Roch-Olivier Maistre, Président du Conseil d’administration Laurent Bayle, Directeur général Samedi 9 février 2013 Les Dissonances | David Grimal Dans le cadre du cycle En boucle du 6 au 16 février Samedi 9 février 2013 Vous avez la possibilité de consulter les notes de programme en ligne, 2 jours avant chaque concert, à l’adresse suivante : www.citedelamusique.fr Les Dissonances | David Grimal | Grimal | David Les Dissonances Cycle En boucle « Musique et répétition sont termes presque synonymes. » Cette formule de Clément Rosset, dans son essai L’Esthétique de Schopenhauer, met l’accent sur l’une des caractéristiques essentielles (c’est-à-dire par essence) de la musique, art du temps. La répétition musicale semble en effet aussi inévitable que diverse. Elle irrigue, sous toutes ses formes et à tous les niveaux, le morceau : au-delà des reprises, da capo ou refrains, des « idées fixes » ou leitmotive, des réexpositions ou variations, qui forment une bonne part de l’économie formelle « apparente » de la pièce, elle intervient aussi au niveau des attractions tonales, des hauteurs de son, des durées… La liste de ses occurrences paraît en fait interminable. Le champ de la répétition oscille entre deux pôles extrêmes, ceux du fondamentalement identique et du fondamentalement différent. Ni l’un ni l’autre ne se laissent appréhender si facilement. Tout comme on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve, l’acte même de répétition change la signification de ce qui est répété. De cet état de choses, les musiciens de la Renaissance et de l’ère baroque donneront des interprétations qui en accentuent le côté potentiellement vertigineux. Chaconne et passacaille tendent ainsi toutes deux à se construire (comme le ground anglais) sur une basse obstinée. La contrainte, de taille, revient donc à proposer à la fois du nouveau et de l’identique. De temps à autre, l’une de ces formes de la répétition se cristallise sur une redite supérieure encore, tel ce thème obstiné de la folía, qui traverse l’Europe et le temps, depuis ses origines vraisemblablement populaires et portugaises jusqu’à ses lointains rejets chez Liszt ou Rachmaninov, tout en inspirant Vivaldi, Corelli, Marin Marais, Couperin ou Bach père et fils… entre autres : car on en trouve aussi des traces dans le répertoire mêlé des conquistadors que fait revivre Jordi Savall avec Hespérion XXI. Dans une certaine mesure, la période classique et romantique élargira le point de vue, abordant la notion plus volontiers sous l’angle de la variation, du rondo ou de la forme sonate. De temps à autre, des exceptions accrochent l’oreille, chez Brahms notamment, grand connaisseur de la musique de ses aînés. Le finale de la Quatrième Symphonie, comme avant lui la dernière des Variations sur un thème de Haydn, propose ainsi une passacaille monumentale, qui utilise une variante de la basse obstinée achevant la cantate de Bach Nach Dir, Herr, verlanget mich. La musique sérielle, ou plus particulièrement le sérialisme intégral des années cinquante, a voulu poser le tabou de la répétition (même si, comme le reconnaît finalement Adorno, « aucune répétition n’y est permise, et tout – puisque tout dérive d’une matrice unique – y est répétition »). Schönberg, lui, avait appuyé une part importante de sa réflexion sur la notion de « variation développante », qu’il relie notamment au geste brahmsien dans son célèbre article « Brahms, le progressiste », expliquant ici que « la forme dans la musique sert à réaliser l’intelligibilité au moyen de la remémorabilité » et là que « l’intelligibilité en musique semble impossible sans répétition ». Quant à Boulez, il explique dans ses Leçons de musique la nécessité conjointe des règles et de leur transgression. Il évolue donc d’une idée de « temporalité musicale irréversible », affirmée en 1966, à des architectures marquées par la notion de retour. Angèle Leroy 2 DU mercredi 6 AU samedi 16 FÉVRIER MERCREDI 6 FÉVRIER – 20H SAMEDI 9 FÉVRIER – 20H SAMEDI 16 FÉVRIER – 20H Folías criollas – La Route du Nouveau Arnold Schönberg Gérard Grisey Monde Symphonie de chambre n° 1 Modulations Le dialogue musical entre l’ancienne Johannes Brahms Brice Pauset Iberia, le baroque mexicain et les Sextuor à cordes n° 1 Vita nova traditions vivantes Huasteca, Llanera Symphonie n° 4 Pierre Boulez et Jarocha. Dérive 1 Les Dissonances Philippe Manoury Hespèrion XXI David Grimal, violon Gesänge-Gedanken mit Friedrich Jordi Savall, direction Hans Peter Hofmann, violon Nietzsche La Capella Reial de Catalunya Natasha Tchitch, alto Tembembe Ensamble Continuo Hélène Clément, alto Ensemble intercontemporain Christophe Morin, violoncelle Pierre Boulez, direction Maja Bogdanović, violoncelle Christina Daletska, mezzo-soprano VENDREDI 8 FÉVRIER – 20H Hae-Sun Kang, violon Ad infinitum DIMANCHE 10 FÉVRIER – 14H30 Un avant-concert est proposé à 19h Florilège de canons, chaconnes et CONCERT-PROMENADE à la Médiathèque. ostinati (1513-1749) Les Talens Lyriques au Musée Capriccio Stravagante Skip Sempé, direction Les Talens Lyriques Christophe Rousset, direction SAMEDI 9 FÉVRIER – 19H LUNDI 11 FÉVRIER – 19H SAMEDI 16 FÉVRIER – 11H MERCREDI 13 FÉVRIER – 19H CLASSIC LAB CONSERVATOIRE DE PARIS Les Musiques répétitives Philippe Boesmans Reigen (Version de chambre) Avec les Élèves du Conservatoire de Paris, Lucie Kayas et Benoît Faucher Orchestre du Conservatoire de Paris Élèves du département des Le Classic Lab se déroule disciplines vocales du Conservatoire à La Bellevilloise, 19-21 rue Boyer, de Paris 75020 Paris Tito Ceccherini, direction Marguerite Borie, mise en scène 3 SAMEDI 9 FÉVRIER – 20H Salle des concerts Arnold Schönberg Symphonie de chambre n° 1 Johannes Brahms Sextuor à cordes n° 1 entracte Johannes Brahms Symphonie n° 4 Les Dissonances David Grimal, violon Hans Peter Hofmann, violon Natasha Tchitch, alto Hélène Clément, alto Christophe Morin, violoncelle Maja Bogdanović, violoncelle Enregistré par France Musique, ce concert sera retransmis le mercredi 6 mars à 20h. Coproduction Cité de la musique, Opéra de Dijon et Les Dissonances. Fin du concert vers 22h20. Arnold Schönberg (1874-1951) Symphonie de chambre n° 1 op. 9 Composition : 1906. Création : 8 février 1907 à Vienne par le Quatuor Rosé et des membres de l’Orchestre Philharmonique de Vienne sous la direction du compositeur. Effectif : flûte/flûte piccolo, hautbois, cor anglais, clarinette en mi bémol, clarinette en si bémol/clarinette en la, clarinette basse, basson, contrebasson, 2 cors, violon I, violon II, alto, violoncelle, contrebasse. Durée : environ 22 minutes. Dans un texte écrit aux États-Unis à l’âge de 75 ans (Comment j’ai évolué, 1949), Schönberg situe l’Opus 9 (1906) à l’apogée de sa première période de composition. Avec cette Première Symphonie de chambre, il a la conviction d’avoir atteint son « propre style de compositeur » en étant notamment parvenu « à un progrès considérable dans la libération de la dissonance ». Bien qu’inscrite dans la tonalité générale de mi majeur, cette œuvre repose en effet sur un matériau étranger au système tonal. Schönberg y accumule des procédés tels que la prolifération des ambiguïtés harmoniques, le chromatisme et la gamme par tons (dans le premier thème de la section initiale, Sehr rasch, par exemple). Mais c’est surtout l’utilisation d’harmonies de quartes qui mine définitivement le sentiment tonal, et ce dès la première page, avec le signal du cor construit sur la succession ré-sol-do-fa-si bémol-mi bémol. Schönberg souligna lui-même le rôle fondamental de cet intervalle dans son Traité d’harmonie (1911) : « Ces quartes se répandent à travers l’œuvre entière de façon architecturale [...]. Elles n’apparaissent pas seulement en tant que mélodie ou simple effet d’accord impressionniste, mais leur caractère particulier pénètre la structure harmonique tout entière : ce sont des accords comme les autres. » Quant à la forme générale de cette composition en un seul tenant, Alban Berg est le premier à en avoir cherché la combinatoire dans une analyse thématique qu’il publie en 1918. Il ramène la structure à l’imbrication d’un vaste premier mouvement de sonate avec les quatre moments de la symphonie traditionnelle (exposition / scherzo / développement / mouvement lent / récapitulation). L’extrême concentration de cette construction confère un caractère plutôt ramassé à la partition qui se retrouve dans l’effectif instrumental. Il s’agit en effet d’un orchestre réduit dans lequel tous les pupitres sont représentés à l’exception de la percussion. Après son installation aux États-Unis, Schönberg effectue une version pour grand orchestre de cet opus (comportant d’importantes modifications au niveau des parties secondaires et d’accompagnement), qu’il dirige pour la première fois à Los Angeles en 1935. Corinne Schneider 5 Johannes Brahms (1833-1897) Sextuor à cordes n° 1 en si bémol majeur op. 18 Allegro ma non troppo – Poco più moderato Andante, ma moderato Scherzo. Allegro molto Rondo. Poco allegretto e grazioso Composition : achevée en septembre 1860. Création : le 20 octobre 1860 à Hanovre, par Joseph Joachim au premier violon. Durée : environ 34 minutes. Première œuvre de musique de chambre véritablement achevée par Brahms (puisque le Trio op. 8 sera retravaillé à la fin du siècle), le souriant Sextuor op. 18 est incontestablement une réussite. Sa formation, empruntée à Boccherini (avec les six Sextuors op. 23 composés en 1776), adjoint au traditionnel quatuor à cordes un alto et un violoncelle supplémentaires, équilibrant ainsi parfaitement les tessitures et conférant à l’œuvre des sonorités pleines, plus graves, que Brahms affectionnait. L’équilibre de ses formes, le moelleux de ses lignes, la fluidité de son inspiration conquirent immédiatement tant les amis (Clara Schumann ainsi que Joseph Joachim, qui s’en fit aussitôt l’ardent défenseur) que le public, à Hanovre comme à Leipzig ou à Hambourg, où l’œuvre fut donnée le même automne. L’Allegro ma non troppo initial, aux couleurs chaudes, est schubertien aussi bien dans son caractère que dans sa construction formelle (forme sonate avec un double second thème utilisant deux tonalités différentes, ici la et fa majeur).
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