Région De Toma Et Dédougou)
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1 Note préliminaire Ce document présente les résultats d'une recherche relative aux conditions et modalités de l'implantation d'immigrés Mossi dans les régions de Toma et Dédougou. Cette recherche est menée principalement dans le cadre des activités du Centre ORSTOM (devenu IRD) de Ouagadougou. Elle est actualisée, partiellement complétée, lors d'investigations faites sur les mouvements d'immigration Mossi dans l'ensemble du territoire national, à la demande du Gouvernement du Burkina Faso (alors Haute-Volta). Une partie de ses résultats figure dans le rapport établi en 1975 intitulé "Enquête sur les mouvements de population à partir du pays Mossi. I. Les migrations internes Mossi". Le document proposé présente l'ensemble des résultats. Il met à profit les recherches effectuées à la même époque par d'autres chercheurs, en particulier celles de J.M. Kolher, sociologue, dans une région de l'Ouest du pays Mossi, et de G. Ancey, économiste. La recherche est ancienne. Elle retrace une page de l'histoire des mouvements d'immigration Mossi, du début du siècle au début des années 1970, dans une partie de l'Ouest du pays qui se singularise par l'accueil de générations successives de migrants, partis pour des raisons différentes, vers des aires distinctes. Depuis, les conditions et modalités de l'implantation des immigrés se sont sans nul doute transformées, en particulier dans les deux "terres neuves", à l'époque naissantes, situées dans les environs de Yé (Toma) et au Sud de Dédougou. Pourquoi diffuser ces résultats près de trente ans plus tard ? Extensives ou plus approfondies, les enquêtes menées nourrissent un tableau de la situation du peuplement immigré, au plan démographique, social, économique, d'une part dans la partie orientale de la S/P de Toma quelques décennies après la création des établissements, d'autre part dans les "terres neuves" situées plus à l'Ouest formées au cours des années 1960. Dans l'un et l'autre cas, elles peuvent fonder une analyse des changements survenus depuis lors. Dans le premier, l'appel exercé par les "terres neuves" s'est-il maintenu durablement, avec quelles conséquences sur la structure des groupements, sur l'économie mise en place ? Comment, dans le second, les groupements Mossi ont-ils évolué, comment les immigrés se sont-ils adaptés à la fin vraisemblable des terres "neuves" à l'échelle locale, dans quelles voies leur économie s'est-elle orientée, quelle est la nature des rapports politiques, sociaux, fonciers finalement établis avec la population locale ? Notre recherche offre l'opportunité d'apprécier concrètement le devenir de deux des principales formes de l'implantation d'immigrés Mossi hors de leur aire ethnique. Une telle perspective justifie le grand nombre des annexes jointes au texte: elles sont autant d'outils pour d'éventuelles nouvelles recherches. Nous conservons les appellations administratives en usage lors de cette recherche. Gérard REMY Mars 2007 2 IMPLANTATIONS MOSSI DANS L'OUEST VOLTAÏQUE (Région de Toma et Dédougou) VERS UN AUTRE PRÉSENT Tout au long du 20° siècle, le Nord-ouest de la Haute-Volta accueille des familles Mossi conduites, pour des raisons diverses, à quitter leur aire ethnique. En 1960, le Département de Dédougou (il regroupe les anciens Cercles de Tougan, Toma, Nouna et Dédougou) rassemble 55% des immigrés Mossi fixés en milieu rural voltaïque (soit environ 45000 personnes). Il draine 56% des migrants ruraux qui quittent le pays Mossi de 1968 à 1972 (près de 1800 familles). Quelle que soit la date de leur déplacement, les Mossi ne se sont pas répartis également dans le Nord-ouest de la Haute-Volta. Ils se sont concentrés par plages (cf. carte N°1) qui contrastent avec les zones voisines, totalement ou largement délaissées. Mais, selon cette date, les principaux foyers d'accueil des immigrés sont nettement distincts. Les plus anciens, apparus avant 1945-50, sont presque tous riverains du pays Mossi (un seul -dans la région de Nouna- fait exception). Effet d'un déversement frontalier, un cordon presque continu d'établissements Mossi plus ou moins étoffés ourle la frange occidentale du pays Mossi, de Kiembara à Sabou et au-delà. Ils s'insinuent le plus souvent entre les mailles du peuplement autochtone, parfois relativement dense, et localement ils mettent à profit l'étroite bande de terres vides d'hommes qui à l'époque séparait le pays Mossi des populations voisines. Les foyers récents sont plus lointains. Tous font face à la vallée de la Volta noire ou de ses principaux affluents. Ils s'étendent généralement dans des zones très peu peuplées ou inoccupées. Cette nouvelle orientation géographique témoigne de la rupture intervenue dans le phénomène migratoire. Les migrations récentes répondent à des situations nouvelles au pays Mossi, et les migrants investissent de nouveaux projets dans les lieux d'installation. Du passé au présent, le chemin n'est pas continu. Les arrondissements de Toma et Dédougou sont en 1968-70 l'objet de diverses enquêtes sur les migrations Mossi. Comportant un important foyer de migrants anciens -à l'Est de Toma-, et deux des "terres neuves" ouvertes depuis 1963-64 sur les rives de la Volta noire, ils se prêtent à une analyse, à la fois spécifique et comparative, des principales formes présentées par l'immigration Mossi au cours du 20° siècle. L'origine commune au pays Mossi (essentiellement, la région de Yako) de la plupart des migrants facilite par ailleurs l'étude diachronique des conditions de l'émigration et des modalités de l'implantation du peuplement immigré. Les enquêtes sont menées à trois niveaux emboîtés (cf. carte N°2). Des informations succinctes sont recueillies sur la vie migratoire de tous les chefs de famille présents: lieu d'origine au pays Mossi et date de départ, étapes, date d'installation dans le lieu actuel. Totalisant 23% de l'effectif global des immigrés, quinze établissements (1) font l'objet d'investigations plus 1) Nous appelons établissement l'ensemble des immigrés installés sur les terres d'un même village, et recensés dans ce dernier. Le groupement est une unité à la fois résidentielle et sociale, constituée autour d'un "kasma". Un établissement peut rassembler un ou plusieurs groupements. 3 4 5 approfondies. Un plan à vue de l'habitat permet de dénombrer avec précision les enclos familiaux, d'individualiser les cellules socio-résidentielles, et d'observer les modalités de l'insertion des "quartiers" Mossi dans le paysage villageois local. Des enquêtes concernent le mouvement migratoire (y compris les départs de familles), les migrants (tous recensés) et leur migration (motifs, modalités de l'installation) et quelques aspects de leur activité économique. D'autres s'adressent aux conditions de la mise en place et de l'évolution des groupements d'immigrés, aux rapports entretenus avec la population-hôte. Rendues plus fines par un séjour prolongé et une meilleure connaissance des lieux et des gens, les investigations précédentes sont complétées dans trois établissements -l'un ancien (Raotenga), les deux autres fondés récemment (Bondaotenga, Kamadena)- par une monographie agricole appuyée sur une levé parcellaire (établi à partir de prises de vues aériennes). A la demande du Gouvernement de la Haute-Volta, une approche pluridisciplinaire des migrations Mossi est entreprise de 1972 à 1974 sur l'ensemble du territoire voltaïque. Toutes les données recueillies précédemment sur l'implantation Mossi dans les arrondissements de Dédougou et Toma sont actualisées; des enquêtes sont menées dans quelques établissements des "terres neuves" afin d'apprécier les évolutions survenues. Notre étude s'adressait aux migrations Mossi. Elle nous a mis cependant au contact de mouvements migratoires impliquant d'autres ethnies voltaïques. En particulier, des populations Lélé (sing. Léla) de la région de Dydir se sont également déversées dans la partie orientale de l'arrondissement de Toma pendant la première moitié du 20° siècle, se mélangeant parfois aux immigrés Mossi. Dans les lieux d'enquête où ils sont représentés, les migrants Lélé sont l'objet d'investigations rapides, suffisantes pour établir la grande proximité des migrations anciennes des deux groupes ethniques. Mais la population Léla ne participe pratiquement pas à la colonisation récente de "terres neuves". Elle s'est associée un temps, mais un temps seulement, au phénomène migratoire Mossi. 6 LE PEUPLEMENT LOCAL LE CHOIX DES HOMMES ET LES EMPREINTES DU PASSE Le champ d'étude présente une architecture faite de franches oppositions au sein du paysage géomorphologique et de contrastes de peuplement à la fois au plan ethnique et démographique. Adossé vers l'Est aux pays Mossi et Léla, et vers le Sud au Dafina -le pays des Dafing (c'est à dire des Marka), ce champ d'étude comprend deux môles de peuplement autochtone, l'un Samo, dans la région de Toma, l'autre Bwa, autour de Dédougou; il sont séparés par la vallée de la Volta noire dont l'un et l'autre demeurent distants (cf. carte N°3). Les populations Samo et Bwa s'étendaient-elles jadis jusqu'aux rives de la rivière ? De part et d'autre de celle-ci se sont glissées des populations Marka dès le 17° siècle. Repoussant les collectivités locales, peut-être peu nombreuses, vers l'intérieur des terres (CAPRON, 1973), elles ont fondé un réseau distendu de gros villages. Cette répartition du peuplement connaît bien avant l'époque coloniale deux évolutions majeures qui s'impriment en creux dans le paysage démographique. Un faisceau de facteurs historiques et écologiques concourent au dépeuplement de toutes les zones riveraines de la Volta noire et de ses principaux affluents: ils affectent de toutes parts le môle de peuplement Bwa; ils scindent la coulée de populations Marka; ils font reculer le front méridional du pays Samo. Ce dernier devait par ailleurs se retirer à l'Est, face au pays Mossi et aux agressions des nakomsé (aristocratie Mossi).