Le Devoir, Cahier Spécial Sur L'innovation Sociale
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SOCIÉTÉ INNOVATION SOCIALE CAHIER THÉMATIQUE J › LE DEVOIR, LES SAMEDI 19 ET DIMANCHE 20 MARS 2016 UdeM: de la Habitation pédagogie sociale communautaire: pour les habitants nouveau fonds de Parc-Extension d’aide à la rénovation Page J 3 Page J 6 VALERY RIZZO PARK SLOPE FOOD COOP En 2000, la Park Slope Food Coop a doublé l’espace de son magasin situé dans la rue Union, entre les 6e et 7e avenues à Brooklyn, passant de 500 à 1000 mètres carrés. PARK SLOPE FOOD COOP Donner du temps pour payer moins cher son épicerie ! Si votre supermarché vous offrait d’acheter rence à l’Université Concordia dans le cadre Le nombre de membres est en revanche si vos aliments moins cher en échange d’une de Transformer Montréal, un événement élevé que certains services ont pu être créés en poignée d’heures par mois de travail béné- consacré à l’entrepreneuriat social et solidaire, parallèle, comme une garderie où les membres J’ai été attiré au départ à pour expliquer la réussite de ce supermarché peuvent déposer gratuitement leurs enfants le vole, acquiesceriez-vous ? Dans le quartier de coopératif dont il est devenu membre en 1975, temps de faire leurs courses. Seuls les retraités, «la Park Slope Food Coop par Brooklyn, à New York, ils sont près de avant d’en prendre les rênes comme coordon- les gens avec des limitations physiques et les 15 000 à trouver qu’il s’agit d’une bonne nateur général en 1988. « J’ai été attiré au dé- personnes en congé parental sont exempts de l’opportunité d’appartenir part à la Park Slope Food Coop par l’opportu- cette corvée parmi les membres. idée. Portrait de la Park Slope Food Coop, un nité d’appartenir à un lieu où les gens travail- Actuellement, la coopérative, dont le chiffre à un lieu où les gens supermarché coopératif de plus de 40 ans, lent ensemble tout en étant propriétaires, ra- d’affaires dépasse 52 millions de dollars, qui a été à l’avant-garde des mouvements conte M. Zimmerman. Ce n’est qu’après un cer- compte 16 700 membres, dont 14 500 travail- travaillent ensemble tout d’achats locaux et d’approvisionnement en ali- tain temps que la nourriture en elle-même est lent de manière bénévole. « La plus grande dé- devenue importante pour moi. » pense pour un supermarché, c’est la main-d’œu- en étant propriétaires ments biologiques. vre », soulève M. Zimmerman. Les économies S’engager pour pouvoir acheter générées se répercutent directement dans Allen Zimmerman, ancien coordonnateur» ÉTIENNE PLAMONDON ÉMOND Depuis la fondation de la coopérative en une diminution des prix des aliments. La plu- de la Park Slope Food Coop 1973, le concept reste relativement simple : part des produits y sont entre 20 % et 40 % llen Zimmerman a pris en avril pour réaliser ses emplettes à la Park Slope moins chers que dans les supermarchés voi- dernier, à l’âge de 65 ans, sa re- Food Coop, le membre s’engage à donner en- sins, voire presque à moitié prix dans le cas La Park Slope Food Coop a ainsi été à l’avant- traite comme coordonnateur de la viron 35 heures de travail bénévole par année, des aliments biologiques. garde en matière d’achat local et d’aliments bio- Park Slope Food Coop. « Mais la dans 13 plages horaires différentes d’un peu «Nos membres possèdent la coopérative et le logiques, «au moins une décennie avant» que coopérative reste profondément moins de trois heures. Les membres pren- contrôle. Ils ont décidé d’avoir une sélection d’ali- cela soit à la mode, affirme M. Zimmerman. dansA ma vie et dans mon cœur », insiste nent ainsi quelques heures par mois pour être ments fondée sur des principes éthiques plutôt «De plus en plus de gens achetaient des aliments M. Zimmerman, en entrevue téléphonique caissiers, garnir les tablettes, recevoir les li- que sur le profit. C’est une autre façon dont nous biologiques. La coop a compris que c’était la avec Le Devoir depuis New York. vraisons ou effectuer le ménage après la fer- nous distinguons des autres supermarchés», ex- Le samedi 19 mars, il donnera une confé- meture du magasin. plique M. Zimmerman. VOIR PAGE J 2 : ÉPICERIE Sous-fi nancement en éducation IR EN AV Des coupes qui freinent L’ S le progrès social. ON NOUS CRÉ J 2 LE DEVOIR, LES SAMEDI 19 ET DIMANCHE 20 MARS 2016 SOCIÉTÉ Les innovations sociales naissent dans les contextes de crises Les innovations sociales destinées aux services aux per- sonnes, tels les centres de la petite enfance et les centres lo- caux de développement, ont connu un essor sans précédent au Québec au cours des dernières années. Les politiques d’austérité pourraient toutefois freiner le mouvement, pré- ANNIK MH DE CARUFEL LE DEVOIR vient Benoît Lévesque, grand expert de l’innovation et de « Autrefois, pour nourrir les individus qui n’en avaient pas les moyens, on a créé la soupe populaire. Désormais, il ne suffit pas de l’économie sociales. simplement s’alimenter. On veut manger de façon saine et différente en privilégiant la production locale », assure Benoît Lévesque, grand expert de l’innovation et de l’économie sociales. MARIE LAMBERT-CHAN universitaire et l’abandon de la novations sociales ne sont pas thousiasme ou dans la violence l’insertion : en plus de créer des populaire, dit-il. Mais désor- Politique nationale de la re- systématiquement à la merci et la guerre. On ne peut le sa- emplois, on voulait donner une mais, il ne suffit pas de simple- es innovations sociales sur- cherche et de l’innovation, adop- des compressions, car elles ne voir à ce stade-ci. Cependant, formation aux travailleurs ment s’alimenter. On veut L gissent dans tous les sec- tée en 2013 sous le gouverne- sont pas toutes tributaires de une chose est sûre, ce ne sera pour qu’ils puissent être plus manger de façon saine et diffé- teurs d’activité, tant dans le pu- ment Marois mais jamais mise l’État, pas plus qu’elles ne se ré- pas court: une transition, actifs dans la société. » rente en privilégiant la pro- blic que dans le privé. Néan- en application, «ne sont pas des sument à des services. contrairement à une révolution, Aujourd’hui s’amorce la fi- duction locale. D’où la popula- moins, on en trouve une facteurs facilitants» pour stimu- « C’est beaucoup plus large. exige des années et parfois lière de la transition écologique, risation des marchés publics, concentration particulière ler l’innovation sociale. Ce sont des idées, des ap- même des siècles.» «très prometteuse, mais beau- des jardins communautaires dans les services consacrés «C’est grave, car nous sommes proches, des produits ou coup plus difficile, car plus dif- et de l’agriculture urbaine. » aux personnes. Or, s’il y a un désormais dans une économie mêmes des lois — comme la lé- L’économie sociale fuse», précise M. Lévesque. Le professeur vante les mé- domaine qui a souffert des po- de la connaissance, rappelle-t-il. galisation du mariage gai — à en transition «La population est amenée à rites de l’économie sociale à la litiques d’austérité, c’est bien Si on ne fait pas assez de re- travers lesquels nous sommes Benoît Lévesque est couram- changer son mode de consomma- sauce québécoise. «Ce qui fait celui-là, qu’on pense cherche, on se tire dans amenés à nous organiser diffé- ment surnommé le «pape de tion et de production, ainsi qu’à notre force, entre autres, c’est no- aux centres de la petite le pied. Les pays qui remment pour répondre de ma- l’économie sociale» puisqu’il est réduire sa consommation d’éner- tre écosystème où l’aide de l’État enfance, à l’aide à do- réussissent le mieux sont nière plus durable à un besoin le premier à avoir introduit ce gie. On ouvre la porte à l’écono- ne sert pas qu’à soutenir des sec- micile ou aux (dé- ceux qui consacrent plus social », explique celui qui a terme dans le monde de la re- mie de proximité, à l’économie teurs, mais aussi à offrir des ou- funts) centres locaux de 2% de leur PIB à la cofondé le Centre de re- cherche québécoise. Témoin de fonctionnalité, à l’économie tils de développement, comme de développement, recherche et au dévelop- cherche sur les innovations privilégié de l’évolution de circulaire, à l’économie de par- des fonds de financement, du pour ne nommer que pement. Le Québec ne sociales (CRISES) en 1986, la cette sphère qui compte pour tage… Cela signifie que tous les conseil, de la recherche et de la ceux-là. «C’est certain fait guère plus de 2%. toute première organisation plus de 35 milliards du PIB an- services de base sont appelés à formation. Résultat: de telles po- que les coupes de l’État C’est une voie qui pour- scientifique au Canada à étu- nuel du Québec, l’expert es- être redéfinis», explique le lau- litiques transversales favorisent ont une incidence forte Benoît rait nous conduire à dier ce sujet. time qu’«on est au terme d’une réat du prix Marie-Andrée-Ber- un système d’innovation. Et sur les innovations so- Lévesque une forme de sous-déve- Par ailleurs, c’est dans les filière d’innovation qui dure de- trand 2015, récompensant un quand on coupe directement ciales», constate Be- loppement, surtout contextes de crises que nais- puis environ 30 ans». scientifique dont les travaux ont dans un secteur, les effets sont noît Lévesque, professeur qu’ailleurs dans le monde, beau- sent souvent les innovations « Il y a d’abord eu la filière mené au développement d’inno- beaucoup moins ressentis, car le émérite au Département de so- coup demandent d’adopter des sociales.