Feuilleton DADVSI

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Feuilleton DADVSI Feuilleton DADVSI Le suivi au jour le jour des débats parlementaires relatifs à la loi « Droit d’Auteur et Droits Voisins dans la Société de l’Information » (DADVSI) Sébastien CALMONT Feuilleton DADVSI Episode 1 : « Au-delà du réel » Résumé de la 2ème séance du mardi 7 mars 2006 à l’Assemblée nationale Après plus de 2 mois d’interruption, le débat relatif au projet de loi n° 1206 « droit d’auteur et droits voisins dans la société de l’information » reprend cette semaine (mardi 7 mars) à l’Assemblée nationale. On se rappellera qu’en décembre dernier, les députés avaient adopté deux amendements à l’article 1er du projet de loi, légalisant les pratiques de téléchargement des œuvres via les réseaux peer-to-peer : la fameuse « licence globale », contre l’avis du Gouvernement, et tout particulièrement du ministre de la Culture, Renaud Donnedieu de Vabres. Nouveau rebondissement dans la nuit de lundi à mardi… le Gouvernement décide de retirer l’article 1er du projet de loi… provoquant la fureur d’un certain nombre de députés, notamment des députés PS. Jean-Marc Ayrault dénonce la volonté de « bafouer les droits du Parlement ». Christian Paul utilise quant à lui la notion de « contrefaçon de démocratie ». Malgré la confirmation de la légalité de cette procédure de retrait d’article par le Président de l’Assemblée (décision du Conseil constitutionnel du 26 juillet 1984), les députés PS bien renseignés indiquent qu’un tel retrait n’a jamais été fait depuis 45 ans et qu’il sera soumis au contrôle du Conseil constitutionnel. On apprendra quelques jours plus tard (le jeudi 9 mars) que le ministre a finalement réintroduit l’article 1er du projet de loi tel que modifié en décembre, provoquant le trouble chez les députés de l’opposition. Lors de la reprise des débats, le ministre rappelle les deux principes qui guident son action : protéger le droit d’auteur, « droit fondamental et intangible » mais aussi permettre l’accès à la culture et aux œuvres grâce à l’univers numérique. Il indique avoir conclu la semaine dernière un accord entre le ministère de l’Education nationale et les différents secteurs de la création concernés par l’utilisation des œuvres à des fins pédagogiques et de recherche. Il rejette donc toute idée de licence globale qui ne permettrait pas de financer la musique et le cinéma français. Il préfère favoriser le développement des offres légales, tout en garantissant l’exercice de l’exception de copie privée, l’interopérabilité et la concurrence. Un système de sanctions graduées est mis en place (v. à ce sujet le Flash IRPI du 2 mars 2006 présentant les derniers amendements au projet de loi). Patrick Bloche, un des plus fervents défenseurs de la licence globale au côté de Christian Paul, s’étonne qu’on souhaite transposer les Traités OMPI de 1996, « vieux de 10 ans » donc, que son collègue qualifie même de « texte préhistorique ». Il précise que la solution de licence globale ne devrait pas concerner le cinéma (pour respecter la chronologie des médias) et devrait avoir un caractère obligatoire. Finie donc la licence globale optionnelle de décembre dernier. Les positions évoluent. Après s’être réjouit que le téléchargement ne soit plus considéré comme de la contrefaçon, M. Bloche s’interroge sur le nouveau système de sanctions graduées : « l’infraction sera-t-elle constituée pour chaque acte de téléchargement ou pour chaque morceau téléchargé ? Qui fera les constatations ? Qui contrôlera ? Qui établira le lien entre l’adresse IP et l’identité de l’internaute ? ». Ce sont des questions légitimes auxquelles le ministre devra répondre. Il est encore choqué qu’on laisse au Collège des médiateurs le soin de dire combien d’exemplaires seront possibles dans le cadre de la copie privée : il sera ainsi à la fois « régulateur et arbitre des litiges ». 1 Feuilleton DADVSI C’est ensuite au tour de l’UDF, par la voie de François Bayrou, de déplorer la manière dont se déroule l’examen de ce texte, estimant que la procédure d’urgence retenue est « stupide » et qu’il faudrait mieux laisser du temps aux deux assemblées pour discuter du projet de loi. Il note pour sa part deux enjeux principaux : le logiciel libre (et donc à travers lui la crainte vis-à-vis des DRM) et la copie privée (qu’il proclame comme un droit pour les utilisateurs et qui nécessite d’assurer l’interopérabilité). Le droit à la copie privée ne peut être laissé à l’appréciation de spécialistes au sein du Collège des médiateurs, il doit être encadré par la loi. Quant au système de contravention automatique, il considère qu’il serait préférable de délivrer des avertissements via une autorité administrative obéissant aux règles légales. Frédéric Dutoit (groupe Communistes et Républicains) demande également de lever l’urgence sur ce débat… et même de retirer ce texte de l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Il refuse le contrôle des usages privés imposé par les DRM et propose une nouvelle solution : « la mise en place d’une plateforme publique de téléchargement, qui pourrait être à la fois financée par les FAI et par une taxe sur les énormes profits que génère le développement de l’e-commerce » ainsi que par une contribution forfaitaire des internautes. Il ironise sur le succès du site lancé par le ministre de la Culture (www.lestelechargements.com) sur lequel, selon lui, seulement 5% des internautes auraient laissé un commentaire favorable au texte du ministre ! Bernard Accoyer lui succède pour assurer le ministre du soutien du groupe UMP. Il en aura bien besoin le pauvre ! Didier Mathus (PS) indique qu’il veut faire mentir le grand spécialiste du droit d’auteur qu’est Emmanuel Pierrat, qui écrit dans son dernier ouvrage La Guerre des copyrights, que « les lobbies ont déjà truqué le résultat du match ». Christine Boutin, frondeuse à l’UMP, défend la licence globale, considérant qu’elle permet une juste rémunération des artistes, grâce à l’observation des flux et des sondages sur les internautes. Nicolas Dupont-Aignan, lui aussi à l’UMP pourtant, regrette l’abandon de la licence globale et met au défi le prochain gouvernement d’envoyer des millions de contraventions aux internautes qui téléchargent ! Jean Dionis du Sejour, pour l’UDF, rappelle les inconvénients de la solution « licence globale » : injuste (pourquoi faire payer les internautes qui ne téléchargent pas d’œuvres ?), elle serait un frein au développement des abonnements internet, poserait des problèmes de répartition et serait contraire aux engagements internationaux de la France. La séance se termine sur les interventions de Martine Billard (n’appartenant à aucun groupe), Christian Paul et Patrick Bloche. La première s’inquiète des problèmes d’interprétation soulevés par le récent arrêt de la Cour de cassation dans l’affaire Mulholland Drive (v. le commentaire de cet arrêt dans le Flash IRPI du 2 mars 2006) et invite à ce que la loi précise que « les intérêts légitimes des auteurs ne se confondent pas avec l’amortissement des coûts de production cinématographique ». Le second estime que la « contredanse pour la musique » (la contravention de 38 euros) ne sera pas dissuasive. Le troisième termine en posant la question qui lui paraît primordiale : « faut-il considérer le téléchargement comme une exception à la copie privée » ? Le débat est ouvert… 2 Feuilleton DADVSI Episode 2 : « La petite DADVSI dans la prairie… de la copie privée » Résumé de la 3ème séance du mardi 7 mars 2006 à l’Assemblée nationale Lors de la 3ème séance du mardi 7 mars, le ministre de la Culture, Renaud Donnedieu de Vabres, présente l’amendement 272, censé remplacer l’article 1er du projet de loi, retiré la veille à la demande du Gouvernement. Cet amendement modifie l’article L. 122-5 du Code de la propriété intellectuelle relatif aux exceptions au droit d’auteur. Il la complète même, avec quatre nouvelles exceptions : une exception pour la reproduction et la représentation par des personnes morales en vue d'une consultation strictement personnelle de l'œuvre par des personnes handicapées (atteintes d'une déficience motrice, psychique, auditive ou visuelle…) à des fins non lucratives et dans la mesure requise par le handicap, par des personnes morales et tous les établissements ouverts au public tels que bibliothèques, archives, centres de documentation et espaces culturels multimédia. Les établissements susceptibles de mettre en œuvre cette exception sont donc plus largement admis que dans le projet initial ! En outre, le texte prévoit que les documents imprimés font l'objet d'un dépôt sous la forme d'un fichier numérique pour faciliter la mise en œuvre de cette exception. une exception pour les copies effectuées par une bibliothèque ou un service d'archives accessible au public, d'œuvres protégées appartenant à leurs collections, lorsque le support sur lequel est fixée l'œuvre n'est plus disponible à la vente ou que le format de lecture est devenu obsolète, à la condition qu'elles ne visent aucun avantage commercial ou économique. Il s’agit de « copies de sauvegarde » afin de remplir la mission de conservation de ces organismes. une exception en faveur de la presse pour la reproduction intégrale ou partielle, dans un but d'information, d'une œuvre d'art graphique, plastique ou architecturale, lorsqu'il s'agit de rendre compte d'événements d'actualité, lorsque cette reproduction est faite de manière accessoire ou que l'œuvre a été réalisée pour être placée en permanence dans un lieu public. L’exception de citation est donc élargie et sort de sa limitation traditionnelle aux œuvres littéraires. une exception dite de « copie technique », qui était déjà logiquement présente dans le projet de loi, étant donné que c’est la seule exception obligatoire prévue par la directive de 2001.

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