The Virgin Suicides De Sofia Coppola David Tougas
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Document generated on 09/28/2021 4:28 a.m. Ciné-Bulles Le cinéma d’auteur avant tout The Virgin Suicides de Sofia Coppola David Tougas Volume 18, Number 4, Summer 2000 URI: https://id.erudit.org/iderudit/59560ac See table of contents Publisher(s) Association des cinémas parallèles du Québec ISSN 0820-8921 (print) 1923-3221 (digital) Explore this journal Cite this review Tougas, D. (2000). Review of [The Virgin Suicides de Sofia Coppola]. Ciné-Bulles, 18(4), 52–54. Tous droits réservés © Association des cinémas parallèles du Québec, 2000 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/ This article is disseminated and preserved by Érudit. Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal, Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to promote and disseminate research. https://www.erudit.org/en/ ^ i ^ r-j+2 CrfMI O- caissier un billet maladroitement griffonné que ne l'empêche pas de tomber dans l'œil d'un ce dernier n'arrivait pas à déchiffrer et qui le médecin vieillissant à l'occasion d'une sommait pourtant de lui remettre un sac rempli réception parmi le gratin de Manhattan. Une de billets de banque, Ray tient le plan du casse belle leçon d'honnêteté dans cette mer à l'envers, si bien que sa troupe creuse un d'escrocs à double visage. tunnel sous le commerce qu'il a récemment acheté pour aboutir, bien sûr, tout à fait ailleurs Bien sûr, Woody s'en donne à cœur joie en que dans la chambre forte! Mais si Virgil n'a fait fustigeant les nouveaux riches et leur mauvais que vieillir dans la peau de Ray, gardant tou goût (le traditionnel flamant rose est remplacé jours sa démarche et son immaturité d'éternel par un hideux échassier en or massif), mais il adolescent, son créateur, lui, a acquis ses lettres égratigne aussi au passage la haute bourgeoisie de noblesse en passant du Woody scénariste, new-yorkaise dans son snobisme et sa bête acteur et réalisateur de films comiques appré suffisance. Néanmoins, ce film en mode ciés (mais où aucun gag n'était sacrifié au profit mineur, qui ne compte pas son lot habituel de de la structure, de la rigueur ou de la profon one-liners, n'apporte rien de vraiment nouveau deur), à «Monsieur» Allen, l'un des cinéastes à une filmographie déjà très riche en morceaux américains les plus marquants et les plus de choix. Maintenant dans la soixantaine, respectés de sa génération. Woody Allen devrait-il prendre davantage de temps entre deux tournages pour créer un C'est ce trajet de carrière que l'on ressent dans dernier (ou un avant-dernier) chef-d'œuvre? • le «second» film à l'intérieur de Small Time Crooks, qui a aussi son double dans la filmographie allenienne. Il s'attarde sur les espoirs et les désillusions de Frances, qui, ayant fait fortune grâce à sa recette unique de biscuits, décide de sortir de son état de nouvelle bourgeoise inculte en profitant des enseigne ments de David (Hugh Grant), intellectuel aussi The Virgin érudit que oisif et opportuniste, qui, devant la naïveté de cette femme en mal de savoir, flaire Suicides la bonne occasion pour faire profiter ses propres affaires. Le personnage de «Frenchy» de Sofia Coppola (étonnante Tracey Ullman) est une lointaine cousine de la Cecilia incarnée par Mia Farrow dans The Purple Rose of Cairo. En effet, les par David Tougas deux femmes rêvent à une vie mieux remplie, plus romanesque, qui parviennent à réaliser leur rêve le court temps d'une escapade avec l'objet (l'amant) de leur désir profond. Cette portion tragicomique du film véhicule davan LI arrive fréquemment que certains premiers tage d'émotions que l'autre, plus drôle mais longs métrages de jeunes réalisateurs soient aussi plus convenue, des malheurs d'un petit pour moi une source particulière de plaisir Small Time Crooks escroc réduit à l'inactivité grâce à la réussite puisque la fougue, le désir de plaire et d'éton financière et sociale de son épouse. ner, doublés d'une soif d'étaler au grand jour sa 35 mm / coul. / 94 min / culture et sa maîtrise du langage cinématogra 1999/fict. /États-Unis phique, transpirent hors de l'écran. Sofia Excellent quand il s'agit de tracer des portraits Réal. et scén.: Woody Coppola (la fille de l'autre), scénariste et Allen de femme, Woody nous offre un double plaisir Image: Fei Zhao en dessinant un second personnage féminin, la réalisatrice du film The Virgin Suicides fait Son: Cary Al per et Robert immanquablement partie de ce groupe-sélect- Hein quatrième roue du chariot, May Sloan (la trop Mont: A Usa Lepselter rare Elaine May, tout à fait jouissive), qui vient d'auteurs-hi p-à-la-Paul-Thomas-Anderson Prod.: Jean Doumanian, (Boogie Nights, Magnolia) qui, faute d'avoir un ennoblir le côté plus que modeste de son per UJ Helen Robin, Charles H. sujet inédit, réussissent à soutenir l'intérêt du Joffe et Jack Rollins sonnage par l'intelligence du cœur. Présentée Dist: Dreamworks d'emblée comme une gaffeuse presque attardée spectateur par une narration et une mise en Int.: Woody Allen, Tracey mentale, elle persiste, contrairement à Frenchy, scène à la fois personnelle et toute en clins 1 Ullman, Michael Z 52 Rappaport, Tony Darrow à demeurer elle-même du début à la fin, ce qui d'œil. o C-f'l'Sl sps. c- D'emblée, le sujet privilégié par «Miss» sorte un prétexte pour découvrir l'éveil à Coppola n'est pas des plus légers, puisqu'il est l'amour, à la sexualité des «ados» et, surtout, à question du suicide collectif de cinq sœurs l'imaginaire éclaté qui caractérise ce passage âgées de 13 à 17 ans dans une paisible ban entre deux mondes. lieue américaine des années 1970. Mais n'ayez crainte: là où un scénariste «à la chaîne» aurait Non seulement elle crée une ligne narrative englué son récit d'une infâme bouillie mélodra complexe (le film ressemble drôlement à un matique, Sofia Coppola parvient à dédramatiser journal intime), mais la scénariste a aussi la l'acte par son recours à l'humour (particulière brillante idée de ne jamais oublier le spectateur. ment l'ironie) et en adoptant un regard tout à Un peu comme dans les films policiers fait original. En effet, toute l'histoire est classiques, Coppola a recours à de nombreux racontée et vue par les yeux d'une bande de implants qui annoncent les dénouements à jeunes garçons obsédés par les cinq sœurs venir. Par exemple, quelques minutes avant le Lisbon. Les suicides deviennent en quelque suicide «aérien» de la cadette, le père (James Les soeurs Lisbon... moins une: Chelse Swain (Bonnie), Kirsten Dunst (Lux), Leslie Hayman (Thérèse) et AJ. Cook (Mary), dans T7ie Virgin Suicides 53 C'-T'S'X'SS I'JsS- o Woods) fait part de son amour de l'aviation à des copains de sa fille en leur montrant les ailes d'un avion miniature. S'ajoutent à cela The War plusieurs scènes symboliques ou oniriques, de multiples ruptures de ton et, surtout, l'impor Zone tance du non-dit, principale force du film. En effet, si rien n'est jamais clair ou expliqué, tout de Tim Roth est ressenti. Une scène est particulièrement révélatrice: le curé rend visite à la famille Lisbon à la suite du décès de la cadette. Il pénè par Jean-Philippe Gravel tre tour à tour dans les trois mondes, les trois ambiances majeures du film: le silence et l'incommunicabilité du père, la candeur appa rente des jeunes soeurs, et le dramatique à C-el a commençait à se savoir, depuis la saveur religieuse de la mère (Kathleen Turner). sortie de The War Zone, que Tim Roth avait été Bref, le scénario est touffu, parfois un peu victime d'inceste dans sa jeunesse. Les «pre confus, mais l'ensemble démontre une maîtrise mières œuvres» ne sont-elles pas toutes auto impressionnante de l'écriture cinématogra biographiques? Quoi qu'on en pense, cette phique. sortie relève peut-être d'une faute de goût des plus communes, qui consiste à garantir une Visuellement et formellement parlant, le film est sorte de «prime d'authenticité» à l'œuvre en un petit bijou d'intertextualité. En effet, la jouant l'argument du vécu, affaire de se le tenir réalisatrice ne se retient guère de montrer ses pour dit: Tim Roth devrait savoir de quoi il parle influences. La séquence prégénérique donne le et comment en parler. Et pourtant, pareille expérience ne vous rend pas immédiatement ton: si les premiers plans semblent tout droit spécialiste en la matière: plus souvent qu'autre sortis d'un film de Terrence Malick (avec ment, elle enferme ses victimes dans le mutisme, nuances, bien évidemment), le reste de la le secret et le désaveu... Pouvoir en témoigner, séquence pastiche quelque peu les films c'est donc s'imposer d'emblée une distance, mafieux de Scorsese par son ambiance qui permet de mettre l'expérience en récit et en musicale, son montage-choc, son utilisation du discours. commentaire en voix off ainsi que par le recours au ralenti et à l'image figée. De plus, les Autant dire d'emblée qu'en plus de son sujet- monteurs (Melissa Kent et James Lyons) choc, le film frappe tout de suite par la multiplient les fondus enchaînés, surimpres cohérence et la sensibilité de son regard.