Vincent Paul TOCCOLI YUME Cet incertain désir de rêve ... ou L’empire des songes... Désir Rêve Essai sur « ... l’invincible englobant de l’univers... » André Malraux Éditions Amalthée Page 1 SOMMAIRE • Exergues en guise de Préface • Présentation • Chap.1 : La mort en soi • Chap.2 : Après Vie bouddhiste et chrétienne • Chap.3 : Vie et mort Shinto • Chap.4 : La mort Bushido • Chap.5 : Le Samouraï et la mort • Chap.6 : La mort Zen • Chap.7 : Funérailles • Annexe 1 : Princesse Mononoké : le sauvetage de la nature (toute illustration non autorisée par les studio Ghibli de Tokyo) • Annexe 2 : Suicide Club : le film • Annexe 3 : Vie & Mort en boucle : Ring • Annexe 4 : La mort Butô • Annexe 5 : Le Haïku et la célébration de la mort • Excursus 1 : Maître Tokitsu et le complexe d’Ajazé • Excursus 2 : Une spiritualité de (la) mort • Postface • Bibliographie • Du même auteur Page 2 À ma mère, rentrée dans le rêve de Dieu Le 5 septembre 2005, à l’aube... Page 3 Exergues à méditer en guise de PRÉFACE Le monde dans lequel nous vivons n’est pas très différent d’un rêve. Hagakure Où sommes-nous quand nous dormons sans rêver ? Anonyme Si j’avais su que c’était un rêve Je ne me serais certes pas réveillée. Ono no Komachi Deux réveils et un sommeil ! Rêve d’un monde en fuite ! Reflets bleus de la prime aurore ! Tokugawa Ieyasu (1542-1616) Ma vie est apparue comme la rosée, elle s’évanouira comme elle : je ne suis qu’une suite de rêves... Toyotomi Hideyoshi (1536-1598) Tout n’est que rêve J’ai laissé derrière moi ciel et terre Debout dans le crépuscule du matin, Libre de tous les nuages de l’attachement. Uesugi Kenshin (1530-1578) Une pierre pour oreiller, j’accompagne les nuages. Santoka Il est bon de considérer le monde comme un rêve. Hagakure Le seul véritable voyage, le seul bain de Jouvence, ce ne serait pas d’aller vers de nouveaux paysages, mais d’avoir d’autres yeux, de voir l’univers avec les yeux d’un autre, de cent autres, de voir les cent univers que chacun d’eux voit, que chacun d’eux est. Marcel Proust La définition est une limitation, la beauté d’une image ou d’une fleur repose dans son inconscient déploiement . Anonyme Japonais Le monde moral est un entrecroisement sans fin d’affaires, de situations, d’intérêts, de conflits, de passions. On peut le considérer et le traiter scientifiquement à des points de vue variés [...]. Ce qui s’y passe journellement n’est ni fait ni voulu, comme de l’histoire, par aucun être raisonnable : c’est une certaine manière de considérer l’événement après coup, qui, des affaires, fait de l’histoire. Johann Gustav Droysen Je suis mon (propre) monde. (Le microcosme.) De même qu’à la mort le monde change pas, mais cesse. La mort n’est pas un événement de la vie. La mort ne peut être vécue. Si l’on entend par éternité, non pas une durée temporelle infinie, mais l’intemporalité, alors celui-là vit éternellement qui vit dans le présent. Notre vie est tout autant sans fin que notre champ de vision est sans limite. Ce qui est mystique, ce n’est pas comment est le monde, mais le fait qu’il est. Il y a assurément de l’inexprimable. Celui-ci se montre, il est l’élément mystique. Ce dont on ne peut parler, il faut le taire. L.Wittgenstein, Tractatus logico-philosophicus , traduit de l’allemand par Pierre Klossowski, Éditions Gallimard, 1961 Page 4 Quand je considère la petite durée de ma vie, absorbée devant l’éternité précédant et suivant, le petit espace que je remplis et même que je vois, abîmé dans l’infinie immensité des espaces que j’ignore et qui m’ignorent, je m’effraie et m’étonne de me voir ici plutôt que là, car il n’y a point de raison pourquoi ici plutôt que là, pourquoi à présent plutôt que lors. Qui m’y a mis ? Par l’ordre et la conduite de qui ce lieu et ce temps a-t-il été destiné à moi ? Car enfin qu’est-ce qu’un homme dans la nature ? Un néant à l’égard de l’infini, un tout à l’égard du néant, un milieu entre rien et tout, infiniment éloigné de comprendre les extrêmes. La fin des choses et leurs principes sont pour lui invinciblement cachés dans un secret impénétrable. Egalement incapable de voir le néant d’où il est tiré et l’infini où il est englouti, que fera-t-il donc, sinon d’apercevoir quelque apparence du milieu des choses dans un désespoir éternel de connaître ni leur principe ni leur fin ? Le silence éternel de ces espaces infinis m’effraie. Pascal, Pensées , Édition de Michel Le Guern, Folio classique Nos architectes ont rêvé leurs cathédrales comme des pierres d’éternité, ceux d’Isé ont rêvé la leur comme le plus grandiose des nuages. Et cet éphémère parle d’éternité plus puissamment que les cathédrales, que les Pyramides. [...] Comme les Esprits des forêts, de la cascade de Nachi qui tombe de cent mètres et semble jaillir [...] ; piliers tendus, cascade tendue, lame de sabre perdue dans la lumière . André Malraux, Le Japon, Antimémoires , Folio. Les fleurs d’hier sont les rêves d’aujourd’hui. Proverbe nippon La Voie du Samouraï se trouve dans la mort. En face de la mort, il n’y pas plus qu’elle à choisir... S’il veut être prêt à mourir, un Samouraï doit se considérer comme déjà mort. La voie du Samouraï est la passion de la mort. Il faut développer la passion de la mort. Ce dont chacun a besoin c’est la passion de la mort. Tout le reste découlera naturellement de cette passion... L’absolue loyauté vis à vis de la mort doit être mise en œuvre tous les jours. On doit aborder chaque aube en méditant tranquillement, en pensant à sa dernière heure et en imaginant les différentes manières de mourir : - tué par une flèche, par un boulet, tranché par le sabre, submergé par les flots, - sautant dans un incendie, foudroyé par l’éclair, écrasé dans un tremblement de terre, - tombant d’une falaise, victime d’un malaise ou de mort soudaine. On doit commencer sa journée en pensant à la mort. Jocho Yamamoto (1659-1719), Hagakure, Le livre secret des Samourai . Quand tu te retrouveras au carrefour des voies et que tu devras choisir la route, n’hésite pas : choisis la voie de la mort. Ne pose pour cela aucune raison particulière et que ton esprit soit ferme et prêt. Quelqu’un pourra dire que si tu meurs sans avoir atteint aucun objectif, ta mort n’aura pas de sens : ce sera comme la mort d’un chien. Mais quand tu te trouves au carrefour, tu ne dois pas penser a atteindre un objectif : ce n’est pas le moment de faire des plans. Page 5 Tous préfèrent la vie à la mort et si nous nous raisonnons, ou si nous faisons des projets, nous choisirons la route de la vie. Mais si tu manques le but et si tu restes en vie, en réalité tu seras un couard. Ceci est une considération importante. Si tu meurs sans atteindre un objectif, ta mort pourra être la mort d’un chien, la mort de la folie, mais il n’y aura aucune tache sur ton honneur. Dans le Bushido , l’honneur vient en premier. Par conséquent, que l’idée de la mort soit imprimée dans ton esprit chaque matin et chaque soir. Quand ta détermination de mourir en quelque moment que ce soit aura trouvé une demeure stable dans ton âme, tu auras atteint le sommet de l’instruction du Bushido . Le vrai courage consiste à vivre quand il est juste de vivre, à mourir quand il est juste de mourir. Jocho Yamamoto (1659-1719), Hagakure, Le livre secret des Samourai La fleur des fleurs est le bourgeon de la fleur du cerisier, le Samouraï est l’homme parmi les hommes. Proverbe japonaiso Page 6 Présentation Noël 2004, Italie du Nord, Villongo, lac d’Iseo, 9 h du matin : le téléphone... Christian, de Tokyo : – Franck était à KaoLak (Côte thaï occidentale, près de Phuket) ; ses beaux-parents, Muriel, sa femme et deux de ses enfants, Matthieu et Iris, ont disparu dans le tsunami... Silence... – Il voudrait que tu t’en occupes... Pendant cette conversation défilent devant mes yeux désormais concernés les images épouvantables que CNN diffuse en boucle depuis la catastrophe, et que je regardais inlassablement depuis mon arrivée, la veille, avec l’attention ordinaire soudain mobilisée par le désastre quotidien du monde... – Oui, bien entendu ! Que dois-je faire ? – Il t’appellera lui-même. De janvier à septembre 2005, et par quatre fois, au rythme saccadé et irrégulier des découvertes, des identifications, des rapatriements, des cérémonies funèbres et des enterrements, j’ai accompagné deux familles, mais surtout mon ami Franck qui avait, en 30 secondes, perdu femme, enfants et beaux- parents. Cinq personnes que les fêtes de Noël avaient rassemblées sur la côte idyllique des séjours tropicaux, dans le nouveau Sofitel super luxe, où tout avait été conçu pour le plus grand confort de ses hôtes : on allait même rejoindre sa chambre en barque par des petits canaux bordés de végétation luxuriante. J’avais vu çà déjà quelque part à la frontière entre Californie et Arizona, ce devait être à Palm Springs... Je pouvais imaginer... Il y eut ainsi les deux imposantes manifestations de sympathie et de condoléance, à Paris, dans la grande synagogue de la rue Copernic, près de l’Étoile – Muriel était juive – et à Tokyo, dans l’immense chapelle de la Women University : le couple habitait Tokyo depuis plus de 15 ans ; nipponophones tous deux, ils occupaient des postes de première importance, respectivement chez CaLyon pour lui, chez L’Oréal pour elle.
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