LA GUERRE ET LES GRANDS BATIMENTS L’Homme Prime La Fonction, Voire Les Fonctions, Car Les Ministres Cumulent Souvent Plusieurs Attributions
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MINISTERE DE LA DEFENSE ETAT-MAJOR DE L’ARMEE DE TERRE SERVICE HISTORIQUE LA GUERRE ET LES GRANDS BATIMENTS INDEX DE LA CORRESPONDANCE EXPEDIEE PAR FRANÇOIS-MICHEL LE TELLIER MARQUIS DE LOUVOIS SECRETAIRE D’ETAT DE LA GUERRE ET SURINTENDANT DES BATIMENTS DU ROI 1683-1691 SOUS-SERIE A1 696-1033 par Thierry SARMANT Archiviste-paléographe Docteur de l’université de Paris-I-Sorbonne Conservateur au Service historique de l’armée de Terre et Mathieu STOLL Archiviste-paléographe Conservateur stagiaire des bibliothèques Préface d’André CORVISIER Professeur émérite à l’université de Paris-Sorbonne Château de Vincennes 1999 Louvois plus haut que lui ne voyait que son maître. Dans le sein des grandeurs, des biens et des plaisirs, Un trait fatal et prompt borne enfin ses désirs Et ne lui laisse pas le temps de se connaître. Hélas, aux grands emplois à quoi sert de courir ? Pour veiller sur soi-même, heureux qui s’en délivre ! Qui n’a pas le temps de bien vivre Trouve malaisément le temps de bien mourir. Charles Perrault Épitaphe de Louvois, 1691 PREFACE Dans la mémoire collective des Français et même de leurs voi- sins, le nom de Louvois est resté lié aux guerres de Louis XIV. Il apparaissait déjà tel aux courtisans ses contemporains, qui, dans l’Esther de Racine, crurent le reconnaître sous les traits d’Aman, le mauvais ministre d’Assuérus. L’historiographie ne l’a pas ménagé. Évoquant les dragonnades et l’incendie du Palatinat, Ernest Lavisse, dans son manuel d’enseignement primaire qui a formé le jugement de tant de générations, n’hésite pas à écrire que c’était « un méchant homme ». En 1991, le ministère des Postes n’a pas cru devoir émet- tre un timbre spécial en l’honneur de celui qui avait été le premier organisateur de ce service. Cependant, si les historiens les plus objectifs ne peuvent dissimu- ler son caractère brutal, depuis les travaux de Camille Rousset, ils rendent hommage au grand travailleur qu’il fut, passionné par la grandeur du roi et de la France. Il a tout de même fallu attendre Louis André et les recherches de l’école de Roland Mousnier pour replacer plus sûrement les activités de Louvois dans le système poli- tique et administratif du règne de Louis XIV. Contrairement aux époques postérieures où un ministère est un « département » qui enferme son titulaire dans des limites bien défi- nies, on peut dire, sans trop d’exagération, qu’au XVIIe siècle, II LA GUERRE ET LES GRANDS BATIMENTS l’homme prime la fonction, voire les fonctions, car les ministres cumulent souvent plusieurs attributions. C’est le cas bien connu de Colbert. C’est aussi celui de Louvois. Ces hommes, ambitieux pour leur roi, leur pays, mais aussi leur lignage, sont dans la vie publique des rassembleurs de fonctions, comme ils le sont, dans la vie privée, de domaines, de revenus, de titres et de clientèles. À cet égard, Lou- vois a témoigné d’une véritable boulimie, mais il n’est pas le seul. Pour le comprendre, il est indispensable de voir en lui plus que le secrétaire d’État de la guerre et le ministre influent du Conseil du roi, surtout après la mort de Colbert. Pour accéder à une vision globale du personnage, le moyen le plus direct se trouve dans la correspondance et notamment les minu- tes, conservées dans les gros registres du Service historique de l’armée de Terre, des lettres adressées à des correspondants nom- breux et variés, allant du roi à de simples particuliers, relatives aux activités diverses d’un ministre qui n’hésitait pas à traiter d’affaires mineures. La masse en est considérable. De près de trois mille par an aux environs de 1670, elle s’accroît avec la faveur et la confiance du roi pour atteindre onze mille en 1690. Alors que les départements ministériels ne sont pas cloisonnés, les correspondants de Louvois constituent un monde considérable, appartenant à tous les ordres de la société et tous les corps de l’État. C’est le véritable substrat hu- main du gouvernement et de l’administration du royaume. Pour orienter les recherches dans ce monde, les tables alphabéti- ques des destinataires placées en tête des registres sont d’usage mal- commode. Un inventaire analytique et un index ont été établis pour les minutes des années 1630-1682. Ils sont restés manuscrits, mais consultables. Leurs auteurs ont été arrêtés dans leur travail par la masse croissante de ces documents à partir de 1682. Thierry Sarmant et Mathieu Stoll ont eu le courage de reprendre l’ouvrage et de le mener à bien pour la période couvrant les neuf dernières années de Louvois, tâche ingrate, d’autant plus qu’elle INDEX DE LA CORRESPONDANCE DE LOUVOIS, 1683-1691 III vise à satisfaire aux exigences de la prosopographie moderne. Char- tiste, docteur en histoire, jeune et d’une activité débordante, Thierry Sarmant, spécialiste du Cabinet des médailles du roi, ne s’est pas enfermé dans la numismatique, puisque nommé conservateur au Service historique de l’armée de Terre au sortir de l’École des char- tes et de l’École nationale du patrimoine, il s’y est vu rapidement confier la section des inventaires, fonction qu’il mène de front avec une charge de cours à l’université de Paris-X-Nanterre sur l’histoire politique de l’Europe moderne et l’élaboration d’une thèse d’habilitation sur le cardinal de Fleury, le tout accompagné d’un nombre déjà appréciable d’articles publiés. Également archiviste-paléographe, conservateur stagiaire des bi- bliothèques, Mathieu Stoll a consacré une remarquable thèse d’École des chartes à la biographie de Claude Le Peletier, contrô- leur général des finances de 1683 à 1689 et fidèle de la famille Le Tellier. Ainsi était-il le mieux à même de disséquer la clientèle civile et militaire de Louvois dans les années 1680. C’est donc non seulement en érudits mais aussi en historiens que ces deux cher- cheurs ont abordé la réalisation de cet instrument de travail. Bien des problèmes se posaient à Thierry Sarmant et à Mathieu Stoll. D’abord celui de la délimitation de l’ouvrage. Ils ont choisi la période la plus dense de l’activité de Louvois, qui va de la mort de Colbert à sa propre disparition. Au secrétariat d’État de la Guerre, qu’il exerce seul depuis que son père Michel Le Tellier est devenu chancelier de France (1677) et à l’administration des provinces frontières et des territoires occupés qui y est rattachée, il a joint de- puis 1668 la surintendance des postes, le grand vicariat de l’ordre de Saint-Lazare, la chancellerie de l’ordre du Saint-Esprit, l’administration des haras… mais surtout il se fait attribuer des dé- pouilles du clan Colbert. À la mort de son grand rival, il prend la surintendance des bâtiments à laquelle sont rattachés les arts et ma- nufactures. Dans cet important domaine auquel il peut se consacrer pleinement avant la reprise de la guerre en 1688, il s’acharne à vou- IV LA GUERRE ET LES GRANDS BATIMENTS loir faire mieux que son prédécesseur. Même si là précisément son action fut courte et pas toujours judicieuse, elle n’est pas négligea- ble. Malheureusement, elle attend encore une étude sérieuse. Enfin, à la mort de Seignelay, il rattache les fortifications de mer aux forti- fications de terre dont ils s’occupait déjà. Ajoutons que, de l’intérim des Affaires étrangères qu’il a exercé en 1673, il a conservé de nombreux correspondants parmi les diplomates français en poste à l’étranger et que par le chancelier de France son père et l’archevêque de Reims son frère, il touche à l’administration de l’Église. Pour ces neuf années qui coïncident avec l’apogée de Lou- vois, ce n’est pas moins de cent trente-trois registres que Thierry Sarmant et Mathieu Stoll ont minutieusement analysés. Ils y ont relevé environ deux milles destinataires. Les autres difficultés rencontrées sont d’ordre technique. Que vaut un index sans identification des personnes ? Noms, titres, fonc- tions des destinataires des lettres envoyées par Louvois sont expri- mées de manière sommaire, certes suffisante pour les intéressés, mais pleine de traquenards pour l’historien. Homonymies, parentés, qualifications temporaires prêtent à de nombreuses confusions. Un travail considérable a été indispensable pour mettre au point cet excellent instrument de travail. Par le monde qu’il évoque, l’intérêt de cet ouvrage dépasse la simple prosopographie. Il peut servir de base à l’élaboration d’un véritable annuaire de l’administration militaire du règne de Louis XIV, dont l’utilité n’est pas à démontrer. Mais au delà de ce rôle, il permet d’accéder à des témoignages directs sur les rapports entre Louis XIV et Louvois, éclairant le non-dit auquel il est fait souvent allusion. La personnalité de Louvois peut s’en trouver précisée. Thierry Sarmant et Mathieu Stoll ne nous ont-ils pas apporté par ailleurs sur le style de Louvois des vues fort judicieuses ? Homme à la fois sensible et dur, aux conceptions de l’État peu encombrées de préjugés, parfois en avance sur son temps, Louvois, par son caractère, serait-il assez semblable à Colbert, à l’écart près INDEX DE LA CORRESPONDANCE DE LOUVOIS, 1683-1691 V de génération et d’origine sociale, et même à Louis XIV, à la diffé- rence énorme, il est vrai, de comportement que leur imposaient leur rang, leur mission, leur formation respectives ? On voit tout ce que les historiens peuvent tirer de l’utilisation de cet index, appelé à devenir rapidement indispensable à l’étude de la monarchie administrative et du règne de Louis XIV.