Dans le panthéon des voix de comédiens, de part sa texture, son phrasé unique, sa stabilité de jeu, sa sonorité et sa résonance au coeur de l'oreille, il en est une terriblement envoûtante, celle de Jean Topart. Mais si pour certains il est seulement cette voix des plus marquantes, il est avant tout un comédien de grande dimension, dans toute l'acceptation du 1 terme. Né le 13 avril de l'année 1922, il débuta sa carrière artistique en 1948, au théâtre et à la radio, peu après les débuts au cinéma de sa soeur Lise Topart (1927-1952). Celle-ci côtoya, dès son premier film Sylvie et le fantôme, dirigé par Claude Autant-Lara en 1945, quelques grands noms tels Odette Joyeux, François Perrier, Jean Dessailly, Julien Carette ou Jacques Tati. Malheureusement, elle perdit la vie à l'âge de 24 ans, dans un accident d'avion où elle était accompagnée 2 par la danseuse Harriet Toby (1929-1952, danseuse du Ballet Russe de Monte-Carlo) et l'actrice Michèle Verly (1909-1952 : Belphégor, 1927, Monte-Cristo de Fescourt, 1929). Il entra dans la décennie suivante au TNP, le Théâtre National Populaire que Jean Vilar dirigea depuis sa réouverture après la guerre en 1951, et où il rencontra des artistes tels Georges Wilson, Maria Casarès ou Gérard Philippe. Sur les planches, parmi ses nombreuses prestations, on notera qu'il joua sous la direction de Jean Vilar, en 1956, dans Ce 3 fou de Platanov de Tchekhov, avec entre autre Casarès, Wilson et Philippe Noiret (il débuta en 1953 au TNP), en 1959, dans Mère courage de Bertolt Brecht, dans le cadre du Festival d'Avignon (festival créé par Jean Vilar), ou encore, en 1962, dans L'avare de Molière, quelques mois avant que Jean Vilar laisse sa place à Georges Wilson à la tête du TNP. Parmi bien d'autres pièces, on peut ajouter en 1966, Le retour de Harold Pinter auprès de Claude Brasseur. Il sera aussi dirigé par Georges Wilson ou Anne Bourgeois, et 4 oeuvrera également dans la troupe des Tréteaux de France conduite par Jean Danet. Autre exercice scénique, il lira en 1993 des textes de Louis Aragon, accompagné par François Chaumette (autre comédien au timbre de voix caractéristique), Daniel Mesguich, François Perrier, Rufus, Edith Scob et Jean Davy. 5 A son début, la petite lucarne était alors proche d'une certaine idée du théâtre, et elle lui offrira quelques unes de ses plus belles prestations auprès d'un large public. Cela, sous forme de téléfilms, souvent tournés en direct dans les années 60. Il jouera ainsi de nombreuses fois sous la direction de Claude Barma, dans Macbeth (1959), Cyrano de Bergerac (1960) et Othello (1962), trois oeuvres où le rôle titre est tenu par Daniel Sorano (1920- 1962), ainsi que Ruy Blas (1965) d'après Victor Hugo, dont sera enregistré, la 6 même année, des extraits de l'oeuvre originale lu par Jean Topart, Jean-Louis Trintignant ou encore Jean Piat. Dans le même temps, il donna la réplique à Michel Bouquet, dans Plainte contre inconnu (1961), et le comédien Jean Piat le dirigea en 1963 dans Premier amour. Pour le programme Le Théâtre de la jeunesse, où l'on prenait le temps de présenter chaque oeuvre, il jouera dans Doubrovsky (1961) de Pouchkine, mis en scène par Alain Boudet (qui le dirige l'année suivante dans Quatre-vingt treize 7 de Victor Hugo) et Sans-souci ou le chef- d'oeuvre de Vaucanson (1965) réalisé par Jean-Pierre Decourt avec Philippe Avron. Il oeuvrera également dans la célèbre série Rocambole (1964-1966, 78 épisodes) auprès de Pierre Vernier, mis en scène par Jean-Pierre Decourt qui le dirigera dans le même temps dans Gaspard des montagnes (1965) avec Bernard Noël. A propos justement de Noël, non pas l'acteur mais la fête religieuse, on pourra le voir en 1966, avec quelques autres personnalités, évoquer le Père Noël dans le court 8 documentaire Y croire encore. Dans un autre programme célèbre à l'époque, Le tribunal de l'impossible, il interprètera en mai 1968, alors que les pavés volent, le rôle titre de Nostradamus ou le prophète en son pays sous la direction de Pierre Badel. L'année suivante, il interpréta le rôle d'un directeur de théâtre dans Les voyages de votre Faust, une oeuvre lyrique sous forme de téléfilm produit par la RTBF et réalisé par Jean Antoine. Cette oeuvre, mis en musique par Henri Pousseur, se basait sur 9 plusieurs pièces lyriques jouées au cours de cette décennie, pièces écrites par l'écrivain Michel Butor. Mais c'est surtout sous la direction du metteur en scène de Jacquou le croquant, Stellio Lorenzi, qu'il apparaîtra le plus de fois à l'écran. Cela dans la série La caméra explore le temps avec La crime sous Louis- Philippe (1962) et Les Cathares (1966), ainsi que les téléfilms Oncle Vania (1962, avec Michel Vitold), Crime et châtiment (1971) d'après Dostoïevski, Le Cerisaie (1972) d'après Tchekhov, Antigone (1974) 10 de Sophocle, Les Rosenberg ne doivent pas mourir (1975) écrit par Alain Decaux, et enfin leur ultime collaboration avec Emile Zola ou la conscience humaine (1978), où Jean Topart interprétait le rôle de l'écrivain. Lazare Iglesis, poète et prolifique réalisateur pour la télévision, le dirigera par deux fois, dans Le Bunker (1972) évoquant avec François Chaumette la fin 11 du 3ème Reich, et où il interprétait le rôle du SS Otto Hermann Fegelein, ainsi que La Servante (1979) servit par la musique de Vladimir Cosma. Il oeuvrera dans bien d'autres téléfilms : Les glaces (1973) de Claude Dagues, L'inconnu (1973) auprès de Gérard Depardieu, Cher Janet, cher Alec (1975) auprès de Evelyne Ker, Passion d'Anna Karénine (1975) où jouant l'époux, il donne la réplique à Ludmilla Tcherina, Léopold le bien-aimé (1975) de et avec Georges Wilson, Le berger des abeilles (1976) de Jean-Paul Le Chanois, Vaincre à 12 Olympie (1977) écrit par Maurice Genevoix avec Jean Marais, L'embrumé (1980) de José Dayan avec Patrick Bouchitey et François Chaumette, La dernière nuit (1981) de Didier Decoin avec Annie Girardot, La puce et le privé (1981) avec Bruno Cremer, Siegfried (1982) d'après Jean Giraudoux avec Jean Dessailly, Un grand avocat (1984) auprès de Roger Hanin et Paul Guers, et enfin Génération vidéo (1996) de Antoine Lorenzi. On l'appréciera également sur le petit 13 écran, dans quelques pièces diffusées dans Au théâtre ce soir (1966-1984) de Pierre Sabbagh : en 1970, dans Frédéric de Robert Lamoureux, mis en scène par Pierre Mondy, en 1974, dans Giliane avec Mireille Delcroix (pièce qu'il joua avec Danielle Darrieux en 1965, sous le titre Comme un oiseau), en 1975, dans La moitié du plaisir avec Robert Dalban (d'après le film Le jeu de la vérité) et Quelqu'un derrière la porte de Jacques Robert, mis en scène par André Villiers, et enfin en 1977, dans Catérina de Félicien Marceau. 14 Chaque pièce de ce programme était filmée en direct lors d'une représentation au Théâtre Marigny, puis diffusée sur le petit écran quelques semaines ou quelques mois plus tard. Toujours pour le petit écran, il participera à quelques courtes séries comme Le monde enchanté d'Isabelle (1973, 13 épisodes) réalisé par Youri, auteur pour la jeunesse, Un tyran sous la pluie (1973, 4 épisodes), 15 L'accusé (1974, 20 épisodes), Le paria (1985, 6 épisodes) avec Charles Aznavour. Il fera également quelques apparitions dans un épisode de diverses séries comme Le train bleu s'arrête 13 fois (1965, 1er épisode : Paris signal d'alarme), Allô police (1969, 31ème épisode : Enquête visible), Les cinq dernières minutes (1958-1975, 62ème épisode : La mémoire longue, 1975), Messieurs les jurés (1974-1986, épisode : L'affaire Perissac, 1976), Les enquêtes du commissaire Maigret (1967-1990, 38ème épisode : Maigret et les témoins 16 récalcitrants, 1978), et Julien Fontanes (1986, 22ème épisode : Dix petites bougies noires). En 1979, il fera également une lecture dans la série littéraire de FR3, Un comédien lit un auteur (1979-1981), avec l'épisode appelé sobrement Jean Topart lit Armand Lanoux. On soulignera que Jules Verne fut lu dans cette série par Charles Vanel. 17 On notera également qu'en 1959, l'année où il débuta à la télévision dans Macbeth, il interprétait le rôle de Désiré, le majordome dans Le Testament du docteur Cordelier de Jean Renoir, une variation de Docteur Jekill et Mister Hyde avec Jean- Louis Barrault. Cette production, destinée à la fois pour le petit et le grand écran, était filmée en direct par les caméras de l'ORTF. Elle ne sera diffusée à la télévision qu'en novembre 1961, dans le même temps que sa sortie au cinéma. 18 Bien que le 7ème art ne lui est pas offert de grands rôles comme la télévision a pu le faire, il jouera tout de même auprès de grands comédiens pour le grand écran, comme Jean Gabin dans Le soleil des voyous de Jean Delannoy (1966), Pierre Vaneck et Robert Hossein dans Maldonne (1968), Charles Bronson et James Mason dans De la part des copains (1970) de Terence Young, ou Jean Poiret dans Poulet au vinaigre (1985) de Claude Chabrol. On notera tout de même sa première prestation cinématographique en 1949, 19 dans le film Le sorcier du ciel de Marcel Blistène, ainsi que des rôles de second plan sous la direction de Bernard Borderie dans Le chevalier de Pardaillan (1962) et Hardi Pardaillan! (1964) avec Gérard Barray, ainsi que Angélique marquise des anges (1964), Soleil noir (1966) de Denys de La Patellière ou il retrouve Michèle "Angélique" Mercier avec Daniel Gélin, Roger la honte (1966) de Riccardo Freda, avec Irène Papas, Copland sauve sa peau (1968) d'Yves Boisset, La main noir (1968) de Max Pécas, Dis-moi que tu m'aimes 20 (1974) avec Mireille Darc, Parlez-moi d'amour (1975) de Michel Drach, et dans Les acteurs (2000) de Bertrand Blier où il incarne le cinéaste Jean-Pierre Melville.
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