Demande En Reduction D'impots Presentee Sous Louis XIV Par Les Habitants De La Baronnie De Chateau-Verdun
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DEMANDE - EN RÉDUCTION D1MPOTS IRÉSENTËE SOUS LOUIS XIV Par lesHabitants de la Baronnie de Châtean-Verdun J. PRÉFACE Dans la demande en réduction dimpôts que les habitants de la baronnie decihâteau-Verdun adressèrent aux commis- saires des États, de Foix, chargés de procéder à la con- fection des rôles, nous trouvons un tâbleau de la misère qui sévissait dans les montagnes du Comté de Foix, vers le milieu du XVJJe siècle. Les documents de de genre permet- tent détablir quelle étai! tous Louis XIV la situation dune province reculée, comme le pays de Foix, et montrent que le germe des désastres de la fin du règne ét&it déjà sen- sible, même pondant les années de la splendeur. La baronnie de Château-Verdun, (1) située sur les bords (1) Le canton des Caiannm qui dépend do larrondissement de Poix, est situé entre Ax et Tarascon. à lextrémité du département, sur les deux rives de lAriège: il est adossé à la frontière dAndorre, au pied de la grandd chaîne P yrénéenne. Les dix villages, qui compo- saient ta baronnie da Château-Verdun. nont quune population peu considérable et ne comptent pas parmi tes plus riches de la vallée. Ce sont les suivants : Albiès, 401 habitants; Aston, 464; Château-Verdun, Document M -. I II I I Il I II lI IIIIIIIlI 0000005651115 -4— de lAriège, entre deux rangées de hautes montagnes, com- prenait les dix villages énumérés dans lacte et rattachés aujourdhui au canton des Cabannes. On ne parle que de soixante-dix feux pour toute léten- due de la baronnie, dont la •population était plus considé- rable que ne le ferait supposer ce nombre. Par ce mot de feu il ne faut pas entendre maison ou mé- nage en Languedoc et dans les provinces voisines, la signification était différente. On dMignait sous ce terme une certaine portion de territoire, capable de supporter la quantité dimpositions qui devait être levée sur chaque ménage. Un pays, par exemple, dont le chiffre dimposi- tions était porté à cent mille livres, était divisé en deux dents feux, cotés chacun cinq cents livres, en sorte que chaque ville ou village était réputé contenir un certain nombre de feux, quoique souvent le nombre de ménages fut plus considérable. Dans le cas dévènements malheureux, les habitants dune sénéchaussée ou dune commune représentaient leur triste situation et les pertes quils avaient éprouvées. Des commissaires étaient députés sur les lieux pour pren- dre des informations sur les faits qui étaient allégués. Quand lenquête était terminée, on examinait les réclama- tions; et, si lon devait en tenir compte, on faisait une nouvelle répartition des territoires imposables par la mo- dification du nombre de feux. Dans les pays dÉtats, comme le Comté de Foix, lassem- blée avait le droit de recevoir les requêtes en réduction dimpôts présentées par les communautés de déléguer des commissaires pour faire une instruction, et enfin de statuer sur les demandes. 143 Larcat. SuC; Peeh, 116; Sinsat. 161; Verdun, 453; en tout, 2964. Les autres communes du canton des Gabannes, avant la Révolu lion, fornaientla baronnie de Lordat. Les documents historiques, qui concernent les deux baronnies de Château-Verdun et de Lordat, sent déposés en partie aux archives de la Haute-Garonne, dans le fonds de la grande Malirise des Eaux et en Forêts (série BI. Ils furént produits, 1669 t a lépoque de la Réforma- lion Forestière que dirigea M. de Froidour. Une copie du catalogue de ces actes est donservée aux archives de lAriège. -5— Aussi, cest aux États de Foix que les habitants de la baronnie de Chdteau-Verdun réduits à la misère par suite des circonstances mentionnées dans leur supplique, sadres- sèrent pour obtenir, par un dégrèvement dimpositions, un soulagement à leur déplorable situation. Les causes de la ruine publique dans la vallée étaient multiples ; guerre étrangère, guerre civile, passages de troupes, inondations, récoltes insuffisantes, mauvaise qualité d sol, épizootie, exagération des charges locales, tout contribuait à laggravation du mal. Dans leur pétition aux commissaires des États, les habi- tants faisaient connaître que le pays, naturellement pauvre, était en proie aux calamités de toute sorte. Dabord, ils navaient que des droits dusage dans les montagnes qui les entouraient ; le seigneur de Gudanes en était seul propriétaire, ainsi que des forges et moulins. Les terres situées sur le versant des coteaux étaient de mau- vaise qualité, difficiles daccès, cultivables seulement à la bêche, exposées aux dévastationsdes torrents. Les bestiaux étaient en petit nombre; encore les habitants ne les te- naient-ils quà titre de cheptel, et supportaient toutes les per- tes, sans que tes propriétaires fussent soumis à aucun ris- que. Ce serait donc une injustice, après avoir procédé à la- bonnement des terres en prenant comme base le revenu donné par le bétail; détablir une imposition sur ce même bétail. Les inondations, produites par le débordement des tor- rents, provoquaient dans le pays les plus grands,ravages. Les meilleurs fonds de terre étaient rendus improductifs par suite du ravinement et par le dépôt de blocs quentrat7 naR le courant. En 1613, Verdun se trouva plus particulièrement exposé au fléau de linondation; cinq maisons furent emportées; léglise manqua dêtre renversée ; des morts furent déterrés; des quartiers de rochers, abandonnés par leau, recouvri- rent plusieurs champs; un berger disparut avec le troupeau de moutons- quil gardait. Quelques années après, la même calamité se reproduisit avec une moins grande intensité que la fois précédente; en même temps que Verdun, elle — G — frappa Aston, Larcat, Pech, Albiès et amena une perte de 6000 livres dansie village de Bouan. Remarquons que linondation de 1875, qui emporta une partie de Verdun dans la nuit du 23 juin, présenta les mê- mes caractères quen 1613. On serait tenté den conclure que le fléau se manifeste A des époques déterminées et sévit chaque fois dans des conditions analogues. Aux malheurs qui provenaient du fait de la nature, sa- joutaient, pour compléter la ruine de la vallée, les désas- tres résultant des circonstances et particulièrement de la - guerre. En 1627, il avait fallu contribuer aux dépenses occasionnées par les sièges du Mas-dAzil et de Pamiers, (lue larmée royale avait repris aux Protestants. De ce chef, la population de la baronnie supportait encore une charge de 20,000 livres. En 1654, un détachement de troupes, qui allait en Cata- logne, avait logé à Verdun et marqué son passage en brû- lant plusieurs maisons avec le mobilier et les récoltes quelles renfermaient. Pour réparer le dégât, les proprié- taires avaient été dans la nécessité de vendre ou dengager le reste de leurs biens. Enfin la baronnie devait 5500 livres au trésorier dû Comté pour larriéré des anciennes contributions ; les frais, qui sajoutaient chaque aunée au capital, rendaient impossible le payement de la somme. Le pays était en outre tenu de faire face à toutes les dépenses locales. Ainsi les ponts restaient à la charge des habitants, notamment celuig de Saint-Martin, près dAulos, qui servait de passa e à toute la montagne. Comme les torrents débordaient sou- vent, les réparations étaient fréquentes à tous les ponts. • Telles étaient les raisons que les gens de la baronnib de • Château-Verdun faisaient valoir auprès dqs commissaires, en vue dobtenir un dégrèvement de moitié sur la taxe, à laquelle ils avaient été cotés précédemment. Ils ajoutaient • que plusieurs habitants avaient déjà quitté le pays, parce quils ne pouvaient plus payer la taille. Pour juger , du re- venu de la vallée, les commissaires étaient invités à prendre comme base la dîme, qui ne sélevait quà 22500 livres. Quoique la pièce ne soit pas datée, on peut inférer quelle -7- a été rédigée vers 1671, année pendant laquelle le Roi fit procéder à un dénombrement et à une révision du domaine de lÉtat dans le Comté de Foix. A la suite de cette opéra- tion, on entreprit la réfection dun grand nombre de livres terriers, ce qui amena une modification dans la quotité et la perception de limpôt. Cest sans doute à cette occasion que les habitants 4e la baronnie de Château-Verdun ont dù présenter leurs doléances aux commissaires des États de Foix. En 1671, M. Jérôme de Salles était seigneur de. Château- Verdun, en paréage avec le Roi, et avait établi à Gudanes le siège de la baronnie. Pour les droits de justice, le Roi en avait un tiers, et M. de Sales deux tiers. Nous ne nous éten- drons pas plus longuement sur les institutions dela vallée; ce sujet est traité dans la déclaration qui fut faite. lel7décem- bre 1671, par les consuls, aux commissaires chargés de procéder au dénombrement(1). (Archives de lAriège, sérte C, Registre du dénombrement de 1671,fewiltels 128-484.) II. TEXTE Déclaration que les habitants de la Baronnie de Castel- Verdun remettent devant vous, Nosseigneurs les commis- saires députés par les États généraux du Pays de Foix pour procéder àla recherche etcompdids (2) des feux dudit pays. Disent [les habitants] que ladite baronnie est composée de dix villages, qui sont Castel-Verdun, les Cabannes, Albiès, Pech, Aston, Larcat, Sinsat, Bouan; Aulos et Ver- dun, qui appartiennent en toute justice, haute, moyenne et basse, au seigneur de Gudanes, et contribuent aux char- ges et impôts du pays sur le pied de septante sept feux. l) Ce document nest pas dans un dépôt oublie. il a été communiqué par IL Ernest Joffr, avocat k Poix, qui le tient de M. Àlzieu, inéde- ciit à Axial. dans le canton des Cabannes. (-?) On appelait ainsi, en Languedoc et dans quelques provinces voi- sines, la répartition des immmposi tions sur tons les fonds ou sur tous les contribuables dune commune lon donnait aussi le même nom au rôle qui contenait la répartition.