Thèse de doctorat Université Pierre et Marie Curie Ecole doctorale « Complexité du vivant », ED 515 Estimation des taux de mutation : implications pour la diversification et l’évolution du phytoplancton eucaryote Marc Krasovec Le 19 Octobre 2016, à Banyuls sur mer Gwenaël Piganeau Université Pierre et Marie Curie Directeur de thèse Sophie Sanchez-Ferandin Université Pierre et Marie Curie Directeur de thèse Vincent Laudet Université Pierre et Marie Curie Président de Jury Laurent Duret CNRS, UMR 5558 Rapporteur Olivier Tenaillon INSERM, UMR 1137 Rapporteur Delphine Sicard INRA, UMR 1083 Examinateur 1 2 Remerciements Ma plus profonde gratitude va à mes deux directrices de thèse, Gwenaël Piganeau et Sophie Sanchez-Ferandin, pour m’avoir donné l’opportunité de réaliser cette thèse avec elles, et surtout pour le soutien indéfectible et permanent durant ces trois années. Au-delà de la grande qualité de l’encadrement qu’elles m’ont apporté, j’ai pris un grand plaisir à travailler avec elles pour leurs nombreuses qualités aussi bien professionnelles que relationnelles. Ces trois années de thèse passées avec Gwenaël et Sophie ont été pour moi un grand épanouissement professionnel et personnel, et constituent une unique et excellente expérience pour ma vie future. Je tiens également à adresser mes remerciements aux membres du jury pour avoir accepté d’évaluer mon travail, Laurent Duret, Olivier Tenaillon, Delphine Sicard et Vincent Laudet, ainsi que les membres de mes comités de thèse, Delphine Sicard, Jean-Paul Cadoret et Adam Erye-Walker. Je tiens aussi à remercier le laboratoire de Biologie Intégrative des Organismes Marins et l’équipe de génomique environnemental du phytoplancton pour m’avoir accueilli et permis de réaliser cette thèse. D’une manière plus générale, je remercie ma famille, en premier lieu ma mère Christine sans laquelle je ne serais jamais allé aussi loin aussi bien dans mes études que dans mes avancées personnelles, ainsi que mes frères et sœur Caroline, David, Frédéric (ou Lélic) et mon frère jumeau, Gabriel, comme moi grand admirateur des êtres vivants. Aussi, nombreuses sont les personnes du laboratoire Arago qui m’ont aidé dans mes travaux, en sein de l’équipe, Nigel Grimsley, Hervé Moreau, Evelyne Derelle, Sheree Yau, et enfin une grande reconnaissance pour Elodie Desgranges et Claire Hemon, mes deux collègues de bureau et de laboratoire. 3 Je remercie également les membres de la plateforme cytométrie, David Pecqueur et Christophe Salmeron, toujours disponibles pour venir à la rescousse d’un cytomètre en panne. Pour finir, je remercie mes différents amis, Florian, Sylvain, Alex (vous vous reconnaitrez) et les doctorants du laboratoire pour les discussions, les soirées avec une mention spéciale pour les gaming-night, et les amitiés qui resteront bien après la fin de cette thèse. Pour citer quelques noms, je remercie bien sûr mon cher collègue de thèse Hugo L et sa femme, Océane l’aristocrate, Sandrine et ses petits félins, Margot et son congénère larvaire qui ont toujours des bonbons à me donner, mon premier ministre imaginaire Mathieu que je remercie pour avoir effectué le déplacement, Hugo B pour les discussions philosophiques sur Homo sapiens, Marine, Tatiana et Remy, Mariana, Mathias qui va se faire séquencer, Nathalie, Brian et Elsa, Daniel. A toutes les personnes évoquées ci-dessus, je vous suis reconnaissant d’avoir supporté mes discussions parfois inutiles et inintéressantes sur les chats, les chinchillas (dont Kalam et Glorfindel sont les plus beaux représentants), et mes idées sensiblement peu démocratiques. 4 SOMMAIRE Liste des abréviations 7 CHAPITRE 1: INTRODUCTION 9 1. Introduction générale 11 2. Les enjeux de la recherche sur les mutations 12 3. Les variations du taux de mutation 14 4. Les expériences d’accumulation de mutations 15 1. Les premières expériences de Terumi Mukai 15 2. L’effet des mutations sur la fitness 17 1. Les successeurs de Terumi Mukai 17 2. Paysage adaptatif 19 3. Interactions génotype-environnement 22 1. Les changements d’effet des mutations 22 2. Le stress et les hyper mutateurs 23 5. Les estimations directes du taux de mutation 24 1. Les variations inter génomiques du taux de mutation 24 1. La taille du génome 24 2. La taille efficace (Ne) 26 3. Le temps de génération 28 4. Le taux métabolique et la température 2. Les variations intra génomiques du taux de mutation 30 1. Le sens de la transcription et de la réplication 30 2. Le temps de réplication 31 3. Les régions codantes et le niveau d'expression 31 4. La composition en GC 31 6. Nouveaux modèles biologiques 35 1. L’importance écologique du phytoplancton 35 2. Présentation des espèces 36 1. Choix des modèles biologiques 36 2. Les Mamiellophyceae 40 3. Les Trebouxiophyceae 41 1. Présentation générale 41 2. Les transferts horizontaux de gènes 42 7. Les objectifs de thèse 45 5 CHAPITRE 2: EFFETS DES MUTATIONS SUR LA FITNESS 47 CHAPITRE 3: LE TAUX DE MUTATION CHEZ LES MAMIELLOPHYCEAE 61 CHAPITRE 4: LES TRANSFERTS HORIZONTAUX DE GENES: LE CAS DE PICOCHLORUM RCC4223 81 CHAPITRE 5: IMPACT DU TAUX DE MUTATION POUR LES BIOTECHNOLOGIES 97 CHAPITRE 6: DISCUSSION ET CONCLUSION 113 1. Les variations de fitness indépendantes des mutations 115 1. La plasticité phénotypique 115 2. Les bactéries présentes dans les cultures d’O. tauri 117 3. Le rôle des variations structurelles sur le phénotype 118 2. Les limites à l’estimation du taux de mutation 120 3. Perspectives pour les EAMs 123 4. Conclusion générale 125 Annexes 127 Listes des figures et des tableaux 175 Bibliographie 181 Résumé 214 6 Liste des abréviations a : Effet de la mutation sur la fitness ADN : Acide désoxyribonucléique ARN : Acide ribonucléique CV : Variation de l’effet des mutations ΔV : Changement de variance de la donnée de fitness ΔM : Changement moyen de fitness par génération EAM : Experience d’accumulation de mutations G : Taille de génome GCeq : Contenu en GC du génome à l’équilibre Ge : Taille de génome codante GxE : Interactions Genotype-Environement HGT : Horizontal gene transfer Μb : Mega base MMR : Mismatch repair Ne : Taille efficace de population OmV1 : Ostreococcus mediterraneus Virus 1 PFGE : Pulsed-field gel electrophoresis R1 : Taux de mutation de GC vers AT R2 : Taux de mutation de AT vers GC RCC : Roscoff culture collection ROS : Reactive oxygen species TCR : Transcription-coupled repair U : Taux de mutation par génome Uc : Taux de mutation caryotypique par génome Ud : Taux de mutation délétères par génome µ : Taux de mutation par nucléotide 7 8 CHAPITRE 1: INTRODUCTION 9 10 1. Introduction générale Depuis la publication de l’origine des espèces et du principe de la sélection naturelle par Charles Darwin en 1859, des générations de biologistes ont étudié les questions fondamentales qui entourent l’évolution et la diversité du vivant. A cette époque, la génétique n’est pas connue et Darwin ignore les mécanismes qui génèrent la variabilité et la diversité soumises à la sélection naturelle. Les lois de Mendel sont redécouvertes en 1900, et en 1902 Walter Sutton propose la théorie chromosomique de l’hérédité. L’existence des mutations est démontrée en 1911 par Thomas Morgan en réalisant des expériences sur des drosophiles. Les mutations sont le moteur de l’évolution et constituent la base du potentiel adaptatif des espèces car elles constituent la principale source de diversité sur laquelle peut agir la sélection. Les biologistes s’intéressent donc depuis longtemps aux rôles des mutations, et les découvertes du début du 20ème siècle vont aboutir à la théorie synthétique de l’évolution, en particulier avec les travaux de Sewall Wright, John B. S. Haldane, Hermann J. Muller ou Julian Huxley (Haldane, 1949, 1937; Muller, 1928; Wright, 1932). La découverte de l’ADN et de sa structure (Watson and Crick, 1953) ouvrira la voie aux technologies de séquençage qui permettent d’observer directement l’apparition des mutations sur un génome, leurs fréquences et leurs distributions. Leurs effets sur la capacité de survie sont également explorés (Eyre- Walker and Keightley, 2007; Haldane, 1937; Muller, 1950) pour comprendre les différents processus évolutifs et adaptatifs des êtres vivants. La théorie neutraliste de l’évolution de Kimura dans les années 1960 apporte une nouvelle vision de l’évolution avec la mise en avant du hasard comme force aussi importante que la sélection, la dérive génétique (Kimura, 1991, 1987, 1968). Il s’agit de la variation aléatoire des fréquences alléliques dans une population (Charlesworth, 2009), indépendamment de la sélection ou des migrations. La dérive est plus forte dans des populations de petite taille, et donc de faible taille efficace (Wright, 1931), et peut aller à l’encontre de la sélection naturelle (Charlesworth, 2009; Willi et al., 2006). Les mutations sont soumises à ces forces évolutives et le taux de mutation subit lui même la sélection naturelle ou le hasard de la dérive génétique. 11 2. Les enjeux de la recherche sur les mutations La diversité que nous pouvons observer sur Terre au sein des trois empires du vivant que sont les bactéries, les archées et les eucaryotes est issue des processus de sélection et de mutations. Les mutations sont une altération de la molécule d’ADN, à un niveau ponctuel ou chromosomique. Cette altération peut être le remplacement d’un nucléotide par un autre, une insertion ou une délétion de séquence, une cassure, une duplication, un réarrangement chromosomique ou autres modifications de l’ADN. Nous pouvons distinguer deux origines aux mutations: les mutations issues des erreurs de réplication d’une part, et issues de facteurs mutagènes d’autres part (rayonnement ultra violet, stress oxydatifs ou radioactivité par exemple); voir la revue de Maki, 2002 (Maki, 2002) et la Figure 1. Les mutations constituent un large enjeu pour la recherche en biologie et en médecine. En recherche fondamentale, elles sont étudiées pour répondre à des questions centrales sur l’évolution et les capacités d’adaptation des espèces.
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