Le Portique, 27 | 2011, « André-Georges Haudricourt (1911-1996) : La Matière Du Monde » [En Ligne], Mis En Ligne Le 04 Août 2011, Consulté Le 26 Avril 2021
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Le Portique Revue de philosophie et de sciences humaines 27 | 2011 André-Georges Haudricourt (1911-1996) : la matière du monde Édition électronique URL : http://journals.openedition.org/leportique/2525 DOI : 10.4000/leportique.2525 ISSN : 1777-5280 Éditeur Association "Les Amis du Portique" Édition imprimée Date de publication : 29 juin 2011 ISSN : 1283-8594 Référence électronique Le Portique, 27 | 2011, « André-Georges Haudricourt (1911-1996) : la matière du monde » [En ligne], mis en ligne le 04 août 2011, consulté le 26 avril 2021. URL : http://journals.openedition.org/leportique/ 2525 ; DOI : https://doi.org/10.4000/leportique.2525 Ce document a été généré automatiquement le 26 avril 2021. Tous droits réservés 1 SOMMAIRE André-Georges Haudricourt (1911-1996) La matière du monde Préface Barbara Niederer, Alban Bensa et Jean-François Bert Haudricourt, un marginal philosophe antiphilosophe Jacqueline M. C. Thomas et Luc Bouquiaux André-Georges Haudricourt et la phonologie : la phonologie panchronique en perspective Jean-Claude Rivierre Les fleurs, les langues et Haudricourt ou les sirènes du cœur et la discipline de la raison Claude Hagège Ce que la linguistique historique sur les langues de l’Asie du Sud-Est doit à André-Georges Haudricourt Michel Ferlus Des goûts et des odeurs… François Sigaut Une passion de la différence : le parcours pédagogique avec A.-G. Haudricourt Georges Drettas Haudricourt et les ethnosciences au Muséum National d’Histoire Naturelle Serge Bahuchet Note sur la domestication des porcs Alban Bensa Dans l’intimité du professeur A.-G. Haudricourt – son voyage au Japon Tadahiko L. A. Shintani Le patrimoine génétique de L’Homme et les Plantes cultivées : historiographie d’un ouvrage riche en ancêtres et fécond en héritiers Carole Brousse Correspondance Haudricourt/Mauss (1934-1935) Présentée, éditée et annotée par Jean-François Bert André-Georges Haudricourt Entretien A.-G. Haudricourt et Alban Bensa Inédits André-Georges Haudricourt Recensions Fleuves et rivières couleront toujours François Fourquet Le Portique, 27 | 2011 2 André-Georges Haudricourt (1911-1996) La matière du monde NOTE DE L’ÉDITEUR Le Portique, 27 | 2011 3 Préface Barbara Niederer, Alban Bensa et Jean-François Bert 1 Issu d’une famille de propriétaires picards, André-Georges Haudricourt est né en janvier 1911. Il est décédé dans sa quatre-vingt-sixième année, à Paris, le 20 août 1996. Ingénieur agronome en 1931, il a découvert l’ethnologie grâce à Marcel Mauss, s’est formé à la botanique avec Auguste Chevalier, la linguistique et la phonologie avec Marcel Cohen, les techniques rurales avec les historiens Marc Bloch et Charles Parain. 2 Pratiquant autant les sciences humaines que les sciences naturelles, il a su mettre en évidence les liens intrinsèques entre ces champs traditionnellement séparés dans des études pionnières sur la domestication des animaux, la culture des plantes, l’évolution des langues, la technologie, ou encore le traitement d’autrui 1. 3 Son impressionnante bibliographie permet de prendre la mesure de l’extrême diversité des objets auxquels il a consacré sa réflexion savante et libre de tout cloisonnement disciplinaire 2. 4 Esprit inclassable, il entretenait un rapport de biais avec les institutions. Le CNRS – section de biologie végétale d’abord, de linguistique ensuite – lui offrait l’indépendance qui lui était nécessaire pour développer sa créativité. Entièrement voué à son travail, mais ouvert à ceux qui l’entouraient ou le sollicitaient, il a attribué une partie de son appartement de la rue d’Assas à ses collaborateurs qui venaient y travailler quotidiennement. Il recevait régulièrement des chercheurs français et étrangers, tantôt pour aborder des questions ponctuelles et précises, tantôt pour élaborer des projets communs. Occasionnellement, il finançait lui-même les études de certains chercheurs, et en hébergeait d’autres, réfugiés ou simples passagers. 5 Les discussions avec lui se poursuivaient bien souvent au restaurant ou finissaient en excursion botanique. Tel légume, tel arbre lui offrait l’occasion d’une excellente illustration des liens entre son origine et ses dénominations actuelles, entre sa diffusion géographique et ses utilisations par l’homme. 6 Si les particularités du parcours d’A.-G. Haudricourt ont donné lieu à de nombreux travaux biographiques 3, la parole a ici été donnée à des chercheurs qui ont eu l’occasion de travailler avec lui et sont, en quelque sorte, les dépositaires de son œuvre orale. Qu’ils évoquent leurs souvenirs de ces rencontres ou nous livrent les réflexions Le Portique, 27 | 2011 4 qu’elles ont suscitées, ils témoignent du plaisir partagé d’observer comment sont engendrées nos façons de dire et de faire, raison d’être de nos pratiques humaines dont A.-G. Haudricourt faisait la matière du monde. 7 * 8 Nous remercions l’Institut Mémoire de l’Édition Contemporaine (IMEC) pour avoir mis à notre disposition les documents d’archives et les photographies d’A.-G. Haudricourt, et le Centre de recherches linguistiques sur l’Asie orientale (CNRS) d’avoir rendu possible leur reproduction dans le présent volume. NOTES 1. Les lecteurs de la collection « Les carnets » du Portique ont pu découvrir ce dernier sujet avec la parution, en 2008, d’un article inédit d’Haudricourt intitulé « Essai sur l’origine des différences de mentalités entre Occident et Extrême-Orient ». 2. Voir la bibliographie très complète élaborée par Andrée DUFOUR, Bulletin de l’EFEO N° 84, 1997, p. 30-64. 3. Voir, par exemple, A.-G. HAUDRICOURT et Pascal DIBIE, Les Pieds sur terre, Paris, Éditions Métailié ; Georges CONDOMINAS, « In memoriam », Bulletin de l’EFEO N° 84, 1997, p. 8-29, Jean-François BERT, Préface, dans : A.-G. HAUDRICOURT, Des gestes aux techniques, Paris, Éditions MSH/QUAE, 2010, p. 11-22. AUTEURS BARBARA NIEDERER ALBAN BENSA Directeur d’études à l’EHESS, spécialiste de la Nouvelle-Calédonie kanak, il soutient le principe d’une anthropologie d’abord descriptive et toujours historique. Il a puisé chez Haudricourt le souci du détail, des interactions et des variations inscrites dans des contextes locaux précis. Il a récemment publié : La Fin de l’exotisme, essais d’anthropologie critique, Toulouse, Anacharsis, 2006 et Après Lévi-Strauss. Pour une anthropologie à taille humaine, Paris, Textuel, 2010. JEAN-FRANÇOIS BERT Sociologue et historien des sciences sociales françaises. Appartient au IIAC (EHESS-CNRS). Il a publié, en particulier sur Haudricourt, Des gestes aux techniques, Paris, MSH/QUAE, 2010. Le Portique, 27 | 2011 5 Haudricourt, un marginal philosophe antiphilosophe * Haudricourt, marginal anti-philosophy philosopher Haudricourt, ein Aussenseiter der Philosophie, ein Antiphilosoph Jacqueline M. C. Thomas et Luc Bouquiaux 1 En 1983-1984, un concours de circonstances fit que, dégagés pendant un temps des contraintes du terrain, nous décidâmes, Jacqueline Thomas, Serge Bahuchet et moi, de temps en temps rejoints par Jean-Claude Rivierre, de faire subir pendant plusieurs semaines, à notre maître et ami, le supplice de l’interview… ou de l’entretien si l’on veut, sans objectif bien précis. Ou plutôt, nos motivations ne devaient pas être les mêmes, car en dépouillant presque vingt ans plus tard, les enregistrements de nos conversations, il apparut que j’[LB]avais été le plus bavard du lot, toujours disposé à relancer le débat et à poursuivre parfois dans ses derniers retranchements un personnage qui, sous des dehors ouverts, s’avançait masqué, pratiquait à merveille l’art de l’esquive, réglait d’une pirouette une question insidieuse et ne se livrait que sans le vouloir vraiment quand on s’éloignait du sujet… Il est possible que j’aie toujours été fasciné par des personnalités hors normes et que c’est la raison pour laquelle mes questions s’apparentaient de temps à autre à une traque, soucieux que j’étais de découvrir je ne sais quel secret, exactement comme lorsque j’écoute du Mozart ou du Bach et que je me demande où « ils » ont bien pu aller chercher ça (qu’il s’agisse d’un thème inattendu ou d’un développement particulièrement heureux). Ma comparaison n’aurait pas plu à Haudricourt, qui disait détester la musique, nourrissant même des idées de meurtre envers les musiciens du métro, bien qu’il possédât des enregistrements de Boris Vian et de Brassens qu’il devait bien écouter parfois. Ce que j’essayais de faire apparaître en fait, c’est ce qui avait bien pu, à travers les particularités de son enfance, ses années de jeunesse et de formation, les aléas de son éducation, façonner un personnage si particulier, plein de contradictions, à la fois solitaire et sociable, pingre et généreux, génial et plein de travers mesquins, égoïste et le cœur sur la main, communiste et grand bourgeois, indulgent et formulant des avis tranchants et à l’emporte-pièce sur certains de ses contemporains. Condominas a fait de lui un portrait particulièrement réussi 1. Je n’ai pas la prétention de l’égaler, mais Le Portique, 27 | 2011 6 plutôt de combler les interstices de sa présentation, d’ajouter quelques pièces d’un puzzle, qui ne s’adapteront pas tout à fait aux autres parce qu’aussi bien, toute vision est toujours un peu partiale et personnelle et qu’il n’a pas fallu attendre À chacun sa vérité et Rashomon pour savoir que la réalité a de multiples facettes et qu’il est vain de vouloir harmoniser l’ensemble. 2 Quand on veut faire une synthèse de ces enregistrements, on constate qu’il faut éliminer une bonne partie de bavardages sans réel intérêt, style discussion autour d’un thé ou d’un distributeur de café, mais que