Image D'ici Et D'ailleurs

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Document généré le 25 sept. 2021 00:21 Séquences La revue de cinéma Image d’ici et d’ailleurs Numéro 117, juillet 1984 URI : https://id.erudit.org/iderudit/50899ac Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) La revue Séquences Inc. ISSN 0037-2412 (imprimé) 1923-5100 (numérique) Découvrir la revue Citer ce compte rendu (1984). Compte rendu de [Image d’ici et d’ailleurs]. Séquences, (117), 23–56. Tous droits réservés © La revue Séquences Inc., 1984 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ JUILLET 1984 fm^f 23 SÉQUENCES N" 117 ~W~ ES ANNÉES DE vir la narration. C'est-à-dire que Malheureusement, Les M RÊVES — Réalisation: pour servir le sens, la coloration de Années de rêves, film historique, ne M J Jean-Claude Labrecque — cette narration. saisit pas très bien cette période (les Scénario: Robert Gurik, avec la col­ Un exemple. années soixante et le début de la laboration de Marie Laberge, sur Dans le dernier long Crise d'Octobre) qui bouscula le une idée originale de Jean-Claude métrage de Jean-Claude Labrecque, Québec. Jean-Claude Labrecque, Labrecque — Images: Alain Dostie Les Années de rêves, les deux per­ merveilleux documentariste, ne sem­ — Musique: Les Beatles, Robert sonnages principaux, Louis et Clau­ ble pas très à l'aise dans la fiction Charlebois, Bob Dylan, Chopin — dette, venant tout juste de se et c'est même avec plaisir (et soula­ Montage: François Labonté — marier, défilent à toute vitesse à gement, dirait-on) qu'il a recours Interprétation: Anne-Marie Proven- bord de leur décapotable, heureux dans son film à des extraits de son cher (Claudette Pelletier), Gilbert et insouciants. Ils passent à vive documentaire sur la visite du Géné­ Sicotte (Louis Pelletier), Alexandre allure devant la caméra qui, au lieu ral De Gaulle. C'est qu'il n'a pas Guertin-Aird (Mathieu à 2 ans et de suivre leur mouvement, fixe une su se sortir de l'impasse de l'his­ demi), Guillaume Lemay-Thivierge inscription peinturlurée sur un mur: toire: les personnages ne vivent pas (Mathieu à 5 ans), Monique Mer­ FLQ. Zoom avant, et montée dra­ dans les années soixante, ils les cure (Tante Yvette), Amulette Gar- matique de la musique nous met­ représentent, ils participent à une neau (Tante Adèle), Jean Mathieu tent la puce à l'oreille que leur entreprise de recréation. D'où les (John), John Wildman (John-John), bonheur sera de courte durée. clichés, les stéréotypes, qui sont iné­ Carmen Tremblay (Tante Marie), Il n'aura suffi que d'un vitables dans un tel cas. Labrecque, Roger Lebel (Armand, le député de plan pour que l'Histoire bascule « cinéaste à hauteur d'homme » Limoilou), Monique Joly (Madame dans l'histoire. Soulignées par le comme on peut le désigner, a trop Garand) — Origine: Canada (Qué­ réalisateur, ces trois lettres banales tendance à nous montrer les années bec) — 1984 — 96 minutes. se démarquent du quotidien des per­ soixante dans l'homme plutôt que On pourrait dire, si on ne sonnages pour devenir une sorte de l'homme dans les années soixante, craignait pas de schématiser un peu symbole prémonitoire, annonçant ce qui est étrangement contraire à trop les particularités propres à cha­ des événements qui se préparent à ses habitudes. cun de ces deux cinémas, que la l'insu de Louis et de Claudette. Les Alors que dans Les Vau­ principale différence qui sépare le faits, ainsi recréés, sont donc impré­ tours il nous brossa un tableau de documentaire de la fiction se résume gnés d'une vision a posteriori de l'époque duplessiste à travers ses à une question d'orthographe. l'Histoire qui, afin d'établir un sus­ personnages qui baignaient littéra­ D'orthographe « littéraire » en tout pense, met la charrue devant les lement dans cette époque « bleu­ premier lieu, mais aussi d'orthogra­ boeufs (faisant transparaître l'ave­ tée », donc à qui on ne demandait phe cinématographique, ou ce qui nir dans le présent). Bref, la fiction qu'à vivre pour que tout un pan en découle. écrase la réalité. de l'Histoire nous soit dévoilé, dans En effet, alors que le C'est le propre de la fic­ Les Années de rêves (deuxième volet documentaire a souvent comme tion lorsqu'elle se penche sur l'His­ d'une trilogie sur le Québec con­ sujet l'Histoire, la fiction, elle, toire: elle a tendance à la regarder temporain), il tourne de haut en s'intéresse plutôt à l'histoire, sans sous la lumière des événements ulté­ bas. Ses personnages ne sont plus majuscule. Alors que le premier sai­ rieurs. On peut, par contre, mini­ que des personnages de scénario sit dans leur immédiateté des faits miser l'effet de ce miroir déformant qu'on a affublés de bandeaux et de qui se déroulent devant la caméra en intercalant, par exemple, dans sandales, et à qui on a demandé (surtout dans le cas du cinéma le découpage, des commentaires de faire « comme si ». Bref, ces direct), le second recrée ces faits de assumant pleinement cette fonction aventures de Louis et de Claudette, toutes pièces. Alors que, dans une (comme on l'a fait dans Les Ordres perdus dans un monde politique­ certaine mesure, les faits et gestes ou Reds). Ou, entre autres, en gon­ ment bouillonnant, tiennent plus, des protagonistes d'un documentaire flant tel Visconti toute la fiction de de par la grosseur des traits, à la parlent pour eux-mêmes, ils n'exis­ l'H(h)istoire afin de l'édifier en bande dessinée. tent, dans la fiction, que pour ser­ spectacle grandiose. Le talent de Labrecque, 24 JUILLET 1984 le mieux fignolé? Mais ceci est (déjà) une autre H(h)istoire... Richard Martineau ÇyONATINE - Scénario ^^ et réalisation: Micheline F>*^J Lanctôt — Images: Guy Dufaux — Musique: François Lanc­ tôt — Montage: Louise Surprenant, Lucette Bernier — Interprétation: Pascale Bussières (Chantai), Marcia Pilote (Louisette), Pierre Fauteux (le chauffeur d'autobus), Kliment Dent- chev (le marin bulgare) Pierre Giard (le père de Louisette), Thérèse Morange (la mère de Louisette), Pauline Lapointe (l'épouse du chauffeur), Jean Mathieu (l'inspec­ teur), Marc Gélinas (le chauffeur par contre, ne pouvait pas être com­ scène finale d'un lyrisme rare dans remplaçant) — Origine: Canada plètement absent, et il illumine de le cinéma de chez nous et qui réus­ (Québec) — 1983 — 90 minutes. sa touche deux scènes susceptibles sit à tout balayer sur son passage. « Y a-t-il quelqu'un dans de figurer dans une éventuelle On touche ici aussi à l'essence de le monde qui pense à nous autres? » anthologie du cinéma québécois. La ces années turbulentes, bien qu'on Nous autres, c'est Chantai et Loui­ première met en scène les membres se situe à l'opposé de tout réalisme. sette, deux filles qui en sont à l'âge de la famille Pelletier réunis lors Dans les deux cas, Labrecque n'a qu'on dit ingrat. Chantai est déli­ d'un repas, après qu'ils ont tous pas fait « comme si »; il s'est mis cate et timide, Louisette est fon­ goûté à un gâteau assaisonné de totalement à l'écoute de ses person­ ceuse et débrouillarde, mais toutes marijuana. Le comique de la situa­ nages, ou de ses propres sentiments. deux ont en commun leur désarroi tion l'hilarité générale, de même que Ce n'est que lorsque la vie ou le devant un monde qui semble chan­ la performance des comédiens spectacle prennent le dessus sur la ger parce qu'elles sont en train de (époustouflante composition de démonstration, l'exposé et l'analyse se transformer, de devenir des fem­ Roger Lebel) nous font sentir, sans que le cinéma est ce qu'il est. mes. Plus elles se sentent désempa­ trop forcer la note, toute la douce La question, bien sûr, n'est rées, plus elles se replient sur folie anarchique de cette époque. pas de savoir si Les Années de rêves elles-mêmes, sur leur amitié com­ C'est un exemple de reconstitution constitue une demi-réussite ou un mune, érigeant entre le monde et où on est tout d'abord parti de la demi-échec. Ne serait-ce que pour elles une barrière de son à l'aide base, c'est-à-dire des personnages ses hauts et ses bas qui nous font d'un appareil pourtant conçu pour eux-mêmes. réfléchir sur les rapports qu'entre­ la communication mais qui devient À l'autre bout du spectre tiennent Histoire et histoire, le film en l'occurence un instrument d'iso­ se situe cette vision de l'Histoire vaut la peine qu'on s'y attarde. La lement, le « walkman ». Quelqu'un qu'on peut qualifier de viscontienne, véritable question est celle-ci: après pourtant a pensé à elles, une comé­ c'est-à-dire où on a poussé à son ce répertoire des visions de l'His­ dienne devenue cinéaste qui s'est paroxysme Partificialité de la recons­ toire (documentaire, bande dessinée, souvenu des troubles, des rêves et titution à tel point que l'Histoire scènes de la vie quotidienne ou des contradictions de l'adolescence. devient un énorme spectacle. Il opéra), laquelle choisira Labrecque Et ce faisant, Micheline Lanctôt a s'agit bien sûr de la merveilleuse pour le dernier volet qui devra être composé un joli morceau de cinéma 25 SÉQUENCES N" 117 (comme on dit un morceau de musi­ le renard sur les conditions de gnie.

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