« LA CHAPELLE ROYALE DE VERSAILLES » GRANDS MOTETS DE COLASSE ET DESMAREST À LA CHAPELLE DE LOUIS XIV Samedi 29 novembre 2003 Chapelle royale du château de Versailles GRANDS MOTETS DE COLASSE ET DESMAREST À LA CHAPELLE DE LOUIS XIV Samedi 29 novembre 2003 Chapelle royale du château de Versailles PROGRAMME GUILLAUME-GABRIEL NIVERS Suite de pièces d’orgue (1632-1714) extraites du Premier Livre d’orgue (1665) Suites du 1er ton transposées en ut Prélude, 1er verset, Fugue grave, 2e verset, Diminution de la basse, 3e verset, Duo, 4e verset, Récit de cromhorne, 5e verset, Grand jeu HENRY DESMAREST De Profundis (1661-1741) psaume 129 PASCAL COLASSE Motets pour la chapelle royale de Versailles (1649-1709) Pange lingua Lauda Jerusalem 5 avec Hanna Bayodi, Isabelle Obadia, dessus François-Nicolas Geslot, haute-contre Emiliano Gonzalez-Toro, taille Benoit Arnould, basse LE CHOEUR DU CONCERT SPIRITUEL Delphine Malik, Aude Fenoy, dessus Arnaud Raffarin, Emmanuel Bardon, haute-contre Pascal Richardin, Gauthier Fenoy, tailles Christophe Gauthier, Christophe Olive, basse-tailles Sébastien de Hutten, Emmanuel Bouquey, basses L’ORCHESTRE DU CONCERT SPIRITUEL Hélène Schmitt, Bérangère Maillard, violons Judith Depoutot, Sophie Cerf, haute-contres de violon Pierre Boragno, Michelle Tellier, flûtes à bec Luc Marchal, Benoit Richard, hautbois Stéphane Tamby, basson François Poly, violoncelle Caroline Delume, Juan Sebastian Lima, théorbes François Saint-Yves, orgue DIRECTION : HERVÉ NIQUET 7 Des deux compositeurs Desmarest est plus jeune de douze années. Ils fréquentèrent les mêmes lieux : la Chapelle royale, l’Académie royale de musique. Tous deux eurent une vie compliquée dont on pourrait tirer un roman. Ce qui les différencie aujourd’hui ? La notoriété ! Henri Desmarest connut les fastes des Grandes Journées du Centre de Musique Baroque de Versailles en 1999. Pascal Colasse attend les siennes… L’œuvre d’Henry Desmarest et de Pascal Colasse possèdent deux faces principales qui se répartissent entre art lyrique et musique spirituelle. C’est de spiritualité dont il est question dans ce concert. HENRY DESMAREST (1661-1741) Élevé à la Chapelle royale du temps d’Henry Du Mont et de Pierre Robert, il quitta l’état de page pour endosser celui d’« ordinaire de la musique du roi ». À vingt et un ans il donna avec succès ses premiers ouvrages lyriques. Son Idylle pour la naissance du Duc de Bourgogne fut jouée à la Cour en 1682, sous l’égide du grand Lully. Le genre du motet revêtit un sens particulier pour Desmarest lorsqu’il se présenta au concours de la Chapelle royale en 1683 qui visait au remplacement de Du Mont et de Robert par quatre sous-maîtres. Au vu des succès obtenus à la Cour, Desmarest avait peut-être ses chances. Mais les nominations furent le fruit des influences des hommes de pouvoir du moment. Deux musiciens qui évoluaient dans le giron versaillais — Michel Richard De Lalande et Pascal Colasse — ainsi que deux prêtres — Guillaume Minoret et Nicolas Goupillet — furent nommés. Parmi les quatre récipiendaires il y avait au moins un médiocre, voire un incapable ! et, tout comme Marc- Antoine Charpentier, il reçut une pension... probablement plus une récompense pour son talent qu’un lot de consolation. L’an 1686 est un bon cru pour Desmarest : il présente Endymion au début de l’année et, en novembre, le divertissement La Diane de Fontainebleau. Au moment où Lully s’écrase le gros orteil en dirigeant son Te Deum pour remercier Dieu d’avoir guéri Louis XIV de la fistule, Desmarest met la dernière main au sien. En 1689, il se marie. Tout semble aller pour le mieux. Il vit sans charge mais la reconnaissance de son génie lui apporte de nombreux soutiens, de nombreux subsides... Mais voilà qu’en 1693 éclate le scandale, le premier... En fait, l’un des quatre sous-maîtres de la Chapelle, Nicolas Goupillet, avait les pires difficultés à écrire les œuvres à grand concert qu’il devait à l’institution. Goupillet avait besoin d’un sous-traitant mais d’un sous-traitant non déclaré. C’est Henry Desmarest qui joua ce rôle et qui composa les grands motets que Goupillet faisait exécuter à la Chapelle royale sous son nom ! Mais Goupillet oublia, semble-t-il, de rémunérer le 8 « travail au noir ». Desmarest osa dévoiler l’affaire et se plaignit que son labeur ne trouvait pas toujours rétribution. Il put prouver les faits ; Goupillet fut congédié. Mais comme il venait d’ébranler l’aura de la Chapelle royale, notre compositeur ne retira aucune faveur de cette indiscrétion, bien au contraire ; le quartier laissé vacant par l’incapable Goupillet ne lui revint pas et on l’attribua à Lalande qui servit alors la moitié de l’année. Cette fâcheuse affaire fut néanmoins contrebalancée par le triomphe obtenu par sa tragédie en musique, Didon, présentée à l’Académie royale de musique la même année. Dans le domaine lyrique il donnera dans la continuité Circé (1694), Théagène & Chariclée et Les Amours de Momus (1695). Le second scandale survient en 1698, lorsque, veuf depuis environ deux ans, il s’éprend de Mlle de Saint-Gobert, son élève et fille du président à l’élection de Senlis. Tout paraît normal jusqu’au moment où l’on en vient à parler de mariage. Bien qu’ayant préalablement donné son accord aux épousailles, Monsieur de Saint-Gobert change de position et oppose un refus catégorique au projet d’union ; de plus il poursuit Desmarest en justice pour enlèvement et séquestration sur la personne de sa fille. Face à ce revirement, les amants qui ont déjà un enfant s’enfuient. Le couple a tôt fait de dépasser les frontières du royaume et gagne rapidement Bruxelles et la cour de Maximilien-Emmanuel de Bavière, gouverneur des Pays-Bas. Bruxelles qui était alors aux mains de la branche espagnole des Habsbourg était une ville meurtrie. Les armées de Louis XIV l’avaient pillée et, quatre années avant l’arrivée de Desmarest, les troupes françaises du maréchal de Villeroi l’avait assiégée et puis laissée en ruines. Cependant, à Bruxelles l’art français est bien présent, on y joue du Lully. Les ravages n’ont pas empêché l’essor artistique. Au moment où Henry Desmarest arrive dans la capitale du Brabant, on inaugure le Théâtre de la Monnaie. Bien que Desmarest fût à Bruxelles, la justice de Louis XIV suivait son cours. La suite des démêlés Saint-Gobert—Desmarest se solda par un procès où le compositeur fut reconnu coupable d’enlèvement. Il fut condamné à mort par contumace. Peu après cet événement, Charles II d’Espagne mourut. La succession d’Espagne était ouverte. Louis XIV imposa son petit- fils, qui prit le nom de Philippe V. C’est probablement par l’intermédiaire de son ami Matho que Desmarest fut invité à suivre le nouveau roi à Madrid. Desmarest arriva à la cour de Philippe V au milieu de l’année 1701 ; il venait y remplir la fonction de Maître de musique de la Chambre du roi. Il constitua un corps de musique en faisant appel à des musiciens français. Sa formation rivalisait avec une autre institution, composée exclusivement d’Espagnols : la Chapelle dirigée par Sebastian Durón. Malheureusement le Roi, qui rejoignit ses possessions d’Italie en 1702 pendant plusieurs mois, ramena une troupe de musiciens italiens. La cour se désintéressa des Français et, en 1703, la plupart des musiciens recrutés par Desmarest rejoignirent la France. Par contre, leur chef dut rester dans la péninsule ibérique pour éviter l’application du jugement qui avait été prononcé contre lui. La situation ne se débloqua qu’en 1706. Desmarest quitta l’Espagne pour Lunéville, alors capitale du duché de Lorraine ! Le duc de Lorraine Léopold Ier cherchait à développer la musique ducale dont l’essor avait été compromis par les vicissitudes de la guerre de Succession d’Espagne. Après l’installation d’une gar- nison de soldats français à Nancy, il transféra sa cour à Lunéville et y fit immédiatement construire un château imité de Versailles. Il lui fallait aussi une musique digne de son ambition. Pour y répondre il engagea Henry Desmarest comme Surintendant de la musique, à la fin de 1706, sur les recommandations du Dauphin, père de Philippe V. Le duc confia à Desmarest l’éducation musicale de ses enfants. Il lui laissa aussi toute latitude pour organiser les concerts, définir les programmes, engager les musiciens, diriger les exécutions et, bien évidemment, composer les 9 œuvres qui devaient donner à la cour un éclat qu’elle n’avait jamais connu. Malheureusement, en 1717, un terrible train d’économies touche la musique. Le nombre des instrumentistes est ramené à douze et tous les chanteurs appointés sont congédiés. Depuis la Lorraine, Desmarest, qui espérait toujours voir sa condamnation annulée, envoyait en France des grands motets que son ami Matho parvenait à faire jouer devant le roi. Il arriva à ses fins, mais sous la Régence ; ce n’est qu’en 1720 qu’il fut gracié. Desmarest partagea alors son temps entre la cour de Lorraine et Paris où, en 1722, il fit représenter un nouvel opéra à l’Académie royale de musique : Renaud ou la suite d’Armide. Sa carrière prit fin lorsque, à la fin des années 1720, François III succéda à Léopold. La cour de Lorraine fut alors livrée aux musiciens italiens avant que n’arrive Stanislas Lezczynski de Chambord avec tout un corps de musique qu’il confia au compositeur et violoniste Jean-Baptiste Anet. Henry Desmarest s’éteignit à Lunéville le 7 septembre 1741. EDMOND LEMAÎTRE DE PROFUNDIS Le De profundis que présente ce programme est probablement l’un de ces motets que Desmarest fit jouer dans la Chapelle royale sous le nom de Goupillet.
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