JODIE J. EMERY Le 17 août 2017 Comité permanent de la santé Chambre des communes Ottawa (Ontario) K1A 0A6 Canada À l’intention des députés et du président du Comité permanent de la santé, M. Bill Casey, des vice-présidents, MM. Don Davies et Len Webber, et des membres du Comité permanent de la santé. Je m’appelle Jodie Emery et j’aimerais présenter respectueusement ce mémoire sur le projet de loi C-45, « Loi sur le cannabis ». Mes qualifications pour commenter cette réforme importante sont notamment les suivantes : - Depuis plus de 13 ans, je me consacre à la recherche sur le cannabis, j’écris sur le sujet, que je défends, ainsi que sa légalisation, en qualité de rédactrice en chef de magazine, propriétaire d’entreprise, porte-parole et candidate politique. - J’ai parlé à de nombreuses conférences et rencontres sur le cannabis dans tout le Canada, aux États-Unis et ailleurs. - En 2010, j’ai fait campagne pour la Proposition 19 en faveur de la légalisation du cannabis en Californie. - En 2011, j’ai témoigné devant la Commission des voies et moyens de l’Assemblée législative de l’État de Washington à propos du projet de loi 1550 sur la légalisation. - En 2012, j’ai approuvé officiellement l’initiative 502 pour la légalisation du cannabis de l’État de Washington, qui a abouti. - En 2012, j’ai demandé la légalisation aux côtés de l’ancien procureur général de la Colombie- Britannique Geoffrey Plant, de l’ancien procureur de district des États-Unis John McKay et du Dr Evan Wood, du Centre d’excellence sur le VIH/sida, dans le cadre de notre campagne pour la légalisation du cannabis baptisée « Arrêtez la violence ». - En 2014 et 2015, j’étais candidate à la nomination pour le Parti libéral du Canada dans la circonscription de Vancouver-Est avec un programme et une campagne très active en faveur de la légalisation. - En février 2016, j’ai parlé de la légalisation et de l’amnistie pour des infractions à la réglementation du cannabis devant les sénateurs et devant un groupe de travail lors de la rencontre sur la légalisation du forum des sénateurs libéraux au Parlement. - Je suis directement et indirectement concernée par l’application de la loi interdisant le cannabis et en suis victime depuis 2004, année où j’ai commencé à prôner pacifiquement la légalisation du cannabis et à m’engager politiquement. Introduction : pourquoi légaliser le cannabis? Depuis quelques années, après des décennies de militantisme politique et de défense publique de cette cause, combinés à une désobéissance civile pacifique et à des contestations devant les tribunaux, de plus JODIE J. EMERY ~ [email protected] ~ TWITTER.COM/JODIEEMERY en plus de gens sont favorables à la légalisation du cannabis. Pendant deux ans, le Comité sénatorial spécial sur les drogues illicites a étudié le cannabis et il a conclu dans son rapport de 2002 que « la continuation de la prohibition met la santé et le bien-être des citoyens du pays davantage en danger qu’une mise en marché réglementée du cannabis ». https://sencanada.ca/content/sen/Committee/371/ille/rep/summary-f.pdf La légalisation du cannabis était considérée comme un moyen de régler les questions suivantes : 1) Depuis 1965, des millions de Canadiens sont injustement arrêtés et se retrouvent avec un casier judiciaire à cause d’infractions à la réglementation du cannabis, quand bien même ils ne portent pas atteinte à la sécurité ou au bien-être de leurs concitoyens. 2) L’industrie et la sous-culture du cannabis – y compris les producteurs, les distributeurs et les consommateurs – existent déjà, malgré des sanctions pénales prohibitives. 3) Des milliards de dollars des deniers publics sont consacrés à l’application de la Loi sur le cannabis dans tout le Canada, sans incidence sur le marché noir, mais avec un grand préjudice causé à des millions de Canadiens pacifiques et non violents. Les victimes de décennies d’interdiction du cannabis méritent que quelqu’un les représentant parle des préoccupations au sujet de la protection des libertés publiques, de la santé publique et de la sécurité. C’est pourquoi je soumets l’information suivante dans l’espoir d’amendements au projet de loi C-45, « Loi sur le cannabis ». Les victimes de l’interdiction du cannabis Des millions de Canadiens ont été arrêtés et par ailleurs pénalisés à cause du cannabis depuis 1965 et des millions d’autres ont connu bien d’autres difficultés. Ce serait donc faire preuve de négligence que d’examiner la réforme de la Loi sur le cannabis sans entendre le témoignage d’un représentant des victimes de l’interdiction du cannabis. Des dizaines de milliers de Canadiens sont arrêtés chaque année uniquement parce qu’ils se trouvent en possession de cannabis. Une arrestation – ou même une interaction avec la police – à cause du cannabis entraîne pour des Canadiens pacifiques des pertes d’emploi, d’enfants, de possibilités de formation, de droits de déplacement, de capacité de faire du bénévolat et d’autres difficultés et mesures discriminatoires encore. L’application de la Loi sur le cannabis se révèle être d’emblée raciste et discriminatoire. La police cible généralement les pauvres, les jeunes, les marginaux, les Autochtones et les personnes de couleur. Le Toronto Star a obtenu dernièrement des données de la Police de Toronto sur l’application de la Loi sur le cannabis et constaté que la police cible et arrête de façon disproportionnée les membres de groupes minoritaires. « Les données de la Police de Toronto obtenues par le Toronto Star ventilent les arrestations par quartier et montrent qu’un nombre anormalement élevé de Noirs sont inculpés pour possession de cannabis. » [TRADUCTION] https://www.thestar.com/news/insight/2017/07/06/toronto-marijuana-arrests- revealstartling-racial-divide.html Le député libéral chargé du dossier de la légalisation chez les libéraux Bill Blair a déclaré au forum des sénateurs libéraux sur la légalisation en 2016 que « les contrôles de police disparates et disproportionnés en ce qui concerne l’application des lois sur la marijuana et leur incidence sur les communautés minoritaires, les communautés autochtones et les populations des quartiers les plus vulnérables sont une des grandes injustices dans ce pays » [TRADUCTION]. http://nationalpost.com/news/politics/liberals- considering-amnesty-for-past-marijuana-crimes-but-wont-halt-prosecutions-in-themeantime/ JODIE J. EMERY ~ [email protected] ~ TWITTER.COM/JODIEEMERY À Oakland, en Californie, la légalisation a eu pour effet la mise en place d’un programme de permis équitables qui prévoit que la moitié du cannabis autorisé aille à des victimes de l’interdiction du cannabis. http://www.mercurynews.com/2017/03/08/oakland-ground-breaking-pot-permit-programtakes-shape/ et aussi http://www2.oaklandnet.com/government/o/CityAdministration/OAK064043 Quand le Canada légalisera le cannabis, le monde sera attentif. Notre législation doit reconnaître les victimes de l’interdiction et offrir des grâces, des amnisties et des réparations. La légalisation devrait reconnaître, réduire et éliminer les dommages causés par la criminalisation injuste et discriminatoire du cannabis. Les préjudices causés par les arrestations sous l’interdiction du cannabis Je connais personnellement depuis 12 ans les conséquences néfastes de l’interdiction du cannabis, directement et indirectement. En tant qu’épouse d’un homme emprisonné à cause de l’interdiction du cannabis, je peux attester du stress physique, psychologique et financier extrême et des difficultés rencontrées lorsqu’on affronte le système de justice pénale à cause du cannabis. En 2005, mon époux, le militant politique très médiatique Marc Emery a été arrêté et extradé aux États-Unis en raison de son militantisme en faveur de la légalisation du cannabis et de son financement de cette cause. En 2009, il a été condamné à une peine de cinq ans dans une prison fédérale américaine. Les honoraires des avocats, le coût des appels téléphoniques et du courrier avec la prison, les visites, les produits d’hygiène, la nourriture et d’autres petites attentions derrière les barreaux sont autant de dépenses pour lesquelles j’ai dû travailler sans relâche pour que mon époux pacifique et non violent continue d’être en sécurité dans sa prison. Moi-même militante pro-cannabis connue, j’ai vécu récemment ma première arrestation liée au cannabis. Je peux parler personnellement de la nature dégradante et injuste du processus d’application de la loi à la suite d’une arrestation de ce type. Se voir passer les menottes, être soumise à une fouille à nu, ne pas avoir la capacité de donner ou refuser mon consentement, puis être incarcérée dans une cellule en béton froide sont autant d’humiliations que ne devraient jamais subir des Canadiens pacifiques et non violents, surtout pour quoi que ce soit en rapport avec le cannabis. Les craintes au sujet du projet de loi C-45 Le gouvernement fédéral libéral affirme s’être appuyé sur des faits pour élaborer le projet de loi C-45. Cependant, plusieurs études et rapports scientifiques respectables réfutent en grande partie les données erronées utilisées pour justifier l’adoption de nouvelles sanctions sévères que prévoit ce projet de loi (et le projet de loi C-46 connexe). Trois allégations sont avancées pour justifier la criminalisation du cannabis : 1) Le cannabis est nocif pour les adolescents et les jeunes adultes. 2) Le cannabis affaiblit davantage les facultés et cause plus d’accidents de la route. 3) Des organisations criminelles s’enrichissent avec le cannabis. Des messages exagérés fondés sur la peur présentant le cannabis comme dangereux ont été utilisés par le passé pour justifier la criminalisation, ce qui a entraîné des violations flagrantes des libertés publiques et des droits de la personne. Si le Canada doit vraiment respecter les principales raisons de mettre fin à l’interdiction du cannabis, il ne faut pas que la loi continue de criminaliser le cannabis pour quelque motif que ce soit.
Details
-
File Typepdf
-
Upload Time-
-
Content LanguagesEnglish
-
Upload UserAnonymous/Not logged-in
-
File Pages8 Page
-
File Size-