Le conservatisme canadien en transition, 1987 -2008

par

Claude R. J. Michaud

Mémoire déposé à la faculté d'études supérieures remplissant en partie les exigences du diplôme de Maîtrise es Arts

Études canadierures Collège universitaire de Saint-Boniface/Université du Manitoba Winnipeg, Manitoba

@ Claude R. J. Michaud, juillet 2008 THE T]NIVERSITY OF MANITOBA

FACULTY OF GRADUATE STUDIES gJJgg COPYRIGHT PERMISSION

Le C onservatisme Canadien en Transiti on, 1987 -2008

BY

Claude R. J. Michaud

A ThesisÆracticum submitted to the Faculty of Graduate Studies of The University of

Manitoba in partial fulfillment of the requirement of the degree of

Master of Arts

Claude R. J. Michaud O 2008

Permission has been granted to the Libraries to lend a copy of this thesis/practicum, to Library and Archives Canada (LAC) to lend a copy of this thesis/practicum, and to LAC's agent (UMI/ProQuest) to microfilm, sell copies and to publish an abstract of this thesis/practicum.

This reproduction or copy of this thesis has been made available by authority of the copyright owner solely for the purpose of private study and research, and may only be reproduced and copied as permitted by copyright laws or with express written authorization from the copyright owner. Table des matières

Dédicace. lll Remerciements. iv Sommaire v

Chapitre I - Introduction

Chapitre II - Le conservatisme canadien au fil de I'histoire : une idéologie à définir 10 l. La réforme des institutions politiques... 11 2. La fiscalité l3 3. La politique sociale. 20

Chapitre III - Le Parti progressiste-conservatew. 27 1. Historique et idéologie de base. 27 2. L'hériøgeduparti. ....':.. 29

3. Les politiques économiques du parti. , 4. Les politiques sociales du parti... 39

Chapitre IV - Le Parti réformiste du Canada et I'Alliance canadienne...... 46 1. Preston Manning et la fondation du Parti réformiste... 46 2. Le programme du parti. 52 i. La réforme des institutions politiques... 53 ii. La f,rscalité 57 iii, La politique sociale. 63 3. L'Alliance canadienne et Stockwell Day. 68 i. La fondation du parti. 68 ii. L'élection générale du27 novembre 2000. 69 4. Le retour de Stephen Harper. 73

Chapitre V - Stephen Harper et le nouveau Parti conservateur du Canada 75 1. Le fusionnement de I'Alliance canadienne avec le Parti progressiste-conservateur. 75 2. L'élection générale du 28 juin 2004. 80 i. Le programme du parti. 80 3. La convention cle Montréal (mars 2005). 9l i. Les.résolutions adoptées..... 9l 4. La campagne électorale de 2005-2006...... 96 i. Le programme duparti. 97 Chapitre VI - Le Parti conservateur du Canada au pouvoir 111 1. Le programme du parti. 1t4 i. Laréforme des institutions politiques. tt4 ii. La fiscalité t23 139

Chapitre VII - Conclusion 152 i, Stephen Harper : un conservatisme tempéré 152 2. L'avenir 1s8

Bibliographie 161 Dédicace

Ce mémoire est dédié à ma très chère épouse Norma qui n'a jamais douté de mes habiletés à compléter cette recherche.

llt Remerciements

Par la présente, j'aimerais remercier les nombreuses persorules qui m'ont aidé du¡ant ce processus et sans qui la rédaction de ce mémoire aurait été impossible. En premier lieu, je désire remercier mon directeur de mémoire, le professeur Raymond Hébert du

Collège universitaire de Saint-Boniface, qui m'a guidé tout au long de cet exercice et dont I'expertise dans le domaine et les conseils ont été d'une valeur incontestable.

Aussi à remercier sont les autres membres de mon comité, les professeurs Luc Côté et

Ken Osborne qui n'ont pas hésité à m'offrir à leur tour des commentaires et des recommandations afin de m'orienter dans ma recherche. De plus, je désire reconnaître le travail de Jacqueline Rémillard qui a passé de nombreuses heures à faire une relecture minutieuse de ce mémoire. Finalement, j'aimerais remercier mon épouse

Norma qui m'a appuyé et encouragé du¡ant les nombreux mois que j'ai consacré à réaliser ce rêve depuis si longtemps souhaité.

IV Sommaire

L'élection fédérale canadienne du 23 janvier 2006 a marqué le retour au pouvoir

d'un parti politique dit conservateur pour la première fois depuis 1993. Issu du fusionnement du Parti progressiste-conservateur à l'Alliance canadienne, le Parti conservateur a été accusé, dès sa fondation en2003, de promouvoir un programme socialement et économiquement conservateur et à tendance populiste.

En étudiant les domaines de la réforme des institutions politiques, de la fiscalité et de la politique sociale, le mémoire analyse dans quelle mesure le Parti conservateur du Canada s'est dissocié de plusieurs éléments d'un prograÍrme de droite radicale afin de se positionner vers le centre politique depuis I'ascension de Stephen Harper à la tête de I'Alliance canadienne en2002, du Parti conservateur en2004 et de la victoire

électorale de ce dernier lors de l'élection en 2006.

De toute évidence, le parti a réussi à projeter une image plus modérée et centriste en atténuant ou éliminant nombreuses politiques controversées ancrées dans un conservatisme de droite. Par contre, certaines initiatives du gouvernement depuis

I'automne 2007 portent à croire qu'il pourrait changer de cap et rétablir un programme i déologiquement conservateur. Chapitre I - lntroduction

Le Z3janvier 2006,1e Parti conservateur du Canada a remporté l'élection générale et a formé un,nouveau gouvernement minoritaire à la Chambre des commr¡nes.

Issu du fusionnement entre I'Alliance canadienne, parti politique originaire de l'ancien

Parti réformiste du Canada, et le Parti progressiste-conservateur, réduit à une poignée de sièges à la Chambre des communes depuis une douzaine d'années, il représentait le premier parti dit conservateur à exercer le pouvoir au niveau fédéral depuis 1993.

Depuis sa fondation en décembre 2003, le Parti conservateur du Canada sous la direction de son chef Stephen Harper est accusé à plus d'une reprise par des adversaires politiques variés et par bon nombre de simples citoyens de vouloir promouvoir un prograÍrme socialement et économiquement conservateur et à tendance populiste, reflétant plutôt la tradition réformiste /allianciste, qu'un programme reflétant la tradition plus modérée des progressistes-conservateurs. Quiconque peut se demander si ces accusations reflètent véritablement la position actuelle du Parti conservateur du

Canada ou les éléments de programmes politiques abandonnés depuis quelque temps par un parti voulant se distancier de son ancienne idéologie de droite plus controversée.

En analysant les programmes et les politiques du Pafi conseryatetu du Canada et en les comparant à ceux de ses prédécesseurs, il sera possible d'identifier plus clairement la position réelle du pani.

Sous cette optique, ce mémoire de maîtrise tentera de démontrer dans quelle mesure le Parti conservateur du Canada s'est dissocié de plusieurs éléments d'un programme de droite radicale, afin de se positionner davantage vers le centre politique depuis I'ascension de son chef Stephen Harper à la tête de I'Alliance canadienne en 2002, du Parti conservateur du Canada en2004 et de la victoire électorale de ce dernier

lors de l'élection fedérale en janvier 2006.

Le mémoire se limite à trois domaines qui ont figuré d'une manière prédominante dans les programmes du Parti réfonniste du Canada et de son successeur,

I'Alliance canadienne. En étudiant ces domaines, nous porrrïons voil si le Parti conservateur du Canada s'est véritablement déplacé vers le centre politique après son arrivée au pouvoir. Le premier domaine exploré est celui de la réforme des institutions politiques ou les réfonnes dites , c'est-à-dire la réforme du Sénat, les

élections à date f,rxe, le vote libre des députés à la Chambre des communes, le rappel des députés et enfin les référendums soumis à la population canadienne. Le detxième domaine à l'étude est celui d'une politique dite sociale incluant les valerus familiales, les mariages gais, l'avortement, la garde d'enfants, ainsi que le crime, I'immigration et les langues offrcielles. Le troisième domaine porte sur la fiscalité, dont l'impôt et les dépenses gouvernementales. Bien que ces domaines ne reflètent qu'une partie de

I'ensemble du programme du Parti conservateur du Canada (nous aurions pu par exemple discuter de I'environnement, des affaires étrangères et des questions autochtones), ils représentent bien la position actuelle du parti ainsi que son évolution.

De plus, il a été jugé que les questions d'ordre social et économique et celles liées aux institutions politiques peuvent présenter un reflet fidèle de I'ensemble du programme du parti.

La recherche s'inspire de sources primaires et secondaires variées. Parmi les sources primaires consultées, mentionnons les budgets du Parti conservateur du

Canad4 les discours du trône prononcés depuis qu'il a accédé au pouvoir, les projets de lois, les progr¿ürmes électoraux et les prograÍrmes de ses prédécesseurs, I'Alliance canadienne et le Parti réformiste du Canada. De plus, l'analyse serait incomplète sans consultation des débats de la Chambre des communes ainsi que les propos de certains leaders conservateurs. Les sources secondaires comprennent les écrits anal¡iques portant sur maints aspects du Parti réformiste, de l'Alliance canadienne, du Parti progressiste-conservateur, et de l'idéologie de droite des leaders politiques. Entre autres, soulignons les propos des idéologues et des militants qui ont défendu le mouvement de droite conservateur sur le plan économique et social (Ernest et Preston

Manning, Tom Flanagan), les propos de ceux qui ont défendu un conservatisme plus modéré ou centriste (Heath Macquarrie, George Grant) ainsi que des professeurs, des chercheurs (Tom Flanagan, David Laycock) et des analystes politiques canadiens

(Jeffrey Simpson, William Johnson, Murray Dobbin, Sydney Sharpe, Don Braid et Ron

Dart). Des articles publiés dans des revues scientifiques telles que la Revue canadienne de science politique, Canadian Issues et Canadian Women's Studies ont aussi été consultés pow leur profonde analyse sur des questions pertinentes. Les publications d'instituts et d'organismes variés tels que I'Institut Fraser et l'Institut de recherche en politique publique ont aussi servi à cette recherche. La consultation auprès de revues canadiennes, de chaînes de télévision et de quotidiens canadiens ont servi à mieux interpréter les faits qui peuvent varier d'une région du pays et d'une époque à I'autre.

Afin d'approfondir l'énoncé de thèse, le mémoire est divisé en sept chapitres.

Le présent chapitre, I'introduction, sert à présenter l'énoncé de thèse et à souligner comment le mémoire peut favoriser notre compréhension de la scène politique actuelle.

L'analyse politique étant souvent influencée par des considérations partisanes, le présent mémoire se veut une analyse objective de différents aspects du programme du

Parti conservateur du Canada. Cette analyse permettra de déterminer si le Parti conservateur du Canada a évolué en un parti plus modéré sous la direction de Stephen

Harper ou s'il continue à promouvoir une idéologie davantage penchée vers la droite depuis qu'il est arrivé au pouvoir. De plus, ce mémoire sert à décrire l'évolution du conservatisme au Canada depuis 20 ans. L'introduction identifie les domaines du programme du Parti conservateur du Canada qui permettent de déterminer si ce parti s'est rapproché du centre politique. On indique aussi dans I'introduction les raisons qui ont mené au choix de ces domaines. Cette première partie du travail annonce les chapitres de ce mémoire et elle se termine avec la défrnition de certains termes qui sont jugés essentiels à la compréhension de ce sujet. Les termes libérolisme, conservøtisme, populisme, la draite, la gauche et le centre sont des concepts politiques clés utilisés tout au long du mémoire et avant d'entamer l'analyse, il faut définir ces termes avec précision,

Le deuxième chapitre est consacré à une recension des écrits qui met en

évidence les textes, les articles scientifiques et les écrits et discours pertinents consultés et dont la lecture est essentielle pour comprendre la position actuelle du Parti conservateur du Canad4 son historique et son idéologie dont les racines proviennent en grande partie des programmes de ses prédécesseurs dont le Parti réfornriste du Canada,

I'Alliance canadienne et le Parti progressiste-conservateur. Une analyse impartiale de maints aspects du programme du Parti conservateur du Canada abordée dans ce mémoire peut servir de complément à la littérature existante, car elle trace l'évolution du conservatisme au Canada durant les dernières décennies et identifie plus précisément le positionnement actuel du parti sur la scène politique.

Le troisième chapitre de ce mémoire porte sur le Parti progressiste-conservateur du Canada qui s'est fusionné avec I'Alliance canadienne en 2003, ce qui a mené à la création du Parti conservateur actuel du Canada. Bien que le chapitre comprenne un bref historique du parti, I'accent porte davantage sur l'idéologie et la position conservatrice traditionnelle sur les domaines choisis pour explorer le programme actuel du Parti conservateur. Une analyse du Parti progressiste-conservateur permet d'autant plus de relever et d'expliquer brièvement certains facteurs qui ont pu mener, durant les années au pouvoir du premier ministre , à la fondation du Parti réformiste du Canada.

Le chapitre quatre est consacré au Parti réformiste et à I'Alliance canadienne.

Ençore ici, un court historique du Parti réformiste est présenté, tout en soulignant les raisons principales qui ont mené à sa fondation, raisons qui trouvent leurs origines dans l'insatisfaction d'individus tels que Preston Manning et les politiques d'un gouvernement progressiste-conservateur qui ne portait que peu d'attention arx désirs de

I'Ouest canadien et qui s'éloignait d'une idéologie dite de droite (Manning 1992, p.126). L'essentiel du chapitre porte sur l'étude du programme du Parti réformiste et de son successeur l'Alliance canadienne en rapport aux domaines choisis pour cette étude.

La documentation est utilisée pour souligner la transformation qui s'est effectuée au sein de ce mouvement politique de droite. Pour ce faire, il est nécessaire de comparer le programme de Preston Manning et de son successeur Stockwell Day qui reposait en partie sur un conservatisme social, à celui de Stephen Harper qui était axé surtout sur un conservatisme économique.

Le cinquième chapitre discute du fusionnement du Parti progressiste- conservateur et de I'Alliance canadienne. Il met à la lumière les pourparlers entre les deux chefs Stephen Harper et Peter MacKay qui ont mené à la fondation du nouveau

Parti conservateur du Canada en2003. L'analyse du programme du parti portera sur les trois domaines choisis. Cette analyse repose sur trois grands événements qui ont eu lieu après I'ascension de Stephen Harper au poste de chef du parti en 2004. Le premier

événement marquant est l'élection fédérale du mois de juin 2004, élection pour laquelle le Parti conservateur du Canada a eu très peu de temps à préparer un programme complet. Le deuxième événement est la première convention offlrcielle du parti à

Montréal en mars 2005 où le parti a adopté une série de résolutions qui ont servi de guide jusqu'à la prochaine élection générale. Le troisième événement est la campagne

électorale du 23 janvier 2006.I1 est évident que cette période entre mars 2004 et l'élection du mois de janvier 2006 marque une période décisive pour le Parti conservateu¡ et le mouvement de droite en général, car plusieurs de ses nouvelles politiques sont considérées plus centristes que de droite (Flanagan 2007, p. 203 et

Johnson 2006,p. 330). Il est à noter que cette transformation s'est effectuée sous l'influence incontestable du chef Stephen Harper.

Le chapitre six porte sur le Parti conservateur qui forme un gouvernement minoritai¡e après l'élection fédérale du 23 janvier 2006 et sur les deux ans qui ont suivi sa victoire jusqu'à mars 2008. Ce chapitre est une étude détaillée des actions de

Stephen Harper qui révèlent jusqu'à quel point le Parti conservateur est devenu en quelque sorte un parti plus modéré. En examinant les discours du trône, les budgets du gouvemement, les débats dans la Chambre des communes, les initiatives du parti en matière de politique sociale, de l'économie et des réformes démocratiques ainsi qu'une multitude d'articles écrits à l'égard de Stephen Harper, il est clair que le parti s'est dissocié de certains éléments d'un programme longtemps considéré conservateur sans pour autant rejeter complètement ses principes de droite. Il est par contre impossible de déterrniner si ce positionnement central peut être considéré permanent, compte tenu que le parti n'est au pouvoir que depuis deux ans et qu'il a le statut d'un gouvernement minoritaire, ce qui limite sa marge de manæuvre.

La conclusion de ce travail reprend l'énoncé de la thèse de départ pour en

évaluer la validité. Le Parti conservateur du Canada s'est dissocié de plusieurs éléments d'un programme de droite radicale afin de se positionner davantage vers le centre politique. Par contre, cerlaines décisions prises par le gouvernement Harper laissent croire que le parti pourrait adopter à nouveau un programme plus conservateur si jamais il réussissait à former un gouvernement majoritaire. Le refus du parti de respecter le protocole de Kyoto et la position émise au Sommet du Commonwealth en novembre

2007 où il refuse d'accepter des cibles obligatoires pour réduire les gaz à effet de serre ne sont que deux exemples qui servent à appuyer cette hypothèse. De plus, M. Harper a pris la décision de ne plus intervenir dans l'exécution de Canadiens jugés et trouvés coupables de crimes capitaux dans des pays démocratiques. Cette prise de position, basée en partie sw le cas de Robert Smith, un Canadien qui risque de se faire exécuter au Montana, a renversé une tradition de longue date au Canada selon laquelle le gouvemement a toujours imploré la clémence dans de telles situations et qui par ce fait même positionne le Parti conservateur nettement à la droite. Ce ne sont que quelques exemples qui peuvent servir de base pour réévaluer, dans le cadre de recherches complémentaires futures, l'évolution idéologique du Parti conservateur et du conservatisme canadien en général.

En terminant, vu la nature politique du présent mémoire, une définition de certains termes de base est considérée nécessaire avant d'entamer l'analyse.

. Le libéralísme est une ( doctrine économique fondée sur deux postulats : existence d'un ordre et de lois économiques conformes à la nature de l'homme et recherche de l'intérêt individuel ou de profit comme moteur conduisant infailliblement à l'intérêt général [...] d'où les concepts de liberté, d'entreprise, de production, de circulation et de consommation. > (Off,rce québécois de la langue française 2007).

. Le conservatisme < désigne, chez un individu ou un groupe, un reflexe systématique favorable au statut quo et une tendance à refuser le changement social, économique et politique. On trouve dans ce courant les points de vue et les valeurs qui sont liées aux intérêts de groupes privilégiés et à ceux des classes dominantes. > (Boudreau et Perron

2006,p.44).

. Le populisme est un mouvement politique caractérisé par des < discours et attitudes de certains dirigeants, fondés sw les opinions et les pressions populaires plutôt que sur les convictions politiques. Le populisme est le fait de politiciens ou de dirigeants charismatiques, de tendance plus ou moins autoritaire qui prétendent représenter le peuple [...], promettant de lui redonner le droit de parole et le pouvoir "usurpés". )>

(Boudreau et Perron 2006,p.Ia\. . La droite est un mouvement politique auquel ( [.. .] on associe [...] les idées ou idéologies, les acteurs politiques, les discours, les attitudes qui sont réfractaires au changement, [...] et qui [...] favorisent des classes sociales ou des groupes privilégiés.

Par exemple, la droite prône la fidélité au passé, l'élitisme, le maintien de la loi et de

I'ordre, le chauvisme national; elle accepte les grandes disparités économiques existant entre les individus, celles-ci étant naturelles à ses yeux. > (Boudreau et Perron 2006, p. 66).

. La gauche est un mouvement politique où ( [...] on situe des idées ou idéologies, des acteurs politiques, des discours et des attitudes favorables au changement en matière d'égalité, de justice et de démocratie, [...] et qui favorisent des classes sociales ou des groupes dominés ou méprisés. Par exemple, la gauche prône la liberté de pensée et d'action, les transformations sociales, la justice sociale et économique, 1'égalité des droits des peuples, etc. ) (Boudreau et Perron 2006, p. 85).

. Le centre est un < terme générique désignant les mouvements refusant le conservatisme des partis de droite et les bouleversements proposés par les partis de

gauche et favorables à un changement progressif et modéré des structures sociales. >>

(Debbasch et Daudet 1974,p.31). Chapitre II - Le conservatisme canadien au hl de I'histoire : une idéologie à déhnir

La recension des écrits a pour but de présenter et de commenter brièvement les textes et les articles scientifiques essentiels à cette présente étude. Rappelons que le mémoire a coûlme objectif de démontrer dans quelle mesure le Parti conservateur du

Canada s'est dissocié de plusieurs éléments d'un prograÍÌme de droite radicale afin de se positionner davantage vers le centre politique depuis I'ascension de son chef Stephen

Harper à la tête de I'Alliance canadienne en2002 et son élection en 2006. Cette analyse de la position actuelle du parti a exigé une étude historique et idéologique du mouvement conservateur au Canada af,rn d'en retracer l'évolution Étant donné que le

Parti conservateur du Canada provient en partie du Parti réformiste et de l'Alliance canadienne, il a semblé nécessaire d'étudier la nature conservatrice de droite de ces partis en examinant de façon particulière les trois domaines principaux choisis, soit la réforme des institutions politiques, la fiscalité et la politique sociale. Puisque le Parti conservateur est le fusionnement de l'Alliance canadienne au Parti progressiste- conservateur, caractérisé comme étant plus centriste, il a aussi été essentiel d'analyser la nature du conservatisme de ce dernier par rapport aux mêmes domaines, bien que la réforme des institutions politiques ait rarement été un élément important de son programme. La comparaison entre les programmes de ces divers partis à celui du Parti conservateur montre l'évolution de l'idéologie conservatrice au Canada depuis les demières décennies et permet d'identifier plus clairement le positionnement actuel du parti.

10 1. La réforme des institutions politiques

Un domaine choisi dans le cadre de cette étude, soit la réforme des institutions politiques, a caractérisé de façon importante les programmes de la droite du mouvement conservateur au Canada. La réforme du Sénat, l'utilisation de référendums, le rappel possible des députés, le vote libre en Chambre et les élections à des dates fixes sont tour

à tour défendus et critiqués par les auteurs étudiant le conservatisme au Canada.

Parmi les auteurs qui ont développé l'idée qu'il faut procéder à une réforme des institutions politiques au pays, il faut souligner avant tout Ernest C. Manning (1967).

Ancien sénateur et premier ministre créditiste de I'Alberta, il propose ure réorganisation des partis politiques fédéraux en deux entités bien distinctes, chacune basée sur une idéologie clairement définie. Un parti conservateur de droite aurait eu coÍtme but de faire avancer ce dossier à l'aide d'une consultation directe auprès de la population, enlevant ainsi le pouvoir à l'élite politique qui contrôle les institutions fédérales. Le fils de Ernest C. Manning, Preston (1992,1993,1996,1997) a repris et a davantage développé les principes populistes défendus par son père. Les principes sont devenus la pierre angulaire du programme du Parti réformiste en 1987 sous Preston

Manning. Appuyées à l'époque par Stephen Harper, futur premier ministre du Canada, les réformes démocratiques proposées par Preston Manning et les réformistes, telles que la réforme du Sénat, les votes libres en Chambre, les élections à date fixe, I'utilisation des référendums et le rappel des députés visaient une plus grande imputabilité des politiciens afin qu'ils représentent mieux les intérêts des électeurs et la mise en place d'un Parlement efficace, réduisant ainsi le pouvoir des élites et des intérêts contrôlant les institutions nationales.

11 Bien que le Parti réformiste et son successeur,I'Alliance canadienne, attachent une grande importance à la réforme des institutions politiques, cette position n'a pas

échappé aux critiques. Dobbin (lggz)ainsi que Sharpe et Braid (Iggz)ont relevé de nombreuses lacunes dans ces propositions qui, selon eux, rendaient les réformes en pratique moins effrcaces qu'elles semblaient l'être en principe. Ils ont expliqué qu'il aurait été très difficile de faire accepter ces propositions dans certaines parties du pays, plus particulièrement en Ontario et au Québec où la réforme du Sénat diminuerait l'influence et le pouvoir politique que détenaient ces provinces sur la scène politique nationale. Pour leur part, Flanagan (1995), professeur de sciences politiques à l'Université de Calgary, joueur actif au sein du Parti réformiste, de l'Alliance canadienne et du Parti conservateur du Canada, et gérant de la campagne électorale de

Stephen Harper en 2006, et Laycock (1994,2002) ont porté une attention particulière aux prograÍrmes du Parti réformiste et de I'Alliance canadienne, soulignant les

éléments qui, selon eux, limiteraient le succès de ces partis de droite. Les réformes démocratiques proposées, populaires auprès d'un certain pourcentage de l'électorat canadien, semblaient plutôt entraver le succès de la droite sur la scène politique nationale. Laycock, polr sa part, conclut que ces réformes, si elles avaient été adoptées, auraient pu affaiblir les moyens démocratiques de prise de décision. Elles auraient réduit les délibérations au sein du processus politique en faveur d'une consultation directe de la population.

Les nombreuses critiques ne peuvent pas à elles seules expliquer les raisons pour lesquelles les réformes démocratiques ont presque entièrement disparu du prograûrme du Parti conseryateur du Canada, même si ce parti a récemment réussi à

l2 établir des élections à date fixe et qu'il espère encore procéder à une certaine réforme du Sénat (la nouvelle proposition est moins controversée que celle des alliancistes). Si l'on se penche sur les écrits de Flanagan (1995,2007) et de Johnson (2006), on peut constater que Flanagan a analysé de près les rôles que Preston Manning et Stephen

Harper ont joué au sein de la droite politique, tout en soulignant leurs similarités et leurs différences sur le plan idéologique. Stephen Harper est dépeint comme un politicien qui se place nettement à la droite du centre politique en matière d'économie et de politique étrangère. D'après I'autew, Harper est généralement moins préoccupé par les éléments plus populistes d'un programme conservateur qui pourraient, à ses yeü, être un handicap pour le mouvement de la droite. Johnson, pour sa part, arrive

également à la conclusion que la pensée politique de Stephen Harper a évolué dans le sens du rejet de certains principes populistes réformistes et alliancistes.

En résumé, I'analyse de ces auteurs du programme de réforme des institutions politiques démontre clairement rure transformation au sein du conservatisme de droite au Canada depuis les deux dernières décennies. À l'origine, ce mouvement avançait une série de réformes démocratiques qui auraient engendré des changements radicaux des institutions politiques, mais comme nous le postrlons ici, Stephen Harper a adopté des mesures moins controversées dans ce domaine en positionnant le conservatisme davantage vers le centre politique.

2. Laftscaliié

Le deuxième domaine du mémoire, celui du programme fiscal du Parti conservateur et de ses prédécesseurs, a, lui aussi, été analysé par de nombreux auteurs.

13 parti sur le plan de la Af,rn d'évaluer plus clairement le positionnement cowant du parti progressiste- fiscalité, il est nécessaire de comparer son pfogramme à celui du

et allianciste, plus conservateur plus modéré, ainsi qu'à ceux des partis réformiste

conservateurs.

sur un premier axe, les auteurs qui ont étudié à fond le parti progressiste-

les principes conservategr I'ont décrit conìme ayant historiquement défendu I'idéologie du économiques du conservatisme britannique. Grant (1978) critique

et par les libéralisme économique prôné à l'époque par le Parti libéral du Canada

économique, États-Unis. Cette idéologie, basée sur I'individualisme et le laissez-faire

et de son respect était contraire à la modération inhérente du conservatisme britannique dirigisme du bien commun. Le conservatisme britannique permettait un certain

du bien économique de la part du gouvemement. Ce dirigisme asswait la défense

questions commun et permettait de coniger les excès du libéralisme qui laissait les

(1980), pour sa part' économiques se régler uniquement par les forces du marché' Perlin

des avance l,idée que le Parti progressiste-conservateur adoptait traditionnellement Ancré mesures économiques et sociales qui le plaçaient plutôt dans le centre politique-

que le dans la tradition du torysme britannique, le parti avait toujours reconnu

les gouvernement avait un rôle à jouer dans les questions économiques même si

principes capitalistes de production le guidaient. Simpson (1984) étudie plus

(1979-1980) et spécifiquement le gouvernement progressiste-conservateur de

il conclut que ce dernier, tout en adoptant certaines politiques économiques plus

jouer un conservatrices, était convaincu que le gouvernement pouvait et devait doit rôle

actif dans le's questions économiques et sociales de la nation. D'ailleurs, son

T4 gouvernement était prêt à augmenter les dépenses gouvernementales et certaines taxes pour attaquer les problèmes économiques du jour, politiques diffrcilement acceptables aux yeux des conservatews économiques. Macquarrie (1992), dans son histoire du Parti progressiste-conservateur, met un accent particulier sur certains individus et

événements qui ont déhni le conservatisme traditionnel au Canada dont la Conférence de Port Hope de 1942 où le parti a adopté une série de mesures économiques pour freiner la popularité du CCF, mesures qui plaçaient le programme du parti nettement au centre sinon à la gauche politique. Macquarrie n'hésite pas à critiquer son parti et l'administration de Brian Mulroney qui adoptait plutôt des principes du libéralisme classique, ce qui signalait un virage vers la droite, du moins sur le plan de la fiscalité.

Dart (1999) présente au lecteur une description du conservatisme traditionnel britannique ou

<, et il compare minutieusement les deux idéologies. Bien que f influence du conservatisme traditionnel étÃit encore présente au sein du Parti progressiste- conservateur à la hn des années 90, Dart déplore le fait que le torysme bleu semble davantage dominant au sein du parti depuis les années 80. Il compare le torysme bleu au libéralisme américain où l'individualisme et le laissez-faire économique dominent.

Sur un deuxième axe, plusieurs auteurs ont décrit les principes économiques de droite qui ont guidé les partis réformiste et allianciste à partir des années 80. Sur le plan théorique, Grant (1978), Perlin (1980), Simpson (1984), Macquarrie (1992) et Dart

(1999) ont tour à tour identifié des caractéristiques du libéralisme classique sur lesquels s'étaient basé les réformistes et les alliancistes pour développer leurs programmes fiscaux. Ernest Manning, dans son æuvre Political Realignment : a Challenge to

15 Thoughtful Csnadians (1967), envisageait l'établissement d'un parti politique plus à la droite qui adopterait comme principes économiques de base le capitalisme et la responsabilité fiscale. La tâche de développer les éléments d'un plogramme

économique de droite est revenue à son fils Preston Manning (1992,1996,1997) qui a fondé le Parti réformiste en 1987. Ses ouvrages et ses nombreux autres écrits et discours ont élaboré en détail la position de son parti par rapport à la fiscalité en proposant des programmes qui auraient réduit nettement les dépenses gouvemementales dans de nombreux domaines tout en diminuant la charge fiscale des contribuables. Il proposait aussi d'équilibrer le budget fédéral pour enfin produire des surplus qui seraient à leur tour utilisés pour offrir de nouvelles réductions d'impôts aux particuliers. Les mesures étaient carrément une représentation d'une philosophie de droite. La philosophie Manning se rapprochait du libéralisme classique car il voyait une diminution marquée de I'intervention du gouverutement dans l'économie. Dobbin

(1992) ainsi que Sharpe et Braid (1992) ont décrit les positions de Manning tout en offrant une critique de certaines mesures proposées par le Parti réformiste. Les auteurs ont clairement identifié la position du parti par rapport au rôle que devait jouer le gouvernement dans les questions d'ordre économique. Selon ces auteurs, une idéologie de droite était préconisée par les réformistes qui souhaitaient voir le secteur privé assumer un rôle plus actif sur le plan économique. Ainsi, le secteur privé assumerait davantage certaines responsabilités traditicinnelles du gouvernement. Ceci aurait pu inclure, entre autres, la privatisation de sociétés d'états et l'administration de pro grammes fedéraux tels que l' assurance-chômage.

I6 Puisque Tom Flanagan est depuis longtemps associé au mouvement et aux partis de droite au Canada et qu'il connaît personnellement Preston Manning,ll a été en mesure d'offrir une perspective interne du parti. Dans Waitingfor the Wave :

The Reform Party and Preston Manning (1995), il analyse de près les éléments du programme f,rscal des réformistes en se basant sur la documentation offrcielle du parti, y inclus leurs programmes électoraux. Il conclut que le parti se trouvait en général à la droite en matière fiscale, position développée non seulement par Preston Manning, mais surtout par Stephen Harper qui jouait aussi un rôle important au sein du parti. Laycock

(2002), dans son histoire du Parti réformiste et de l'Alliance canadienne, se concentre avant tout sur les politiques de ces partis et comment certaines d'entre elles ont été graduellement modifiées par Preston Manning, Stockwell Day et Stephen Harper.

Laycock analyse bien comment les leaders devaient atténuer certains éléments plus conservateurs de leurs progrÍürmes afin de tenir compte des réalités politiques. Il conclut que malgré cette atténuation de principes, ces partis avaient eu une influence sur la politique au Canada, car les idées qu'ils avançaient telles les réductions d'impôts, les compressions budgétaires des programmes sociaux, la réduction de la réglementation gouvernementale et la réduction du déficit et de la dette nationale avaient été adoptées par le parti politique au pouvoir.

Enfin, pour bien évaluer le positionnement actuel du Parti conservateur du

Canada sur le plan fiscal, il a fallu consulter des ouvrages illustrant les convictions personnelles de Stephen Harper, chef du parti, et les initiatives du parti depuis la victoire électorale de Harper en janvier 2006.

t7 De façon générale, même si les ouwages de Manning (1992), Dobbin (1992) et

Flanagan (1995) portent avant tout sw le Parti réformiste et le rôle joué par son fondateur Preston Manning, ces auteurs reconnaissent tous l'influence marquante de

Stephen Harper dans le développement de la politique économique du parti. Dès 1987, lors de la fondation du parti, Harper s'est prononcé en faveur d'un virage fiscal vers la droite, visant à réduire la charge fiscale des contribuables. Influencé par le conservatisme aux États-Unis et en Grande-Bretagne, ses propos fi.rent utilisés pour développer les politiques du parti (Blue Book,l99l) ainsi que plus d'un programme

électoral. Malgré son retrait de la scène politique fédérale en 1997, Stephen Harper a continué à professer un conservatisme économique. À la tête du Natìonal Citizens

Coalitíon il a même publié une lettre ouverte au premier ministre Ralph Klein

(Harper et al. 2001) dans laquelle il se réjouissait des efforts de ce dernier à adopter des mesures conservatrices de droite en mettant sur pied un programme qui permettait d'équilibrer le budget, de diminuer la dette provinciale, de privatiser certains services gouvemementaux, d'établir un taux d'imposition unique et de réduire les subventions de l'État aux entreprises. Revenu sur la scène politique en2002 cornme chef de l'Alliance canadienne et comme premier chef du nouveau Parti conservateur en2004,

Harper est décrit à nouveau par Flanagan (2007) et Johnson (2006) cornme étant un conservateur économique influencé par le libéralisme classique, bien qu'il semblait prêt

à adopter des mesures plus modérées en politique sociale par rapport à un grand nombre d'alliancistes.

Compte tenu de son historique, il est tout à fait normal de penser que Stephen

Harper et le Parti conservateur auraient implanté une ligne d'action économique

l8 conservatrice dès leur arrivée au pouvoir en janvier 2006. De fait, le nouveau gouvernement a réduit, dans une certaine mesrue, la charge fiscale des contribuables, entre autres en réduisant la taxe sur les produits et services. Par contre, le premier ministre aété,Ia cible de critiques en provenance de la droite alors qu'on I'accuse d'avoir abandonné ses principes économiques. L'institut Fraser publie plus d'un article critiquant le budget des conservateurs déposé en mars 2007. Clemens et Veldhuis

(2007) ont de la difficulté à considérer le budget comme étant réellement conservoteLtr, car il ne limitait pas les dépenses publiques et n'offrait pas de réductions d'impôts significatives. De plus, il augmentait les dépenses fédérales dans de nombreux prograÍìmes et continuait à transférer des sorìmes importantes aux provinces. Du côté de I'allègement fiscal, le budget offrait des réductions d'impôts dans quelques domaines, mais le taux d'imposition'des contribuables et des entreprises n'est pas réduit. Pour leur part, Esmail, Clemens, Veldhuis et Palacios (2007) soulignent surtout la faiblesse du gouvernement de promethe aux provinces 39 milliards de dollars répartis sur 7 ans dans le cadre de programmes tels que la péréquation et le Transfert canadien en matière de programmes sociaux.'Le Parti conservateur, d'après ces auteurs, ne semble pas se détacher de la tendance de son prédécesseur, le Parti libéral, qui remettait aux provinces des soÍrmes de plus en plus importantes sans les obliger de modifier leurs programmes pour répondre de façon plus efftcace aux besoins provinciaux et locaux. En-fin, Doern (2006) critique, lui aussi, le programme hscal du gouvernement conservateur, jugeant que ses dépenses étaient beaucoup trop élevées, car elles se comparaient à celles promises par le gouvernement libéral précédent et qu'il n'adressait pas suffrsamment I'allègement fiscal des contribuables.

t9 Somme toute, selon les écrits, Stephen Harper semble avoir modifié quelque peu sa position depuis que son parti forme le gouvemement. Les écrits confirment que

Harper a traditionnellement préconisé une hscalité plus conservatrice en encourageant une réduction des dépenses gouvernementales et des impôts; par contre les nombreuses augmentations de dépenses qu'il a effectuées dans une variété de domaines depuis son arrivée au pouvoir laissent sous-entendre qu'il a atténué son prograrìme économique de droite.

3. La politique sociale

Comme pour le domaine de la fiscalité, nous pouvons comparer la politique sociale du Parti conservateur à celle de ses prédécesseurs afin d'établir le positionnement actuel du parti. La recension des écrits montre encore une fois une certaine évolution du programme conservateur dans ce domaine.

Pour ce qui est de la politique sociale du Parti progressiste-conservateur, les auteurs consultés sont d'accord qu9 le parti a traditionnellement appuyé un programme progressiste. Dart (1999) et Grant (1978) indiquent que les gouvemements progressistes-conservateurs ont historiquement accepté un certain dirigisme social af,rn d'assurer le bien commun de la population canadienne. Ceci représentait l'antithèse du libéralisme classique qui préconisait avant tout comme principe de base le respect et la promotion des droits de I'individu sans intervention gouvernementale. Macquarrie

(1992) affirme que la Conférence de Port Hope en 1942 était un point marquant dans

I'histoire du parti étant donné qu'il a adopté une série de résolutions socialement centristes sinon de gauche afin de contrer la popularité du CCF. Il a aussi souligné

20 l'influence de , malgré son manque de popularité auprès des

Canadiens-français, et de dans l'établissement d'une politique sociale progressiste. Simpson (1984), dans son analyse de l'administration de Joe Clark, affirme que I'ancien premier ministre avançait des notions socialement progressistes, embrassant ouvertement le fait français au Canada ainsi que les droits des minorités ethniques et des femmes. Perlin (19S0) soutient que le Parti progressiste-conservateur appuyait traditionnellement des mesures sociales qui le plagaient vers le centre politique. Sur ce plan, le parti, malgré les tensions intemes entre ses factions plus centristes et conservatrices, a souvent adopté des politiques dites progressistes par rapport, entre autres, à l'universalité de programmes sociaux et aux langues officielles.

Contrairement à la politique sociale modérée des progressistes-conservateurs, celle des partis réformiste et allianciste est considérée beaucoup plus conservatrice selon les auteurs qui l'ont étudiée. En grande mesure, ces partis ont trouvé leur inspiration dans le conservatisme social proposé par Ernest Manning (1967) qui entrevoyait l'établissement d'un parti philosophiquement de droite sur la scène politique avec une idéologie qui se basait en partie sur les droits de l'individu et les valeurs familiales traditionnelles. D'après Simpson (1993), ces principes de base alliés

à des convictions religieuses et morales fondamentalistes ont guidé son fils Preston dans le développement de la politique sociale du Parti réformiste. Les textes de

Manning (1992,1993,1996,1997) décrivent un programme social axé avant tout sur

I'individu responsable de son propre bien-être, réduisant ainsi le rôle du gouvernement central dans les questions sociales. Ceci peut expliquer son désir de vouloir privatiser le système de santé, de réduire le nombre d'immigrants au pays pour n'accepter en

21 majorité que ceux qui pourraient s'intégrer facilement à la société canadienne, d'éliminer les subventions aux organismes culturels variés, d'abroger la Loi sur les langues ofFrcielles et de mettre fin à la politique du multiculturalisme au pays. Le fondamentalisme religieux de Preston Manning était à la base de son opposition à l'avortement et les mariages gais et de son appui d'une réforme du système pénal selon laquelle les individus deviennent davantage responsables de leurs actes criminels.

Le programme social proposé par le Parti réformiste a été critiqué par bon nombre d'auteurs qui l'ont trou'vé trop réactionnaire. Dobbin (1992) voyait l'élimination de programmes sociaux comme les allocations familiales et le refus de subventionner des garderies d'enfants comme une attaque directe contre les droits de la femme. De plus, la privatisation proposée du système de santé universel et la position du parti sur les langues officielles et le multiculturalisme risquaient de faire disparaître des caractéristiques fondamentales de la société canadienne. Sharpe et Braid (1992) ont repris plusieurs des propos de Dobbin et ont conclu que sur le plan social, tout comme sur le plan économique, Manning ne voyait qu'un rôle très limité pour le gouvernement fédéral, préférant remettre aux autorités provinciales ou locales la gestion de nombrerx programmes sociaux et culturels. Flanagan (1995), comme les auteurs précédents, reconnaissait la nature conservatrice du programme social, mais aussi ses lacunes, car il croyait que si le Parti réformiste continuait à trop methe l'accent sur des questions morales et sociales, il pounait limiter son succès politique étant donné le manque d'appui de certaines de ses politiques sociales auprès de la population canadienne.

Laycock (2002) appuie les énoncés de Flanagan, ajoutant que le successeur du Parti réformiste, l'Alliance canadienne, souffrait du même dilemme, son manque de

22 popularité étant attribué plus à son programme social et moins à son programme

économique. Il ajoute que c'est grâce à Stephen Harper, le nouveau chef des

alliancistes, que le programme social de la droite a été quelque peu atténué étant donné

que Harper voyait le programme du parti comme un handicap possible à son succès

politique.

Même si Stephen Harper est reconnu pour son conservatisme économique, son

influence sur la polìtique sociale du mouvement de la droite au Canada durant les

demières décennies est indiscutable. Partisan du mouvement réformiste dès ses débuts

en 1987, il appuyait à l'époque le programme social conservateur promu par le parti,

bien que, d'après Johnson (2006), sa position sur des questions d'ordre social a été

I'objet d'une certaine réévaluation au courant des années. Comme d'autres auteurs

étudiant la carrière de Harper, Johnson l'a décrit coÍune étant prêt à adopter une

position plus modérée qui correspondait mieux à la réalite canadienne et qui le

dissociait jusqu'à un certain point des principes qu'il formulait durant ses débuts sur la

scène politique, sans toutefois s'éloigner complètement de I'idéologie de droite. Ceci

expliquerait son engagement plus récent envers les langues offrcielles et sa position

plus modérée face à I'immigration. D'aillews, Harper lui-même affrrmait lors d'une

entrevue avec Canødian Issues (2005) que la société multiculturelle au Canada était une

réalité valorisée au sein de sa population et que le Parti conservateur étaitengagé à

apporter des réformes au niveau de I'immigration en adoptant des politiques faisant la promotion de la diversité et du multiculturalisme. Flanagan (2007) a repris les énoncés

de Johnson, caractérisant Harper coûlme un homme depuis longtemps placé nettement à la droite du centre politique, surtout en matière d'économie et de politique étrangère,

23 mais étant aussi capable de reconnaître certaines réalités canadiennes sur le plan social

le poussant à adopter des mesures plus modérées. D'après l'auteur, Stephen Harper

réalisait déjà en 1996 que le conservatisme au Canad4 pour connaître du succès, devait

allier des éléments populistes avec le torysme traditionnel et le nationalisme canadien-

français, ce qui, en fin de compte, nécessitait certains compromis. Il est à noter que le

Parti conservateur actuel a adopté une politique sociale progressive lors de sa fondation

en2004et plusieurs résolutions adoptées à sa convention à Montréal en 2005 sont

décrites comme étant plutôt centristes. Sa victoire électorale en janvier 2006, elle aussi,

témoignait d'un certain repositionnement partiel vers le centre. V/att (2006) a avancé

l'argument que la victoire de Stephen Harper et du Parti conservateur était le résultat de

la mise en place d'une coalition politique ressemblant à celle de Brian Mulroney qui

avait permis au Parti progressiste-conservateur de former le gouvemement de 1984 à

1993.Entenant compte de certains intérêts des anciens réformistes et alliancistes, des

Québécois bleus, des conservateurs rouges et des libéraux bleus, il apu gagner

suffisamment d'appui à l?échelle du pays pour former un gouvernement minoritaire. Le

fait même que Stephen Harper a pu établir cette coalition démontre qu'il a dû en partie

adopfer un programme centriste.

Ce repositionnement de la part de Stephen Harper et du Parti conservateur ne

veut pas dire qu'ils ont complètement abandonné un programme social de droite. De

fait, en matière de la garde d'enfants, Prince et Teghstsoonian dans Doern (2007) ainsi

que Friendly (2006) ont situé à la droite l'initiative du gouvernement de remettre à

chaque famille canadienne ayant des enfants de moins de six ans une allocation mensuelle de 100$ par enfant. D'après les auteurs, cette initiative, contrairement à un

24 système universel de garde d'enfants, a beaucoup limité le rôle du gouvernement fédéral dans ce domaine social. Prince et Teghstsoonian ont ajouté qu'elle semble avoir profité plutôt à des familles à salaire unique dont un des membres du couple reste à la maison garder les enfants, ce qui reflète de façon plus exacte la vision conservatrice de la famille traditionnelle. Lee dans Doern (2007) pour sa part, a analysé les réformes du nouveau gouvernement de Stephen Harper en matière de crime et a conclu que son programme qui préconise une série de mesures plus draconiennes reflète les convictions des anciens partis réformiste et allianciste dans ce domaine.

Ainsi, sur le plan de la politique sociale, les écrits indiquent que le Parti conservateur du Canada a atténué jusqu'à un cerúain point son prograrnme pour le rendre plus modéré et plus acceptable aux yeux de l'électorat sans toutefois se dissocier complètement de ses principes plus conservateurs. C'est une approche qu'ila répétée du côté de son prograÍrme fiscal et de ses initiatives en matière de réformes des institutions politiques et qui le rapproche, du moins en partie, du centre politique.

En conclusion, I'analyse du conservatisme au Canada au fil de son histoire démontre une transformation prononcée de cette idéologie dans les domaines de la réforme des institutions politiques, de la fiscalité et de la politique sociale. Selon les auteurs, c'est la modération qui a caractérisée avant tout les leaders progressistes- conservateurs et leurs prédécesseurs dans ces domaines. Avec I'arrivée des réformistes sur la scène politique nationale, le mouvement conservateur s'est scindé et les réformistes sont devenus les porte-parole d'un conservatisme plus radical. Le fusionnement des deux partis conservateurs en décembre 2003 pour créer une nouvelle entité politique, le Parti conseryateur du Canada" a marqué à nouveau un changement

25 profond au sein du conservatisme. Grâce en grande partie à Stephen Harper, le parti s'est dissocié de nombreux éléments radicaux de son programme pour adopter des mesures plus modérées, sans toutefois abandonner complètement ses principes de droite. Une analyse détaillée de I'idéologie et des politiques du Parti progressiste- conservateur au chapitre suivant permettra de souligner les éléments modérés de leurs programmes qui ont été retenus par Stephen Harper et le Parti conservateur actuel.

26 Chapitre III - Le Parti proeressiste-conservateur

Ce chapitre présente tm bref historique du Parti progressiste-conservateur du

Canada, explore son idéologie de base et décrit l'héritage de ses nombreux gouvernements en identifiant sa position historique face aux domaines qui font l'objet de cette présente étude et au conservatisme britannique traditionnel. Cette analyse montre dans quelle meslre les principes de base et les actions de ce parti ont mené, en

1987, à la fondation du Parti réformiste du Canada (parti idéologiquement plus à la droite) et permet aussi d'illustrer le positionnement du Parti conservateur actuel au

Canada.

1. Historique et idéologie de base

Le Parti progressiste-conseryateur du Canada a pris racine au milieu du 19' siècle. Basé sur les principes du torysme britannique, le parti devient, à partir de la

Confedération en 1867, un des principaux partis qui marque la scène politique nationale. Il guide le pays lors de sa naissance comme nation et assure sa survie lors de grands bouleversements, telle la Première Guerre mondiale et la Grande Dépression.

Connu sous le nom de Parti conservateur, il adopte enl942le nomprogressiste- conservateur. Cetle nouvelle appellation affiche une tendance réformiste qui le rapproche de la gauche alors incarnée par le Parti libéral et par le CCF (Macquarrie

1992, p.50). Ayant formé le gouvemement à multiples reprises aux 19' et20" siècles, le parti et ses chefs tels que John A. Macdonald, , Richard Bennett, John

Diefenbaker, Joe Clark et Brian Mulroney influencent grandement le développement

éconorrriq.re et social du Canada. En 1993, le parti subit une défaite électorale

27 désastreuse qui le réduit à deux sièges à la Chambre des communes. Après avoir langui un autre dix ans avec un minimum de sièges, le parti se fusionne officiellement en décembre 2003 avec l'Alliance canadienne pour ainsi former le Parti conservateur du

Canada.

L'idéologie du Parti progressiste-conservateur trouve ses origines dans le torysme britannique, moì.rvement conservateur traditionnel qui avance I'idée de base que le gouvernement doit jouer un rôle important et actif au sein de l'état afin de promouvoir le bien coÍrmun (Grant 1978, p.70). Contrairement au libéralisme américain dont l'idéologie est guidée par des notions d'individualisme, de compétition et de progrès, ce conservatisme se fonde plutôt sur des principes de communauté et de nation, de coopération et de tradition. Le bien coÍìmun, c'est-à-dire le bien du peuple et de la nation, suq)asse les intérêts privés appuyés par le libéralisme. Étant donné que le gouvemement est responsable d'établir et de maintenir le bien commun, il était alors naturel que I'idéologie encourage le respect des institutions politiques et sociales traditionnelles. Bien qu'il soit tout à fait raisonnable de suiwe des principes

économiques capitalistes, il ne fallait pas négliger le rôle de l'éthique nécessaire à la protection des intérêts économiques de la population et de l'état même si cela exigeait parfois une intervention gouvernementale corrective des excès du marché (Dart 1999, p. 30-35). Cette intervention gouvemementale, tant au niveau social qu'économique, est une caractéristique de base du Parti progressiste-conservateur. Cet élément a influencé,

à différents degrés, le programme progressiste-conseryatew depuis ses débuts sur la scène politique nationale.

28 2. L'héritage du parti

En examinant de plus près l'héritage du Parti progressiste-conservateur provenant du Parti conservateur de John A. Macdonald, il est possible de constater

I'influence du conservatisme britannique traditionnel. Bien que cette influence du torysme rougs, plus centriste, soit marquante, il ne faut tout de même pas négliger le fait que le parti a souvent été victime de tênsions internes appuyées d'une part par les principes du torysme rouge et d'autre part par ceux qui voulaient adopter des mesures

économiques et sociales ressemblant davantage au libéralisme classique. Des auteurs tels Perlin (1980) et Simpson (1984) soulignent que ces tensions entre conservateurs rouges et conservatews bleus ont souvent créé des déchirures au sein du parti. Les disparités idéologiques ont parfois mené à la démission de ses chefs incapables de réconcilier les intérêts des deux factions. Malgré ce fait, il ne fait nul doute que la fadition britannique est au cæur d'une série d'initiatives provenant d'tme multitude d' administrations conservatrices,

On peut afñrmer que les initiatives principales des gouvernements de John A.

Macdonald (1867-1873 et 1878-1891) ont fortement été influencées par le conservatisme britannique. Le rêve de bâtir une nation qui s'étendrait de l'océan

Pacifique à l'océan Atlantique se concrétise avec I'achèvement du chemin de fer

ûanscontinental. Pierre angulaire de la Politique nationale, ce projet de longue durée avait exigé un appui direct et continu du gouvernement. Le chemin de fer transcontinental est alors devenu le symbole d'une nation unie distincte des États-Unis.

Le peuplement des territoires de l'Ouest, achetés de la Compagnie de la baie d'Hudson,

était une deuxième composante de la Politique nationale qui visait la création d'une

29 nation forte et indépendante capable d'exploiter ses richesses et de se développer. Ces

éléments montrent clairement chez Macdonald un vif intérêt à cultiver un sens de nationalisme au sein du nouvel état canadien et à maintenir la tradition conservatrice par rapport au rôle que devait jouer le gouvernement à cet égard (Dart 1999, p. I4).

Comme Macdonald, Robert Borden (1911-1920) se monhe prêt à défendre les intérêts du Canada sw les scènes nationale et internationale. Vers la fin de son mandat,

Borden procède à la nationalisation de différents chemins de fer arx prises avec des difficultés financières ou de comrption. Il établit le Canadien national coÍrme société de la couronne et met en place une deuxième ligne ferroviaire transcontinentale. Sa vision d'une nation canadienne forte et indépendante se concrétise à la fin de la

Première guelre mondiale alors que Borden réussit à convaincre la Grande-Bretagne de reconnaître l'autonomie des dominions au sein du Commonwealth et de permettre au

Canada de signer un traité de paix séparé, sans la tutelle de la mère patrie.

L'administration du premier ministre R.B. Bennett (1930-1935) est aussi caractérisée par une initiative démontrant une tendance interventionniste du gouvernement dans la promotion du nationalisme. Enl932,son gouvernement établit la

Commission canadienne de la radiodifñ.lsion avec comme mandat la diffi¡sion d'émissions canadiennes dans toutes les régions habitées du pays. Établie pour répondre au nombre grandissant d'émissions radiophoniques provenant des Ét¿ts-Unis, la commission, qui allait devenir la Société Radio-Canada, servirait d'agent de promotion du nationalisme canadien.

À son tour, I'administration du premier ministre John Diefenbaker (1957-1963) est marquée, elle aussi, par le conservatisme britannique traditionnel. À part une série

30 de mesures sociales et économiques nécessaires pour répondre aux besoins des gens moins nantis, Grant (1978) affrrme que Diefenbaker est connu pour son nationalisme, c'est-à-dire son désir de défendre les intérêts du Canada face à des pressions politiques et économiques intemes et externes qui risquaient d'engloutir le pays dans une vague de mondialisation. Même si, d'après l'auteur, le concept de nationalisme chez

Diefenbaker, celui d'une notion canadienne, ne répondait pas nécessairement à la réalité canadienne de plus d'un peuple fondateur, le premier ministre maintenait f idée que la communauté, ou la nation, était plus importante que l'individu, ce qui est contraire au libéralisme philosophique.

Brian Mulroney (lg}4-lgg3), pour sa part, est généralement considéré cornme

étant un premier ministoe se situant plus à la droite que nombre de ses prédécesseurs.

Heath Macquarrie, ayant étudié à fond le mouvement conservateur au Canad4 doute que Brian Mulroney ait appuyé l'idée d'un gouvernement central fort, prêt à défendre le concept du nationalisme canadien, caractéristique traditionnelle du torysme rouge

(Macquarrie 1992,p.3a\. Derx initiatives importantes de Brian Mulroney, les accords du lac Meech et de , peuvent servir d'exemples. Bien qu'un de leurs buts principaux ait été de ramener le Québec au sein de la famille constitutionnelle canadienne, il serait possible de considérer ces accords comme des tentatives de satisfaire les désirs des conservateurs de la droite, car ils offraient une certaine décentralisation des pouvoirs du gouvernement fédéral ainsi qu'une réforme des institutions politiques tel l'établissement du Sénat triple E (élu, égal, efñcace).

Quoi qu'il en soit, les politiques de I'administration Mulroney ainsi que celles de ses prédécesseurs conservateurs n'ont évidemment jamais pu satisfaire les adhérents

31 du libéralisme classique, ni au sein du parti ni à l'échelle nationale. D'ailleurs, une analyse plus approfondie des politiques économiques du Parti progressiste-conservateur relève également des différences fondamentales entre ses principes de base et ceux avancés à partir de 1987 par le Parti réformiste.

2. Les politiques éionomiques du parti

Dwant ses nombreuses années comme premier ministre, John A. Macdonald a maintenu la tradition du conservatisme britannique qui, bien qu'ancrée dans des principes capitalistes, défendait la participation active du gouvernement dans les questions économiques touchant.la nation. Deux exemples appuient cette proposition.

Dans un premier temps, la construction du chemin de fer transcontinental achevée en

1885 nécessitait des subventions énormes en provenance de fonds publics. Aucun intérêt privé n'était capable ou prêt à assumer tous les coûts reliés à un projet d'une telle envergure. Par contre, une participation aussi active de la part du gouvernement au développement économique allait à I'encontre des principes du libéralisme qui préconise plutôt une non-intervention gouvernementale et qui préfère laisser libre cours aux forces du marché. Dans un deuxième temps, l'imposition de tarifs de la part de l'administration Macdonald sur une variété de produits manufacturés provenant des

États-Unis encourage la protection des industries canadiennes et démontre la volonté de jouer un rôle actif dans la politique économique de la nation. Ce principe provient du conservatisme traditionnel. Un adhérent du libéralisme aurait eu tendance à appuyer l'élimination des tarifs et l'adoption du libre-échange afin de permettre la libre circulation des marchandises et du capital et d'encourager la compétition au sein du

32 marché. Par conséquent, sur le plan économique, on peut affirmer que John A.

Macdonald incame le conservatisme traditionnel.

Pour sa part, le premier ministre Robert Borden appuyait également des principes qui allaient à I'encontre du laissez-faire économique promu par le libéralisme classique. Dès 1911, Borden démontre une réticence face à ce laissez-faire économique en se prononçant contre le traité de réciprocité que tentait de négocier le premier ministre libérat Wilfrid Laurier avec les États-Unis. L'administration de Borden est aussi la première à établir un impôt sur le revenu des particuliers malgré que cette mesure puisse être justifiée par le fait que le Canada était en guerre. Ces exemples montrent comment I'administration de Borden était prête à intervenir dans le secteur

économique et ils représentent aussi une politique inacceptable atx yeux des conservateurs de la droite.

R.B. Bennett, pour sa part, a été fortement influencé par les événements de l'époque. On voit paraître cette influence dans son programme fiscal. Au pouvoir durant les premières années de la Grande Dépression, Bennett propose, vers la fin de son mandat, un vaste programme de réformes économiques et sociales pour adresser les nombreux problèmes qu'avait engendrés la pire crise économique mondiale de l'histoire. Connues sous le nom de New Deal canadien et basées sur la version américaine du président Roosevelt, ces réformes n'ont jamais été implantées puisque le gouvemement Bennett a été défait lors de l'élection générale de 1935. Les réformes proposées demeurent toutefois une indication claire que le premier ministre désirait accorder au gouvernement un rôle plus actif au sein de l'économie, voire même un certain contrôle sur elle, afin d'éliminer les abus du capitalisme et pour ainsi surmonter

-t -1 les difficultés causées par la Grande Dépression (Perlin 1980, p. 44 etMacquarrie 1992, p.23). Entre auhes, son plan avançait l'idée d'une durée maximale de la semaine de travail, I'imposition d'trn salaire minimum et une réglementation stricte des conditions de travail. De plus, Bennett proposait d'établh un système d'assurance-chômage et de revoir le programme de soutien à I'agriculture. Ce dirigisme économique était perçu par certains comme étant un progr¿ürme de gauche, voire même socialiste. Plutôt que démanteler le capitalisme, Bennett était intéressé à en corriger les défauts et les excès

(Macquanie 1992, p.24) ce qui était justifrable dans la pensée de conservateurs traditionnels. Durant les demiers mois de son mandat, Bennett a aussi établi la Banque du Canada, banque centrale qui avait conìme mandat principal la gestion de la politique monétaire du pays et la promotion de ses intérêts économiques. Bennett établit

également la Commission canadienne du blé pour faciliter la mise en ma¡ché de cette denrée agricole en réglementant non seulement son prix de base, mais en coordonnant aussi son transport, son entreposage et ses exportations outre-mer.

En I942,1e Parti conservateur organise une conférence à Port Hope en Ontario afin d'évaluer son programme. À l'époque, le CCF avait atteint un niveau respectable de popularité au sein de la population canadienne en avançant un programme de gauche. Les Conservateurs réalisaient qu'ils devaient ajuster leur programme vers la gauche pour répondre aux désirs de la population sans toutefois rejeter les principes de la libre entreprise (Macquarrie 1992, p. 47). Les propositions présentées à la conférence

étaient nombreuses. On acceptait que le gouvemement intervienne dans les questions

économiques au besoin. Les participants proposaient aussi qu'il y ait une réglementation plus stricte des monopoles. Ils recoÍtmandaient l'établissement de

34 programmes pour prêter main-forte aux agriculteurs. On proposait des négociations en vue d'établir des conventions collectives et une présence syndicale au sein du gouvernement. Bien que ces éléments aient répondu aux désirs du parti de mettre en place un prograürme centriste et même de gauche, il ne négligeait pas de respecter ses traditions capitalistes en reconìmandant de laisser tomber une ligne de conduite protectionniste dans le but d'adopter à sa place une politique qui verrait une intégration plus poussée de l'économie nationale à celle de la Grande-Bretagne et des États-Unis.

Chose certaine, le Parti conservateur, à la clôture de la Conférence de Port Hope, était encore bien ancré dans ses principes conservateurs traditionnels.

Le Canada se souvient de John Diefenbaker comme étant un grand défenseur de

I'autonomie de la nation face aux pressions exercées par les États-Unis en matière de défense. Certes, cela est une caractéristique du conservatisme traditionnel, mais sur le plan économique, le premier ministre démontrait aussi un intérêt à promouvoir ce type de conservatisme. Macquarrie (1992, p.155) a souligné que le discours du trône du Parti progressiste-conservateur en 1957 étølit le produit d'un gouvernement prêt à participer activement au développement économique de la nation. Dans le domaine de

I'agricultwe, il proposait étâblir un programme pour stabiliser les prix agricoles, offrant ainsi aux fermiers des prix plus justes pour leurs denrées. Constatant qu'il y avait des problèmes à régler quant à la mise en marché des produits agricoles, le gouvemement

Diefenbaker promettait d'établir de nouveaux marchés tout en offrant des crédits de caisse aux fermiers qui éprouvaient de la difficulté à mettre en marché leurs récoltes. Le gouvemement voyait aussi la possibilité de créer des marchés additionnels pour l'industrie de la pêche au Canada tout en encourageant une exploitation responsable de

35 cette ressource. Il prévoyait methe sur pied un programme de développement

économique dans les provinces atlantiques et désirait entrer en négociations avec les provinces afin de développer conjointement des projets hydroélectriques partout au pays.

Bien qu'il n'ait jamais été élu premier ministre, le successeur de John

Diefenbaker à la chefferie du Pani progressiste-conservateur, Robert Stanfield

(1967-1974), défendait, lui aussi, des mesures économiques qui nécessitaient une intervention directe du gouvemement pour régler les diffrcultés économiques du jour.

En 1969, lors d'une conférence organisée pou discuter du programme du parti, on recommande au parti d'appuyer l'idée d'un programme national de revenu minimum garanti pour combathe la pauvreté. Même si la proposition n'a pas été acceptée, elle illustre encore une fois des principes de base du conservatisme traditionnel, c'est-à-dire le désir de défendre le bien commun et de protéger les intérêts économiques de la population en général avant ceux des individus. Plus tard, le parti propose une réglementation des prix et des revenus pour combattre l'inflation, autre mesure allant à

I'encontre du libéralisme. Un conservatew de droite aurait plutôt recommandé un laissez-faire économique, laissant l'offre et la demande établir le prix des marchandises et le revenu des travailleurs. Par contre, il ne faut pas croire que les initiatives de

Stanfield étaient acceptées par I'ensemble de son caucus. George Perlin, dans son livre

The Tory Syndrome (1980), démontre que même si Stanfield voulait placer son parti plus à la gauche, la résistance à laquelle il a fait face au sein de la branche plus conservatrice de son parti était très forte.

36 Jeffrey Simpson (1984) a analysé à fond l'administration du premier ministre

progressiste-conservateur Joe Clark (1979-1980) et plus particulièrement son

programme fiscal. Lors de la campagne électorale de 1979 qui le porte au pouvoir, Joe

Clark est dépeint comme un leader politique voulant répondre aux désirs des deux

factions de son parfi, celle de droite et celle à tendance plus centriste. Tout en

promettant de dépenser des centaines de millions de dollars sur une variété de

programmes touchant par exemple à l'exploitation des sables bitumineux en Alberta, la

recherche médicale et la formation de la jeunesse, Clark propose aussi une réduction

d'impôts sw les particuliers, la privatisation de sociétés d'état et une réduction dans le

nombre d'employés ceuvrant au sein de la fonction publique (Simpson 1984, p. 59 et

64). Arrivé au pouvoir, le parti avait la responsabilité de présenter son budget. Ayant

établi coÍrme priorité une réduction du déficit et l'équilibre éventuel du budget, le parti

devait choisir la meilleure façon d'atteindre ses buts. Un conservateur de droite aurait

proposé des compressions importantes dans les dépenses gouvernementales et des

réductions d'impôts et c'est ce que le parti a tenté d'effectuer en offrant une déduction

partielle de l'intérêt payé sur les hypothèques ainsi que sur les taxes foncières (Simpson

1984,p.64). Par contre, le budget était avant tout marqué par une augmentation de taxe

de 0,18$ du gallon des carburants en plus de I'imposition d'une surtaxe de 5%o sur les

profits des corporations (Simpson 1984, p. 19). Pour ce qui est de la privatisation des

sociétés d'état, Joe Clark avait promis de remethe Petro Canada entre les mains

d'intérêts privés, mais il a décidé enfin que le gouvernement avait encore un rôle à jouer au sein de f industrie du pétrole au moyen de cette société d'étât. Le fait qu'une

faction du Parti progressiste-conservateur ait voulu se positionner davantage vers la

37 droite et le remplacement de Joe Clark comme leader après l'élection de 1980 (Simpson

1984, p. 363), démontrent tout de même une certaine insatisfaction du progtamme

économique au sein du parti.

De toutes les administrations progressistes-conservatrices analysées jusqu'à présent, celle de Brian Mulroney (1984-1993) est considérée comme étant la plus proche, sur le plan fiscal, du libéralisme classique. En fait, Ron Dart (1999, p. 28) place

Mulroney dans le même camp que des conservateurs bien connus à l'époque, dont

Margaret Thatcher en Grande-Bretagne et Ronald Reagan aux États-Unis qui défendaient, tous les deux,les principes du libéralisme classique. D'ailleurs, une des plus grandes initiatives de Brian Mulroney a été l'accord du libre-échange conclu avec les États-Unis. Tout accord mettant I'accent sur une réduction des barrières tarifaires qui entravent le libre échange était certes alléchant pour les adhérents de I'idéologie de droite. Même Stephen Harper, reconnu pour son libéralisme économique, appuyait cette initiative du premier ministre. (Johnson 2006, p. 32). Mulroney était aussi bien connu poìr sa position fiscale de droite qui préconisait une réduction des dépenses gouvernementales, un contrôle du déficit, une meilleure productivité et une ouverture aux investissements étrangers (Johnson 2006, p.2l). Les années au pouvoir de

Mulroney sont aussi marquées entre autres par des compressions budgétaires de certaines sociétés d'état telles que la Société Radio-Canada et Via Rail. Par contre, certaines politiques fiscales de Mulroney ont aliéné les conservateurs de la droite au sein de son parti et du mouvement de la droite en général. L'aliénation se manifeste davantage lors de I'imposition de la taxe sur les produits et services en 1991, le refus de réformer le programme d'assurance-chômage, vu par ceux de la droite corrtme étant un

38 prograÍtme qui subventionnait les ouvriers saisonniers, et le maintien de I'indexation des pensions de vieillesse à l'augmentation du coût de la vie, malgré la promesse de l'éliminer afin de réduire le déficit et la dette qui ne cessaient d'augmenter (Johnson

2006,p.31-32 et 50). Malgré la position plus à la droite que celle de ses prédécesseurs, la politique fiscale de Brian Mulroney n'était pas assez conservatrice pour empêcher la formation du Parti réformiste du Canada en 1987.

Il est à souligner que les prograÍrmes fiscaux des gouvernements progressistes- conservateurs et de leurs prédécesseurs n'expliquent pas, à eux seuls, le bouleversement politique occasionné en 1987 lors de la fondation du Parti réformiste. Il est nécessaire d'analyser aussi la position de ces administrations face à de nombreuses questions sociales pour cerner les différences fondamentales entre le Parti progressiste- conservateur et le Parti réforrriste, et par extensior¡ le Parti conservateur du Canada actuel.

4. Les politiques sociales du parti

Le concept conservateur traditionnel du bien cornmun (c'est-à-dire que les intérêts et les besoins de la communauté ou de la nation doivent primer sw ceux de

I'individu) a historiquement poussé les leaders du Parti progressiste-conservateur et leurs prédécesseurs à proposer et à methe sur pied des initiatives pour répondre aux besoins les plus pressants de la population. Il était alors tout à fait naturel que l'État intervienne dans les questions sociales du jour s'il constatait qu'une partie de la population ne jouissait pas des mêmes avantages sociaux de base que les autres. Ce concept est en opposition à une idéologie plus de droite qui met l'accent avant tout sur

39 les droits et les biens de I'individu et qui n'admet qu'un rôle très limité du

gouvernement dans les questions d'ordre social.

Cette tradition conservatrice de répondre aux besoins fondamentaux de la

population s'est manifestée tout au long de l'histoire de la nation. Le New Deal de

R.B. Bennett, proposé pour alléger les difficultés ressenties par la population

canadienne suite au Krach de 1929, n'étatt pas seulement un ensemble de mesures

économiques, mais il comprenait aussi des éléments d'une politique sociale. Parmi ses

initiatives, on avançait I'idée d'un régime d'assurance contre la maladie et les accidents

et on proposait d'améliorer les pensions de vieillesse.

Cette tendance à vouloir apporter des réformes aux politiques sociales est

réitérée lors de la conférence du parti à Port Hope en 1942, organisée pour freiner la

popularité grandissante du cCF (Macquarrie 1992,p.27). Bien que les réformes

économiques proposées sont nombreuses, les recommandations faites sur le plan social,

exigeant une intervention directe et marquée du gouvernement, étaient toutes aussi

importantes. Les délégués préconisaient l'établissement d'habitations à loyer modéré,

un appui monétaire du gouvernement fédéral en matière d'éducation et un système

d'assurance pour les gens à la retraite. De plus, on recommandait l'augmentation des

sommes remises dans le cadre du progr¿rrnme fédéral de pensions de vieillesse. On

suggérait aussi l'établissement de sysGmes d'assistance médicale et d'allocations aux

mères de familles. Quoique les propositions n'aient pas tous été adoptées et que

certaines d'entre elles n'aient été implantées que plusieurs années plus tard (Macquanie

1992, p.50), le programme proposé lors de la conference illustrait clairement la tradition conservatrice de subvenir aux besoins des moins nantis et de se préoccuper du

40 bien commun. Ce programme offre un contraste frappant avec une idéologie plus à la droite.

La position de John Diefenbaker par rapport aux principes de base du conservatisme traditionnel, du moins sur le plan social, étzttplus controversée. Dans le contexte canadien, on peut affrrmer que le conservatisme qui repose sur le bien comfitun, le respect de la communauté et de la nation, la coopération et la tradition, reconnait le rôle historique important qu'a joué la francophonie dans l'édification de la nation canadienne et par conséquent il lui réserve un statut particulier. Par contre,

Diefenbaker soutenait plutôt le concept d'une nation sans tenir compte de la race ou de la religion (Grant 1978,p.21) ce qui, évidemment, risquait d'aliéner les Canadiens- français et tous les Canadiens préoccupés par l'unité nationale (Perlin 1980, p. 79).

Malgré les difhcultés à gagner l'appui de la population canadienne-française,

Diefenbaker réussit en tant que premier ministre à promouvoir un programme social progressiste qui répondait aux besoins des moins fortunés. Comme ses prédécesseurs, il propose des augmentations aux pensions de vieillesse. Il recommande un transfert de fonds aux provinces poru que celles-ci puissent augmenter leurs allocations aux gens souffrant d'invalidités et il propose une augmentation aux allocations offertes aux anciens combattants. Enfin, les réformes apportées par le gouvemement Diefenbaker mènent à un développement accru de l'État-providence (Perlin 1980, p.l83). À noter aussi durant son administration sont l'adoption de la première Déclaration canadienne des droits garantissant aux citoyens certains droits universels ainsi que I'adoption d'une loi accordant le droit de vote aux Premières nations, un pas vers la reconnaissance de leurs droits fondamentaux.

4l Le successeur de John Diefenbaker à la chefferie du Parti progressiste- conservateur, Robert Stanfield, démontre à plusieurs reprises sa volonté de promouvoir un programme social soutenant la tradition conservatrice au Canada. Lors de la convention du parti en 1967 où il est choisi pour remplacer Diefenbaker, il se prononce en faveur de l'universalité des programmes sociaux, contrairement aux autres candidats

à la chefferie. Devenu leader de l'opposition, il appuie le projet de loi des Libéraux portant sur l'augmentation des allocations familiales et il vote en faveur de I'abolition de la peine capitale en 1973 (la majorité de son caucus a voté contre).

Ce qui a distingué Robert Stanfield de ses prédécesseurs est son appui catégorique du fait français au Canada. Stanfield appuie la Loi sur les langues officielles malgré une certaine opposition au sein de son parti, car il croit qu'il est essentiel de maintenir la confiance des Canadiens-français en la fédération canadienne

(Perlin 1980, p. 114). Stânfield donne aussi son appui à une résolution du Parti libérat qui veut implanter le bilinguisme au sein de la fonction publique fédérale. Il refuse même la nomination d'un candidat conservateur du Nouveau-Brunswick à cause de son opposition à la Loi sur les langues officielles. L'appui de Robert Stanfield par rapport à l'uriversalité des programmes sociaux, aux allocations familiales, au fait français et à

I'abolition de la peine capitale fait partie d'une politique sociale qui sera remise en question plus tard par le Parti réformiste.

Joe Clark, comme Robert Stanfield, a mis beaucoup de temps à cultiver les relations entre le Parti progressiste-conservateur et la francophonie canadienne.

Reconnaissant lui aussi l'import¿nce du fait français au Canada et les aspirations des francophones, Clark s'efforce de rendre son parti plus ouvert à leurs idées (Simpson

42 1984,p.364). Certes, il n'apas pu, dans une période de neuf mois au pouvoir, développer un prograûrme social très détaillé, par conhe le fait qu'il ait appris le français, qu'il ait accepté la recommandation du rapport Chouinard pour l'embauche de contrôleurs de la navigation aérienne bilingues, qu'il ait nommé un Québécois au poste de greffier du Conseil privé et qu'il ait exigé que ses ministres embauchent tous au moins un employé francophone au sein de leur cabinet sont un témoignage de

I'engagement du gouvemement fédéral conservateur à protéger la langue française au

Canada (Simpson 1984, p. 322).

À purt son appui à la francophonie, Joe Clark est aussi connu pour son ouverture sur les questions touchant les groupes ethniques ainsi que les femmes (Simpson 1984, p.364), position qui sera remise en question par le mouvement de droite plus radical des années 80.

Pow ce qui est de Brian Mulroney, même si sur le plan économique il se situait plutôt à la droite, sur le plan social son programme reposait en grande partie sur des

éléments du conservatisme traditionnel depuis longtemps étabtis dans la structure sociale canadienne et appuyés, à tour de rôle, par plusieurs de ses prédécesseurs. Pour ce qui est de la reconnaissance de la francophonie, Mulroney appuie la notion de société distincte pour le Québec afin de le ramener à I'intérieur de la famille constitutionnelle. De plus, en 1987, son gouvemement présente un projet de loi amendant la Loi sur les langues officielles en y ajoutant une section pour promouvoir l'utilisation du français et de l'anglais partout au pays. L'accord de Charlottetown, pour sa part, comprenait entre autres une charte sociale qui enchâssait un régime dé soins de santé, des services de bien-être social et la protection de l'environnement ainsi qu'une

43 Clause Canada soulignant les valews fondamentales canadiennes telles que la diversité,

l'égalitarisme et la nature distincte de la société québécoise. Bien que les accords du lac

Meech et de Charlottetown n'aient jamais été adoptés, nombreux ont été les critiques du

mouvement de droite représenté à l'époque par le Parti réformiste. En fait, comme l'a

démontré William Johnson dans son ouvrage Stephen Harper and the Future of Canada

(2006, p. 81-85), Stephen Harper lui-même exprimait une opposition vive à

l'amendement proposé à la Loi sur les langues officielles et au statut spécial réservé au

Québec dans le cadre de l'accord du lac Meech, message qui a résonné clairement lors

de la fondation du Parti réformiste du Canada en 1987.

Ce survol historique du Parti progressiste-conservateur du Canada démontre

bien que ce parti politique était imprégné du conservatisme britannique traditionnel.

Tout au long de son histoire, ce parti a été dirigé par des leaders qui, tout en adoptant

des principes économiques capitalistes, n'ont pas hésité d'utiliser les pouvoirs de l'État

cortme moyen d'intervention pour corriger les excès du marché et pour assurer la

primauté du bien commun. Cette conviction fondamentale que l'Etatpeut jouer un rôle

actif et positif au sein de la vie économique et sociale de la nation a encouragé le parti à

proposer des programmes qui, à maintes reprises, lui ont donné un caractère centriste.

L'établissement et la promotion de sociétés d'état sous Borden et Benneti,le New Deal

de Bennett, l'appui de l'État-providence et le désir de stanfield, de clark et de

Mulroney de répondre aux aspirations de la francophonie canadienne sont tous des

exemples de la nature centriste de ce parti. Par contre, il est à souligner qu'à certains

moments le parti a proposé des mesures se rapprochant du libéralisme classique et on peut affirmer que les membres des caucus conservateurs n'ont pas toujours appuyé

44 tmanimement les positions de leurs chefs. Malgré ces faits, plusieurs auteurs dont

Grant, Dart, Macqua¡rie et Perlin sont tous d'accord pour dire que le parti était majoritairement influencé par ce qu'on appelle le torysme rouge.

L'historique du Parti progressiste-conservateur démontre que son programme

économique se transforme lors de l'arrivée au pouvoir de Brian Mulroney en 1984. Le désir de Mulroney de conclure une entente de libre-échange avec les États-Unis et plus tard avec le Mexique, les coupures au sein de ceriaines sociétés d'état et I'ouverture aux investissements étrangers ressemblaient davantage à des meswes économiques défendues par le libéralisme classique. Ceci aurait dû, en théorie, lui fournir un appui auprès des membres les plus conservateurs de son parti et de la droite en général.

D'après Johnson (2006,p.32) cela semble avoir été le cas. Par contre, il ne faut pas oublier que c'est durant le premier mandat de Brian Mulroney qu'a été formé le Parti réformiste du Canada et que ce parti a proposé un programme économique ancré dans le libéralisme et un programme social très conservateur. On peut conclwe alors que le

Parti progressiste-conservateur n'avait pas réussi à répondre assez bien ou assez rapidement aux attentes des conservateurs de la droite.

Le prochain chapitre explore à fond la création du Parti réformiste du Canada et son successeur, I'Alliance canadienne. Indignés par un Parti progressiste-conservateur qui à leurs yeux avait trahi les principes du libéralisme classique, leurs adhérents ont

établi un programme économique et social dont cerüains éléments survivent encore dans le programme du Parti conservatew du Canada actuel.

45 Chapitre IV - Le Parti réformiste du Canada et I'Alliance canadienne

1. Preston Manning et la fondation du Parti réformiste

Du 29 au 31 mai 1987 a eu lieu à Vancouver une conférence,Ia Western

Assembly on Canada's Economic and Political Future, organisée par des académiciens, des chercheurs et des militants frustrés par le système politique canadien qui, d'après eux, ignorait depuis trop longtemps les aspirations politiques et économiques de I'Ouest du pays. Réunissant quelques centaines de délégués, surtout des provinces de I'Ouest, la conference s'était donnée deux buts majews. Le premier était de développer un programme axé sur des changements qui pourraient satisfaire les désirs de I'Ouest et le detxième était de choisir le meilleur moyen de faire véhiculer le programme. À Ia fin de la conférence, les délégués ont proposé un prograriìme qui englobait la réforme du

Sénat, la protection des droits économiques individuels, l'établissement d'un marché commun dans l'Ouest du pays et l'utilisation de référendums dans le processus décisionnel politique. De plus, les délégués ont décidé d'organiser une conférence à

Winnipeg à la fin octobre de la même année afin de fonder officiellement un nouveau parti politique national qui ferait la promotion du programme lors des prochaines

élections fédérales. Le parti allait prendre le nom de Parti réformiste du Canada.

L'un des principaux organisateurs de la conférence à Vancouver et fondateu du

Pa¡ti réformiste était Preston Manning, qui allait diriger ce mouvement de la droite politique pendant une douzaine d'années. Né à Edmonton en 1942,Preston Manning avut été fortement influencé par la pensée politique de son père Ernest C. Manning, chef du Crédit social en Alberta et premier ministre provincial de 1943 à 1968, et aussi par william Aberhart, premier leader du parti et évangélisateur bien connu.

46 Le Crédit social, fondé en 7932 par Aberhart en réaction à la pauvreté engendrée par la Grande Dépression et à la perception que la richesse nationale était concentrée dans I'Est du pays, se voulait, à ses débuts, un mouvement populiste qui promettait de remettre entre les mains du peuple le pouvoir politique usurpé par l'élite qui ne représentait plus ses intérêts. En théorie, ce mouvement populiste devait consulter directement et fréquemment le peuple par rapport aux questions du jour et par conséquent, la volonté de la masse serait alors plus importante que les convictions personnelles des politiciens élus et du programme du parti. De fait, durant ses premières années au pouvoir, Aberhart utilisait des sondages et des votes directs auprès des membres du parti lors de ralliements. Par contre, ces techniques étaient perçues, par certains, comme n'étant qu'une façon de faire croire aux membres du parti qu'ils détenaient le pouvoir, car malgré ces consultations le parti devenait de plus en plus autoritaire sous le leadership de Aberhart et de son successeur Emest Manning (Dobbin

1992, p.27). Quoi qu'il en soit, ces techniques populistes de consultation auprès de la population seraient utilisées plus tard par Preston Manning lorsqu'il était à la tête du

Parti réformiste, bien que ce dernier ait eté accusé, lui aussi, de contrôler de façon plutôt autoritaire le programme de son parti et d'y limiter I'influence populiste

(Flanagan 1995, p. 24-27).

Un autre élément qui a influencé la pensée politique de Preston Manning était son fondamentalisme religieux, mouvement qui était devenu très populaire en Alberta grâce aux sennons d'Aberhart à partir des années 20. De fait, Ernest Manning avait été un étudiant àla Prophetíc Bible Institute d'Aberhart, devenant plus tard son protégé. Ce fondamentalisme, cette interprétation littérale de la Bible par la famille Manning,

47 influencerait la position qu'adopterait plus tard Preston Manning face à certaines questions sociales, entre autres l'avortement, les mariages gais et le rôle de la femme dans la société. La philosophie religieuse adoptée par les Manning reposait aussi sur l'idée que f individu était lui-même responsable de son bien-être et qu'il devait être prêt

à subvenir à ses propres besoins au lieu de se fier à!'Etat. De plus, les convictions religieuses professées par les Manning reposaient sur la participation politique active de la part de la population qui livre et répand le message. Cette conviction explique en partie la carrière politique de Preston Manning (Dobbin 1992, p. 19-22).

, I est impossible de nier l'influence du conservatisme aux États-Unis sur la pensée politique de Preston Manning. Historiquement, des mouvements politiques variés en Alberta ont été marqués par les institutions et des initiatives politiques américaines. Les Albertains voyaient ces institutions et ces initiatives comme étant plus aptes à résoudre les problèmes entre le gouvernement central et les autorités régionales

(Dobbin 1992,p.24). Les concepts du Sénat élu, effrcace et égal, l'utilisation des référendums, les votes libres en Chambre et le rappel de politiciens, éléments communs en politique américaine, ne faisaient pas partie de la tradition parlementaire britannique

(Simpson 1993 , p . I 3 1 ). Le bouleversement politique vers la droite aux États-Unis au début des années 80 allait marquer, lui aussi, le programme de Preston Manning et du

Parti réformiste. Des réductions d'impôts, un gouvernement fédéral moins présent dans la vie quotidienne des gens, des budgets équilibrés et un retour à des valeurs morales traditionnelles se trouvaient parmi les éléments à la base de la pensée réformiste

(Simpson 1993,p.129).

48 Dans son ouvrage Political Realignment, A Chqllenge to Thoughtful Canadians

(1g67),Ernest Manning appuyait l'idée d'une réforme au sein des partis politiques canadiens afin d'établir un nouveau parti de la droite qui proposerait un programme socialement plus conservateur. Cette théorie de conservatisme social, développée à l'aide de son fils Preston, avançait l'idée que les principes du capitalisme et le secteur privé pouvaient ensemble résoudre des problèmes sociatx. De fait, ils croyaient que l'entraide entre les individus et les groupes privés seraient un moyen plus efficace d'atteindre certains buts collectifs que se serait donnés la société (Sharpe et Braid 1992, p. 66-67). Cette entraide réduirait tout naturellement la responsabilité fiscale et le rôle du gouvernement dans les questions sociales. Ce que Preston et Emest Manning proposaient alors était wr parti qui se positionnerait nettement à la droite en adoptant les principes de l'individualisme, du capitalisme, d'un secteur privé responsable, d'une influence gouvemementale limitée et de la responsabilité fiscale chez les gouvemements (Manning1967,p.6a-67). Ajoutés au maintien des valeurs familiales traditionnelles, ces éléments allaient résonner à nouveau en octobre 1987 lors de la fondation du Parti réformiste.

À cette pensée politique de Preston Manning, développée durant quelques décennies, s'ajoutait un sentiment que I'Ouest du pays avait trop souvent subi des injustices aux mains de l'élite politique représentant I'Ontario et le Québec, ce qui l'empêchait de devenir partenaire égal au sein de la confédération canadienne. Que ce soit la résistance des Métis sous Louis Riel dans la colonie de la Rivière Rouge en

1869-70,les efforts de Haultain à accorder aux Territoires du nord-ouest le statut de province au début du 20" siècle, ou le mouvement progressiste des années 20 qui

49 s'opposait aux tarifs douaniers qui protégeaient l'industrie canadienne du centre du pays tout en augmentant les prix de la machinerie agricole, tous ces éléments étaient perçus comme des injustices causées par des leaders politiques nationaux voulant contrôler et subjuguer l'Ouest canadien. Des exemples plus récents tels la Commission sw le bilinguisme et le biculturalisme qui renforçait le concept d'un Canada fondé par deux nations et le Programme énergétique national qui contrôlait le prix domestique du pétrole ont, eux aussi, ajouté au sentiment d'aliénation ressenti par les provinces de l'Ouest (N4anning 1992, p. 1 I 8-120).

Bien que ces nombreux exemples aient pu justifier en quelque sorte l'établissement d'un noì.rveau parti politique qui voulait défendre les intérêts de I'Ouest et promouvoir un programme plus conservateur, c'est en bonne partie le programme du premier ministre progressiste-conservateur Brian Mulroney qui a poussé Manning et ses adhérents à vouloir former un nouveau parti. Entre autres, le gouvernement Mulroney n'avaitpas immédiatement aboli le Programme énergétique national imposé par son prédécesseur. Mulroney était aussi accusé de ne pas suffrsamment vouloir réduire la dette et contrôler les dépenses gouvernementales. I1 ne s'apprêtait ni à réformer le Sénat ni à réduire les barrières tarifaires entre provinces. De plus, Mulroney appuyait toujours

I'universalité des progranÌmes sociaux et la politique linguistique du gouvernement libéral précédent. L'événement qui a véritablement confirmé le sentiment que le gouvernement Mulroney était plutôt intéressé à défendre les intérêts du centre du

Canada que ceux de I'Ouest a été la décision d'accorder un contrat pour I'entretien d'avions CF-l8 à la compagnie Canadair de Montréal au lieu de la compagnie Bristol à

V/irinipeg, même si cette dernière avait soumis wre meilleure offre et qu'elle était

50 reconnue pour avoir plus d'expertise dans le domaine (Dobbin 1992, p.91 et Manning

1992,p.126).En conséquence de tous ces événements, le Parti réformiste est officiellement fondé à Winnipeg environ cinq mois plus tard.

L'assemblée à Winnipeg a aidé à définir le programme que le Parti réformiste allait suivre pendant plusiews années. L'ordre du jour comprenait l'adoption d'une série de principes généraux qui reflétaient les idées populistes et conservatrices de

Preston Manning, telles que la consultation de la population par les élus, la responsabilité des politiciens à se soumettre à la volonté du peuple avant celle d'un parti politique, et la primauté du système de libre entreprise et de propriété privée coÍrme éléments de base de la production économique (Manning 1992,p.360-361). De fait, Manning a, lui-même, rédigé les principes de base du nouveau parti acceptés par l'assemblée, ce qui a démontré son désir de contrôler la direction du parti même s'il le concevait comme étant un mouvement populiste (Flanagan 1995,p.24). L'assemblée à

Winnipeg a aussi permis au mouvement réformiste d'accueillir un nouveau-venu dans ses rangs qui allait avoir une influence de plus en plus marquée sur la scène politique dans les années à venir. Stephen Harper, ancien partisan désenchanté du Parti progressiste-conservateur et étudiant en économie à l'Université de Calgary, a été invité par Preston Manning à présenter un discours à I'assemblée. De nature économique et très conservatrice, son discours a exposé une série d'événements historiques qui, d'après lui, avaient poussé l'Ouest du pays dans une situation économique désavantageuse par rapport au centre du pays, tels que la Politique nationale de John A.

Macdonald et l'administration des territoires de l'Ouest par le gouvernement fédéral.

Son discours critiquait aussi le traitement spéciøl accordé au Québec au cours des

51 années et la politique officielle du bilinguisme qui, disait-il, avait empêché les gens de

I'Ouest d'accéder aux positions de pouvoir à Ottawa. De plus, le discours de Harper dénonçait I'État-providence en le caractérisant de fardeau pour les contribuables.

D'après Flanagan (1995, p. 55), ce discours montrait déjà, à l'époque, le désir de

Harper d'établir un parti politique conseryateur davantage préoccupé des questions

économiques que de nature populiste avancé par Preston Manning. D'ailleurs, les propositions adoptées par I'assemblée démontraient effectivement une tendance conservatrice parmi les délégués. Le désir d'équilibrer le budget en trois ans, d'éliminer les subventions aux entreprises, de développer une politique d'immigration qui mettait l'accent sur les besoins économiques du Canada au lieu de la réunification des familles, entre autres, donnait I'impression que le Parti réformiste se positionnait, dès ses débuts,

à devenir un parti nettement de la droite politique. Une analyse plus approfondie de ce programme démontre jusqu'à quel point le populisme et le conservatisme de Preston

Manning et de Stephen Harper ont défini le programme de droite du Parti réformiste.

2. Le programme du parti

Afin de mieux comprendre la droite politique incamée dans le Parti réformiste et de comparer son programme à celui du Parti conservateur du Canada actuel, il est nécessaire d'étudier à fond ses politiques dans les domaines retenus pour les f,ins de cette présente étude.

52 i. La réforme des institutions politiques

La réforme des institutions politiques a toujours été la pierre angulaire du programme réformiste. Remettre le pouvoir décisionnel entre les mains du peuple était le reflet d'une philosophie populiste. Les réformes proposées telles que la réforme du

Sénat, l'utilisation des référendums, le rappel des députés, les votes libres en Chambre et des élections à date fixe éøient considérées coÍtme des éléments se rattachant à un programme plus conservateur ou de droite, car elles visaient à diminuer le pouvoir et

I'influence du gouvernement central et de l'élite sur les affaires de la nation' Le message du Parti réformiste visait surtout les gens de l'Ouest canadien qui, depuis longtemps, se sentaient tenus à l'écartdu pouvoir politique (Simpson 1993, p.118-119).

Parmi les réformes démocratiques, celle du Sénat a toujours occupé une place d'importance dans le programme des réformistes. Ce que le parti proposait, au lieu de maintenir le statut quo, était d'établir un Sénat triple E. Les sénateurs seraient élus par suffrage universel à I'intérieur de leur province, le nombre de sénateurs représentant chaque province serait égat (le chiffre le plus souvent suggéré étant six) et on

confererait au Sénat certains pouvoirs décisionnels pottr qu'il devienne plus efficace'Le parti, lors de la campagne électorale de 1988, avait proposé que les sénateurs soient élus

pour un terme de six ans lors d'élections à date fixe. Pour maintenir leur indépendance,

les sénatews ne pourraient pas accepter des postes au sein du cabinet. Le Sénat se

verrait accorder des pouvoirs pour sauvegarder les intérêts provinciaux et régionaux,

mais n'aurait pas le droit de défaire le gouvernement. Il conserverait certains de ses

pouvoirs fiscaux et aurait la responsabilité de ratifier des traités ainsi que des

53 nominations à la Cour suprême, à des commissions officielles et au sein des commissions fedérales (Manning 1992,p.160). Basées sur le modèle américain, de telles réformes au Sénat auraient, d'après les réformistes, changé la perception que la population avait de cette institution, c'est-à-dire celle d'un outil utilisé par le gouvernement fédéral pour récompenser ses partisans qui protégeaient avant tout les intérêts de l'Ontario et du Québec, vu le nombre élevé de sénateurs provenant de ces régions. L'idée d'un Sénat réformé était évidemment alléchante pour les provinces de l'Ouest qui voyaient, dans cette initiative, une façon de bloquer des décisions gouvernementales impopulaires telles que I'imposition de la TPS et le Programme

énergétique national de Pierre Trudeau (Dobbin 1992,p.220) et d'augmenter leur pouvoir politique face à l'Ontario et au Québec. Un tel projet avait à surmonter certains obstacles. Premièrement, il était peu probable que l'Ontario et le Québec voudraient réduire leur nombre de sénateurs, ce qui diminuerait leur pouvoir sur la scène politique

(Sharpe et Braid 1992,p.171). n était aussi à se demander jusqu'à quel point les réformes, elles-mêmes, étaient démocratiques, car elles accordaient le même nombre de sénateurs aux provinces dont la population était nettement inférieure aux plus populeuses (Dobbin 1992, p. 220).

L'utilisation des référendums comptait aussi parmi les réformes démocratiques proposées par le parti. Ayant toujours comme but la diminution du pouvoir du gouvemement central, cette réforme offrait aussi, d'après Preston Manning

(1992, p. 32a) K [...J greater opportunity for more direct ínput by the people of Canada

ìnto major federal government decisions affecting their interests and their future >.

Manning croyait aussi que la population canadienne avait le droit de se prononcer sur

54 des questions morales telles que la peine capitale et I'avortement et sur des questions touchant la structure sociale canadienne de base comme la langue et l'immigration.

Bien que Sharpe et Braid (1992, p. 175) aient affrrmé que l'idée de référendums semble avoir été de plus en plus acceptable aux yeux de l'électorat canadien après l'échec de l'accord du lac Meech, le Québec, d'après eux, n'aurait probablement jamais accepté l'idée, ses leaders ayant continuellement voué qu'ils n'accepteraient que les résultats de référendums québécois pour des questions touchant leurs intérêts. Potr sa part, Dobbin

(1992, p.237) trouvait I'idée de Manning trop générale, car il ne mentionnait pas d'autres sujets qui pouvaient être considérés comme faisant partie de la structure sociale de base au Canada, par exemple I'universalité des programme sociaux et la pauvreté.

Par ailleurs, Laycock (2002, p. 106-109) a questionné la nature démocratique d'une telle réforme, jugeant qu'elle risquait de diminuer la discussion et les débats entourant les questions référendaires, forçant ainsi les citoyens à faire des choix simplistes basés sur des questions préparées par les leaders des partis. De plus, il a suggéré (lgg4, p.zal) que les électeurs, à la longue, pourraient utiliser les référendums pour punir un parti politique au lieu de considérer les conséquences de la question posée.

Un autre moyen par lequel le Parti réformiste voulait limiter I'influence des

élites à Ottawa était de permettre le rappel des députés. Controversée dès sa conception, cette réforme proposait qu'un député devait renoncer à son siège à la Chambre des cofltmunes si un nombre sufFtsant d'électeurs dans sa circonscription l'exigeaient par

I'entremise d'une pétition, déclenchant ainsi tme élection partielle. Preston Manning n'était pas, lui-même, convaincu de I'effrcacité d'une telle réforme. Il serait trop facile de mettre en marche le processus de rappel d'un député, et par conséquent cela

55 entraînerait un réel bourbier politique à moins qu'un pourcentage très élevé des

électeurs soit requis pour appuyer la pétition (Manning 1992, p.236). Manning se souvenait bien de l'expérience de William Aberhart, premier ministre albertain dont le parti Crédit social avait passé une loi permettant le rappel des députés. Aberhart avait, lui-même, été la cible d'une telle pétition. La menace d'avoir à renoncer à son siège ne s'était éteinte qu'une fois la loi abrogée (Sharpe et Braid 1992,p.176). Quoi qu'il en soit, Manning a évité de développer une politique spécifique à cet égard jusqu'à ce que les membres de son parti I'aient exigé. Malgré cela, Manning s'est assuré que toute pétition de rappel nécessiterait l'appui de 50% des électeurs éligibles, rendant ainsi le rappel pratiquement impossible (Flanagan 1995, p.26).

Le droit des députés d'exercer des votes libres à la Chambre des communes était une autre façon que le Parti réformiste voulait arracher le pouvoir à l'élite représentée à cette instance par les partis politiques et leur habitude d'imposer une discipline rigide aux membres de leur caucus. Un concept populaire en Alberta, où la population se sentait trahie par Brian Mulroney et ses députés progressistes-conservateurs qui avaient imposé la TPS contre sa volonté, les votes libres étaient vus cofirme un moyen de redonner une voix aux gens de I'Ouest et de diminuer les chances que les partis politiques ne respectent pas leurs promesses électorales. Basée, coÍrme les auhes réformes démocratiques proposées, sur le modèle américain où les membres du

Congrès sont libres de voter selon leur propre gré, cette initiative obligeait les députés à se plier avant tout à la volonté de leurs électeurs et non à celle du parti. Par contre, même si c'est Manning, lui-même, qui avait lancé cette idée au sein du parti, il réalisait que le système politique canadien, où les branches exécutive et législative ne sont pas

56 séparées cornme aux États-Unis, aurait de la difficulté à s'adapter à une telle initiative, car le parti pourrait trop facilement perdre le contrôle de ses membres et serait par conséquent incapable de faire adopter son programme. Pour cette raison, Manning a décidé, au début des années 90, de permettre des votes libres et ouverts au sein de son caucus; par contre une fois arrivés en Chambre, les députés auraient l'obligation de suivre la ligne directrice du parti (Dobbin 1992,p.228-230 et Sharpe et Braid 1992, p. t77-178).

Enfin, le Parti réformiste proposait aussi un changement selon lequel les

élections fédérales seraient tenues à une date fixe, chaque quatre ans comme aux

États-Uois. Vue comme étant moins radicale que les autres réformes (Dobbin 1992,p.

227), ce changement enlèverait le droit au gouvernement central de déclencher des

élcctions quand il estimait que son niveau de popularité étãit assez élevé pour lui garantir la victoire.

Les nombreuses réformes aux institutions politiques annoncées par le Parti réformiste ne représentaient qu'un volet de son programme qui serait repris plus tard par I'Alliance canadienne et dans une certaine mesure par le Parti conservateur du

Canada actuel. Detx autres volets, ceux de la fiscalité et de la politique sociale démontrent, eux aussi, jusqu'à quel point le parti était prêt à promouvoi¡ un programme conservateur de droite qui risquait de bouleverser la scène politique nationale.

ii La fiscalité

Sur le plan de la fiscalité, c'est-à-dire des impôts et des dépenses gouvernementales, le Parti réformiste a défendu, tout au long de son histoire, les

57 principes économiques conservateurs de réductions d'impôts et des dépenses du gouvemement central afin de stimuler la productivité économique et de diminuer

I'influence du gouvernement dans la vie quotidienne des gens. De fait, Layco ck (2002, p. 18) s'est basé sur des statistiques tirées de l'élection générale en 2000 pour démontrer que les principes du parti et de son successeur I'Alliance canadienne étaient clairement appuyés par des gens qui se disaient des conservateurs fiscaux.

Le plan fiscal de Preston Manning et du Parti réformiste était influencé par le conservatisme de Ronald Reagan au* États-Unis au début des années 80. Simpson

(1993,p.129) a souligné que Manning, comme Reagan, se plaignait de l'omniprésence du gouvernement central et des impôts élevés et que par conséquent il fallait à tout prix réduire ces derniers en limitant les dépenses fédérales afin d'équilibrer le budget.

L'influence de Stephen Harper dans le développement d'un programme économique conservateur semble aussi avoir été importante. Harper avait prononcé un discours avançant des idées économiques conservatrices à l'assemblée générale à Winnipeg où le parti avait pris naissance en 1987. D'ailleurs, Harper, qui occupait plus d'une position au sein du Parti réformiste et qui était un membre du cercle intérieur à Preston

Manning pendant bon nombre d'années, était caractérisé par des auteurs tels que

Flanagan (1995, p. 60), Laycock (2002, p. 181) et Johnson (2006,p.212) comme étant plutôt un conservateur fiscal qui préférait voir le parti se concentrer sur des questions

économiques que sur des réformes démocratiques ou sur des questions sociales.

Bien que le programme fiscal du Parti réformiste ait été modifié de temps à autre, surtout durant les campagnes électorales, il est possible d'en retirer des éléments illustrant sa nature conservatrice. Convaincu que le fardeau fiscal des contribuables

58 devait être allégé, le Parti réformiste proposait une réforme du système de taxation, car comme I'avait affrrmé Preston Manning, lui-même, lors de son discours au Empire

Club of Canada en mai 1997, (( [...J a dollar left in your pocket - the pocket of a consumer to spend or invest in a business - is more productive in terms ofjob creqtion than that dollar in the hands of afederal bureøucrat. Ð Lcette fin, le parti a avancé l'idée d'un système d'imposition à tatx unique qui serait plus simple et transparent.

Défendu comme metLant tous les Canadiens sur un pied d'égalité, ce système aurait diminué le taux d'imposition payé par la plupart des citoyens, y inclut les plus riches

(Simpson 1993,p.129).

Un deuxième point plus contentieux était la possibilité d'éliminer la taxe sur les produits et services imposée par le gouvemement Mulroney et mal acceptée à l'échelle du pays. L'élimination d'une taxe aussi visible aurait été appuyée auprès de l'électorat, mais Manning s'est rapidement rendu compte qu'il ne serait pas facile de remplacer les fortes sonìmes que rapporûait la TPS aux coffres du gouvemement. En 1992, il a changé sa position et il annoncé qu'il maintiendrait la TPS afin de réduire le déficit et la dette

(Dobbin 1992,p.206) bien qu'il ait proposé, lors de la campagne électorale de 1993, de l'éliminer graduellement une fois que le budget serait équilibré.

D'autres réductions annoncées par le parti incluaient, entre autres, une augmentation de 1500$ du crédit de base personnel pour fin d'impôts, une augmentation de 2500$ du montant pour le conjoint, une réduction de 50%o de I'impôt su les gains en capital, l'élimination d'une surtaxe de 3Yo visant les contribuables à revenu élevé, et une réduction de 28%o des primes que devaient débourser les employeurs dans le cadre du programme d'assutance-chômage.

59 Non seulement le Parti réformiste voulait-il réduire la charge fiscale des contribuables mais il désirait aussi éliminer le défrcit et contrôler la dette, jugeant qu'un trop grand pourcentage des revenus gouvernementaux étaient utilisés pour payer les intérêts sur la dette (Mannin g I992,p. 339). Lors de la campagne électorale de

1993,11avait proposé d'éliminer le déficit en 3 ans, message répété en 1996.

Un gouvernement qui promet de diminuer la charge fiscale des citoyens tout en

éliminant le déficit et en contrôlant la dette nationale doit évidemment réduire ses dépenses. De façon générale, le Parti réfonniste proposait avant tout une décentralisation majeure du gouvernement, identifiant clairement les domaines de compétence réservés aux provinces et ceux réservés au gouvernement central. Le gouvernement fédéral continuerait à transférer, du moins à court terme, des sommes aux provinces pour les aider à administrer certains programmes, mais la responsabilité de les gérer reviendrait aux provinces, réduisant de beaucoup les coûts administratifs du gouvernement à Ottawa (Manning 1992,p.343). De plus, afin de viwe selon ses moyens, le gouvernement fédéral n'aurait pas le choix que d'éliminer un certain nombre de ministères et de programmes et surtout les subventions distribuées aux groupes d'intérêts spéciaux, aux corporations et aux sociétés d'état (Manning 1992, p. 341). Le gouvernement central finirait par limiter ses responsabilités à une dizaine de champs de compétence, soit la défense, les affaires étrangères, la politique monétaire, la réglementation des institutions financières, 1'administration du code criminel, l'établissement de norrnes nationales, la péréquation, le coÍtmerce intemational, le commerce domestique et la réforme des institutions nationales (Cønoda and the World

Backgrounder,2000, vol. 6, n" l).

60 Les réductions financières proposées par le Parti réformiste auraient eu de nombreux effets. Retirer une multitude de programmes aurait permis au parti de réduire considérablement le nombre d'employés au sein de la fonction publique. De plus, tme fois élu, le parti aurait réduit les salaires et les pensions des ministres, des sénateurs et des députés et il aurait réduit de l5Yo les budgets de la Chambre des communes, du

Sénat, du Bureau du Conseil privé, du Cabinet du premier ministre et du gouverneur général.

Pour la population dans son ensemble, le parti était prêt à remettre aux provinces toutes les responsabilités liées à I'administration du système de santé, tout en leur remettant les sommes nécessaires pour le gérer à leur façon étant donné que les réformistes considéraient que, d'après la constitution, la santé était un domaine de compétence provinciale. selon Dobbin (1992, p. 191) et Laycock (2002,p. 71), ceci aurait pu mener à la disparition du système de santé universel. Les provinces administrant à leur guise le système au niveau local aurait probablement mené, d'après

Sharpe et Braid (1992, p. 78), à une privatisation partielle du système.

L'État-providence await été davantage démantelé par l'élimination d'une série de programmes, entre autres les allocations familiales, les contributions fédérales au système de bien-être social et aux programmes de construction de logements sociaux, les déductions pour la garde d'enfants et les lois sur le salaire minimum. Le gouvernement fédéral se retirerait aussi du système d'assurance-chômage, le modifiant pow qu'il soit uniquement administré et financé par les employeurs et les employés.

Les institutions culturelles étaient, elles aussi, une cible du Parti réformiste. À

Ottawa en 1994,le parti a voté en faveur d'une résolution encourageant la promotion de

6l cette dernière étant jugée la culture sans aucune participation du gouvernement fédéral, d'individus et du secteur inutile. Le parti remettait le dossier culturel entre les mains

de la société privé. ceci sous-entendait aussi une privatisation partielle ou tot¿le culturels Radio-Canada et la fin de subventions fédérales accordées aux organismes

(Flanagan 1995, P. 198)'

de rôle à jouer Pour ce qui est des sociétés d'état, elles n'avaient pas vraiment

politique soutenait que dans le progfamme fiscal du parti, étant donné que sa

( [...] corporations shouldbeplacedinthe sectorwheretheyperformbestwiththe is overwhelming evidence teast likelihood of incurring debt [.. J We believe that there

(Reform Party of that this would be the private sector in the vast majority of cases. > parti proposait canadadans Dobb in 1992,p. 209). En 1997,Ie programme électoral du

que et Postes Canada' de privatiser les chaînes de télévision de la SRC ainsi Via Rail

Même le secteur privé ne se trouvait pas à l'abri des réductions financières

proposées par le parti. D'après Manning, ce secteur devait aussi accepter des réductions

afin importantes au niveau des subventions et des concessions qui lui étaient accordées

(Laycock 2002, d,éviter des augmentations de taxes et des dépenses gouvernementales

p.20e).

Le programme fiscal du Parti réformiste n'était pas le seul volet d'un

programme qui faisait un virage vers un conservatisme de droite. La politique sociale

programme du parti à cette époque était, el|e aussi, reconnue pour sa promotion d'un

très conservateur qui allait à l'encontre de plusieurs tendances sociales établies.

62 iii. La politique sociale

Le Parti réformiste, depuis ses débuts, s'était prononcé contre le bilinguisme au

Canada qui était devenu politique offrcielle du gouvemement avec l'adoption de la Loi

sur les langues offrcielles en 1969. La position du parti face au bilinguisme officiel,

idée qui n'avait jamais été bien reçue dans I'Ouest du pays, pouvait être liée de près à la

vision que s'était donnée Preston Manning d'un nouveau Canada. D'après lui, f idée

que le Canada pouvait être défrni comme un partenariat entre deux peuples fondateurs,

les Français et les Anglais, ne reflétait plus la réalité, surtout depuis les grandes vagues

d'immigration dans l'Ouest (Simpson 1993,p.124). Comme l'avait dit Stephen Harper

en critiquant le projet de loi C-72 proposé par le gouvernement Mulroney, loi qui aurait

réaffirmé I'engagement du gouvernement fédéral à la Loi sur les langues offrcielles, le

Canada était composé d'une région essentiellement francophone, le Québec, et une

région essentiellement anglophone, le reste du Canada (Johnson 2006,p.97). Manning

et le parti voyaient le Canada cofirme étant plutôt < [...J afederation of provinces, not a federation offounding races or ethnic groups > (Manning dans Dobbin 1992, p.21,6),

ce qui impliquait que toutes les provinces devaient être sur un même pied d'égalité.

Ceci expliquait la position du parti face au Québec. Il était impossible d'accorder au

Québec un statut spécial ou d'accepter qu'il forme une société distincte, car cela aurait

été perçu comme lui offrant un traitement préférentiel par rapport aux autres provinces

(Simpson 1993, p. 124).Le parti appuyait même l'idée que si le Québec était incapable

d'accepter le concept réformiste de l'égalité entre les provinces, il n'aurait aucun choix

que de se séparer du Canada après être entré en négociations avec le reste du pays

(Sharpe et Braid 1992,p.151). Si le Québec choisissait de se séparer, il n'y aurait

63 évidemment aucune raison d'avoir une politique officielle concernant le bilinguisme au

Canad4 car la vaste majorité des francophones vivent dans cette province. De plus, le fait même que le parti favorisait la décentralisation des pouvoirs gouvemementaux et qu'il voulait donner aux provinces le pouvoir de gérer localement les questions de langue et de culture remett.ait en question la nécessité d'avoir une politique nationale offrcielle sur le bilinguisme (Simpson 1993, p. 138-140). La position du parti se reflétait dans les énoncés de ses programmes. Déjà en 1988, le parti avait publié un manifeste, rédigé par Stephen Harper, dénonçant le bilinguisme officiel, position reprise lors de son assemblée à Ottawaen 1994 où les réformistes appuyèrent ouvertement l'abrogation de la Loi sur les langues offrcielles (Flanagan 1995, p. 56 et

197). Ses progr¿rmmes subséquents, lors des élections générales de 1993 et de 1997 , proposaient de mettre fin aux fonds fédéraux promouvant le bilinguisme et de fermer le

Bureau des langues officielles. Les réformistes se disaient prêts à accepter la notion de bilinguisme pour quelques institutions nationales clés tels le Parlement et la Cour suprême (Manning 1992,p.273), position acceptée par Stephen Harper à l'époque

(Johnson 2006, p. lafl.

Par extension, le parti caractérisait le multiculturalisme de la même façon que le bilinguisme. Il répétait son message qu'il était préférable de traiter des questions de culture au niveau local, voulant éviter de conferer un statut spécial à tout groupe ethnoculturel au profit des autres.

Pour ce qui est de l'immigration, les réformistes étaient accusés d'intolérance envers les nouveaux-arrivés. Ce fait était accentué par les paroles et actions de certains candidats réformistes aux élections, de leurs militants et des publications

64 traditionnellement favorables au programme réformiste telles que le BC Report efle

Alberta Report qui ont articulé des opinions critiquant l'immigration (Laycock2002, p. 90). Quoi qu'il en soit, la position du parti représentait clairement une perspective plus conservatrice sur l'immigration que celle qui existait à l'époque. De façon plus précise, le parti appuyait une politique d'immigration qui methait avant tout l'accent sur les besoins économiques du Canada afin d'accueillir des gens qui possédaient les connaissances et les habiletés qui leur permettraient de s'adapter rapidement aux besoins de la société canadienne et de son marché du travail. D'après Dobbin (1992, p.202), ceci pouvait être interprété comme une tentative de recruter surtout des professionnels des classes moyennes ou privilégiées. Le parti croyait fermement qu'il ne fallait surtout pas qu'une politique d'immigration soit simplement une politique d'accroissement de la population. De fait, le parti préconisait dans son programme

électoral de 1993 une réduction de 50% dans le nombre d'immigrants accueillis annuellement au pays. Dans cette même optique, il fallait modifier la politique d'immigration pour enlever l'accent qui était mis sur la réunification familiale et

l'accueil des réfugiés :

Immigration would be based solely on economic criteria, except in cases of 'genuine refugees', stricþ defined. Sponsorshíp privileges would be limited to 'immediate families, thot is wives or husbands, minor dependant children, and aged dependant perents'. (Sharpe et Braid 1992,p.132)

Non seulement les critères d'admission au Canada devenaient-ils plus rigides, mais le parti soutenait aussi que la Constitution devait être amendée pour nier les droits aux immigrants illégaux et pour les déporter immédiatement (Dobbin 1992,p.133). Le parti voulait aussi modifier la Loi sur I'immigration, obligeant les immigrants à devenir

65 des citoyens avant qu'ils puissent profiter des programmes d'aide sociale et du système de santé universel (Flanagan 1995,p.197).

Le domaine du crime figurait aussi au prograûrme du parti. Sa position pouvait encore être caractérisée comme très conservatrice à l'époque. Les programmes

électoraux du parti et les résolutions adoptées lors de leurs assemblées ont illustré clairement le programme de droite dans ce domaine. Le principe qui guidait le programme reposait sur la protection des citoyens et le respect des droits des victimes du crime. Le parti a proposé notamment, d'imposer des peines plus sévères aux jeunes contrevenants et à toute personne trouvée coupable de crimes violents, d'adopter un système de liberté conditionnelle plus rigoureux, de rendre les parents responsables des dommages causés par leurs enfants, de créer des programmes de travail obligatoire pour les prisonniers et de restaurer la peine capitale. Basée sur une loi américaine, le parti avait aussi adopté en l994,lors de son assemblée à Ottawa, une résolution qui aurait emprisonné, pendant une période indéterminée, toute personne ayant été trouvée coupable d'avoir infligé à deux reprises de sérieuses blessures à autrui. Bon nombre de ces éléments ont été repris plus tard par I'Alliance canadienne et par le Parti conservateur du Canada acfuel.

Les valeurs familiales ont aussi joué un rôle important dans le programme social du Parti réformiste, la tendance étant de promouvoir une ligne de conduite qui accentuait les valeurs conservatrices traditionnelles de droite touchant une variété de domaines tels que les mariages gais, l'avortement et la garde d'enfants. Il fallait avant tout défendre la cellule familiale traditionnelle qui, d'après les réformistes, était essentielle au bien-être de I'individu et de la société (Sharpe et Braid 1992, p. 146).

66 Sur les mariages gais, le parti maintenait qu'un mariage était défini comme étant

I'union légale entre un homme et une femme et que cette définition devait être utilisée pour accorder aux conjoints des bénéfices qui étaient administrés ou financés par le gouvernement fédéral. Il est intéressant à noter que Stephen Harper, bien qu'il ait voté contre trne loi voulant légaliser les mariages homosexuels, voulait se distancier du débat entourant un tel projet de loi, le jugeant coÍrme étant une question morale plutôt que politique. Ceci I'aurait mené à voter selon ses propres convictions et selon la volonté des électeurs de sa circonscription (Flanagan 1995, p. 200).

En tenant compte du fondamentalisme religieux des réformistes, il n'était pas surprenant que Manning et plusieurs membres de son caucus se soient placés du côté pro-vie dans le débat sur l'avortement. Le parti comme tel préférait considérer l'avortement comme une question morale et demandait à ses membres de discuter de la question dans leurs circonscriptions respectives pour tenter d'arriver à un consensus.

Bien que cette position pro-vie aille à I'encontre de ce qui était avancé à l'époque par la plupart des groupes de femmes, elle trouvait de l'appui auprès de R.E.AL. Women, organisation qui promouvait des valeurs familiales plus traditionnelles (Sharpe et Braid

1992,p.144).

Enfin, la position du parti sur la garde des enfants était maintenue de façon constante tout au long de son histoire. Encore influencé par son respect des valeurs familiales traditionnelles et se basant sur le principe que les services sociaux étaient mieux administrés au niveau provincial ou local, le parti s'opposait à I'idée d'un programme universel de garde d'enfants. Le parti voulait plutôt encourager les familles,

67 les communautés et le secteur privé à trouver des solutions qui répondraient mieux à leurs besoins (Dobbin 1992, p. 196).

La politique sociale du Parti réformiste tout comme son programme fiscal et les réformes démocratiques qu'il proposait illustrent clairement sa position vers la droite politique. Il reste à voir si son successeur, l'Alliance canadienne, adopterait ces mêmes positions, même après le retour de Stephen Harper sur la scène politique. Après avoir quitté le Parti réformiste en 1997, Harper réussit à se faire élire chef de l'Alliance canadienne en mars 2002, ce qui signale le début d'une nouvelle ère sur la scène nationale.

3. L'Alliance canadienne et Stockwell Day i. La fondation du parti

Bien que le Parti réformiste ait connu un certain succès politique durant les années 90, remportant 52 sièges au Parlement lors de l'élection générale en 1993 et 60 sièges en 1997, formant ainsi I'opposition offrcielle, il était clair d'après les résultats

électoraux que son appui se concentrait dans les provinces de l'Ouest, surtout en

Alberta et en Colombie-Britannique. Constatant que le parti devait attirer un plus grand appui de l'électorat à I'est du Manitoba et que deux partis soi-disant conservateurs, les réformistes et les progressistes-conservateurs, continueraient à se séparer le vote de la droite en présentant chacun un candidat dans la plupart des circonscriptions lors des

élections, Preston Manning a décidé d'établir une coalition des pafis de la droite. Ses efforts mènent à la fondation de l'Alliance canadienne en janvier 2000.

Malheureusement pour Manning, Joe Clark, le chef du Parti progressiste-conservateur,

68 a refusé de fusionner son parti à l'Alliance canadienne, donnant l'impression que le

Parti réformiste n'avait que changé de nom. Quoi qu'il en soit, la responsabilité de guider le nouveau parti et de développer un programme pour la prochaine élection fedérale revient à Stockwell Day devenu premier leader de l'Alliance canadienne en juillet 2000 en remportant la victoire contre de Preston Manning.

ii. L'élection générale du 27 novembre 2000

Si le but de I'Alliance canadienne était d'attirer une plus grande part de l'appui de l'électorat, il est naturel de penser que le parti await modifié quelque peu son programme. Par contre, une comparaison de son programme menant à l'élection du

27 novembre 2000 à celui de son prédécesseur relève beaucoup de similarités. Les réformes démocratiques proposées, le programme fiscal et la politique sociale reprenaient tous les thèmes longtemps soutenus par Preston Manning et les réformistes bien que Day ait tenté d'en atténuer un certain nombre vus comme étant trop régionalistes (Laycock 2002, p.l 67).

Sur le plan des réformes démocratiques, I'Alliance canadienne désirait toujours que les sénateurs soient élus; par contre, elle avait laissé tomber de son programme les deux autres considérations du Sénat triple E soit l'égalité et l'efficacité. Le parti promettait aussi des référendums pour trancher des questions sociales telles que

I'avortement et la peine capitale, mais seulement si un certain powcentage de la population I'exigeait. Bien que le powcentage exact n'ait pas été clairement défini, le manuel d'information des candidats alliancistes l'établissait à 3% des électeurs, même si le chef Stockwell Day considérait ce taux beaucoup trop bas (Gagnon, La Presse,

69 le 11 novembre 2000). Pour ce qui était du rappel possible des députés, le même manuel précisait qu'une élection partielle serait déclenchée dans une circonscription si

25o/o de ses électeurs déposaient une pétition le réclamant. Stockwell Day appuyait

I'idée générale, mais il n'y avait pas'établi de pourcentage spécifrque (Gazette, le 8 novembre 2000). Le vote libre des députés en Chambre serait aussi permis sauf pour le vote de confiance ou celui sur les budgets. Enfin, le parti proposait toujours de tenir les élections fédérales à une date fixe à tous les quatre ans.

Du côté de son plan fiscal, le parti continuait la tradition réformiste de réduire les impôts des contribuables tout en proposant des compressions budgétaires. Dans un premier temps, le taux d'imposition unique suggéré par le Parti réformiste et critiqué coÍrme favorisant plutôt les riches était modifié par le parti allianciste. Ce dernier proposait deux taux différents, un de I7o/opow les contribuables gagnant un salaire jusqu'à 100 000$ et un taux de 25Yo pour ceux dépassant cette limite. D'autres réductions d'impôts touchaient une variété de domaines. Les corporations verraient leur taux d'imposition réduit à21% après une réduction initiale de trois points de pourcentag e àt25o/odurant les deux premières a¡nées au pouvoir de l'Alliance. Les petites entreprises verraient une réduction d'impôts de 10%. De plus, le parti augmenterait la déduction de base personnelle pour impôts et celle pow le conjoint à

10 000$, une augmentation de 2 000$ à l'époque. L'Alliance canadienne proposait aussi d'éliminer une surtaxe de 5%o qui visait uniquement la réduction du déficit. Enfin, le parti comptait diminuer les taxes sur l'essence de 3 cents du litre et réduirait aussi les impôts su¡ les gains en capital.

70 Pour ce qui est du déficit et de la dette nationale, le parti promettait des budgets

équilibrés et une réduction annuelle de la dette de 6 milliards de dollars. De plus, 75olo de tout surplus budgétaire serait automatiquement affecté à la réduction de la dette.

Afin de compenser pour les réductions d'impôts et de réduire les dépenses fédérales qu'ils percevaient comme étant du gaspillage, les alliancistes, tout comme les réformistes avant eux, promettaient de nombreuses compressions budgétaires dans plusiews programmes(Ølindsor Star,le 7 octobre 2000). Entre autres,les alliancistes auraient diminué les subventions pour le développement régional et international. Les sociétés d'état et les institutions culturelles n'auraient pas échappé aux plans du parti.

Le manuel d'infonnation des candidats expliquait qu'un gouvernement allianciste privatiserait la société Radio-Canada et Via Rail. Ken Epp, un député du parti, avait même affirmé durant la campagne électorale que l'Alliance étudierait la possibilité d'éliminer le supplément du revenìl à la vieillesse et les pensions de la vieillesse, ce qui, en conjonction avec les autres compressions, illusftait la tendance du parti à maintenir un programme de droite radicale (Marissal, La Presse,le 25 novembre 2000).

L'Alliance canadienne aurait aussi encouragé la décentralisation des pouvoirs en remettant ar.x provinces la responsabilité principale de fournir des services sociaux à leur population. Dans le domaine de la santé, Stockwell Day promettait de maintenir les sommes transférées du gouvernement fédéral atx provinces pour les aider à administrer ces progranìmes bien que le pouvoir des provinces de gérer leur propre système aurait mené, d'après les critiques de ce plan, à une privatisation possible de certains services

(Kennedy, CanWest News,le 6 octobre 2000).

71 La politique sociale allianciste reprenait, elle aussi, maintes idées qui avaient été proposées par le Parti réformiste. Sur le plan des langues offrcielles, et par extension le multiculturalisme, la position du parti était bien claire. Le bilinguisme offrciel ne serait maintenu que dans des institutions fédérales clés corìme le Parlement et la Cour suprême et il n'y aurait aucun financement pour des programmes faisant la promotion du multiculturalisme, dossiers qui tombaient sous la responsabilité provinciale, d'après le parti.

En immigration, le parti menaçait d'invoquer la disposition de dérogation de la

Charte pour empêcher que les immigrants illégaux arrivant au Canada soient accordés

.les mêmes droits que les citoyens du pays et pour les expulser du pays à I'intérieur de

90 jours. Il déclarait vouloir attirer surtout des immigrants qualifiés et de véritables réfugiés tout en prenant les mesures nécessaires pour refuser l'entrée au pays aux immigrants illégaux (O'Neil, Ottøwa Citizen,le 17 novembre 2000),

Du côté des valeurs familiales, les énoncés du parti ne variaient guère de ceux des réformistes. Le mariage était défini comme une wrion légale entre un homme et une femme et ce privilège était refusé aux homosexuels et aux lesbiennes. Quant au droit à l'avortement, Stockwell Day soutenait que son parti n'avait développé aucune position sur cette question; par contre le manuel d'information pour les candidats à l'élection proposait d'utiliser des référendums pour décider de questions sociales si 3% des

électeurs le réclamaient (The Gazette,le 8 novembre 2000).

Le crime est aussi un domaine où le parti allianciste s'était prononcé fortement en faveur de réformes pour punir les délinquants et protéger les victimes. Concernant le débat entourant la restauration de la peine capitale, le parti disait n'avoir aucune

72 position offrcielle malgré que certains de ses membres, tels John Reynolds, espéraient présenter un projet de loi en Chambre en faveur de la peine capitale une fois les alliancistes élus (O'Neil et McGregor, Vancouver Sun,le I novembre 2000). Aussi, il aurait été possible, comme pour I'avortement d'initier un référendum sur le sujet si3o/o des électeurs le désiraient. D'autres mesures sous le thème du crime incluaient une loi plus stricte sur les jeunes contrevenants, la création d'un registre national pour les délinquants sexuels, trne liberté conditionnelle à vie pow tous ceux trouvés coupables de délits violents ou sexuels, la désignation automatique de délinquant dangereux après un troisième délit violent ou sexuel et l'abolition de la pratique qui permettait la libération statutaire des délinquants après qu'ils aient purgé deux tiers de leur peine.

4. Le retour de Stephen Harper

Malgré leurs efforts, les alliancistes n'ont pas réussi à faire la percée qu'ils espéraient au sein de l'électorat canadien lors du scrutin du27 novembre 2000.

Remportant 66 sièges, le parti a conservé son statut d'opposition officielle. Stockwell

Day, qui, pour de nombreuses raisons, éprouvait de la difFrculté à contrôler le désenchantement grandissant parmi ses adhérents au sein du parti, a démissionné conìme chef en juillet 2001. Revenu à la charge comme candidat à la course à la chefferie en mars 2002, Day s'incline enfin devant Stephen Harper. Ce dernier s'était retiré de la scène politique en janvier 1997 alors qu'il avait quitté le Parti réformiste potn devenir vice-président et ensuite président du Nationsl Citizens Coølition, organisme à but non lucratif de droite qui appuyait la privatisation du système de santé, des budgets équilibrés, des restrictions sur l'immigration, une réduction du pouvoir du

73 gouvernement fédéral ainsi que la fin du bilinguisme officiel. Encouragé par ses proches, Harper a décidé de se présenter comme candidat à Ia chefferie de I'Alliance canadienne, course qu'il a remportée au premier scrutin. Cet événement signalait un bouleversement de la scène politique canadienne

74 Chapitre V - Stephen Harper et le nouveau Parti conservateur du Canada

1. Le fusionnement de l'Alliance canadienne avec le Parti progressiste-conservateur

Le fusionnement de l'Alliance canadienne et du Parti progressiste-conservateur pour former Ie nouveau Parti conservateur du Canada en décembre 2003 se concrétise grâce aux efforts des chefs des deux partis : Peter MacKay du côté des progressistes- conservateurs et Stephen Harper du côté des alliancistes. Bien que le projet ait comme but l'union de deux partis soi-disant de droite, les derniers chapitres ont démontré que ces deux partis se distinguaient assez clairement au niveau de leurs programmes de base. De fait, pour que le fusionnement se réalise, Stephen Harper aurait à faire certiaines concessions auprès des progressistes-conservateu¡s.

il est à noter à nouveau que Harper avait longtemps travaillé au sein du Parti réformiste et qu'il avait aidé à développer son prograrnme de droite aux côtés de

Preston Manning. Ayant quitté les rangs réformistes en 7997, Harper s'était retrouvé à la présidence du Notional Citizens Coalition où il avait maintenu sa position conservatrice de droite dans de nombreux dossiers. De fait il était bien connu, lors de sa présidence, poìrr avoir publié avec d'autres militants de la droite une lettre ouverte adressée au premier ministre albertäin Ralph Klein intitulée < Programme pour l'Alberta >. Cette lettre attaquait l'ingérence continue du gouvernement fédéral libéral dans les domaines de compétence provinciale. D'après Flanagan (2007,p.29), Stephen

Harper voulait encourager le gouvernement albertain de reprendre contrôle des pouvoirs qui lui étaient garantis par la Constitution afin de mettre fin à la manipulation d'Ottawa. La lettre recorìmandait que la province se retire du Régime de pensions du

75 Canada pour établir un équivalent provincial, cueillir ses propres impôts sur le revenu

des particuliers, établir sa propre police provinciale pour remplacer la GRC, assumer

toutes ses responsabilités en matière de santé et continuer à encourager la réforme du

Sénat (Harper et autres, < Programme pour l'Albert¿ )), 2001). II s'était prononcé aussi

à l'époque contre la Loi sur les langues officielles, répétant la position de I'ancien Parti

réformiste que le pays était composé d'une région essentiellement francophone,le

Québec, et d'r¡ne autre région plutôt anglophone, le reste du Canada. D'après \ui, << As a

religion, bilingualism is the god that failed. It has led to no fairness, produced no unity,

snd cost Canodian taxpayers untold millíons. > (Harper dans Johns on 2006, p. 292). De

plus, il avait maintenu, dwant sa campagne à la chefferie de l'Alliance canadienne, la

position qu'une union du parti à celui des progressistes-conservateurs serait impossible

si Joe Clark en était le chef, soulignant que ce dernier n'était pas sur Ia même longueur

d'ondes que les alliancistes (Flanagan 2007, p.2S). La démission de Clark comme chef

en août 2002 et l'élection de Peter MacKay comme nouveau leader en mai 2003

éliminerait éventuellement cet obstacle.

Bien que Stephen Harper ait avancé tout au long de sa carrière au sein du

Parti réformiste et du Natíonal Citizens Coalition un progr¿unme nettement de droite, plusieurs autres ont vu chez lui certaines caractéristiques qui lui permettraient, comme chef allianciste, d'atténuer sa position pour arriver à tme entente avec le Parti

progressiste-conservateur en 2003 .

Laycock (2002, p. 181), par exemple, considérait Harper un conservateur

économique, moins préoccupé par le conservatisme social qui pouvait être un handicap pour un mouvement de droite voulant remplacer le Parti libéral à Onawa. Ceci pourrait

76 porter à croire que Harper aurait pu accepter de modifier sa politique sociale pow la

rapprocher de celle des progressistes-conservateurs.

Johnson (2006) reprend la position de Laycock, en ajoutant que Harper, déjà en

1987 lors de I'assemblée à Vancouver où il a présenté son manifeste, prononçait des

paroles qui le rapprochaient du camp des conservatews économiques tout en appuyant

l'idée de réformes démocratiques. De fait, Johnson (2006, p. 6S) souligne que le

manifeste ne comprenait aucun principe le rattachant au conservatisme social de

Preston Manning.

Pour sa part, Tom Flanagan, depuis longtemps un proche de Stephen Harper,

explique dans l'ouvrage Harper's Team (2007,p. l9) que le nouveau chef de l'Alliance lui avait dit en 2002 qu'Ilespérait se placer au centre du parti, af,rn de trouver un

équilibre entre les différentes factions, position qu'il maintiendra plus tard comme chef du Parti conservateur du Canada. D'ailleurs, il semblerait que Harper, depuis longtemps, reconnaissait que le conservatisme au Canada avait historiquement connu du succès sur la scène nationale lorsque le mouvement avait pu marier des éléments du torysme traditionnel, du populisme et du nationalisme canadien-français. D'après

Stephen Harper, il faudrait qu'aux principes réformistes s'ajoutent les vertus du torysme, c'est-à-dire le respect de la tradition, l'ouverture au changement graduel et l'importance du compromis (Flanagan2}}7,p. l6).Enfin, Flanagan explique que

Harper, une fois devenu chef de l'Alliance canadienne, a adopté le concept de la triangulation, idée développée par Dick Morris dans Power Plays : Win or Lose - How

History's Great Political Leaders Pløy the Game. Essentiellement, ce concept dit qu'un leader doit reconnaître, dans un système politique démocratique, qu'il est nécessaire

77 d'accepter des croyances populaires bien en¡acinées même si elles sont associées à des

adversaires politiques (Flanagan 2007, p. 78). L'adoption d'une telle philosophie aurait

pu pousser Harper à modif,ier ses propres croyances afin de se placer davantage au

centre politique. Certes, il était un conservateur économique, mais il était aussi capable

de reconnaître certaines croyances fondamentales canadiennes.

Frustré par le manque de succès de I'Alliance canadienne lors d'une élection partielle en mai 2003, Harper déclare qu'il est temps de multiplier les efforts pour coopérer avec les progressistes-conservateurs, surtout que Joe Clark avait démissionné coÍrme chef et que Peter MacKay l'avait remplacé à la fin mau2003. Malgré certains obstacles, les négociations entre les chefs ont mené, en octobre 2003, à une entente de principe qui verrait le fusionnement des deux partis et l'éøblissement formel d'un nouveau parti, le Parti conservateur du Canad4 en décembre2003. Et, bien qu'un certain nombre de sénateurs et de députés progressistes-conservateurs, tels Joe Clark, refusaient de se joindre à la nouvelle entité, jugeant qu'il s'agissait d'un coup d'état de la part des alliancistes, les principes fondateurs du parti signalaient une orientation, qui dans wte cerüaine mesure était différente des programmes réformistes et alliancistes.

Rédigés en termes généraux, Ies principes appuyaient d'une part la responsabilité fiscale du gouvemement, le droit à propriété privée, les droits fondamentaux de

I'individu de subvenir à ses propres besoins dans le contexte d'un système économique libre et compétitif, et l'existence de gouvemements provinciarx et territoriaux forts.

Ces éléments répondaient aux désirs des réformistes et des alliancistes qui voulaient voir I'adoption d'un programme conservateur de droite. D'autre part, la liste de principes incluait la promotion d'une politique sociale progressiste, le respect des

78 traditions, l'accès à des soins de santé de qualité sans tenir compte de la capacité de

l'individu de payer, une reconnaissance du statut égal du français et de I'anglais à

l'intérieur du pays, une reconnaissance que le gouvernement avait un rôle à jouer pour

venir en aide aux moins favorisés et le principe que le Canada était plus grand que la

somme de ses parties (Harper et MacKay, << Agreement-in-principle on the

establíshment of the conservative Party of canada >>, 2003). ces principes

ressemblaient beaucoup plus à ceux du torysme traditionnel et démontraient une

volonté de la part de Stephen Harper à modifier en quelque sorte ses principes

personnels afin de concrétiser le fusionnement des deux partis.

Le 20 mars 2004, Stephen Harper est élu le premier chef du Parti conservateur

du Canada. En adressant la foule après sa victoire, il a parlé de la nécessité d'adopter des principes économiques conservateurs comme des réductions d'impôts, de réduire la dette nationale et d'encourager la libre entreprise, mais aussi de respecter les principes du torysme rouge tels que Ie maintien des institutions nationales importantes et des programmes sociaux. Il a présenté aussi le rameau d'olivier aux conservateurs sociaux en soulignant l'importance des familles et des communautés sécuritaires, et aussi aux

Québécois en leur adressant un court message en français (Johnson 2006, p. 3ae.

Harper avait à peine trois mois pour organiser son nouveau parti et pour développer un programme complet avant la prochaine élection fédérale. Les dét¿ils de ce prbgraÍüne indiquent jusqu'à quel point Harper était prêt à positionner son parti davantage vers le centre afin d'arracher le pouvoir au Palti libéral.

79 2. L'élection générale du 28 iuin 2004

Les obstacles qu'a drì surmonter le Parti conservateur durant la campagne

électorale menant à l'élection générale du 28 juin 2004 étaient dus surtout au manque de temps qu'il avait à développer une position officielle sur de nombreuses questions qui allaient être débattues en campagne électorale. Après l'élection de Stephen Harper coÍtme chef, le parti n'avait pas le temps d'organiser une convention formelle ou un prograrnme officiel. Certes, il a lancé son programme électoral, Demanding Better, mais ce demier manquait quelque peu de spécificité par rapport à certains domaines, ce qui pouvait rendre difficile une évaluation de la position exacte du parti. Cela, ajouté au fait que Stephen Harper devait se distancier de commentaires farfelus exprimés par quelques-uns de ses candidats, a mené à des accusations qu'il avait un programme secret qu'il implanterait si son parti formait le prochain gouvernement (Johnson2006, p.363).

i. Le programme du parti

Sur le plan des réformes démocratiques, le programme du Parti conservateur

éliminait plusieurs éléments adoptés par les anciens partis réformiste et allianciste,

éléments qui leur avaient causé de sérieux ennuis lors de l'élection générale de 2000

(Flanagan 2007, p. 157). L'utilisation de référendums et le rappel possible des députés, depuis longtemps des pierres angulaires des programmes plus populistes des prédécesseurs du Parti conservateur, ne figuraient plus parmi ses priorités. Le parti voulait toutefois offrir plus de votes libres aux députés sauf pour les votes sur les

budgets et pour les membres du Cabinet (Parti conservateur du Canada, << Demanding

80 Better >>,2004, p. 13). Il promettait aussi des élections à date fixe chaque quatre ans,

une tendance qui devenait plus commune à l'échelle provinciale, la Colombie-

Britannique ayant déjà adoptée une telle loi et d'autres considérant des lois semblables

(Parti conseryateur du Canad4 << Demanding Better >>,p.12). Pour ce qui est de la

réforme du Sénat, I'idée d'un Sénat triple E, tant défendue par les anciens réformistes,

semblait à tout jamais disparue. L'Alliance canadienne avait déjà laissé tomber deux

des éléments de cette réforme, à savoir un Sénat égal et efficace, se contentant de proposer que ses membres soient élus. Le Parti conservateur reprenait maintenant cette même position, même s'il fallait un amendement à la Constitution pour procéder à l'élection des sénateurs, ce qui nécessiterait à son tour I'approbation du Sénat, de la

Chambre des communes et de sept provinces représentant au moins 50o/o dela population canadienne. Pour éviter d'ouvrir à nouveau le débat constitutionnel, le Parti conservateur proposait que le premier ministre nofirme les sénateurs, qui eux, seraient dorénavant élus à partir d'un scrutin provincial.

Somme toute, les réformes démocratiques proposées par le Parti conservateur à la veille de l'élection de 2004 ont représenté dans une certaine mesure un repositionnement vers Ie centre si on les compare à celles de ses prédécesseurs.

Disparus, ou du moins atténués, étaient des élérnents populistes et d'une politique conservatrice de droite tels que l'utilisation des référendums, Ie rappel des députés et

I'idée du Sénat triple E, qui avaient comme but de diminuer le pouvoir décisionnel et

I'influence du gouvernement central. De fait, ce que proposait le Parti conservateur semblait se rapprocher plutôt du statut quo, c'est-à-dire de la tradition de remettre entre les mains d'un gouvemement élu le pouvoir de développer, bon gré mal gré, une série

81 de politiques et d'initiatives pour l'ensemble du pays et d'avoir confiance, cofirme

électeurs, qu'il les mène à bonne fin. Même au niveau de la réforme du Sénat, il est

intéressant de noter que le parti proposait la nomination de candidats élus à l'échelle

provinciale, évitant ainsi la tenue d'un référendum à l'échelle nationale, élément de

base des programmes réformistes et alliancistes.

Pour sa part, le programme électoral fiscal du Parti conservateur était plus

élaboré. Bien qu'il ne propose plus d'éliminer la TPS ou de modifier le système

d'imposition en faveur d'tur ou deux taux pour l'ensemble des contribuables comme

I'avaient suggéré ses prédécesseurs, le parti appuyait toujours la réduction d'impôts,

principe conservateur de base. Il promettait de réduire de plus de25Yo le taux

d'imposition des contribuables à revenu moyen en augmentant les limites des tranches

de revenus et en réduisant cerüains des taux d'impositíon. Il proposait aussi une

déduction d'impôts de 2000$ par enfant bfin de réduire le fardeau fiscal des familles

avec enfants, une façon d'attirer, d'après Flanagan (2007,p. 157),l'appui de jeunes parents qui semblait manquer au parti. Par contre, cette initiative, d'après certains, ignorait les besoins des familles les plus pauvres qui ne payaient déjà aucun ou que très peu d'impôts, la rendant inutile à leu¡s yeux (Lakritz, Calgory Herald,le 25 juin 2004).

De plus, les conservateurs comptaient réduire les primes versées annuellement par les contribuables au régime d'assu¡ance-emploi afin d'en éliminer le surplus, politique qui a été adoptée par le Parti libéral (Flanagan 2007, p. 158). Un autre élément de leur programme préconisait la réduction des subventions aux corporations pour les remplacer par des réductions d'impôts pour toutes les entreprises canadiennes.

82 En ce qui concerne la dette nationale, les déficits ayant été éliminés depuis bon

nombre d'années, le programme électoral du parti promettait de la réduire en utilisant

des surplus budgétaires, accusant ses adversaires libéraux de les dépenser inutilement.

Les propositions fiscales du parti ne se limitaient pas à des réductions d'impôts.

Elles étaient aussi accompagnées de dépenses et de transferts de fonds atx provinces

dans une série de domaines. Même s'ils n'y avaient pas rattaché de sommes

spécifiques, les conservateurs étaient prêts à investir dans le domaine de la recherche

scientifique et médicale, et promettaient de continuer à aider hnancièrement les

ouvriers du secteur primaire tels que les agriculteurs, les pêcheurs et ceux oeuvrant dans

I'industrie forestière. Du côté des transferts, les conservateurs étaient prêts à remettre

aux provinces 0,03$ de la taxe sur I'essence pour les aider à répondre à leurs besoins en

infrastructure et pour remédier au déséquilibre fiscal qui existait entre Ottawa et les

provinces. En santé, le parti s'engageait à dépenser 36,8 milliards de dollars sur une

période de 5 ans. De fait, il appuyait I'Accord de 2003 des premiers ministres sur le

renouvellement des soins de santé conclu entre le gouvernement libéral de Jean

Chrétien et les provinces. L'accord, qui promettait un appui f,rnancier soutenu à long

terme du gouvernement fédéral aux provinces, visait à combler les manques à gagner,

entre autres sur le plan des soins primaires et des soins à domicile ainsi que d'offrir une

couverftre de type catastrophique en ce qui a trait aux médicaments d'ordonnance. Tout

en ayant une certaine flexibilité par rapport à l'administration des services, les provinces auraient la responsabilité de respecter des échéanciers négociés avec le gouvernement fédéral. D'après Flanagan (2007, p.158), c'est encore ici Ie concept de triangulation adopté par Stephen Harper qui le pousse à accepter les principes de cet

83 accord, reconnaissant son importance aux yeux de la population canadienne. De plus, il

évite de faire référence directe à la privatisation du système de santé et se limite à proposer que le gouvemement fédéral assume la responsabilité de la couverture de type catastrophique par rapport aux médicaments d' ordonnance.

Évidemment, des réductions d'impôts telles que proposées par le Parti conservateur, en plus de dépenses assez considérables, surtout en santé, exigeaient un certain contrôle des dépenses gouvernementales pour éviter un déficit budgétaire. Bien que le prograrìme électoral du parti prévoie ce contrôle, il ne proposait rien de spécifique sur les compressions budgétaires, ce qui laissait la porte ouverte à beaucoup de spéculation. Parmi les groupes qui se croyaient visés, l'Alliance de la Fonction publique du Canada comparait le Parti conservateur aux anciens partis réformiste et allianciste qui auraient, eux, entamé des réductions majeures du personnel au sein de la fonction publique et privatisé certains services. Malgré le manque de précision, Stephen

Harper a admis que certaines compressions seraient peut-être nécessaires (Francoli,

The Hill Times,le l4 au 20 juin 2004). D'après les critiques du parti, Ies organismes culturels y inclut la Société Radio-Canada pouvaient, eux aussi, être victimes de réductions budgétaires. Le parti ne mentionnait pas directement les compressions budgétaires d'organismes précis, mais Harper avait l'intention de donner au vérificateur général le mandat de revoir les dépenses gouvernementales afin d'évaluer si celles-ci desservaient les intérêts de la population. Ceci aurait pu mener à des compressions,

étant donné que Harper croyait que les subventions gouvemementales ne devaient pas viser des éléments culturels lorsqu'un équivalent existait au sein du secteur privé

(Francoli, The Hill Times,le l4 au 20 juin2004 etle2l au27 juin2004).

84 Tout comme dans le domaine des réformes démocratiques, on pourrait conclure

que le progr¿unme électoral fiscal du Parti conservateur était moins idéologiquement à

la droite que ceux de ses prédécesseu¡s réformiste et allianciste. Bien que le parti

appuyait encore I'idée de la réduction d'impôts, de la dette nationale et de subventions

aux corporations, son appui de l'accord de 2003 dans le domaine de la santé, sa

promesse d'y investir des milliards de dollars et d'y ¿lssumer des responsabilités

majeures marquaient un cefain départ d'une philosophie plus conservatrice qui aurait

décentralisé le système autant que possible. Du côté des compressions budgétaires, le

manque de précisions dans le programme ne pouvait mener qu'à la spéculation; par

contre, il est fort probable que ces compressions seraient nécessaires vu les dépenses et

les réductions d'impôts promises, ce qui théoriquement suivait de plus près une ligne de conduite conservatrice de droite.

La politique sociale telle qu'exprimée dans le programme du Parti conservateur

était très générale et se limitait avant tout à des éléments qui touchaient au crime et à la sécurité. Elle n'incluait rien sur le bilinguisme, le multiculturalisme, I'avortement ou la peine capitale et ne mentionnait que brièvement les questions de I'immigration et des mariages gais. Par contre, les commentaires de quelques membres du parti durant la campagne électorale ont montré clairement qu'il y existait des élémenæ plutôt réactionnaires. II faut toutefois signaler que le chef du parti, Stephen Harper, se distanciait de ces commentaires et il répétait souvent que la position exprimée par ces membres ne reflétait pas la position officielle du parti.

Pour ce qui est des langues offrcielles, le parti devait, dès le début de la campagne électorale, réagir aux commentaires de Scott Reid, son critique des langues

85 ofücielles. Reid avait dit qu'il était temps de réévaluer la Loi sur les langues officielles

et son mandat d'offrir des services en français et en anglais partout au pays

(Toronto Star,le29 maiz004). Les propos de Reid ont été dénoncés par Stephen

Harper qui avait, lui-même, accepté le principe du bilinguisme officiel lorsque

l'Alliance canadienne s'était fusionnée au Parti progressiste*conservateur (Lambert,

Canadian Press NewsV[lire,le 28 mai 2004). Par contre, certains critiques de Harper

avaient souligné à l'époque que ce dernier atuait pu se prononcer plus clairement en

faveur du bilinguisme même s'il avait dit au début de la campagne que la Loi sur les langues offrcielles éøit inviolable (The Gazette,le 20 juillet2004). D'après Lamberr

(Canadian Press NewsWire,le 28 mai 2004), Aubry (Edmonton Journal,le 29 mai

2004) etle Toronto Star (le 29 mai2004), Stephen Harper n'était pas contre I'idée d'adapter les politiques linguistiques existantes pour mieux refléter les réalités canadiennes.

La question du bilinguisme a été abordée de nouveau durant la campagne lorsque le Parti conservateur a été accusé de vouloir éliminer I'offre de services en français par la société Air canada partout au pays en abrogeant la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada. Bien que Stephen Harper expliquait que les services en français seraient encore garantis par La loi sur les langues officielles, ses adversaires soulignaient que cette loi garantissait des services seulement là où les nombres le justifiaient, et non partout à I'intérieur du pays comrne I'exigeait le mandat d'Air Canada, ce qui aurait pu mener à une réduction des services en français (Dawson et Fife, Calgary Herald,le 21juin 2004).

86 Même si l'avortement n'était pas mentionné dans le programme du parti, une

autre remarque controversée d'un député conservateur a forcé Stephen Harper à réagir.

Le critique conservateur en santé, Rob Merrifield, a affirmé lors d'une entrewe qu'il

croyait que les femmes devraient obligatoirement recevoir du counselling avant de

subir un avortement. Le commentaire a fait boule de neige; Merrifield a démissionné de

son poste comme critique en santé et Harper a dû se défendre contre les accusations que

son parti voulait légiférer I'accès à l'avortement. Il a réaffirmé sa positiorr le 9 juin

2004:

I have no intention of supporting abortíon legislation, so there is no way that abortion rights will be overridden by my government. I have no inteitions of introducing qbortion legislation, and I think the chances of any being passed in thís Parliament are virtually non-existent. (Harper . dans Flanagan2007, p. 168) Malgré ses promesses, certains continuaient de dire que Harper permettrait l'élaboration d'un projet de loi par un de ses députés sur cette question (Cordon,

Canadian Press NewsWíre,le 10 juin 2004). Les statistiques par contre, semblaient appuyer les propos de Stephen Harper. Les sondages à l'épodue démontraient que deux tiers de la population canadienne était partiellement en faveur du droit à I'avortement et que seulement 14o/o était nettement contre I'idée. Même les leaders du conservatisme social disaient que le chef conservateur n'était pas intéressé à ce que le gouvemement s'engage dans de tels débats (Cheadle, Canadian Press NewsWire,le 8 juin 2004), réaffìrmant ainsi sa position traditionnelle que cela représentait une question morale et non politique.

Du côté de l'immigration, la position du Parti conservateur était nettement differente de celle de ses prédécesseurs, même si le programme n'offrait pas beaucoup

87 de détails. Disparus étaient les éléments réformistes des années 90. On ne proposait

plus une réduction substantielle d'immigrants admis au pays chaque année, un

amendement à la Constitution afin de déporter immédiatement les immigrants illégau

ou la nécessité d'avoir la citoyenneté canadienne avant d'avoir droit à des avantages

sociaux. Au contraire, tous les partis politiques à I'époque appuyaient ture immigration

annuelle d'environ 300 000 personnes (1% de la population canadienne) et la réforme

du système af,rn de reconnaître plus rapidement Ie statut des immigrants et des réfugiés

et de leur fournir une formation professionnelle (Skelton, Vancouver Sun,Ie 3 juin

2004). D'ailleurs, le programme du Parti conservateur soulignait que I'immigration avait beaucoup enrichi la société et l'économie canadiennes au cours de notre histoíre.

La position du Parti conservateur par rapport aux mariages gais était plus controversée. Stephen Harper affirmait que c'était au Parlement et non à la Cow suprême de définir ce qui constituait un mariage. Un gouvernement conservateur abandonnerait le renvoi à la Cour suprême, ce qui avait été initié par les libéraux, pour plutôt soumettre la question à un vote libre en Chambre. Il appuierait la définition traditionnelle du mariage sans toutefois nier que les unions de même sexe comporteraient certains droits (Gaudreault-Desbiens, La Presse, le 10 juin 2004). Par contre,les commentaires d'un autre membre du caucus conservateur, Randy White, ont poussé les adversaires des conservateurs à les accuser encore une fois d'avoir un programme secret. White, lors d'une entrevue, a déclaré qu'il serait tout à fait normal d'utiliser la disposition de dérogation de la Charte pour non seulement défendre la définition traditionnelle du mariage, mais aussi pour établir un programme social plus conservateur (Johnson 2006, p. 370). Bien que Stephen Harper ait expliqué que ces

88 coÍrmentaires prononcés à quelques jours de l'élection ne reflétaient pas la position

officielle du pafi, il se peut fort bien qu'ils aient fait perdre de nombreux votes au Parti

conservateur (Johnson 2006, p. 37 1).

Le seul volet de la politique sociale à avoir été développé en profondeur dans le

programme conservateur est celui du crime et, comme ses prédécesseurs, il prônait un

retour vers des mesures plus draconiennes telles que l'obligation des détenus de purger

leur peine au complet et de rendre plus strictes les exigences liées à la liberté

conditionnelle. Le programme demandait aussi que les jeunes contrevenants soient

considérés davantage responsables de lews actes. Par contre, le parti avait décidé de ne pas inclure de référence à la peine capitale, ce qui aurait pu causer davantage de

controverse.

La politique sociale du Parti conservateur, comme les autres aspects de son programme, indique un repositionnement partiel vers Ie centre. Son changement de position à l'égard de l'immigration et la position prise par Stephen Harper sur les questions sociales plus contentieuses telles que l'avortement semblent le confirmer.

Cefies, la position du parti quant au crime pouvait encore, en2004, être définie coÍtme

étant plutôt de droite et les commentaires de quelques-uns de ses membres sur l'avortement, sur les mariages gais et sur le bilinguisme illustraient I'existence d'éléments réactionnaires au sein du parti. Par contre, la direction de ce demier était

établie avant tout par son chef et Stephen Harper a réussi à projeter l'image d'ur parti plus modéré que l'Alliance canadienne et le Parti réformiste. De fait, une analyse des résultats électoraux de2004, à l'extérieur du Québec, confirme que la population canadienne voyait le Parti conservateur d'un nouvel æil. Tout corìme ses

89 prédécesseurs, le Parti conservateur était préféré par les électeurs qui s'identifiaient

comme éønt des conservateurs sociaux et économiques, vivant en régions rurales et se

sentant aliénés par le système politique fédéral (Gidengil et autres, 2006,p.7-12).Par

contre, le parti semblait avoir atténué son image plutôt réactionnaire. L'analyse de

sondages entreprise par les auteurs a démontré que les questions d'immigration,

d'avortement et même celle des mariages gais n'ont pas eu d'effet négatif sw le vote

des conservateu¡s lors des élections. Aussi, le fait que le parti ait attiré presque autant d'appui de la part des femmes que des hommes à l'extérieur du Québec semblait démontrer qu'il avait réussi à projeter I'image d'un parti plus modéré (Gidengil et autres, 2006, p. 16-20). Selon ces auteurs , c'était plutôt le conservatisme économique du parti qui lui a fait perdre des votes, les électeurs préférant des dépenses gouvernementales dans les programmes sociaux au lieu de réductions d'impôts

(Gidengil et autres, 2006, p. l7). Cette analyse appuie les constatations de plus d'un auteur qui ont caractérisé Stephen Harper comme étant avant tout un conservateur

économique qui se souciait moins de questions sociales ou morales contentieuses.

Malgré les efforts de Stephen Harper et du Parti conservateur de modifier la perception que les électeu¡s avaient d'eux, l'élection générale du 28 jurn2004 aété, remportée par le Parti libéral avec 135 sièges, Ie réduisant au statut de gouvernement minoritaire. Les conservateurs, pour leur part, en ont remporté 99. Le programme

électoral général du parti, le manque de temps pour s'organiser entre l'élection de

Stephen Harper cortme chef et l'élection générale ainsi que les commentaires impulsifs de certains de ses membres sont tous des facteurs qui ont mené à la défaite de Stephen

Harper. Quoi qu'il en soit, le parti n'avait pas encore eu l'occasion d'établir un

90 programme compréhensif et off,rciel depuis sa fondation en décembre 2003. C'est alors

que Ie parti organise la première convention du Parti conservateur à Montréal en mars

2005 afn d'établir un programme qui le guiderait lors de Ia prochaine élection en

janvier 2006.

3. La convention de Montréal (mars 2005)

Jugée par les analystes à l'époque comme un succès, la convention à Montréal a

confirmé non seulement la popularité de Stephen Harper au sein du parti, mais aussi la notion que ce dernier était finalement prêt à appuyer un programme complet vu comme modéré aux yeux de plusieurs. Par contre, selon d'autres, le programme de Harper était toujours dominé par une politique de droite (Patten, Edmonton Journal, le 26 mars 2005).

i. Les résolutions adoptées

D'une part, les résolutions adoptées signalaient la fin de nombreux éléments populistes qui avaient été la pierre angulaire des réformes démocratiques soutenues par le Parti réformiste et repris par I'Alliance canadienne. Les délégués ont rejeté les propositions permettant le rappel des députés et l'utilisation de référendums initiés par les électeurs. Les référendums seraient utilisés ni pour des amendements possibles à Ia

Constitution ni pour décider de questions nationales importantes. Même I'idée de tenir des élections à une date fixe a été rejetée. D'autre part, certains aspects du nouveau programme ont été critiqués par les adversaires du parti, car ils semblaient réaffirmer les convictions conservatrices, voire populistes, du parti. C'est le cas d'une résolution

91 appuyant I'enchâssement des droits à la propriété dans la Constitution (Patten,

Edmonton Journal,le 26 mars 2005). Les délégués ont aussi adopté une résolution permettant des votes libres en Chambre sur les projets de lois initiés par les députés.

Ceci permethait aux députés individuels, s'ils le désiraient, de soumettre des projets de lois portant sur l'avortement, la peine capitale, les droits des minorités ou toute autre question contentieuse, les menant théoriquement à être adoptés par la Chambre, même si ces projets ne faisaient pas partie du programme officiel de leur parti (Russell,

Winnipeg Free Press,le26 mars 2005). Il est à noter que les procédures de la Chambre réduisent les chances qu'un projet de loi de ce type passe au vote durant une session parlementaire. L'utilisation de la disposition de dérogation a, elle aussi, été abordée.

Les délégués ont rejeté une résolution qui aurait forcé le parti, lors d'une campagne

électorale, de déclarer son intention de l'utiliser. Ceci a poussé certiains à accuser les conservateu¡s d'avoir un programme secret qu'il tenterait d'implanter en utilisant la disposition de dérogation (O'Neil , Vancouver Sun,le 19 mars 2005).

En général, sur le plan de la fiscalité, les principes de base conservateurs de droite étaient encore présents da¡rs le programme. Du côté des impôts et de Ia dette nationale, les délégués favorisaient des réductions d'impôts à court et à long terme et la réduction de la dette en utilisant les surplus budgétaires. Sur les dépenses et les transferts de fonds aux provinces, Stephen Harper disait reconnaître qu'il y avait urn déséquilibre fiscal entre Ottawa et les provinces. Harper promettait de remettre aux provinces les sommes nécessaires à I'administration des programmes sociaux tout en reconnaissant leur droit constitutionnel à administrer ces programmes (Johnson 2006,

92 p: 390). Même si une telle entente entraînerait des dépenses élevées de la part du

gouvemement fédéral, elle reflétait un principe conservateu¡ de droite de base, celui de

décentraliser les pouvoirs du gouvernement fédéral. Ainsi, il se retirerait des domaines

de compétences des provinces tout en réduisant à la longue ses obligations financières

dans ces mêmes domaines. Dans le domaine de la santé, le financement soutenu

qu'avait promis Stephen Harper en appuyant l'accord de santé de 2003 ne figurait pas

parmi les résolutions adoptées à Montréal. Les délégués adoptèrent plutôt une

résolution demandant que le parti crée des conditions propices permettant au secteur

privé de jouer un rôle actif dans le domaine, position nettement de droite (Patten,

Edmonton Journal,le 26 mars 2005).

La politique sociale du Parti conservateru a été, elle aussi, définie davantage lors

de la convention de Montréal, les questions de I'avortement, des mariages gais et du bilinguismè officiel étant parmi les plus controversées. Sur le bilinguisme, le parti a fait volte-face par rapport à Ia position traditionnelle des partis réformiste et allianciste. Les délégués, appuyant en grande majorité le bilinguisme officiel ainsi que le multiculturalisme, ont hué ceux qui s'étaient prononcés contre ces principes (Yaffe,

Vøncouver Sun,le 2l mars 2005). La question de I'avortement, pour sa part, était plus contentieuse. Bien que Stephen Harper ait annoncé à la foule qu'il n'avait aucune intention d'ouvrir à nouveau le débat sur I'avortement en Chambre, promettant même de ne jamais légiférer sur ce sujet (MacCharles et Gordon, Toronto Star,le 19 mars

2005),45o/o des délégués ont voté en faveur d'une résolution demandant que le parti adopte une loi sur la question. La résolution a été défaite mais le résultat démontrait que le parti comptait encore parmi ses rangs de nombreux conservateurs sociaux qui

93 tenaient à un programme social de droite. Les conservateurs sociaux ont même

remporté le débat sur les mariages gais, alors que 75%o des délégués ont appuyé une

résolution qui définissait le mariage cornme étant une union entre un homme et une

femme (Yaffe, Voncouver Sun,le 21 mars 2005), ce qui donnait l'impression que le

parti était contre les droits des gais et des lesbiennes (Patten, Edmonton Journal,

le 26 mars 2005). Pou¡ sa part, Stephen Harper promettait un vote libre en Chambre sur

la question, position qu'il maintenait depuis longtemps (Flanagan 2007, p. 204). Bien

qu'il ait été personnellement en faveur d'une définition traditionnelle du mariage, il se

disait prêt à accorder les mêmes bénéfices sociaux à tous les couples, quelle que soit leur orientation sexuelle (MacCharles et Gord on, Toronto Star,lel9 mars 2005). Dans le domaine de la garde d'enfants, le parti a rejeté l'idée du gouvernement libéral d'établir un programme à l'échelle nationale, jugeant que cette initiative représentait trne intervention gouvernementale peu souhaitée (Patten, Edmonton Journal,le 26 mars

2005). Sur le crime, les délégués ont décidé de ne pas ouvrir à nouveau le débat sur la peine capitale, mais ils ont appuyé une résolution demandant l'adoption d'une loi des troisfautes (Russell, lVinnipeg Free Press,le26 mars 2005) basée sur le modèle californien qui impose une sentence de 25 ans de prison à quiconque est trouvé coupable d'un troisième délit, quelle que soit la gravité de la troisième faute.

De façon générale, il est possible de conclure que la convention du Parti conservateur à Montréal a réaffirmé et établi officiellement des politiques qu'il appuyait en grande partiç dans son programme électoral de 2004. Le parti espérait ainsi projeter une image plus modérée et moderne auprès de ses membres et de la population canadienne. Bon nombre des résolutions adoptées ont réussi à faire cela malgré que le

94 parti appuie parfois des mesures plus réactionnaires. La politique sociale du parti s'était

beaucoup atténuée même si la question des mariages gais, du crime et de la garde

d'enfants reflétaient encore un programme socialement conservateur. À part l'emploi de votes libres en Chambre et une certaine ambiguiTé par rapport à l'utilisation possible de la clause dérogatoire, les réformes démocratiques populistes du passé f,rguraient de moins en moins au prograrìme. Par contre, s'il y avait un domaine qui continuait à refléter la philosophie conservatrice de base, c'était bien celui de la fiscalité où le parti semblait déterminé à mettre en pratique des principes capitalistes avec une intervention minime de la part du gouvernement.

Stephen Harper, semble-t-il, avait réussi à donner une orientation à son parti qui le rendait plus acceptable aux yeux de l'électorat. D'ailleurs, Tom Flanagan (2007, p.203-204) explique que Harper reconnaissait qu'il était essentiel à Montréal que les délégués adoptent des positions qui pourraient augmenter les chances du parti à gagner une future élection et cela exigeait alors le rejet de politiques trop réactionnaires qui avaient nui au mouvement conservateur dans le passé. De fait, c'est de là que venait l'importance d'accepter le bilinguisme, d'atténuer la position du parti sur l'immigration, de rejeter plusieurs de ses réformes démocratiques et de ne pas ouvrir à nouveau Ie débat sur I'avortement. 'William Johnson Q006, p. 397), décrit la position du parti à la fin de la convention :

LI/'hat emergedfrom the conventionwas aparty that had proved its determinatÌon to be and to be seen as moderate and mainstream - a party of the center-right in matter,c o-f governance and taxation, huÍ in no re,spect at all a party of the extreme right.

[...J this party would deliver I J a more frugol and less ,sp e n dt hr g ov e r m c e nt. t ift nm ent, or e o n c -fo r he t axp ay er,

95 more respect for the provinces, and more concern for economic development. But it would not ,shock the electorate with post-election surprises, with a hidden agenda suddenly popping up like a iack-in-the-box [...J (Harper) would understond the need to cultivate and to carry the a.s,sent of the people in this country, with all its regional, Iinguístic, ethnic, racíal, relígious, and class differences. (Johnson 2006, p. 397)

En moins d'un an, le Parti conservateur et Stephen Harper auraient à réitérer leurs

principes auprès de l'électorat canadien.

4. La campagne électorale de 2005-2006

Après la chute du gouvernement libéral de Paul Martin le 28 novembre 2005, causée en grande partie par le scandale des commandites, les partis politiques sur la scène nationale se sont à nouveau lancés dans une campagne électorale qui se terminerait par une élection générale le26 janvier 2006. Voulant multiplier ses chances de remporter la victoire, Stephen Harper s'assure de mettre en place un système de contrôle permettant à son parti de maintenir une certaine discipline sur ses candidats afin que ces derniers ne soient pas portés à formuler des propos ne faisant pas partie du programme officiel du parti ou qui seraient trop controversés, menant ainsi à une perte d'appui du parti (wells, Maclean s, le 6 février 2006, p. z0-zl). De plus, même si le programme comprenait une série d'initiatives politiques, économiques et sociales,

Harper se concentre avant tout sur cinq priorités qui, espérait-il, séduiraient l'électorat : une loi fédérale sur l'imputabilité, une réduction de la TPS, des réformes du système de justice criminelle, une subvention directe aux parents de jeunes enfants pour répondre à leurs besoins par rapport à la garde d'enfants et une entente avec les provinces pour

96 tenter de réduire les listes d'attente pour certaines interventions chirurgicales. Somme

toute, comme l'ont décrit simpson (Globe and Mail,le 14 janvier 2006), Doern (2006,

p. 8-l 1) et Newmur (Maclean's,le 6 février 2006, p. 40-42),le programme électoral du

Parti conservateur était axé avant tout sur la modération et ressemblait dans une

certaine mesure à un programme électoral libéral ou progressiste-conservateur.

i. Le programme du parti

D'abord, les réformes des institutions démocratiques ne figuraient plus parmi les dossiers importants du Parti conservateur. Harper promettait toujours des votes libres en Chambre sur la définition du mariage ainsi que sur toute autre question en

Chambre sauf celles liées au budget. De plus, il proposait encore d'enchâsser le droit à

Ia propriété dans la Constitution. Il avait aussi repris l'idée des élections à date frxe,

élément qui avait été rejeté lors de la convention à Montréal en 2005, affrrmant que son gouvernement établirait des élections frxes à tous les quatre ans, préférablement à

I'automne. Par contre, toute notion de démocratie directe, c'est-à-dire les référendums, les initiatives populaires et le rappel des députés était complètement disparue, ce qui représentait, pour certains, Ia raison même qui avait mené à l'établissement du Parti réformiste (Castonguay, Le Devoir,le l4janvier 2006). Les conservateurs tenaient encore à mettre sur pied un système selon lequel les électeurs choisiraient les sénateu¡s pour leur province ou territoire respectif, la Chambre haute devant être occupée par quelqu'ur ayant reçu un mandat démocratique, selon Stephen Harper (Brewster,

Le Soleil,le l5 décembre 2005). Cependant, Harper admettait qu'une telle réforme n'atteignait pas les objectifs de son parti. II auait préféré que les sièges au Sénat soient

97 répartis de façon égale parmi les provinces, autre élément d'un Sénat triple E, mais concédait que ce serait très difficile à accomplir étant donné qu'il aurait à ouvrir à nouveau le débat constitutionnel et à convainc¡e I'Ontario et le Québec de réduire leur nombre de sièges à la Chambre haute (Brewster, Le Soleil,le 15 décembre 2005).

Les réformes abandonnées par le parti ont été remplacées par une série de nouvelles initiatives. Da¡s son prografirme, le parti se disait prêt à présenter un projet de loi qui obligerait les candidats aux élections de recevoir l'appui de leur association locale au lieu de se faire parachuter dans une circonscription à partir d'une décision du chef du parti ou de l'association nationale (Brewster, Le Soleil, le 15 décembre 2005).

De plus la loi sur l'imputabilité qu'il proposait présenter pourrait, elle aussi, être vue en partie comme une réforme démocratique populiste, car elle remetûait davantage le pouvoir politique entre les mains de l'électorat en limitant entre autres, les dons des particuliers aux partis politiques à 1000$, en interdisant des contributions par des entreprises et en promettant de réduire I'influence des lobbyistes. Moins controversées que les anciennes réformes, le pafi espérait tout de même, par leur entremise, démocratiser un peu plus le système politique.

Le programme fiscal du Parti conservateur était, lui aussi, considéré comme

étant plutôt modéré. Il reprenait des concepts traditionnels conservateurs en matière de réductions d'impôts, mais il promettait tout de même de dépenser des sommes très importantes dans de nombreux domaines. À noter aussi était l'absence de compressions budgétaires au niveau de la fonction publique ou des sociétés d'état, éléments qui figuraient de façon régulière dans les programmes des prédécesseurs du Parti conservateur.

98 Sur le plan des impôts, le parti promettait de réduire la Taxe sur les produits et

services de 7%o à 60/o dans tm premier temps, puis ensuit e à Syo,ce qui d,après les

estimations aurait coûté au gouvemement une somme d,e 32,5 milliards de dollars sur

5 ans' Ce geste était populaire auprès de I'électorat, mais la plupart des économistes le critiquaient, jugeant qu'il aurait été préférable de réduire les taux d,imposition (Thorpe,

National Post' le 2l janvier 2006). Le parti proposait aussi d'éliminer I,impôt sur les

gains en capital si ceux-ci étaient réinvestis à I'intérieu¡ de six mois, représentant un

autre manque à gagner pour le gouvernement de 750 millions de dollars sur cinq ans.

D'autres initiatives plus modestes incluaient une réduction progressive des taux

d'imposition des petites entreprises, un crédit d'impôt de 500$ pour l,achat de manuels

scolaires, un crédit d'impôt pour l'achat d'outils pour les ouvriers et pour la création de prograrnmes favorisant la formation d'apprentis, un crédit de 500$ pour des frais d'inscription liés à des programmes d'activités physiques et un autre pour l,utilisation

des transports en commun. D'après simpson (Grobe and Maíl,le r4 janvier 2006), ces

initiatives plus modestes ne représentaient que des changements mineurs à la fìscalité et

Thorpe (National Post,le 21 janvier 2006) ajoutait que Ie plan fiscal de Harper le situait nettement au centre politique. un programme de droite aurait compris des réductions marquées des taux d'imposition pour les contribuables et les corporations ainsi qu,une refonte des programmes de développement régional, de subventions aux corporations et d'assurance-emploi.

Pour ce qui est de la dette publique, le parti s'engageait toujours à la réduire en utilisant une partie des surplus budgétaires. Le programme promettait un

99 remboursement d'au moins 3 milliards de dollars par année ou 15 milliards sur cinq

ans.

Les réductions d'impôts, qu'elles soient importantes ou non, ajoutées à la réduction graduelle de la dette nécessitaient que le Parti conservateur adopte dans son prograrnme une diminution des dépenses gouvernementales ou des réductions de cerüains progr¿ürmes ou ministères fédéraux. Par contre, plusieurs analystes du jour semblaient trouver que le contraire s'était produit, les portant à se demander à quel point le parti était en effet conservater.rr. Simpson (Globe and Mail,le 14 janvier 2006) soulignait que le programme électoral conservateur ne mentionnait aucune réduction dans les domaines de la culture, du développement régional, de I'agriculture, de programmes sociaux ou d'assurance-emploi, ce qui était un objectif des anciens réformistes. Même l'opposition traditionnelle du mouvement de la droite aux subventions accordées aux entreprises était disparue du programme électoral du parti

(Flanagan 2007, p. 227).

Du côté des dépenses, le Parti conseryateur selon Doern (2006, p. 8) s'engageait

à respecter les programmes sociaux établis et d'augmenter les dépenses gouvernement¿les totales de 30 milliards de dollars sur 5 ans, s'éloignant de ses principes fiscaux réformistes et alliancistes du passé. Ceci incluait une allocation annuelle de 1200$ par enfant ãgé de moins de six ans aux familles pour leur permettre de choisir le type de garde d'enfants qu'elles préféraient. De concert avec cette initiative, le parti promettait d'offrir des crédits d'impôts de 250 millions de dollars pour l'établissement de places en garderie. Certes, cela devait remplacer le programme universel de garderies dévoilé par le Parti libéral et diminuer I'influence du

100 gouvemement dans la vie quotidienne des gens, éléments traditionnels de la droite,

mais l'initiative conservatrice aurait pu devenir plus coûteuse sur une période de cinq

ans que le plan libéral (Thorpe, National Post,le 2l janvier 2006). Parmi les autres

engagements f,tscaux, on trouvait un appui aux programmes de développement régional,

ce qui était contraire à la position traditionnelle du Parti réformiste et de Stephen

Harper. Ces programmes avaient depuis longtemps été attaqués par les adhérents de la

droite comme étant simplement des programmes de bien-être social pour les régions

canadiennes moins favorisées. Le parti promettait aussi un investissement de 2 milliards

de dollars sur cinq ans pour la construction et l'entretien des routes. De plus, il offrait

200 millions de dollars en crédits d'impôts pour la construction de logements à prix modiques. En éducation, on promettait 100 millions de dollars pour le soutien aux

études postsecondaires et un autre 500 millions de dollars pour la recherche uriversitaire. Les Forces armées (5, 3 milliards de dollars sur 5 ans) et l'aide à l'étranger (425 millions de dollars sur 5 ans) étaient d'autres domaines favorisés par le

Parti conservateur.

Dans le domaine de la santé, Stephen Harper s'était engagé à respecter le système de santé uriversel en respectant I'accord de 41 milliards de dollars qu'avaient conclu le gouvernement fédéral et les provinces en2004.Il espérait aussi conclure une entente selon laquelle le gouvernement fédéral et les provinces accepteraient de défrayer les coûts liés au traitement de patients si ces derniers ne pouvaient recevoir les soins nécessaires da¡rs un délai raisonnable et dans leur propre province. Même si

Harper voyait un rôle possible pour le secteur privé dans la prestation de certains services, il promettait de continuer à financer, à partir des fonds publics, le système de

101 santé (Parti conservateur du Canada, << Stand Up for Canada >, p. 30-31). Bien que le

programme du parti n'ait pas fixé de sommes précises pour ces dépenses, I'engagement

monétaire était substantiel.

Enfin, Stephen Harper disait aussi reconnaître qu'il existait un déséquilibre

fiscal entre les provinces et le gouvernement fédéral, ce demier bénéficiant de surplus

annuels tandis que les provinces avaient de la difficulté à maintenir lews prograrrunes

sociaux. Sans encore y attacher une somme spécifique, il proposait une entente selon

laquelle le déséquilibre fiscal serait une fois pour toutes éliminé en remettant aux provinces les sommes nécessaires pour qu'elles administrent leurs programmes. Par contre, le programme électoral ne spécifiait pas si le gouvemement fédéral transférerait aussi aux provinces le pouvoir d'administrer à leur guise les prograÍrmes visés, ce qui aurait été préférable aux yeux des anciens réformistes et alliancistes, ou s'il continuerait

à jouer un rôle important dans ces domaines.

Dans son ensemble, le programme fiscal du Parti conservateur a été critiqué comme n'étant pas assez conservoteur et de ressembler plutôt au budget libéral :

The Tory spending plans over five years virtually match those of the Martin Lìberals [...] These are hy far the largestfederal spending increases'since the I970',s and are now propelled by a hidcling war. (Doem 2006, p. 11)

Malgré les quelques réductions du côté des impôts, on peut affirmer que pour plusieurs, le conservatisme fiscal de la droite semblait être mis en veilleuse, du moins temporairement. C'est Simpson (Globe and Mail,le 14 janvier 2006) qui a résumé le

jugement mieux le général par rapport aux dépenses promises par le Parti conservateur :

<< Reþrmers, such as M. Harper, whofirst ranfor ffice in I9BB, would hsve

t02 blanched. >

La politique sociale incluse dans le programme électoral du Parti conservateur

reprenait clairement plusieurs des principes établis lors de la convention à Montréal en

2005. En général, elle pourrait être décrite coûrme étant encore en partie socialement

conservatrice bien que bon nombre de ses éléments les plus controversés figurant

traditionnellement dans les programmes réformistes et alliancistes s'y trouvaient

nettement atténués.

Du côté des langues officielles, la volte-face qu'avait effectuée le parti à

Montréal en 2005 en adoptant une résolution appuyant le bilinguisme offici el a été réaffirmée dans son programme électoral et dans ses actions menant à I'élection de

2006. Quelques jours avant le déclenchement de la campagne électorale à la fin novembre, le Parti conservateur a appuyé un amendement à la Loi sur les langues officielles qui exigeait que le gouvernement fédéral appuie les minorités francophones à l'extérieur du Québec et la minorité anglophone à I'intérieur du Québec et qui donnait le droit à ces minorités de poursuivre le gouvernement fédéral s'il manquait à ses responsabilités. Un tel amendement n'au¡ait jamais été, accepté par les partis réformiste et allianciste qui avaient traditionnellement maintenu que les questions de langue devaient être administrées par les autorités politiques locales. Il se peut fort bien que plusieurs membres du caucus conservateur n'étaient pas enchantés d'avoir à appuyer une telle initiative, mais il était devenu évident, aux yeux de Stephen Harper, que le parti devait se montrer en faveur du bilinguisme officiel s'il voulait avoir du succès le jour du scrutin. D'ailleurs, Harper avait dit à son caucus qu'il n'avait pas le choix que de voter en faveur de I ' amendement (Fraser, Toronto Star , le 1 0 décembr e 2005). Le

103 programme électoral du parti réaffirmait le statut égal des deux langues officielles ainsi

que leur utilisation dans toutes les institutions du Parlement et du gouvernement du

Canada. De plus, les conservatews promettaient de travailler avec les provinces pour

encourager la population canadienne à apprendre les deux langues offrcielles. Le parti

s'engageait également à établir un secrétariat de la francophonie au sein du ministère du

Patrimoine canadien, geste appuyé entre autres par le président de la Fédération

canadienne des communautés francophones et acadiennes du Canada (FCFA). Ce demier constatait, en effet, qu'il semblait y avoir eu une évolution dans la pensée du

Parti conservateur et de Stephen Harper depuis quelque temps (SRC Manitoba, le 13 janvier 2006). La position de Harper se résume dans un extrait d'un discours qu'il prononçait à la Chambre de commerce de la ville de Québec dwant la campagne

électorale le 19 décembre 2005. < Nous ne devons jamais oublier que le Canada a été fondé à Québec, par des francophones. Voilà pourquoi je dis que le Québec est le cæur du Canada, et que la langue française est un élément indéniable de l'identité de tous les

Canadiens. > (Harper, 2005)

Sur le dossier de I'immigration, les propos du parti étaient très différents de ce qu'un milit¿nt réformiste ou allianciste aurait prononcés. Alors que ces derniers auraient préféré réduire le nombre d'immigrants dans le pays, leur nier certains droits fondamentaux et encourager l'arrivée de gens qualifiés qui pouvaient combler certains besoins économiques du pays, Stephen Harper reconnaissait que l'immigration était une composante essentielle de la société canadienne et de sa prospérité économique

(Canadian Issues, été 2005, p. 8). Il proposait de mettre en place, par l'entremise d,une agence, des mesures pour mieux évaluer et reconnaître les titres de compétence des

104 nouveaux arrivés. De plus, Harper désirait faciliter la réunification des familles,

poursuivant ainsi la tradition longtemps établie au Canada d'accueillir des réfugiés et

adresser le besoin de financement à long terme pour les agences responsables de

faciliter l'intégration des immigrants à la société canadienne (Canadían Issues, été

2005, p. 8). Il promettait aussi de réduire et possiblement éliminer à l'avenir les droits

d'établissement de 975$ (si la situation économiqùe le permettait) que devaient payer

de nombreux immigrants (Castonguay, Le Devoir,le Sjanvier 2006).Il est à noter que

la politique d'immigration conservatrice n'a pas échappé aux critiques. Ibbitson (Globe and Maíl,le 5 janvier 2006) a souligné que la reconnaissance des titres de compétence tombait dans les champs de compétences provinciaux, ce qui aurait pu porter à croire que le parti étaitprêt à s'ingérer dans les champs provinciaux, notion qui allait à

I'encontre des principes du Parti conservateur et de ses prédécesseurs qui auraient encouragé plutôt la décentralisation du gouvernement et le respect des champs de compétences. Quoi qu'il en soit, le prograÍrme conservateur, contrairement à celui des réformistes et des alliancistes, reconnaissait davantage les avantages de l'immigration et le rôle important que le gouvemement fédéral avait à jouer dans ce dossier.

D'autres éléments de la politique sociale du parti pourraient, toutefois, servir d'exemples pour démontrer qu'il n'avait pas complètement rejeté son agenda traditionnel de droite. La position de Stephen Harper et de son parti n'avait guère changé depuis des années par rapport aux mariages gais. Bien que Harper ait lui-même probablement préféré laisser la question disparaître et qu'il essayait autant que possible durant la campagne électorale d'éviter de discuter de questions sociales controversées

(Fekete, Calgary Herald,le 20 janvier 2006), il promeffait de soumettre à un vote libre

10s en Chambre une motion qui redéfinirait le mariage coÍrme étant une union entre un

homme et une femme. Si la motion était adoptée, elle mettrait fin aux mariages gais au

Canada bien que ceux qui aient déjà été célébrés continueraient à être reconnus. Cette

position a été accueillie favorablement par les militants de la droite; par contre les

adhérents du conservatisme social doutaient qu'un gouvemement sous Stephen Harper

serait prêt à ouvrir à nouveau des débats sur d'autres questions socialement délicates,

telles que I'avortement (Fekete, Calgary Herald,le 20 janvier 2006).

Dans son programme électoral, le Parti conservateur notait clairement que s'il formait le gouvernement, il refuserait d'initier ou d'appuyer des projets de lois qui

réglementeraient l'avortement (Parti conservateur du Canada, << Stand Upfor Canada >>, p. 3 I ), position soutenue par Stephen Harper depuis la conférence à Montréal en 2005.

En théorie, cet énoncé aurait dû apaiser les adhérents du mouvement pro-choix; par contre certains indices durant la campagne électorale ont laissé sous-entendre que le débat pourrait à un moment donné être repris en Chambre. Action Canada pour la populotion et le développement (ACPD), une organisation pro-choix, faisait remarquer que la plupart des membres du caucus conservateur se disaient pro-vie et que même si

Stephen Harper lui-même ne voulait pas prendre de position sur la question, un gouvernement composé en majorité de députés pro-vie pourrait, sans légiférer sur l'avortement, en limiter tout de même l'accès. Ceci pourrait se faire notamment en retirant le financement de cliniques offrant des informations sur l'avortement, en amendant le Code criminel et la Constitution pour donner au fétus le statut de personne, ou en retirant I'avortement de la liste des services assurables dans le cadre de la Loi sur

106 la santé (Conada NewsWire,le 20 janvier 2006).Il était aussi connu à l'époque qu'une

dizaine de membres du caucus libéral ét¿ient pro-vie (Curry, Globe and Mail,

le 14 janvier 2006), ce qui risquait d'enflammer tout débat éventuel sur cette question.

De plus, Harper lui-même, lors d'une entrevue durant la campagne électorale, a refusé

de promeffre qu'il n'y aurait jamais un projet de loi ou un vote libre visant

I'avortement, préférant dire qu'il n'avait aucun intérêt à débattre la question dans un

avenir rapproché (Flanagan 2007, p. 263). Compte tenu de ces prises de position, il était

diffrcile de conclure que la question était close.

D'autre part, Ie domaine de la garde d'enfants, portait moins à la confusion et plaçait le parti nettement dans le camp des conservateurs de droite. Le parti proposait remettre aux familles 100$ mensuellement pow chaque enfant de moins de six ans, somme qui serait utilisée pour défrayer les coûts reliés à la garde d'enfants, quelque soit le type de service choisi. Même si les coûts rattachés à cette initiative représentaient des sommes considérables, elle répondait à des principes de base du conservatisme social, ca¡ le parti remettait entre les mains des familles Ie pouvoir de choisir ce qui était le mieux pour leurs enfants, limitant ainsi l'influence et la taille du gouvernement (Dufff,

Canllest News, le 19 décembre 2005). Le projet de Harper a été fortement critiqué par les adversaires des conservateurs. Friendly (2006, p. 4l) déplorait que les conservateurs voulaient éliminer le système universel de garderies que voulait mettre en place le gouvernement de Paul Martin, soulignant qu'un tel système basé sur des principes de qualité, d'universalité, d'accessibilité et de développement de la jeune enfance aurait amélioré la qualité des garderies déjà existantes en développant des programmes

éducatifs de qualité pour la jeune enfance tout en foumissant de l'appui aux familles

101 dont les deux parents se trouvaient très souvent sur le marché du travail. De plus, la

soÍtme remise aux parents dans le cadre du plan conservateur était critiquée comme

étant trop modeste et davantage profitable aux familles à revenu moyen ou élevé, car les

familles pauvres qui voulaient placer leur enfant dans une garderie n'avaient pas les

fonds suffisants pour combler le manque à gagner (Friendly, Toronto star,

le 19janvier2006).

Le programme conservateur sur le crime se situait dans la longue tradition des réformistes et alliancistes qui appuyaient avant tout la punition des coupables et la protection de la population. Les nombreux éléments inclus dans ce dossier illustraient l'importance du sujet pour le Parti conservateur. Il proposait des peines d'emprisonnement obligatoires et sévères pour ceux trouvés coupables de crimes violents et de crimes commis avec des armes à feu tout en limitant les libérations conditionnelles pour certains détenus ainsi que la création d'un registre de délinquants sexuels. Il appuyait aussi des peines adultes pour desjeunes âgés de 14 ans et plus ayant commis des crimes violents, ce qui était tout de même moins sévère que le programme du Parti réformiste qui aurait fait de même pour les enfants âgés de 10 ans et plus. De plus, il promettait I'ajout de 2500 policiers dans les municipalités et le retrait du droit de vote aux prisonniers. Somme toute, le programme électoral du parti sur le crime était plutôt draconien, ne metLant aucun accent sur Ia réhabilitation des détenus ni sur leur réintégration à la société et ne touchant que marginalement à la prévention du crime.

En général, les domaines analysés du programme électoral de2006 du Parti conservateur peignent un portrait d'un parti qui voyait la nécessité de se repositionner

108 vers le centre pour être mieux perçu aux yeux de l'électorat sans toutefois négliger ses

membres plus conservateurs issus des mouvements réformistes et alliancistes qui

formaient toujours un bloc important au sein du parti. Dans son ensemble, les analystes

ont jugé Ie programme coriservateru comme étant plutôt modéré. Les réductions

d'impôts, pour la plupart modestes, ainsi que des engagements considérables envers les

programmes sociaux et le système de santé en particulier ont poussé Doern (2006, p.8)

à décrire conune Liberal Líte Ie progr¿ürme fiscal de Stephen Harper, plutôt qu'rm true

blue plus conservateur. De concert avec des réformes démocratiques et une politique

sociale moins réactionnaires, le programme entier du parti aurait pu, d'après Simpson,

(Globe and Mail,le 14 janvier2006) être accepté par des leaders progressistes- conservateurs tels que Robert Stanfield, Joe Clark ou Brian Mulroney. D'après

Newman (Maclean s, le 6 février 2006, p. 40), ce repositionnement, au moins partiel, vers le centre pouvait être attribué en grande partie au chef Stephen Harper qui comprenait que l'électorat canadien était avant tout pragmatique et non idéologique et qu'il était guidé par des principes de modération. C'est ce repositionnement qui allait

lui permettre de jouir d'une victoire lors de l'élection générale du 23 janvi er 2006 :

< Stephen Harper become a threat to the Liberals only when he acted on his new þund wisdom by joining the struggle to dominate the political centre, then shaping his party's policies and personal attitudes accordingly. l (Newman2006, p. 40)

En conclusion, la contribution de Stephen Harper à la transformation du Parti conservateur et à son succès électoral est incontestable. En moins de quatre ans, il est devenu chef d'un parti conservateur radical, l'Alliance canadienne, l'a fusionné avec le

Parti progressiste-conservateur pour établir le Parti conservateu.r du Canada et a réussi à

109 avancer Lrn programme plus modéré qui a rendu possible la victoire électorale du mouvement conservateur à l'échelle nationale pour la première fois depuis 1993. Une analyse détaillée du gouvernement conseryateur de Stephen Harper dans le chapitre suivant permettra de déterminer jusqu'à point il a implanté son programme plus modéré dans les domaines de la réforme des institutions démocratiques, de la fiscalité et de la politique sociale depuis 2006.

110 Chapitre VI - Le Parti conservateur au pouvoir

La campagne électorale qui a mené à l'élection fédérale du 23 janvier 2006 a été

déclenchée le 28 novembre 2005 lorsque le gouvernement libéral de Paul Martin a été

défait sur une motion de censure, menant à la dissolution de la Chambre des

cofirmunes. Comme l'ont démontré Clarke, Kornberg, Scotto et Twyman (2006), aux

débuts de la campagne, il semblait que le Parti libéral se positionnait pour remporter

une autre victoire, les sondages montrant qu'il détenait une avance de presque dix points sur le Parti conservateur de Stephen Harper. Mais vers la f,rn du mois de

décembre 2005 , l' écart dont profitaient les libéraux a commencé à diminuer pour complètement disparaître à peine trois semaines avant l'élection. Les conservateurs, entretemps, voyaient augmenter leur niveau de popularité auprès de la population canadienne et ils ont gagné l'élection le 23 janvier, ce qui a signalé le retour au pouvoir au niveau national d'un parti dit conservateur pour la première fois depuis 1993. Le parti de Stephen Harper a été victorieux dans 124 des 308 circonscriptions, dont 40 en

Ontario et 10 au Québec. La victoire ne lui a pas permis de former un gouvemement majoritaire, mais il y avait une nette amélioration par rapport aux résultats des élections précédentes.

La victoire des conservateurs peut être attribuée à plusieurs facteurs entre autres,

I'effort de présenter une image plus modérée et certains événements qu'ils n'avaient pas anticipés. Lors de la campagne électorale, le gouvernement libéral a passé la majeure partie de son temps à répondre aux accusations de corruption liées au scandale des commandites qui avaient fait surface durant l'enquête de la Commission Gomery.

Pour sa part, le bureau du ministre des Finances, Ralph Goodale, a été accusé d'avoir

111 agi de façon inappropriée par rapport à urre affaire des fiducies de revenu. De plus, le

meurtre d'une jeune fille, victime innocente de violence commise par des gangs de rues

de Toronto durant le temps des fêtes, a donné un élan aux promesses électorales faites par les conservateurs dans le domaine du crime. Facteur tout aussi important,

cependant, a été la campagne organisée par Stephen Harper.

[...J Harper and his colleagues emphasized a limited set of policies with broad appeal. Insofar as possible, divisive position issues such as abortion, immigration qnd same- sex marriage were ,side-,stepped, and parÍy ideologue,s were tightly muzzled. As a result of their positive, centrist campaign, the Conservatives were able to minimize the fficts of Liberal efforts to brand them as right-wing exÍremi.,ct,s. (Clark et autres 2006, p.I 5)

Cette campagne plus centriste a permis au parti d'établir une coalition regroupant des

électeurs aux intérêts variés, cornme l'avaitfait Brian Mulroney en 1984. C'est grâce aux efforts de Stephen Harper que le parti avait pu réunir des anciens réformistes et alliancistes, des conservateurs rouges, des libéraux bleus et des Québécois bleus.

D'après Watt (2006), les promesses.électorales du parti de rétablir l'intégrité au gouvernement, de réduire la Taxe sur les produits et services, de donner Ie choix aux parents dans le domaine de la garde d'enfants, de s'attaquer au crime et d'offrir une garantie sur les délais d'attente pour les services essentíels dans le domaine de la santé

étaient assez attrayants pour ces différentes factions et répondaient à certains de lerus désirs sans être perçues cornme étant trop à la droite ou à la gauche de l'éventail politique. D'ailleurs, Stephen Harper a confirmé lui-même la nécessité d'équilibrer son

programme pour répondre aux besoins de Ia coalition dans son ensemble :

The reason I've been able to assemble the coølition I have from (he wrecknge of conserl)aÍism when I became leader of the Opposition. is that, infact, I

112 høve taken a balanced approach [ .J We address a range of policy i,s,sue,s, and a range of concern,s among dffirent conservatives [... J (Harper dans O'Neill 2006, p. 29)

Les analyses des résultats de l'élection de janvier 2006 ont confirmé que les

conseryateurs de Stephen Harper avaient réussi à se présenter comme un parti plus modéré qui était en mesure de faire des promesses acceptables aux yeux de diverses factions au sein de l'électorat canadien. Toutefois, des promesses électorales, bien qu'elles soient essentielles, ne sont pas suffisantes en elles-mêmes pour évaluer le positionnement réel d'un parti politique. Très souvent en politique, des partis qui ont formé le gouvernement ont manqué, pour de nombreuses raisons, à leurs promesses

électorales ou les onJ modif,iées pour réagir à une variété de circonstances. Ceci exige alors une réévaluation du programme du parti une fois qu'il assume le pouvoir.

Idéalement, pour bien juger de sa position, il serait préférable que le parti forme un gouvernement majoritaire, ce qui lui permettrait d'implanter plus facilement son programme. Souvent, en situation minoritaire, un gouvernement doit faire des compromis avec ses adversaires politiques sur des questions plus contentieuses pour demeurer au pouvoir et il finit par diluer en quelque sorte son programme originel.

Le nouveau gouvernement conservateur se trouvait dans une telle situation minoritaire au lendemain de l'élection. N'ayant remporté que 124 des 308 sièges à la

Chambre des communes, il aurait à chercher l'appui d'un ou de plusieurs partis pour faire adopter ses projets de lois. Malgré ces circonstances, le parti était décidé d'implanter son progralnme électoral, ce qu'il a affirmé dans le discours du Trône prononcé le 4 avril 2006. Les cinq points majeurs sur lesquels il avait axé sa campagne

électorale, soit I'imputabilité, le crime, la TPS, la garde d'enfants et les délais d'attente

113 pour les services en santé lui serviraient de tremplin pour établir un programme plus

vaste au cours des mois qui suivraient.

1. Le programme du parti

Même s'il n'a été au pouvoir qu'à peine derx ans et cela dans un contexte

minoritaire, le gouvernement de Stephen Harper a entrepris une série d'initiatives qui

ont résonné sur la scène politique nationale. Précisées entre autres dans ses discours du

Trône, ses budgets et ses projets de lois, ces initiatives ont été analysées et critiquées à

tour de rôle par des adhérents de droite et de gauche, qui essayaient tous et chacun de préciser sa position sur l'éventail politique. Le présent chapitre étudie à fond les interventions du gouvernement depuis 2006 enmatière de réforme des institutions politiques, de fiscalité et de politique sociale pour effectivement définir le positionnement actuel du Parti conservateur du Canada et pour analyser dans quelle mesure il s'est dissocié d'éléments plus réactionnaires et populistes de son héritage depuis le retour de Stephen Harper sur la scène politique en2002.

i. La réforme des institutions politiques

Sur le plan des réformes démocratiques, le gouvernement de Stephen Harper s'est concentré, depuis 2006, sur quelques éléments reflétant son héritage réformiste, notamment la réforme du Sénat. Ayant depuis longtemps abandonné I'idée d'un Sénat triple E, il a profité de son mandat pour avancer I'argument qu'il était quand même nécessaire d'y apporter des changements afin de rendre cette institution davantage imputable à la population et pour lui donner un aspect plus démocratique.

tr4 La position actuelle du gouvemement a été clai¡ement énoncée lors du discours

du Trône du l6 octobre 2007 . Bien que son premier discours du Trône en avril 2006

fasse allusion à une réforme possible de Ia chambre haute, le plus récent marquait

I'intention des conservateurs de procéder à une < consultation directe des électeurs au

sujet de la sélection des sénateurs et de la durée de leur mandat. >> (Discours du Trône,

2007). À cette fin, le gouvernement a déposé deux projets de lois. Le premier, le projet

de loi C-l9, Loi modifiant la Loi constitutionnelle de 1867 (durée du mandat des sénateurs), prévoyait limiter le mandat des sénateurs à huit ans et, en date du 16 novembre 2007,étzitàl'étape de la detxième lecture en Chambre. Le deuxième, le projet de loi C-zL,Loi prévoyant la consultation des électeurs en ce qui touche leurs choix concemant la nomination des sénateurs, prévoyait la consultation des électeurs d'une province sur leurs préférences quant à la nomination des sénateurs pour les représenter. Le 13 février 2008, ce projet de loi a été renvoyé à un comité législatif avant sa deuxième lecture. II est à noter que ce deuxième projet de loi pouvait mener à l'élection de sénateurs à l'échelle provinciale pour remplir les postes vacants, ce qui semblait être la préférence du premier ministre Harper (Gagnon, Gtobe and Moil, le 20 mars 2006 et Vieira, National Post,le 17 mars 2006). La réforme du Sénat à partir de ces modestes initiatives étant préférable à ses yeux, le gouvernement n'a pas toutefois éliminé I'option d'abolir une fois pour toute cette institution si ces mesures ne réussissaient pas à recevoir la sanction royale :

Ce n'est pas ce que nous souhaitons. Nous préférons entreprendre une réforme avant d'envisager l'abolition. Cependant, les Canadiens voudront que nous en arrivons là si les intéressés, qui n'ont aucun compte à rendre" continuent d'user de leu¡ pouvoir démocratique de manière illégitime pour s'opposer à la démocratisation.

115 (Canada, Débats de la Chambre des communes, le 16 novembre2007)

Si le gouvemement décidait à l'avenir de passer à l'abolition de la chambre haute, il

s'est engagé par contre, à consulter la population canadienne au préalable au moyen

d'un référendum national. D'ailleurs, un sondage mené par lpsos-Reid auprès de la

population le l3 novembre2007, a montré que 640/o des Canadiens étaient en faveur

d'un référendum afin de décider de l'avenir du Sénat, bien que la majorité de ceux-ci

préferaient une réforme de I'institution et non pas son abolition.

Les réformes proposées par Ie gouvemement, ainsi que la possibilité d'utiliser

tm référendum, ont suscité de vives réactions, indiquant que le premier ministre aurait peut-être de la difhculté à mener à bonne fin ses projets dans ce domaine. Dans un premier temps, l'engagement de Stephen Harper envers un Sénat élu pourrait se voir remis en question vu qu'il avait, Iui-même, utilisé sa prérogative comme premier ministre pour nommer l'ancien co-directeur de sa campagne au leadership du Parti conservateur en 2003 au Sénat. Michael Fortier ne s'était pas présenté comme candidat aux élections, mais il est devenu ministre des Travaux publics dans le cabinet conservateur après avoir été nommé à la chambre haute. Dans un deuxième temps, les sénateurs, eux-mêmes, étant majoritairement des libéraux, ne seraient pas nécessairement en faveur de réformes qui limiteraient leurs mandats ou ceux de leurs collègues qui les suiv¡aient au Sénat. Dans un troisième temps, l'élection des sénateurs pourrait être vue comme s'attaquant aux caractéristiques fondamentales du Sénat protégées par la Constitution. Un jugement de la Cour suprême en 1980 avait stipulé que des changements à ces caractéristiques, tels que le processus de nomination et le mandat des sénateurs, nécessiteraient une modification constitutionnelle appuyée par

t16 sept des dix provinces représentant plus de 50Yo de la population. Pour éviter d'ouvrir à

nouveau le débat constitutionnel et en se basant sur le modèle albertain, le

gouvernement pourrait en théorie demander aux électeurs d'une province de choisir leur

candidat préféré parmi une liste qui leur serait soumise et le premier ministre pourrait

par la suite nommer ce candidat pour combler le poste vacant (Vieira, National Post,

le l7 mars 2006). Dans un quatrième temps, une difficulté additionnelle se présentait.

Les provinces, elles-mêmes, ne seraient pas forcément en faveur d'une.réforme du

Sénat. Il est fort probable que les premiers ministres provinciatx'ne seraient pas enchantés de voir diminuer leur rôle comme porte-paroles provinciaux au profit de sénateurs élus ayant dorénavant plus d'autorité législative et dont une des responsabilités majeures serait de promouvoir et de protéger les intérêts provinciaux

(Æifl Notional Post,le 12 novembre 2007). D'ailleurs, les premiers ministres provinciaux ne se sont pas montrés intéressés à discuter de cette réforme lorsqu'ils ont rencontré le premier minist¡e Harper en janvier 2008, préférant s'attaquer aux questions

économiques du jour (castonguay , Le Devoír, le 10 janvier 2008). En plus de ces nombreux obstacles, le Sénat élu pourrait contester I'autorité de la Chambre des communes en soutenant que son autorité venait aussi de l'électorat, ralentissant ainsi le processus législatif, surtout si chacune des deux chambres était contrôlée par différents partis (Castonguay, Le Devoir, le 10 janvier 2008). Il faudrait également décider si les

élections sénatoriales seraient contestées au fi.r et à mesure qu'il y aurait des ouvertures ou en même temps que les élections fédérales. Parmi d'autres considérations, demanderait-on aux candidats de porter les couleu¡s d'un parti ? Au¡aient-ils à faire preuve de certaines compétences ou la course serait-elle ouverte à quiconque était

t17 intéressé? Et, finalement, on doit se demander si les électeurs, eux-mêmes, prêteraient

beaucoup d'attention à de telles élections, I'expérience albertaine ayant démontré une

certaine apathie chez I'électorat (Vieira, National Post,le 17 mars 2006).

Compte tenu de toutes ces difficultés, il n'est pas surprenant que le premier ministre ait appuyé récemment I'idée d'utiliser un référendum pour décider de I'avenir du Sénat. Il s'est prononcé en faveur de la tenue d'un référendum en même temps qu'une élection fédérale afin d'éviter les coûts de 300 millions de dollars qui y seraient rattachés; par contre ceci nécessiterait une modification de la Loi référendaire adoptée en 1992. Cette loi ne permet pas la tenue d'un référendum en même temps qu'une

élection et stipule que la question référendaire doit être répondue par un oui ou vn non, ce qui compliquerait encore la tâche du gouvernement qui préférait que la population se prononce entre la réforme ou I'abolition. De plus, toute question référendaire doit être approuvée par la Chambre des communes et le Sénat. Un Sénat majoritairement libéral serait peut-être réticent d'accepter une question proposant son abolition (Castonguay,

Le Devoir,le 10 janvier 2008). Enfin, il est important de noter que la procédure de modification de la Constitution du Canada ne prévoit pas l'abolition du Sénat. Il pourrait alors être argumenté que la procédure normale de modification, c'est-à-dire d'avoir l'appui de la Chambre des communes, du Sénat et de sept des dix provinces représentant plus de 50%o de la population ne serait pas suffisante pour apporter un tel changement à une institution politique fondamentale. Cela nécessiterait peut-être le consentement unanime des deux chambres et des dix provinces comme il est le cas pour la constitution de la Cour suprême et pour la charge de Reine, de gouverneur-général et de lieutenant-gouverneur.

118 A part les quelques réformes modestes proposées du côté du Sénat, le

gouvemement conservateur a tenté, depuis l'élection de janvier 2006, d'apporter

d'autres réformes aux institutions démocratiques en adoptant, en décembre2006,la Loi

sur l'imputabilité dont le but principal était de rendre le gouvernement davantage

responsable de ses actions et transparent aux yerx des électeurs. Une loi sur

l'imputabilité avait été promise par le Parti conservateur durant la campagne électorale

afin de redonner confiance à l'électorat en limitant les contributions financières aux partis politiques et le pouvoir des groupes de pression, réduisant jusqu'à un certain point I'influence des intérêts spéciaux sur les institutions et en faveur des électeurs.

De façon générale, le gouvernement conservateu¡ a été accusé d'avoir manqué à plusieurs de ses promesses dans le domaine de I'imputabilité. Les contributions monétaires aux partis politiques ont été limitées, mais du côté des groupes de pression, la promesse qu'avait faite Stephen Harper d'interdire aux anciens ministres, aux membres de leur personnel et aux hauts fonctionnaires d'agir comme lobbyiste auprès du gouvernement pour une période de cinq ans après avoir quitté leur poste, a été mitigée et limitée à certains fonctionnaires (CBC News, le 25 mu 2006). De plus, les conservateurs s'étaient engagés à rendre obligatoire la divulgation de tous les contacts qu'auraient pu avoir les ministres avec les groupes de pression, mais la réglementation proposée en janvier 2008 n'incluait pas les contacts faits par courriel, une lacune sérieuse d'après Democracy l[/atch, groupe qui surveille le gouvernement dans le domaine de la transparence (Gazette,le 5 janvier 2008). Le gouvernement Harper a aussi été critiqué d'avoir mis beaucoup trop de temps, depuis qu'il est au pouvoir, à répondre aux demandes d'accès à I'information de lapartdes Canadiens, ce qui soulève

119 un doute quant à sa promesse de rendre le gouvemement plus transparent aux yeux de

ses citoyens. Il a été accusé par le Commissaire à l'information de remettre de la

documentation incomplète ou trop censurée (Aubry, Ottawa Citizen,le 30 mai 2007).

Même le juge John Gomery, qui dans son rapport portant sur le scandale des

commandites avait suggéré de rendre le gouvernement plus transparent en modifiant la

Loi sur l'accès à l'information, est d'avis que le gouvemement Harper, par ses actions,

a limité cet accès et a refusé d'adopter plusieurs de ses recommandations (Brown,

Canadìan Press Newsll/ire,le 30 janvier 2008).

Deux autres réformes des institutions politiques trouvant leurs origines dans

I'ancien Parti réformiste se sont retrouvées dans le programme conservateru depuis les deux dernières années. D'abord, le parti avait promis, lors de la demière campagne

électorale, que tous les votes au Parlement sauf les votes sur les budgets et su¡ les budgets principaux des dépenses seraient des votes libres pour les députés ordinaires de la Chambre des communes. Longtemps une pierre angulaire des programmes réformistes et alliancistes, cette promesse a été à toute fin pratique rejetée par le nouveau gouvernement lorsqu'il a ajouté à sa liste d'exceptions les votes sur toutes les questions qu'il jugeait prioritaires dans le cadre de son programme. Le gouvemement n'avait alors qu'à déclarer qu'un vote était important pour forcer les membres de son caucus à voter comme il le souhaitait (Aucoin, Canadian Parliamentary Review, automne 2006). Deuxièmement, les conservateurs ont agi sur leur promesse de modif,rer la Loi électorale pour que les Canadiens soient convoqués à des élections fédérales à une date fixe chaque quatre ans. Ayant reçu la sanction royale en mai 2007,Ie projet de loi C-16, Loi modifiant Ia Loi électorale du Canada, mandate que les élections

r20 générales auront lieu le 3'lundi du mois d'octobre, commençant en 2009 sauf s'il y a

dissolution anticipée de la Chambre des coÍìmunes. Cette modification à la Loi

électorale a pour but d'éliminer le privilège du premier ministre de dissoudre la

Chambre à son gré, généralement lorsqu'il pense que les conditions permettraient à son

gouvemement d'être réélu. Une telle loi pounait aussi aider les partis politiques à

recruter de meilleurs candidats et de les former, puisque la date des élections serait

connue longtemps à I'avance et cela faciliterait la planification à long terme au sein du

gouvernement, étant donné que la période entre les élections serait stable (Butler,

Ottowa Citizen,le 10 septembre2007).Par contre, la loi comportait aussi certaines lacunes. En théorie, les campagnes électorales pourraient devenir de plus en plus longues, réduisant ainsi l'efficacité de la Chambre. De plus, les gouvernements pourraient prof,rter des dates f,rxes poru annoncer une liste de promesses ou pour dépenser de fortes sommes au fi¡r et à mesure que la date des élections approche. Aussi, une date fixe pour les élections n'élimine pas la possibilité que le gouvernement soit défait sur une motion de censure (Butler, Ottøwa Citizen,le 10 septembre 2007), ce qui est une réalité en contexte minoritaire, situation qui prévaut à I'heure actuelle au

Canada.

En résumé, les réformes des institutions politiques prônées depuis plus de 20 ans par le mouvement de droite sur la scène politique canadienne ont été en grande partie atténuées sinon éliminées par le gouvernement conservateur de Stephen Harper.

Les réformes démocratiques du programme allianciste, dont il a hérité en2002, ont aujourd'hui un caractère beaucoup moins populiste. Pour ce qui est de la réforme du

Sénat, le gouvernement proposait l'élection des sénateurs et de limiter leur mandat,

121 mais après deux ans au pouvoir, il n'a pas encore mené ses projets à bonne fin et aura,

semble-t-il, à surmonter une série d'obstacles pow y arriver. Par exemple, s'il décide

d'utiliser un référendum pour décider de I'avenir du Sénat, il devra modifier au préalable la Loi référendaire. Si la population se prononce en faveur de l'élection directe des sénateurs, le gouvernement Harper sera-t-il prêt à ouvrir à nouveau le débat constitutionnel et à modifier les caractéristiques fondament¿les du Sénat, ce qui nécessiterait I'appui des deux chambres et de sept des dix provinces représentant 50o/o de la population? Dans l'affirmative, quelles seraient les nouvelles caractéristiques du

Sénat et qui serait éligible à se présenter aux élections? Si le premier ministre choisit d'utiliser le modèle albertain, sera-t-il prêt à respecter le vote et à nommer le gagnant de l'élection, quelle que soit I'orientation politique de ce dernier? Ne faudrait-il pas aussi trouver une façon de rassurer les premiers ministres provinciaux et de voir à ce que le

Sénat ne conteste pas l'autorité de la Chambre? Le gouvemement s'est prononcé en faveur de l'abolition de I'institution s'il n'arrive pas à la réformer, mais serait-ce prudent si les sondages auprès de l'électorat n'appuient pas cette option? Dans leur ensemble, si ces quelques réformes modestes du Sénat peuvent être à I'origine de tant de questions et de préoccupations, il est possible d'imaginer comment des réformes plus populistes telles que le Sénat triple E pourraient susciter de vives réactions et une forte opposition.

Les autres réformes démocratiques auxquelles le Parti conservateur s'est engagé démontrent clairement qu'il s'est dissocié du prograÍrme populiste qui avait caractérisé les programmes réformistes et alliancistes. Il a véritablement renoncé à sa promesse de permettre des votes libres en Chambre, et ses efforts de transparence gouvernementale

t22 ont été critiqués. Même si le parti conservateur a pu faire adopter une loi fixant la date

des élections fédérales, il a donné l'impression qu'il était prêt à laisser tomber son propre gouvernement et déclencher une élection en annonçant tout récemment que le

vote sur I'avenir de l'engagement des forces canadiennes en Afghanistan était un vote de confiance en son administration.

Somme toute, au lieu de réduire le pouvoir politique des élites à Ottawa et des intérêts spéciaux pour le remettre entre les mains des électeurs comme I'aurait dicté son héritage réformiste, Stephen Harper semble avoir réussi à contrôler de plus en plus, à sa manière, les institutions politiques : < [...J there's more concentration of power ín the

Prime Mínister's Office than we've ever had before, whích is quite remarkable in a minority governmen\ but he's pulled it off. t (Gomery dans Brown, Canødian Press

NewslIlíre,le 30 janvier 2008)

ii. La fiscalité

À la veille de l'élection générale en 2006, le programme fiscal adopté par le

Parti conservateur du Canada comprenait une série de promesses qui, rappelons-le, engageaient le parti à dépenser des sommes considérables pour maintenir les programmes sociaux et pour redresser le déséquilibre fiscal tout en offrant des réductions d'impôts modestes aux contribuables. Évaluées à l'époque comme des mesures fiscales peu conservatrices, elles semblaient montrer une orientation vers le centre. Par contre, afin d'évaluer de façon plus juste la position du gouvemement

Harper, il est nécessaire d'analyser son programme fiscal depuis qu'il est au pouvoir.

Pour ce faire, la présente section portera sur les trois budgets déposés par le Parti

123 conservateur, ceux du 2 mai 2006, du 19 mars 2007 et du 26 février 2008 ainsi que le mini-budget déposé le 30 octobre2007.

De façon générale, le premier budget du gouvernement Harper était fidèle ar¡x promesses faites lors de la campagne électorale de 2005-2006. Du côté de l'allègement du fardeau fiscal des particuliers, il a annoncé la réduction de la Taxe sur les produits et services de 7o/o à 6Yq représentant ainsi un manque à gagner pour le gouvernement de

8,7 milliards de dollars sur deux ans. Harper a aussi annoncé urne légère augmentation de 100$ du montant personnel de base pouvant être déduit des impôts, bien que celle-ci représente en effet une diminution de 400$ de la hausse annoncée par le ministre des

Finances libéral Ralph Goodale en janvier 2006 à la veille de l'élection. D'autres initiatives incluaient entre autres, un crédit d'impôt de 1000$ pour les apprentis de métier et un crédit d'impôt pour les laissez-passer utilisés pour le transport en commun.

Par contre, le gouvernement a augmenté Ie taux d'imposition sur la tranche de revenu la plus basse de I5o/o à 15,5o/o et a renoncé à sa promesse de ne pas taxer les gains en capital si ceux-ci étaient réinvestis à I'intérieur de six mois.

Pour les entreprises et les gens d'affaires, les mesures les plus significatives adoptées étaient la réduction du taux général d'imposition du revenu des sociétés de

21% à l9Yo d'ici 2010,1'élimination de I'impôt fédéral sur le capital et l'élimination de la surtaxe sur les entreprises entrant en vigueur en 2008. D'autre part, le gouvernement offrait un crédit d'impôt allant jusqu'à 2000$ pour les employeurs voulant embaucher des apprentis et un autre crédit de 500$ pour ies gens de métier dont les achats d'outils dépassaient 1000$.

124 Sur le plan des dépenses, le gouvernement Harper s'engageait à remettre

annuellement aux familles canadiennes une somme de 1200$ par enfant âgé de moins

de six ans pour les aider à défrayer les coûts reliés à la garde d'enfants, tout en offrant des crédits d'impôt de 250 millions de dollars sur 5 ans pour des organismes privés ou à but non lucratif intéressés à créer jusqu' à 725 000 places en garderie. Dans Ie domaine de la santé, il promettait d'augmenter les transferts fédérau de 60lo, dont

5,5 milliards de dollars serviraient à réduire le temps d'attente, respectant ainsi I'entente qui avait été conclue entre I'administration libérale précédente et les provinces. Le budget accordait aussi 52 millions de dollars par année sur cinq ans pour lutter contre le cancer. De plus, le budget comprenait entre autres, une promesse de remettre 0,05$ par lit¡e de la taxe fédérale sur l'essence aux provinces et aux municipalités pour les aider à combler leu¡s besoins en infrastructure, une soÍrme de 200 millions de dollars pour la construction de logements à prix modique sous forme de crédits d'impôts et un milliard de dollars pour l'éducation postsecondaire. Pour redresser le déséquilibre fiscal, le budget accordait à court terme au-delà de 255 millions de dollars à certaines provinces dans le cadre de la péréquation, bien que le gouvernement se disait prêt à consulter ces demières avant I'automne 2006 pour arriver à r¡ne solution plus permanente.

Finalement, le gouvernement promettait d'utiliser une partie de ses surplus budgétaires pour réduire Ia dette par 3 milliards de dollars par année.

Comme tout budget, celui du gouvernement Harper en2006 a suscité des réactions variées mais, dans son ensemble, il ne semble pas avoir représenté un virement prononcé vers la droite ou la gauche. La société Desjardins a effectué une analyse de ce budget initial et s'est dite plutôt satisfaite de certaines initiatives du

125 gouvernement p¿u Japport à I'allègement du fardeau fiscal des entreprises, à l'équilibre fiscal maintenu et à la réduction de la dette (Desjardins, << Analyse du budget du Canada

2006 >>,le 2 mai 2006). Pou¡ sa part, le département économique de la Banque de

Montréal a conclu que le budget stimulait légèrement l'économie tandis que Craig

Wright, l'économiste en chef de la Banque Royale du Canada, considérait que les mesures budgétaires pourraient aider le Canada à devenir plus compétitif; par contre, selon lui, elles ne seraient peut-être pas suffisantes (Tuck, Globe and Maíl,le 3 mai

2006). La réduction de la TPS de lo/o à 60/0, en revanche, a été critiquée assez fortement.

La société Desjardins, appuyant I'opinion de la plupart des économistes, aurait souhaité voir une réduction de I'impôt sur le revenu au lieu d'une réduction d'une taxe de consommation car < un impôt élevé sur les revenus est moins efficace du point de vue de la productivité et constitue, dans une certaine mesure, un frein à l'épargne, à

I'investissement et à la création d'emplois. > (Desjardins 2006)

Du côté des dépenses, le gouvernement promettait de limiter l'augmentation à

5,4Yo en2006-07 et à4,1o/o l'année suivante, ce qui représentait une baisse par rapport aux dépenses du gouvernement libéral précédent (Tuck, Globe and Maí|, le 3 mai 2006). Bien qu'une telle initiative soit naturellement appuyée par les adhérents de Ia droite économique, il ne faut pas oublier que le gouvemement Harper s'engageait encore à dépenser des milliards de dollars par année dans le domaine de Ia santé, pour la Prestation universelle de la garde d'enfants, pow régler le déséquilibre fiscal et pour une série d'initiatives dans une variété de domaines allant des logements à prix modique à l'éducation postsecondaire. Contrairement à ce que préconise l'idéologie de droite, il est à noter que bon nombre de dépenses fédérales visaient des domaines

126 comme la santé, l'éducation et le bien-être social qui, d'après la Constitution, sont de compétence provinciale, indiquant encore en2006 ure présence marquée du gouvernement fédéral dans les affaires provinciales.

Dans son ensemble, le budget initial du Parti conservateur, au lieu d'être idéologiquement à la droite ou à la gauche, semblait se placer plutôt vers Ie centre afin de plaire à autant d'électeurs que possible, ce qui n'est pas tout à fait surprenant compte tenu du fait que le gouvernement se trouvait en situation minoritaire.

La réaction au deuxième budget du ministre des finances Jim Flaherfy, déposé le l9 mars 2007, n'a pas été des plus positives, surtout de la part de la droite. Au lieu d'être loué par les adhérents de la droite corrune un budget conservateur judicietx, il a

été plutôt critiqué pour son manque d'allègement fiscal et pour ses dépenses considérées extravagantes par cerüains analystes.

Parmi les faits saillants du budget, ce dernier promettait, sur une période de trois ans, un allègement fiscal de 5,7 milliards de dollars. Ceci comprenait une nouvelle prestation fiscale pour le revenu gagné allant de 500$ pour les individus et 1000$ pour les familles. Cette prestation avait pour but d'encourager les gens de se lancer à nouveau sur le marché du travail au lieu de continuer à bénéficier de I'aide sociale. Le ministre a aussi annoncé un nouveau crédit d'impôt de 2000$ pour chaque enfant âgé de moins de l8 ans, ce qui représentait un allègement fiscal pouvant atteindre 310$ par enfant. Par aillews, le montant servant au calcul du crédit d'impôt en raison de l'âge passait à 1000$, le crédit d'impôt pour les laissez-passer de transport en commun était prolongé, le plafond pour les cotisations annuelles au Régime enregistré d'épargne-

t27 études a été éliminé et le plafond cumulatif augmenté, alors que l'âge limite pour

convertir un REER est passé de 69 à 71 ans.

Pour les entreprises, le gouvernement promettait de réduire le taux général de

I'impôt sw le revenu à 18,5% entre2007 et2011. D'autre part, il venait accorder un

appui au secteur de la manufacture en lui permettant d'appliquer un taux

d'amortissement de 50% sur deux ans sur le matériel et la machinerie acquis à partir de

la date du budget.

Pour les dépenses, le gouvernement avait promis en2006 de régler une fois pour toute la question du déséquilibre fiscal entre Ottawa et les provinces. Le budget de 2007 a tenté de résoudre cette question en promettant de remettre, sur une période de 7 ans,

39 milliards de dollars aux provinces et territoires. Inclus dans cette somme était un montant de2,l milliards de dollars sur deux ans dans le cadre du programme de péréquation, 800 millions de dollars pour l'éducation postsecondaire et 250 millions de dollars pour la création de places en garderie dans Ie cadre du Transfert canadien en matièrç de programmes sociaux ainsi que 650 millions de dollars dans le cadre du

Transfert canadien en matière d'infrastructure. Dans le domaine de la santé, le budget prévoyait un transfert de 21,3 milliards de dollars aux provinces en 2007-08, ce qui représentait une hausse de 1 ,2 milliard de dollars. De plus, 612 millions de dollars seraient investis afin de réduire le problème des périodes d'attente potu les soins médicaux. Plusieurs autres domaines figuraient dans les dépenses du gouvemement, entre autres I'agriculture (1,1 milliard de dollars), l'environnement (1,5 milliard de dollars) et la défense (819 millions de dollars). Enfin, le budget prévoyait une réduction

128 de la dette de 9,2 milliards de dollars en2006-2007 et de 3 milliards de dollars au cours des années suivantes.

La Chambre de commerce du Canada a publié un rapport peu après le dépôt du budget dans lequel elle a analysé les nombreuses mesìres fiscales annoncées par le gouvernement. Bien qu'elle se soit prononcée satisfaite que le gouvernement Harper veuille réduire la dette nationale et qu'il offrait une certaine réduction du fardeau fiscal des entreprises et des contribuables, elle a jugé qu'il restait encore beaucoup à faire. De fait, elle a critiqué les taux d'imposition sur le revenu au Canada encore trop élevés. De plus, elle se préoccupait que les dépenses gouvernementales avaient augmenté de 7 ,9o/o en2006-2007 et qu'une autre augmentation de 5,60/0 était prévue pour 2007-2008, ce qui surpassait les taux annoncés par le gouvernement dans son budget de 2006 ainsi que la croissance nominale de l'économie durant ces deux années. Elle a conclu que le budget conservateur aurait pu offrir de meilleures mesures fiscales aux contribuables

(Chambre de commerce du Canada, < Le budget fédéral du 19 mars 2007 >). Pour sa part, l'Instifut Fraser, reconnu pour son appui à une idéologie de droite, a fortement critiqué le budget conservateur. En matière de santé, Nadeem Esmail, Jason Clemens,

Niels Veldhuis et Milagros Palacios (< Iessons Lost, Billions More for Health Care

Despite Poor Performance >, avril 2007) ont questionné l'habitude du gouvernement de remettre annuellement aux provinces des sommes de plus en plus élevées sans qu'il s'attaque aux problèmes fondamentaux du système. D'après eux, un simple transfert de fonds n'améliore jamais les programmes visés à moins que I'on accorde aux provinces plus de flexibilité au niveau de l'utilisation de ces fonds et que I'on fasse appel à la participation du secteur privé, élément qui n'a pas été adressé par le gouvernement

129 conservateur et qui pourrait à la longue changer fondamentalement la façon dont les

services sociaux sont offerts au Canada. Par ailleurs, Jason Clemens et Niels Veldhuis

(<< A Conservatíve Budget in Name Only >>, avril2007) ont eu de la diffrculté à relever

des éléments réellement consertateurs dans le budget de M. Flaherfy. Quant à eux, le

gouvernement conservateur devait se retirer des domaines de compétence provinciale. Il

devait éliminer les transferts de fonds et réduire I'impôt fédéral afin de permettre aux provinces d'augmenter leurs propres impôts et de financer leurs propres services

sociaux. De façon plus générale, ils ont aussi critiqué le gouvernement soi-disant conservateur d'avoir augmenté ses dépenses de 13,9o/o en deux ans, essayant, semblait- il, de fournir un appui financier à tous et chacun. Du côté de l'allègement fiscal, leur analyse n'a pas été plus positive; ils considéraient les réductions insuffisantes et concluaient qu'en fin de compte, il n'y avait eu aucun changement important dans le taux d'imposition du revenu pour les particuliers ou les entreprises.

Somme toute, il est difficile de voir comment le budget de 2007 pourrait être considéré véritablement conservateur. De fait, il a mis un plus grand accent sur les dépenses et moins sur I'allègement fiscal que le budget de 2006 (Chase, Globe ond

Mail,le 20 mars 2007). D'après John Williamson, porte-parole du Canadian Taxpayers

Federation, le budget de 2007 a proposé la deuxième plus grande augmentation budgétaire en dollars depuis que l'équilibre fiscal avait été, atteint en 1997-1998 (Chase,

Globe and Mail,le 20 mars 2007).ll semble d'ailleurs que le gouvernement ait utilisé son surplus budgétaire pow offrir de I'appui financier à des groupes d'électeurs afin d'obtenir leur appui lors d'une prochaine élection (lvison, National Post,

130 le 20 mars 2001). Cet abandon d'une idéologie plus conservatrice n'a pas échappé à

l'analyse du Notional Citizens Coal¡t¡on et de son vice-président à l'époque, Gerry

Nicholls, qui a critiqué le fait que Stephen Harper, ancien président de l'organisme,

semblait avoir, après seulement l5 mois au pouvôir, mis de côté ses principes

conservateurs et placé son parti plus vers le centre afin d'attirer des électeurs qui

voteraient traditionnellement poru le Parti libéral (Globe and Maíl,le l2 avril 2007).

Par contre, quelques mois plus tard, le gouvernement allait déposer un mini budget qui

exigerait une réévaluation de son approche fiscale.

Le premier prograÍrme fiscal du gouvemement Harper de nature plus

conservatrice a sans doute été le mini budget déposé Ie 30 octobre 2007 . Grâce aux

surplus budgétaires encaissés depuis de nombreuses années, le gouvernement a décidé

d'offrir dans ce mini budget des réductions d'impôts totalisant 60 milliards de dollars

sur 5 ans. Et, sans qu'il réponde à toutes les préoccupations des adhérents de la droite politique, il représentait tout de même un pas dans cette direction. Les points saillants

du mini budget comprenaient, en premier lieu, une deuxième réduction de la Taxe sur les produits et services à 5% à partir du 1"'janvier 2008, ce qui représentait à elle seule un manque à gagner d'au-delà de 30 milliards de dollars pour le gouvernement sur cette période de 5 ans. Le gouvemement a de plus promis de réduire le taux le plus bas d'imposition sur le revenu de 75,5Yo à 15% rétroactif au l"' janvier 2007, un taux égal à celui qu'avait proposé le gouvernement libéral de Paul Martin avant sa défaite

électorale en janvier 2006. L'exemption personnelle de base pour l'impôt des particuliers a aussi été augmentée de 8929$ à 9600$ à partir du l"janvier 2007 et a augmenté encore une fois en janvier 2008 pour passer à 10100$. Du côté des

131 entreprises, le gouvernement a annoncé une réduction des taux d'imposition. Le taux

pour les petites entreprises est passé de L3,2o/o à ll% le 1" janvier 2008 et celui des

grandes entreprises à20% pourtomber à15Yo en20l2. Et, malgré toutes ces

réductions, le gouvemement Harper prévoyait tout de même un surplus budgétaire

d'environ 11 milliards de dollars, dont 10 milliards seraient utilisés pour réduire la dette

nationale.

Les critiques du gouvernement, tel le directeur du Centre canadien de politiques

alternatives, n'ont pas hésité à dénoncer les mesures fiscales du mini budget, disant

qu'elles n'atuaient pas beaucoup d'impact sur les particuliçrs tout en réduisant la

capacité du gouvernement à investir dans les prograÍrmes sociaux, I'environnement et

l'éducation :

Tax cuts will do nothing to help sþrocketing drug costs, our crumbling municipal infrastructure, nor provide clean drinking water on First Nations reserves. They will not create affordable chil.d care space,s, huild affirdabl.e hou,sing, lower tuitionfees, nor reduce greenhouse gases. (Campbell dans Bailey, lVinnipeg Free Press, le 31 octobre 2007)

Les analystes de la droite, pour leur part, ont été moins critiques, jugeant que le gouvernement avait pris certaines décisions importantes qui permettraient aux contribuables et aux entreprises de retenir la main sur une plus grande part de leur revenu ce qui, à la longue, aideraient le Canada à devenir plus compétitif sur la scène

économique internationale. Du côté des particuliers, une réduction du taux d'imposition devrait, en théorie, encourager les gens à épargner et à investir. Bien que la réduction aitété bien reçue, I'Institut Fraser aurait préféré voir une réduction de tous les taux d'imposition, afin d'encourager davantage de contribuables à épargner et à investir

(Fraser Institute, << October Tax Cuts a Beginning, Not an End >>,le 9 novem bre 2007).

t32 Pour le taux d'imposition des entreprises, les réductions devaient attirer des

investissements de l'étranger surtout après 5 ans alors que les tatx seraient les plus bas parmi les pays industrialisés (Canadian Press Newsllire,le l" novembre 2007). Cette productivité économique accrue devrait augmenter à son tour les revenus du gouvernement. L'Institut Fraser, aurait préféré que le gouvernement promette de diminuer le taux des grandes entreprise s à l Io/o en 2012, soit égal à celui des petites entreprises, expliquant que plus celles-ci se développent, plus un taux d'imposition

élevé entrave leur croissance (Fraser lnstitute, << October Tax Cuts a Beginning, Not an

End >>,le 9 novembre 2007). Par contre, de toutes les mesures annoncées dans Ie cadre du mini budget, celle qui n'a reçu aucun appui a été sans doute la réduction de la TPS.

Selon la majorité des économistes, un gouvemement devait conserver une taxe de consommation effrciente de ce genre et réduire plutôt les taux d'imposition des contribuables et des entreprises. Certains analystes ont même suggéré que le gouvemement Harper aurait dû offrir des réductions beaucoup plus importantes des tarx d'imposition tout en augmentant diverses taxes de consommation telles que la taxe sur l'essence ou une taxe sur le gaz naturel, forçant ainsi les contribuables et les entreprises à faire des choix judicieux qui pourraient à la longue répondre à des préoccupations environnementales (Brown, Wnnipeg Free Press, le 3 novembre2007).

En fin de compte, le mini budget du ministre Flaherty, même s'il n'a pas comblé tous les væux du mouvement de la droite, a clairement montré, pour la première fois, que le gouvernement était intéressé à mettre l'accent sur un prografnme fiscal qui reflétait des principes économiques conservateurs.

133 Les importantes réductions d'impôts du gouvernement annoncées en octobre

2007 ansi que le ralentissement de l'économie canadienne et de l'économie américaine

catsées, dans une certaine mesure, par la crise hypothécaire, ont fait en sorte que le

gouvernement Harper avait très peu de marge de manæuvre fiscale lorsqu'il a déposé

son plus récent budget en février 2008. D'ailleurs, les analystes ne s'attendaient pas à

ce que le gouvernement annonce de nouvelles initiatives exigeant des investissements

considérables ou qu'il ajoute ar¡x réductions d'impôts promises en octobre 2007.

Du côté de la fiscalité,la plus importante initiative a étéla création du Compte

d'épargne libre d'impôt (CELI), un outil d'épargne visant les contribuables de 18 ans et

plus qui leur permettra d'investir jusqu'à 5000$ par année à partir de janvier 2009.

Contrairement au Régime enregistré d'épargne-retraite (REER), les contributions à ce

compte ne seront pas déductibles; par contre tous les revenus de placement de ce

nouveau régime ne seront pas imposables, même si le contribuable retire de l'argent du

compte. De plus, les cotisations inutilisées annuellement pourront être reportées

indéfiniment. Le gouvemement a aussi décidé aussi d'établir une nouvelle société

d'état,l'office de financement de l'assurance-emploi, qui aura la responsabilité

d'administrer ce programme. Son but principal sera de s'assurer que les cotisations versées ne soient utilisées que pour compenser les travailleurs dans le besoin plutôt que de voir ses surplus transférés aux revenus généraux du gouvernement; par ce fait même, cela permettra plus facilement des ajustements des taux d'imposition pour financer le programme. Sur les taux d'imposition su¡ le revenu des contribuables et des entreprises, le gouvernement s'en est tenu aux taux établis dans son mini budget d'octobre 2001 et n'a rien proposé de nouveau en termes de taxation générale. Tel qu'annoncé dans le

134 mini budget, il a réitéré que la plus grosse part du surplus budgétaire, soit 10,2 milliards

de dollars d'un total de 12,9 milliards, serait consacrée à la réduction de la dette. Par

contre, vu le ralentissement de l'économie, le gouvernement a aboli la réserve annuelle

de 3 milliards de dollars à cette fin pour les deux prochaines années.

Si I'on compare le plus récent budget conservateu¡ à ceux qui l'ont précédé en

2006 et2007, il est évident, au niveau des dépenses, que le gouvernement a effectué un changement de cap. Le fait qu'il a réservé 10,2 milliards de dollars du surplus au remboursement de la dette ne lui a laissé que 2,7 milliards de dollars pour investir dans des programmes à l'échelle nationale, sornme qui, selon ses propres prévisions

économiques, serait réduite à 1,5 milliard pour l'année fiscale 2008-09. Parmi les nombreux domaines visés, il a annoncé un investissement de 250 millions de dollars sur cinq ans pour la recherche et le développement dans le secteur de l'automobile afin d'enrayer le problème de la pollution causée par les véhicules. En infrastructure, le

Fonds de la taxe sur I'essence, par lequel les municipalités canadien¡es recevaient une partie des taxes sur I'essence pour les aider à défiayer leurs coûts en infrastructure, est devenu permanent. De plus, le gouvemement fédéral a promis d'investir 500 millions de dollars pour améliorer les systèmes de transport en commun. En éducation, il a établi un nouveau programme de subventions aux étudiants totalisant 350 millions de dollars pour remplacer le programme des Bourses du millénaire et dans le domaine de la criminalité et de la sécurité, il a promis d'investir jusqu'à 400 millions de dollars pour l'embauche de plus de 2500 policiers de première ligne.

135 Tout comme ce fut le cas pour le mini budget en octobre 2007,Ies réactions au

budget conservateur du mois de février ont été mixtes, la droite I'accueillant plus

positivement et la gauche le rejetant carrément.

Vu les priorités budgétaires du gouvernement, il n'est pas surprenant que les

organismes qui auraient voulu voir des investissements plus importants dans des programmes sociaux aient été nettement déçus par le budget. De fait, le président de

I'Alliance de la Fonction publique du Canada John Gordon, aurait préféré voir les surplus utilisés pour établir un programme national de garde d'enfants ou un programme envi¡onnemental compréhensif, jugeant que de bons prograÍrmes sociaux bénéficieraient à toute la population canadienne contrairement à des réductions d'impôts qui visaient plus particulièrement certains secteurs de l'électorat

(Canada N ew s\4lir e, le 27 février 2008).

De façon plus précise, les initiatives fiscales du gouvemement semblent avoir

été conformes en bonne partie à des principes conservateurs fondamentaux.

L'établissement du CELI réduit en effet le montant d'impôts que les contribuables auront à payer su¡ leurs investissements, une pierre angulaire de tout progr¿ütme conservateur. De plus, comme I'ont souligné les critiques du CELI, le programme vise plutôt les gens les plus aisés qui peuvent se payer le luxe d'investir 5000$, réduisant ainsi le fardeau fiscal des plus riches. De fait, d'après Thomas Walkom du Toronto

Star,l'initiative est idéologiquement conservatrice, car elle sert à < neutraliser un aspect important du système progressif d'imposition qui vise à faire payer davantage d'impôt aux riches qu'aux pauvres. > (Cornellier, Le Devoir,le l" mars 2008). Pour ce qui est de I'Office de financement de l'asstuance-emploi, le mouvement conservateur pourrait

136 se réjouir de l'établissement d'un organisme plutôt indépendant qui ne sera pas sujet à

une intervention continuelle du gouvernement ayantle pouvoir d'utiliser les surplus du

programme à sa guise. Pou¡ les surplus budgétaires, il est tout à fait normal, selon le

Toronto S/ar, qu'ils soient affectés à la réduction la dette, sinon ils seraient utilisés pour

créer et financer une variété de programmes qui, à leur tour, mèneraient à un plus gros

gouvernement, ce qui va à I'encontre des principes conservateurs de base. Le Calgary

Herald a ajouté que des surplus importants ne font que souligner que les contribuables

sont trop taxés, ce qui justifie des réductions d'impôts (Cornellier, Le Devoir,

le 1" mars 2008). Par contre, s'il y a un aspect du budget qui pourrait inquiéter même des conservateurs, c'est que Ie gouvernement, d'après ses propres prévisions, a tellement peu de marge de manæuvre qu'rur ralentissement plus sérieux que prévu de l'économie pourrait lancer le pays dans une situation déficitaire, ce qui a poussé ceriains à suggérer que Ie gouvernement aurait dû garder une partie du surplus en réserve au lieu de I'affecter presque complètement à la réduction de la dette (Bourque,

LaPr e s s eAffaír e s. c om, le 26 février 2008).

Sur le plan des dépenses, Ies adhérents de la droite appuient sans doute le fait que le budget n'a pas annoncé de nouvelles mesures nécessitant des investissements considérables. De fait, les dépenses gouvernementales pour l'année fiscale ne représentent qu'une augmentation de 3,4 o/o sur I'année précédente, une nette réduction par rapport aux premières années de l'administration Harper. Le gouvernement a fait quelques concessions plus centristes ou de gauche en ét¿blissant un nouveau prograrnme de subventions aux étudiants et en rendant permanent le Fonds de la taxe sur I'essence Q'{ational Post,le27 février 2008), mais en général il n'a pas adopté une

137 approche interventionniste sur les questions économiques du jour. Les difficultés

qu'éprouve présentement le secteur manufacturier appuient cette constatation. Souffrant

de pertes d'emplois considérables causées par la force du dollar canadien et des coûts

énergétiques et de main-d'æuvre élevés, le secteur aurait voulu une intervention forte et

directe du gouvernement pour lui venir en aide; cependant, l'administration Harper

semble avoir adoptée une approche conservatrice fondamentale préférant ne pas

subventionner t¡n secteur particulier de l'économie par rapport à d'autres (McMurdy,

Ottawa Citizen,le 3 mars 2008). À titre de comparaison, le domaine de la criminalité et

de la sécurité a profité d'une certaine largesse du gouvernement, se voyant attribué

400 millions de dollars pour I'embauche de 2500 policiers, mais il est à noter que ce

domaine a traditionnellement fait partie d'une ligne de conduite plus conservatrice et que cet investissement ne fait que s'appuyer sur les principes de base du mouvement de droite.

En résumé, il est possible de constater que le gouvernement Harper, depuis qu'il est au pouvoir, a subi une certaine transformation au niveau de la fiscalité. Tandis que ses deux premiers budgets étaient caractérisés par des dépenses considérables dans une variété de domaines et par des réductions d'impôts modestes, le laissant ainsi ouvert aux attaques et aux critiques de la droite idéologique, le changement de cap f,rscal qu'il effectua à partir de son mini budget en octobre 2001 a révélé un retour à des principes conservateu¡s de base qui, si le Parti conservateur demeure au pouvoir encore longtemps, pourrait signaler des changements fondamentar-rx dans I'orientation fiscale du pays.

138 iii. La politique sociale

Fn matière de politique sociale, Ies deux premières années de I'administration

Harper n'ont pas été marquées par une série de décisions qui indiqueraient un grand

changement d'orientation du parti, bien que quelques-tures de ses initiatives les plus

récentes ont porté certains à questionner son engagement par rapport à ses promesses

électorales et par conséquent son image plus modérée, surtout dans les domaines des langues officielles et de I'immigration.

Sur le plan des langues offrcielles, Stephen Harper, durant la campagne

électorale de2005-2006, se disait appuyer sans réserve le bilinguisme ofhciel, promettânt même d'établir un secrétariat francophone au sein du ministère du

Patrimoine canadien. La position officielle du nouveau gouvemement conservateur a

été réitérée par le sénateur Hugh Segal lors de la conference d'ouverture du colloque

< Le fédéralisme, le Québec et les minorités francophones > en avril 2006 :

L'obligation du gouvernement fédéral envers les minorités francophones du pays demeure donc une responsabilité première pour Ottawa. Le fédéralisme d'ouverture [. ..] doit [...] répondre f ...] aux besoins des communautés francophones de partout au pays qui ne peuvent survivre dans le sirnple cadre provincial. (Segal dans Le Droit,le 12 avril 2006)

Plus tard en novembre 2006,Ie gouvernement Harper, en réaction à une motion du Bloc québécois voulant reconnaître les Québécois comme nation, a présenté sa propre motion qui a été adoptée et qui reconnaissait que les Québécois formaient une nation au sein d'un Canada uni. Même si la motion pouvait mener à diverses interprétations, certains disant qu'elle ne faisait que réaffirmer la notion que la cofiununauté québécoise

était distincte, d'autres s'inquiétant qu'elle pourrait être utilisée par les souverainistes pour avancer leur programme (Saskatoon Star - Phoenix,le2T novembre 2006), elle a

139 tout de même indiqué que le gouvernement était prêt à reconnaître, même si ce n,était que de façon symborique, ra prace wrique du français au canada.

Malgré ces engagements, Ia nouvelle administration a été critiquée tôt dans son mandat pour des décisions qui semblaient aller à l'encontre de son orientation de

départ' Dans un premier temps, les nominations de Beverly oda, qui ne parlait pas le

français, au poste de ministre du Patrimoine canadien et de Ted Menzies, un autre

anglophone unilingue, au poste de secrétaire parlementaire à Ia ministre de la

Francophonie et des langues officielles ont été dénoncées comme des atteintes au

bilinguisme (Demetz, L'Express, Ie 23 février 2006). Encore plus controversée a été Ia décision du gouvernement Harper d'abolir le Programme de contestation judiciaire,

programme qui fournissait un appui financier à tout groupe, y inclut les minorités

francophones, qui voulait faire valoir ses droits devant les tribunaux. L,élimination de cette source de financement forcerait dorénavant les groupes à déÍìayer eux-mêmes tous

les coûts reliés à leur cause, ce qui, pourplusieu¡s d,entre eux, seraithors de leurs

moyens' La décision du gouvernement Harper reposait sur le fait qu'il trouvait que le

programme n'était pas nécessaire vu qu'il se disait prêt à respecter les droits des

minorités tels qu'inscrits dans la constitution : < [...] notre gouvernement n,a pas à payer des avocats libéraux pour poursuivre le gouvernement parce qu,il n,a pas respecté la loi. Nous comptons respecter nos obrigations juridiques et constitutionnelles. > (canada, Débats de la chambre des commtlnes,le 2 octobr e2006). La position du gouvernement a été rejetée par les communautés francophones minoritaires; la décision d'abolir programm le e a étécontestée par la Fédération des

t40 communautés francophones et acadiennes (FCFA) et est présentement en attente de

jugement.

L'administration du premier ministre s'est en partie rachetée auprès des

communautés minoritaires francophones lors du discours du Trône en octobre 2007

alors qu'il s'est prononcé en faveur d'une nouvelle stratégie pour compléter le Plan

d'action sur les langues officielles qui prenait fin en 2008. Lancé en 2003 avec un

budget de 750 millions de dollars par le gouvernement libéral, le plan d'action avait

coÍtme but principal d'offrir un appui du gouvernement fédéral aux communautés minoritaires francophones dans l'ensemble du pays et à Ia minorité anglophone au

Québec afin d'assruer à long terme leru épanouissement et leur prospérité. La

Fédération canadienne des communautés francophones et acadiennes et le Quebec

Community Groups Network voyaient d'un bon æil l'engagement du gouvemement fédéral pour ce dossier (SRC Manitoba,le 17 octobre2007 etCanado NewslIlire,le 17 octobre 2007). Dans cette même optique, et après avoir vu sa performance à l'égard des langues ofFrcielles critiquée par le commissaire aux langues officielles, Graham Fraser, l'administration Harper, au début du mois de décembre2007,a nommé l'ancien premier ministre du Nouveau-Brunswick, Bernard Lord, conseiller chargé de consulter les représentants de communautés linguistiques minoritaires aflin d'aider le gouvernement à élaborer sa stratégie su¡ les langues officielles et à concrétiser le Plan d'action sur les langues officielles. Après avoir consulté les représentants dans sept villes canadiennes, M. Lord a déposé son rapport récemment auprès du gouvernement et il a été rendu public le 20 mars. Les réactions au rapport ont été plutôt réservées.

Parmi les 14 recommandations majeures, on propose que le gouvernement Harper

l4l investisse ur millia¡d de dollars durant les cinq prochaines années pour renouveler le

plan d'action, ce qui représente une augmentation de250 millions de dollars par rapport

au plan originel. Les autres recommandations, plus générales, proposent un appui pour

I'intégration des immigrants et un financement pour les institutions postsecondaires.

Contrairement au plan d'action de 2003, il ne propose rien de concret pour encourager

le bilinguisme au sein de la fonction publique fédérale, un point qui a été fortement

critiqué par le député bloquiste Richard Nadeau (Buzzetti, Le Devoir,le 21 mars 200S).

Par contre, I'élément qui a suscité la plus vive réaction est que Bernard Lord n'ait pas mentionné I'abolition du Programme de contestation judiciaire par le gouvernement malgré le fait que la plupart des intervenants avaient soulevé ce point lors des consultations (Buzzetti, Le Devoir,le 2l mars 2008). Pour sa part, Ia ministre du

Patrimoine canadien, Josée Verner, apréféré ne pas faire de promesses quant à la réaction du gouvernement, disant que les recommandations n'étaient qu'un facteur à considérer dans l'élaboration d'un nouveau plan d'action (Buzzetti, Le Devoir, le 21 mars 2008). Ces propos ont inquiété les organismes francophones tels que la

Société franco-manitobaine et la FCFA qui auraient préféré un engagement plus précis du gouvemement fédéral au lieu de messages souvent considérés ambigus

(Abord-Babin, La Liberté,le 12 au 18 mars 2003).

Des individus et des organismes étudiant de près le domaine de I'immigration ont aussi récemment exprimé leurs inquiétudes, constatant qu'il serait possible que le gouvernement conservateur adopte à l'avenir un programme plus de droite. Parmi ses promesses électorales, le Parti conservateur voulait faciliter le processus par lequel les titres de compétence des nouveaux arrivés étaient reconnus afin de répondre aux

142 besoins économiques de la nation sans toutefois négliger le rôle traditionnel du Canada

de réunifier les familles et d'accueillir les réfugiés, ce qui portait à croire qu,il tentait

d'équilibrer des préoccupations économiques plus conservatrices avec des

considérations humanitaires. Par contre, les propos et initiatives du gouvernement

depuis janvier 2006 semblent de plus en plus favoriser les considérations économiques tout en voulant limiter I'entrée au pays de certaines autres catégories d'immigrants.

' D'abord, le ministre de I'Immigration à I'époque, Monte Solberg, déclarait, tôt

après I'élection de 2006, qu'il était temps d'établir un lien plus direct entre les nouveaux arrivés et les secteurs de I'économie où il existait des pénuries (Cheadle,

Globe and Mail,le l5 février 2006). Sans nécessairement vouloir limiter les

réunifications familiales ou changer Ie nombre d'immigrants arrivant annuellement au

pays, il constatait que pour des considérations économiques le gouvernement devait

( prendre les mesures ["'] nécessaires pour combler l'écart entre les critères de

sélection des immigrants et la situation des nouveaux immigrants au Canada > (Solberg

dans Perreault, La Presse,le 27 mars 2006), mettant ainsi r¡n plus grand accent sur la

reconnaisszurce des titres de compétence. Deuxièmement, le ministre croyait qu'il était

temps que le Canada expulse aussi rapidement que possible ceux et celles qui se

voyaient refuser I'entrée au pays, ce qui représentait amuellement environ 30% des

demandes. Il se disait inquiet que ces gens profitaient du système d,appel existant pour retarder pendant des années leur expulsion, obligeant ainsi Ie gouvernement à dépenser des millions de dollars' Pour cette même raison, le gouvernement refusait aussi d,établir une nouvelle cour d'appel pour entendre les cas des déboutés, point contentieux pour le

Conseil canadien des réfugiés qui s'inquiétait que le gouvemement ne voulait pas

143 prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les demandeurs fuyant la

persécution et qui pouvaient être expulsés pour de mauvaises raisons (Perreault,

La Presse, le 27 mars 2006).

Plus récemment, un nouveau projet de loi, déposé le 14 mars 2008, a suscité

d'autres réactions vives par rapport aux intentions du gouvemement dans le domaine de

I'immigration. Le projet de loi C-50, Loi portant exécution de certaines dispositions du

budget déposé au Parlementle26 fevrier 2008 et établissant des dispositions pour maintenir le plan financier établi dans le budget (Loi d'exécution du budget de 2008), inclut des amendements à la Loi sur l'immigration dans le but de réduire les listes d'attente qui se chiffrent présentement à 800 000 personnes et de faciliter l'entrée au pays de travailleurs spécialisés. Les réactions suscitées portaient sur des amendements qui remettaient au ministre de l'Immigration un pouvoir discrétionnaire trop vaste, selon les critiques. De fait, la ministre actuelle, Diane Finlay, et tout ministre futur auraient le pouvoir d'établir des priorités par rapport aux demandes d'immigration plutôt que de se baser sur des critères clairs et bien définis. Un ministre pourrait décider de restreindre le nombre total d'immigrants à accueillir annuellement, de limite¡ un certain type d'immigrants ou de choisir quelle catégorie d'immigrants aurait préséance sur les autres. Par conséquent, le gouvernement pourrait, en théorie, privilégier les immigrants dits économiques plutôt que ceux accueillis pour des raisons humanitaires

(De Granpré, La Presse,le 15 mars 2008). En fin de compte, si elles étaient adoptées, ces mesures pourraient répondre aux préoccupations exprimées par le gouvemement depuis qu'il est arrivé au pouvoir et l'orienter plus fortement vers la droite en matière d'immigration, dépendamment de la façon dont elles seraient implantées.

t44 Une orientation possible vers la droite s'est révélée tout récemment dans un

autre domaine social qui semblait, à toute fin pratique, disparu de la scène politique.

L'adoption en seconde lecture du projet de loi C-484, initié par le député conservateur

Ken Epp, pourrait à l'avenir ranimer le débat sur l'avortement. Ce projet de loi

demande essentiellement que le fætus soit reconnu coûrme une victime à part égale

lorsqu'une femme enceinte est victime d'agression. Même si le projet de loi n'a pas

l'intention directe de criminaliser l'avortement, les groupes pro-choix s'inquiètent que la Cour suprême pourrait à un moment donné déterminer qu'un fætus est un être humain étant donné qu'un agresseur pourrait être tenu coupable de l'avoir tué. Cette définition de l'être humain pourrait, à son tour, mener à la criminalisation éventuelle de

I'avortement (Buzzetti, Le Devoir, le 7 mars 2008). Certes, le projet de loi doit encore passer au comité parlementaire, à I'ensemble de la Chambre et au Sénat alors le débat est loin d'être terminé, mais le fait qu'il afi été adopté en seconde lecture signale un repositionnement possible du gouvernement conservateur sur cette question, surtout que le premier ministre Harper lui-même ainsi que I l8 des 122 députés conservateurs ont voté en faveur du projet de loi. La position du Parti conservateur sur cette question est bien différente de ce qu'elle étå.it à la veille de la demière élection fédérale. D'après

Flanagan (2007, p.263),le programme électoral du parti à l'époque indiquait clairement qu'un gouvernement conservateur refuserait d'initier ou d'appuyer des projets de lois pour réglementer I'avortement. De plus, en août 2006,Ie parti a rejeté un projet de loi semblable d'un de ses députés afin de ne pas ouvrir à nouveau le débat sur l'avortement. Même le ministre de la Justice à l'époque, Vic Toews, s'était prononcé ouvertement contre le projet, expliquant que ce dernier serait invalidé par les triburaux

145 même s'il était adopté par la Chambre (Bnzzetti, Le Devoir,le 10 août 2006). De toute

façon, et malgré le fait que le projet de loi ne vise pas directement I'avortement, I'appui

considérable qu'il a reçu auprès du caucus conservateur montre que cette question

pourrait être débattue à nouveau.

Contrairement à l'avortement, les débats entourant la question des mariages gais

semblent s'être éteints une fois pour toutes. Il est à signaler à nouveau que Stephen

Harper, Iors de la dernière campagne électorale, avait annoncé son intention de

permettre un vote libre en Chambre sur Ia question. Le gouvernement conservateur s'en

est tenu à sa promesse, déposant une motion en décembre2006 qui, si adoptée, aurait

mené à un projet de loi voulant rétablir la définition traditiomelle du mariage,

c'est-à-dire qu'il est l'union entre une femme et un homme, sans toutefois invalider les

unions de même sexe qui avaient déjà eu lieu. Après quelques jours de débats peu passionnés, laissant les analystes croire que le gouvernement Harper se résignait à la

défaite de sa motion, le premier ministre a annoncé qu'il n'avait plus I'intention de débattre à nouveau la question (Larocque, Le Devoir,le 8 décembre 2006).

Évidemment, la défaite de la motion n'a pas été bien reçue par le mouvement des conservateurs sociaux qui avait demandé au gouvernement Harper en janvier 2007 d'établir une commission royale sur le mariage et les familles, espérant ainsi ouvri¡ à nouveau le débat stu les mariages gais (O'Neil, Ottqwa Citizen,le 2 janvier 2007).Le refus du gouvemement d'établir une telle commission et son refus d'évoquer la disposition de dérogation de Ia Charte canadienne des droits et libertés pour rétablir Ia définition traditionnelle du mariage (Larocque, Le Devoir,le I décembre 2006), semblent indiquer que Stephen Harper veut mettre de côté cette question contentieuse.

146 S'il y a deux domaines de la politique sociale du Parti conservateur qui sont

toujours considérés de droite, ce sont les domaines du crime et de la garde d'enfants. La

position conservatrice par rapport à ces domaines trouve en grande partie ses origines

dans les anciens programmes réformistes et alliancistes.

Sur le crime et la sécwité, Stephen Harper avait promis, lors de sa campagne

électorale, qu'il initierait une série de projets de lois afin de punir plus sévèrement les

gens trouvés coupables de crimes et ainsi protéger les victimes, message qu'il a répété peu de temps après sa victoire. ( [...J we will create a criminal justice system that makes its príorities the punishment of crime, the privacy of the victim and the protection of løw-abiding people and their property. > (Harper dans Rabson, National

Post,le 20 avril 2006). Il est clair que le gouvernement s'en est tenu à sa promesse.

Lors de la lè" session de la 39" législature, d'avril 2006 àseptembre 2007,\e gouvernement conservateur a déposé dix projets de lois portant sur le crime et la sécurité. La vaste majorité d'entre eux proposaient de modifier le Code criminel entre autres en augmentant l'âge du consentement de 14 à 16.ans, visant ainsi les prédateurs sexuels (Projet de loi C-22), en établissant des sentences minimales obligatoires pour les individus coupables d'avoir commis des crimes avec des armes à feu (Projet de loi

C-10), en mettant fin aux libérations conditionnelles pour les crimes commis avec les armes à feu (Projet de loi C-9) et en proposant des peines plus sévères pour des courses de rues (Projet de loi C-l9) et la conduite avec facultés affaiblies (Projet de loi C-32).

Seulement trois des dix projets ont reçu la sanction royale avant la fin de la session mais le gouvernement est revenu à la charge depuis le début dela}" session en octobre

t47 2007, déposantjusqu'àprésent six projets de lois dont ceriains avaient figuré au

programme de la lè" session.

De façon générale, les nombreuses initiatives du gouvernement conservatew

depuis deux ans montrent dans quelle mesure il a adopté une philosophie de droite dans

le domaine du crime, car les initiatives soulignent que l'individu est avant tout responsable des crimes qu'il a commis plutôt que ce soit la faute d'une société qui

I'aurait exclu ou rejeté, philosophie plutôt de gauche (Lee dans Doern 2001, p.226).

Bien que cert¿ins des projets de lois conservateurs aient reçu I'appui des partis de I'opposition, ces mêmes partis n'ont pas hésité de les critiquer, jugeant qu'ils mettaient un trop grand accent sur la punition des criminels au lieu de s'atüaquer aux causes du problème (De Grandpré, La Presse,le 5 octobre 2007). De plus, une philosophie plus centriste ou de gauche telle qu'avancée traditionnellement par les partis libéral et néo-démocrate aurait donné une plus grande place à la réhabilitation qui, pour sa part, indique que la société est prête à assumer une partie de la responsabilité pour les crimes commis par les individus et à les aider à se réintégrer à Ia société (Lee dans Doem 2007, p.226).Il n'est pas surprenant alors qu,un gouvernement conservateur de droite accentue davantage la punition des criminels plutôt que la prévention ou la réhabilitation : < To privilege rehabílítation over and above the principles of denunciation, deterrance and incapocitqtion is to reword deviant behaviour that leads towards anarchy rather than civilizotion. t (Lee dans

Doern 2007,p.226).

Malgré les critiques faites à l'égard de l'approche conservatrice en matière de crime et de sécurité, le simple nombre de projets de lois déposés par le gouvernement

148 durant les des deux dernières sessions parlementaires indique qu'il n'est pas prêt à changer d' orientation.

Comme dans le domaine du crime et de la sécurité, le gouvernement Harper n'a pas hésité, en matière de garde d'enfants, de promouvoir un programme considéré de droite. De fait, Harper a implanté, tôt après sa victoire électorale, sa promesse de remettre à chaque famille canadienne une somme mensuelle de 100$ par enfant âgé de moins de six ans pour les aider à répondre à leurs besoins par rapport à la garde d'enfants. Même si cette initiative représente le premier programme universel à être créé au Canada depuis quarante ans et qu'il réponde ainsi à un programme plus centriste ou de gauche, l'initiative du gouvemement Harper reflète davantage une idéologie conservatrice de droite tant au niveau de la fiscalité qu'au niveau sociétal :

( [...J their approach is congruent with the values and ideological orientations of economic conservatives suspicious of government spending on socíal programs, as well a,s with tho,se of ,social con,servatíve,s ,supportive of heterosexual nuclear famílies structured around a bread'winning father and a mother who takes principal responsibility for the care of the children. y (Prince et Teghstsoonian dans Doem 2007, p. 181)

Le programme ét¿bli par les conservateurs reprend en effet des principes de base des anciens prograÍìmes réformistes et alliancistes tels qu'une intervention moins prononcée et moins directe du gouvernement dans la vie quotidienne de ses citoyens, un respect de la famille nucléaire traditionnelle avec ses rôles bien définis, un appui pour les Canadiens moyens vivant dans de petites communautés rurales et isolées, et une conviction que le secteur privé, les communautés et les familles sont en mesure pour elles-mêmes de trouver des solutions aux défis économiques et sociaux auxquels il font face (Prince et Teghstsoonian dans Doern 2007 , p. I 81). D'ailleurs, la nature

t49 conservatrice du programme a été appuyée par des organismes tels que Advocates for

Childcare Choice, Institute for Canadian Values et Kids First Parent Assocíation of

Canada, des groupes qui historiquement ont préconisé une approche plus traditionnelle

pour élever des enfants et qui se méfient de l'intervention gouvernementale dans ce

domaine (Prince et Teghstsoonian dans Doern 2007,p. lSl).

La nature conservatrice du gouvernement se reflète également dans le fait qu'il

prévoit un rôle très actif du secteur privé dans la livraison de ce service social. Tout

d'abord, le gouvernement Harper se disait toujours prêt, en octobre 2007, à créer jusqu'à 125 000 places en garderie en offrant des crédits d'impôts à des compagnies privées et à des organismes à but non lucratif (Canada NewslI/'ire,le 16 octobre2007).

De plus, la mise en place d'un comité consultatif sur la garde d'enfants en septembre

2007 chargé d'étudier les besoins des familles et du rôle du secteur privé dans le but de créer des places en garderie a été critiquée du fait que le comité était constitué de gens représentant surtout les intérêts privés. Ce comité ignorait des organismes tels que

Child Care Advocacy Associotion of Canada (CCAAC) qui représente la voix des parents (Canada News\ílire,le 6 septembre2007). Finalement, un rôle plus actif du secteur privé peut aussi être perçu comme wre atûaque sur la condition féminine. Si l'on considère que la somme mensuelle de 100$ remise aux parents est insufhsante pour défrayer les coûts de garderies, il est fort possible qu'un des parents soit dans l'obligation de rester à Ia maison avec les enfants. Dans ce contexte, il est probable que ce soit la mère qui reste à la maison, car I'homme gagne généralement un salaire plus

élevé, ce qui répond aux aftentes de conservateurs sociaux voulant promouvoir la cellule familiale traditionnelle. Si I'intention des garderies privées est de maintenir des

150 frais raisonnables, elles devront contrôler leurs coûts d'opération. Elles devront alors

offri¡ de bas salaires, ce qui à son tour aura un effet négatif sur ses employés qui sont

majoritairement des femmes (Prince et Teghstsoonian dans Doem 2007, p. l s8).

Somme toute, I'initiative gouvernementale en matière de garde d'enfants répond

clairement à un programme de droite et a de nombreuses répercussions sur la garde

d'enfants et la condition féminine au Canada.

En résumé, il est possible d'établir un parallèle entre le programme fiscal et le programme social du gouvernement Harper depuis son arrivée au pouvoir en2006.

Caractérisés comme étant de nature plus modérée à lews débuts, les programmes semblent s'être positionnés plus vers la droite avec le temps. Certes, la politique sociale du parti a toujours préconisé un programme dit plus conservateur dans les domaines du crime et de la sécurité ainsi que la garde d'enfants mais cefaines initiatives plus récentes du gouvemement par rapport aux langues officielles, à l'immigration et à l'avortement signalent un changement de cap possible vers la droite plus radicale à l'avenir, surtout si le Parti conservateur arrive un joru à former un gouvernement majoritaire.

l5l Chapitre VII - Conclusion

1. Stephen Harper : un conservatisme tempéré

Le 23 janvier 2006 a signalé un changement important sur la scène politique nationale au Canada. La victoire électorale du Parti conservateur et de son chef Stephen

Harper marquait le retou¡ au pouvoir d'un parti politique dit conservateur pour la première fois depuis 1993. Incontestable dans cette victoire aétéle rôle considérable joué par le chef conservateur Stephen Harper qui avait remporté. la course à la chefferie du parti en2004. Un adhé¡ent de la droite politique depuis de nombreuses années, il avait contribué activement au développement du mouvement réformiste au début des années 90 avant de se retirer de la scène politique en 1997 pour enfin y retourner en

2002 à la tête de I'Alliance canadienne, parti qui avait remplacé le Parti réformiste comme porte-parole de la droite sur la scène politique nationale. Peu de temps après, il est entré en pourparlers avec le chef du Parti progressiste conservateur, Peter MacKay dans le but de fusionner les deux partis et de donner âu mouvement de la droite une seule voix qui pourrait un jow remporter la victoire contre le Parti libéral.

Issu officiellement en décembre2003 du fusionnement de I'Alliance canadienne avec le Parti progressiste-conservateur, le nouveau Parti conservateu¡ du Canada sous la tutelle de Stephen Harper aurait à définir son programme et ainsi sa place sur la scène politique. Choisirait-il de conserver bon nombre des éléments des programmes réformistes et alliancistes idéologiquement de droite et populiste? Ces partis avaient longtemps appuyé des programmes qui préconisaient une réforme importante des institutions démocratiques caractérisée par l'établissement d'un Sénat triple E et de

152 I'utilisation de référendums, du rappel des députés, de votes libres en Chambre et

d'élections à date fixe pour diminuer le pouvoir de l'élite et le redonner au peuple. Du

côté de la fiscalité, leur philosophie avançait avant tout les principes capitalistes de base

qui incluaient une réduction des impôts payés par les contribuables et les entreprises

ainsi qu'une réduction des dépenses gouvemementales pour diminuer l'influence du

gouvernement dans les questions économiques et sociales du jour,laissant ainsi le secteur privé jouer un rôle plus actif. Leur politique sociale refléøit aussi leurs principes conservateurs, entre autres dans ture position contre l'avortement et les mariages gais, en faveur de la cellule familiale traditionnelle, en défendant des mesures draconiennes dans le domaine du crime, en limitant l'immigration et en retirant l'appui gouvernemental pour le bilinguisme officiel et pour la culture en général. Si ces

éléments étaient jugés trop extrémistes, le Parti conseryateur choisirait-il de se modeler plutôt à I'image de l'ancien Parti progressiste-conservateur plus modéré? Pour sa part, ce demier avait rarement abordé la question de la réforme des institutions politiques, démontrant plutôt ì.¡n respect pour ces institutions qui reflétaient la tradition britannique dont était issu le système politique canadien. En matière de fiscalité, l'ancien pafi conservateur, bien qu'il ait toujours défendu des principes capitalistes de base, acceptait la notion que le gouvemement pouvait et devait participer directement à la vie

économique pour redresser les abus du système capitaliste et pour défendre le bien commun. La politique sociale du parti était devenue beaucoup plus progressiste au fil des années, appuyant notamment les principes du bilinguisme officiel et du multiculturalisme et étant plus ouvert à la condition féminine. Alors, non seulement le nouveau Parti conservateur devait-il développer un programme compréhensif qui,

153 espérait-il, répondrait aux attentes des factions dites bleue etrouge dans son propre

parti et aux attentes de l'électorat canadien, mais il devait aussi, dès sa fondation, se

défendre contre les attaques de ses adversaires politiques qui I'accusaient de n'être

qu'un reflet des anciens partis réformiste et allianciste, voulant transformer

radicalement la société canadienne par I'entremise d'un programme idéologiquement

conservateur.

C'est dans ce contexte que s'inscrit le présent mémoire. Tout en illustrant l'évolution du conservatisme au Canada du¡ant les dernières décennies, il s'est donné comme but principal d'analyser dans quelle mesure le Parti conservateur du Canada s'est dissocié de plusieurs éléments d'un programme conservateur plus radical afin de se positionner davantage vers le centre politique depuis I'ascension de son chef Stephen

Harper à la tête de l'Alliance canadienne en2002, du Parti conseryateur en 2004 et de la victoire électorale de ce parti lors de l'élection fédérale en janvier 2006. Cette analyse permet d'évaluer le positionnement actuel du parti, à savoi¡ s'il s'est effectivement transformé en parti plus modéré sous Stephen Harper ou s'il continue à promouvoir des éléments d'une idéologie plus de droite radicale.

Un bref survol des domaines retenus dans le cadre de cette étude, c'est-à-dire la réforme des institutions démocratiques, la fiscalité et la politique sociale, montrent clairement une évolution au sein du mouvement conservateur sous la tutelle de Stephen

Harper, ce qui mène à la conclusion que le Parti conservateu¡, du moins jusqu'à tout récemment, s'est positionné davantage vers le centre politique, ne serait-ce que pour remporter une élection générale.

154 Dans le domaine de Ia réforme des institutions politiques, Stephen Harper,

aussitôt arrivé à la tête de I'Alliance canadienne, s'est dissocié des éléments les plus

populistes de la tradition réformiste et allianciste, les éliminant graduellement du

programme allianciste et par la suite du programme conservatew. De fait,laseule des

réformes originelles des réformistes implantée par le gouvernement Harper est la tenue

d'élections à une date fixe. Certaines ont carrément été abandonnées, telles que le

rappel des députés, d'autres ont été si modifiées, telles que les votes libres en Chambre,

I'utilisation des référendums, et la réforme du Sénat, qu'elles ne reflètent plus l'intention des politiciens réformistes qui les avaient élaborées. Même l'élection des sénater.rs, le seul élément du Sénat triple E qui demeure au programme du parti conservateur, pourrait causer de sérieux ennuis au gouvernement.

Du côté de la fiscalité, stephen Harper s'est montré prêt à promouvoir un programme qui, jusqu'à la veille de l'élection fédérale de janvier 2006, semblait imiter un programme du Parti libéral en offrant des réductions d'impôts modestes tout en promettant de dépenser des milliards de dollars pour maintenir et amélio¡er des services sociaux et une variété de programmes fédéraux. La tendance s'est maintenue une fois que les conservateurs sont arrivés au pouvoir. Leurs deux premiers budgets, critiqués pour leur manque d'initiatives purement conservatrices, offraient ni des réductions importantes dans les taux d'imposition sur le revenu des particuliers et des entreprises, ni une réduction des dépenses gouvemementales. Ce n'est qu'en octobre 2007 que le gouvernement a signalé un changement de cap important en déposant un mini budget orienté davantage sur des préoccupations économiques conservatrices de base.

155 En politique sociale, Stephen Harper a, depuis plusieurs années, fait un effort de

distancier son parti de questions sociales très contentieuses telles que I'avortement et

les mariages gais, refusant carrément dans le cas de I'avortement de discuter de la

question et permettant, dans le cas des mariages gais, un vote libre en Chambre qu'il

semblait résigné à perdre. Pour ce qui est du bilinguisme officiel et de I'immigration, le

chef du parti a réussi jusqu'à récemment à atténuer les messages les plus réactionnaires

qui avaient caractérisé les propos réformistes et alliancistes dans ces domaines,

acceptant sans réserves le principe du bilinguisme officiel au niveau national et

reconnaissant le rôle important que jouait I'immigration dans le développement de la

nation. En principe, sur le plan social, les domaines où le Parti conservateur s'est

montré le plus intransigeant et où se reflète clairement son idéologie de droite sont ceux

de la garde d'enfants, où il refuse d'intervenir directement dans le choix des parents en

établissant un programme national de garderies subventionné par 7'état, et du crime et

de Ia sécurité, où il a continué à appuyer des mesures draconiennes pour punir les

coupables et protéger les victimes d'actes criminels.

De toute évidence alors, le Parti conservateur du Canada et par extension le

mouvement conservateur s'est repositionné vers le centre politique depuis l'arrivée sur

scène de Stephen Harper à Ia tête de l'Alliance canadienne en2002. Par contre, il est

impossible d'ignorer les initiatives récentes du gouvernement qui pourraient signaler un

changement de cap assez important au niveau de la fiscalité et de la politique sociale, et

ainsi un réalignement vers la droite.

Tel que mentionné, le mini budget Harper déposé en octobre 2007 apromis un allègement fiscal beaucoup plus significatif auprès des contribuables et des entreprises,

156 un certain contrôle des dépenses gouvemementales jusqu'alors absent d'après les

critiques de la droite, et une affectation d'une bonne partie du surplus budgétaire à la

réduction de la dette, tous des éléments qui répondaient à des principes économiques

conservateurs. Ces mesures, en plus du ralentissement récent de l'économie, ont réduit

substantiellement le surplus budgétaire, limitant la marge de manæuvre fiscale du gouvernement au point où il a dû diminuer de beaucoup ses dépenses dans le budget de

2008 déposé à la fin du mois de fevrier, répondant ainsi encore wre fois à des préoccupations de la droite.

Du côté de la politique sociale, le projet de loi C-484 initié par un député conservateur propose que les fætus soient reconnus comme des victimes à part égale lorsqu'une femme enceinte est agressée. Appuyé par la grande majorité du caucus conseryateur y inclus le premier ministre, le projet de loi pourrait éventuellement ouvrir

à nouveau le débat sur l'avortement. Sur les langues offrcielles, I'abolition du prograûrme de contestation judiciaire en 2006 etl'ambiguité du rapport Lord qui avait comme but d'aider le gouvemement à développer sa nouvelle stratégie sur les langues officielles, y inclus le renouvellement du Plan d'action sur les langues off,rcielles, inquiètent les communautés linguistiques minoritaires au pays qui questionnent l'engagement du gouvemement dans ce domaine. Finalement, le projet de loi C-50 qui propose donner au ministre de I'Immigration des pouvoirs discrétionnaires très vastes lui permettant d'établir ses priorités en matière d'immigration, pourrait redonner un aspect plus réformiste au dossier en limitant non seulement le nombre d'immigrants, mais aussi le type d'immigrants qui pourraient être accueillis au pays. Ces nombreux exemples s'ajoutent à d'autres décisions du gouvernement touchant à des domaines

157 n'ayant pas fait I'objet de cette étude et qui appuient la notion qu'il a I'intention de

s'orienter à nouveau vers la droite, notamment son refi.rs de respecter le protocole de

Kyoto et d'intervenir pour empêcher l'exécution de Canadiens coupables de crimes

capitaux dans les pays démocratiques.

2. L'averttr

En conclusion, il faut se demander à quoi peut s'attendre la population

canadienne d'un gouvernement conservateur qui a clairement réussi au fil des dernières années à projeter une image plus modérée mais qui, d'après ses plus récentes initiatives, semble prêt à reprendre le pavillon du conservatisme de droite.

Il faudra dans un premier temps voir si le Parti conservateur est capable de décrocher une majorité lors d'une prochaine élection fédérale, qu'elle ait lieu en octobre

2009 tel que prévu ou avant si jamais le gouvernement tombait à la suite d'une motion de censure. Un gouvernement majoritaire conseryateur dévoilerait plus ouvertement ses reelles intentions, tandis que s'il demeure en situation minoritaire, il n'aura pas le choix que de procéder de façon plus prudente, mettant parfois de l'eau dans son vin pour en arriver à des compromis avec les partis d'opposition. Il pourrait toutefois provoquer sa propre défaite en Chambre s'il estimait qu'il pourrait remporter une majorité électorale.

De fait, il semble prêt depuis la fin de 2007 àchoisir cette option, annonçant à plus d'une reprise en Chambre que ses motions étaient en réalité des motions de confiance.

Le sort du Parti conservateur et de son programme va dépendre, dans une certaine mesure, de I'opposition qu'il doit affronter en Chambre. Une opposition forte et bien organisée à I'aide d'un programme clairement défini pourrait critiquer

158 efficacement les initiatives du gouvernement jugées erronées et offrir à la population

canadienne des altematives bien fondées. De toute évidence, I'opposition officielle, le

Parti libéral, n'a pas jusqu'à présent réussi à projeter cette image, souffrant à la fois de

problèmes de leadership et d'un manque de politiques détaillées, permettant ainsi au

Parti conservateur de survivre en contexte minoritaire depuis plus de deux ans,

dépassant de loin la durée moyenne d'un gouvernement minoritaire au Canada.

Quoi qu'il en soit, les plus récentes initiatives de l'administration Harper auront sans doute des effets sur I'orientation générale du pays dans un avenir rapproché. Ses mesures fiscales de concert avec une diminution marquée du surplus budgétaire prévue pour les prochaines années et un ralentissement récent et prononcé de I'économie, indiquent que le gouvernement aura très peu de marge de manæuvre fiscale. En tenant compte des réalités économiques qui s'imposent, le gouvernement risque alors de se trouver prochainement en situation déficitaire pour la première fois depuis 1997-1998.

Il est fort probable que Ie gouvernement Harper évite à tout prix de tomber en situation déficitaire, non seulement parce que cela va à I'encontre de ses principes de base mais parce qu'une telle situation serait dénoncée par des conservateurs économiques et par tous ses adversaires politiques. Pour éviter un déficit, il ne lui resterait que deux options. II serait forcé d'augmenter des taxes ou de couper les dépenses gouvernementales. Tout comme une situation déficitaire, une augmentation de taxes par le Parti conservateu¡ représenterait, en toute probabilité, le suicide politique du gouvernement. Il faudrait alors s'attendre à des compressions budgétaires importantes qui pounaient avoir de sérieuses conséquences sur des programmes et des ministères fédéraux. Il est impossible de savoir lesquels seraient touchés par de telles

159 compressions mais une réduction des dépenses gouvernementales représenterait une intervention moins marquée du gouvernement dans les questions économiques et sociales de la nation et par ce fait même signalerait un retour du moins partiel à ¡n conservatisme plus radical.

160 Biblioeraphie

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