
Marguerite et Faust, un amour tragique in fine Musée Sainte-Croix, Poitiers 25 octobre 2016 -26 février 2017 À l’occasion des Rencontres Michel Foucault In fine, le dernier jour des vivants (organisées par le Théâtre-auditorium de Poitiers et l’Université de Poitiers), le Musée Sainte-Croix propose une présentation du Faust de Goethe autour du personnage de Marguerite. Des œuvres des musées de Poitiers, Orléans et Cognac, et de la Galerie de la Nouvelle Athènes (Paris) sont exposées dans une scénographie théâtralisée. (…) Moi *Faust+ l’ennemi de Dieu, je n’ai pas eu de repos que je n’aie brisé son cœur, que je n’aie fait tomber en ruine sa pauvre destinée. Ainsi donc la paix doit lui être ravie pour toujours. Il faut qu’elle soit la victime de l’enfer. Eh bien ! Démon, abrège mon angoisse, fais arriver ce qui doit arriver. Que le sort de cette infortunée s’accomplisse, et précipite-moi du moins avec elle dans l’abîme. ( Goethe, Faust (1808 - 1832) traduction de Mme de Staël) L’histoire de Faust Souvent perçu comme le héros d’un conte populaire, Faust pourrait être à l’origine un homme qui vécut en Allemagne au 15e siècle. Plusieurs villes se disputent l’honneur de lui avoir donné naissance et conservent des objets que son souvenir rend précieux : Francfort, le premier livre imprimé de l’auteur : Mayence, sa première presse, Wittemberg, ses deux résidences… L’histoire de Faust, populaire tant en Angleterre qu’en Allemagne, a inspiré un grand nombre d’auteurs à diverses époques. Les plus connues demeurent celles du poète anglais Marlowe, joué en 1589, et celle de Goethe. Faust de Goethe (Frankfort, All, 1749 – Weimar, All, 1832) Goethe rédigea entre 1773 et 1775 un premier texte souvent appelé Urfaust (Faust primordial). En 1790, est publié un texte intitulé Faust, un fragment. FAUST I (1808) Le docteur Faust, présenté par l’auteur comme l’incarnation du génie humain, n’ayant plus rien à apprendre ni à voir sur terre, n’aspire plus qu’à la connaissance du surnaturel. Se souvenant que Dieu a interdit le suicide, il se résigne à vivre, triste et pensif. C’est dans cet état d’âme que le diable, Méphistophélès, choisit de le tenter et lui offre, sous forme d’un pari, toutes les ressources surnaturelles imaginables pour la jouissance d’une vie matérielle. Méphistophélès commence par rajeunir les traits du docteur au moyen d’un filtre préparé par une sorcière, le rendant séduisant aux yeux de la première femme rencontrée. Celle-ci se nomme Marguerite (Gretchen chez Goethe). Elle incarne la pureté et l’innocence. Faust, amoureux, engage son complice à l’aider à séduire la belle, en lui offrant des bijoux, et en détournant l’attention de la mère de la jeune femme. Marguerite succombe au charme de docteur et porte en elle le fruit de ces amours illégitimes. Valentin, le frère de Marguerite découvre Faust sortant de la chambre de sa sœur et le provoque en duel. Faust tue Valentin. La mère de Marguerite meurt de chagrin. Sombrant dans le désespoir et la folie, Marguerite tue son enfant. Méphistophélès enlève son compagnon et le transporte au sein d’une nuit fantastique de sabbat afin de lui faire oublier le danger que court sa maitresse. Mais Faust, hanté par le souvenir de Marguerite, oblige le démon à venir avec lui au secours de la jeune femme condamnée et enfermée dans une prison. Celle-ci repousse son amant et refuse le secours de l’Enfer. Voulant expier son crime, elle implore l’assistance de Dieu qui la sauve, laissant Faust quitter la prison en compagnie de Méphistophélès. FAUST II (1832) Publiée à titre posthume, Faust II, est la suite du premier ouvrage. C'est toutefois une œuvre entièrement différente, par le ton adopté, par les thèmes abordés, mêlant au récit des personnages issus de la mythologie gréco-romaine. Faust, appelé, ainsi que Méphistophélès, à la cour de l'empereur se voit confier un certain nombre de tâches à accomplir. Au moment de mourir, Faust retrouve Marguerite qui, rachetant son âme, l'arrache des mains de Méphistophélès, et le sauve. Les personnages : Marguerite, Faust et Méphistophélès Ary Schiffer (1795, Dordrecht, Hollande - 1858, Argenteuil) Marguerite au rouet, c. 1831 Huile sur panneau Galerie de la Nouvelle Athènes, Paris © Galerie de la Nouvelle Athènes, Paris Faust, c. 1831 Huile sur panneau Galerie de la Nouvelle Athènes, PariLe jeune peintre d’origine hollandaise s’impose à Paris comme une des figures de la vague romantique qui culmine au Salon de 1827. Professeur de dessin des enfants du futur roi Louis-Philippe à partir de 1822, il occupe une place prépondérante dans le monde des arts, tant pour ses peinture d’Histoire que pour ses portraits. Scheffer s’inspire des textes les plus célèbres de l’époque dont Faust de Goethe, choisissant dans le récit une série des sujets qui jouissent alors d’une vogue extraordinaire. Le docteur Faust conclut avec amertume que la connaissance ne lui a rien apporté, tandis que derrière lui, Méphistophélès, espionne sa future victime. Marguerite, quant à elle, est ici représentée délaissant son rouet, un livre de prières ouvert devant elle. Les personnages ignorent encore le drame qui va sceller leur destin. © Galerie de la Nouvelle Athènes, Paris Eugène DELACROIX (1798, Charenton-Saint-Maurice – 1863, Paris) Faust dans son cabinet, c. 1827-1828 Encre sur papier Provenance : Collection particulière, Paris © Galerie de la Nouvelle Athènes, Paris Remarqué au Salon en 1824, il produit dans les années suivantes des œuvres s'inspirant d'anecdotes historiques, littéraires, d'évènements contemporains, ou témoignant de ses voyages au Maghreb. À quarante ans, sa réputation est suffisamment établie pour recevoir d'importantes commandes de l'État. Delacroix demeure comme le principal représentant du romantisme dans la peinture française du 19e siècle. En 1827, Charles Motte, éditeur rue des Marais, décide de publier une version française de Faust, la pièce de Goethe, illustrée d’une suite de dix-sept lithographies réalisées entre 1827 et 1828 par Delacroix. Depuis Weimar, dans une lettre adressée à son ami Johann Peter Eckermann, Goethe se dit enthousiasmé par le travail du peintre et estime qu’il a bien su retraduire les scènes qu’il avait imaginées. Le sortilège Méphistophélès mène Faust dans l’antre d’une sorcière afin de lui faire boire un filtre magique, promesse de jouvence. Face aux réticences de Faust, le diable lui rappelle, non sans ironie, qu’il peut aussi trouver une vie saine et simple dans le labeur. Faust lui préfère la vie facile et sans contrainte qu’offre le breuvage surnaturel. Faust Tout cet étrange appareil de sorcellerie me répugne ; quelles jouissances peux-tu me promettre au sein de cet amas d’extravagance ? Quels conseils attendre d’une vieille femme ? Et y a-t-il dans cette cuisine quelque breuvage qui puisse m’ôter trente ans de dessus le corps ? (…) Méphistophélès Mon ami, tu parles encore avec sagesse. Il y a bien, pour se rajeunir, un moyen tout naturel, mais il se trouve dans un autre livre, et c’en est un singulier chapitre. Faust Je veux le connaitre ! Méphistophélès C’est un moyen qui ne demande argent, médecine, ni sortilège ; rends-toi tout de suite dans un champ, mets-toi à bécher et à creuser, resserre ta pensée dans un cercle étroit, contente- toi d’une nourriture simple : vis comme une bête avec les bêtes, et ne dédaigne pas de fumer toi-même ton patrimoine ; c’est, crois-moi, le meilleur moyen de te rajeunir de quatre-vingts ans. Faust Je n’en ai point l’habitude, et je ne saurais m’accoutumer à prendre en main la bêche. Une vie étroite n’est pas ce qui me convient. Méphistophélès Il faut donc que la sorcière s’en mêle. Attribué à David de Teniers II, dit le Jeune (Anvers, 1610 - Bruxelles, 1690) Scène de Sabbat / Départ pour le Sabbat, 2nd moitié du 17e siècle Huile sur toile - 892.1.38 © Musées de Poitiers, Ch. Vignaud David Teniers II fut, dès ses débuts, un peintre très productif grâce, notamment à ses contacts avec le commerce d'art anversois. Ses scènes d'auberge, dans la tradition de la peinture de genre flamande, le rendent rapidement célèbre. Plus tard, son regard devint moins satirique, sa palette s'éclaircit pour des scènes idylliques de la campagne des Flandres. Dans un foisonnement de détails caractéristiques de l’artiste, cette scène rappelle l’antre des sorcières dans laquelle évoluent nombre de monstres improbables, et où Faust aurait pu absorber un filtre magique le rendant jeune et beau. Le sabbat Le terme sabbat (shabbat en hébreu) est le nom du septième jour de la semaine, le samedi qui désigne le jour de la cessation du travail, du repos, de la prière et de l’étude de la Tora dans la religion juive. Il désigne également une assemblée nocturne de sorciers et sorcières, tenue dans un lieu désert souvent élevé, dans laquelle le culte rendu au diable, les danses et les orgies rappellent ceux de l'antiquité païenne (dérivation injurieuse du sens de sabbat, par l'opinion populaire qui, condamnant les Juifs, assimila leur fête à une réunion de sorciers). Par extension le terme désigne une agitation désordonnée et bruyante, un vacarme. La sorcellerie Si pratique et répression de la magie ont toujours existé, elles sont très souvent associées aux périodes troublées. La notion d’hérésie prend une ampleur vers le 11e siècle durant la première croisade. En 1184, le concile de Vérone excommunie les hérétiques, et celui de Gérone, en 1197, les condamne au bûcher. Cette répression ardue donnera naissance en 1231 à l’Inquisition, confiée aux dominicains.
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