www.lemonde.fr 57e ANNÉE – Nº 17539 – 7,50 F - 1,14 EURO FRANCE MÉTROPOLITAINE -- SAMEDI 16 JUIN 2001 FONDATEUR : HUBERT BEUVE-MÉRY – DIRECTEUR : JEAN-MARIE COLOMBANI L’Europe Alger : le fracas de la rue, le silence du pouvoir et M. Bush b Plusieurs centaines de milliers de personnes ont manifesté contre le régime dans la capitale a Les Quinze et algérienne b Violents affrontements, pillages, destructions de bâtiments publics b Deux tués, le président américain des centaines de blessés b De plus en plus contesté, le pouvoir affirme avoir évité le pire veulent relancer DÉFIÉ PAR la rue, le pouvoir 600 000. Elle était essentiellement algérien semblait, vendredi composée d’hommes, jeunes, la croissance 15 juin, figé dans l’immobilisme, reflétant une Algérie où plus de la sans avancer de réponse, politi- moitié de la population a moins en libéralisant que ou économique, à un mouve- de vingt ans. ment de contestation profond qui Elle a commencé à se former à TEMPSPORT le commerce ne paraît pas devoir s’arrêter de proximité de la Foire internationa- sitôt. La veille, au soir de la mani- le, à une dizaine de kilomètres du QUINZE DE FRANCE a festation géante qui a dégénéré centre d’Alger. Elle a très vite con- Le patron d’Usinor en émeutes et pillages au cœur de duit à des affrontements lorsque redoute la capitale, le secrétaire général des milliers de jeunes s’en sont Face aux du ministère de l’intérieur, Moha- pris aux forces de l’ordre, qui, pla- une « guerre » med Guendil, a déclaré à la télévi- ce du 1er-Mai, au cœur de la capita- sion : « Nous avons évité le pire le, barraient le boulevard condui- Springboks de l’acier (…), nous avons tout fait pour limi- sant à la présidence. ter les dégâts ». Deux journalistes Les slogans étaient les mêmes A l’occasion du premier match de avec les Etats-Unis algériens ont été tués, l’un heurté que ceux qui sont criés depuis des l’équipe de France en Afrique du Sud, par un autobus, l’autre écrasé lors semaines en Kabylie et ici et là samedi 16 juin à 17 heures à Johannes- d’une bousculade. Des centaines dans l’Est algérien : « Pouvoir a burg, le sélectionneur français a choisi Bruxelles refuse de manifestants ont été blessés, assassin ! », « Y en a marre des de présenter un groupe rajeuni et victimes de grenades lacrymogè- généraux ! » Au fil de la journée, la fusion nes tirées à hauteur d’homme ou la manifestation a dégénéré en enthousiaste. Parmi eux figure Pieter de matraquages. pillages de commerces, batailles De Villiers, 29 ans (photo), un joueur entre General Electric Organisée pour dénoncer la entre bandes rivales (certaines du Stade français qui n’est pas un répression en Kabylie et présen- appuyées par la police) et sacca- inconnu au pays des Springboks. Origi- et Honeywell ter une plate-forme de revendica- ges de bâtiments publics. naire de Darling, au nord du Cap, il a tions au président Abdelaziz quitté l’Afrique du Sud en 1995 pour Lire pages 4 et 18 Bouteflika, la manifestation a réu- Lire pages 2 et 3 ni plusieurs centaines de milliers apprendre en France à devenir «un f www.lemonde.fr/ue de personnes, de 500 000 à f www.lemonde.fr/algerie pilier plus équilibré ». p. 25 Licenciements : « Et maintenant, bonne soirée », dit Jacques en emmenant Lionel GÖTEBORG mier ministre et les embarras judiciaires du prési- tionnel de mener la danse. Mardi 12 juin, au Fabius contre Jospin de notre envoyé spécial dent. Le président commence par un exposé sur cours du sommet franco-allemand de Fribourg, « C’est comme les conférences à l’ancienne le réchauffement de la planète, sujet du dîner. M. Chirac avait pris un malin plaisir à égrener LAURENT FABIUS s’est manière du temps de Charles de Gaulle. » La Pourquoi êtes-vous ensemble, côte à côte?, tous les sujets abordés, pour ne pas en laisser une a démarqué, jeudi 14 juin, de remarque d’un organisateur suédois ne s’adres- demande-t-on aux deux hommes. « Ce qui serait miette à M. Jospin. « Je pense avoir fait le tour des J.-P. BALTEL Lionel Jospin à propos du projet de sait pas à Jacques Chirac et Lionel Jospin, qui inhabituel, c’est que nous ne soyons pas à une réu- problèmes que nous avons évoqués. Mais le pre- loi qui modifie la procédure des licen- avaient convoqué la presse française jeudi nion de l’Union européenne, ce serait même très mier ministre va déceler chez moi quelques lacu- TÉLÉVISION ciements économiques. Le compro- 14 juin à l’issue du dîner avec George W. Bush à inhabituel », répond Jacques Chirac. Non, non, nes », avait-il conclu, devant un Gerhard mis élaboré entre le premier ministre Göteborg, mais au président américain. La Mai- ici, devant les journalistes. « Vous vous en plai- Schröder hilare. Car les Allemands sont mi-amu- et les communistes pour limiter les son Blanche avait imposé les modalités de la con- gnez ? », lance Lionel Jospin. « M. Jospin, regret- sés mi-médusés des aventures du couple fran- Le décor plans sociaux ne plaît pas au ministre férence donnée par M. Bush, le premier ministre tez-vous l’incident d’hier à l’Assemblée ? » Le pre- çais, de cassette Méry en révélations trotskistes. des finances. Ce texte, selon Laurent suédois et le président de la Commission euro- mier ministre élude et embraye à son tour sur Si Gerhard Schröder a eu besoin de quelques du loft Fabius, ne va pas dans le sens d’une péenne. Il y aurait six questions, pas une de plus, Bush et l’environnement. Vous n’avez pas répon- éclaircissements pour comprendre le trotskisme Aménager le loft le plus célèbre de Fran- économie moderne qui, « dans l’inté- posées par des journalistes choisis à l’avance : du à ma question, se plaint la journaliste « Non, français, l’ancien combattant des rues, Joschka rêt même des salariés, doit être rapide, deux Américains, deux Suédois, deux Européens. bien sûr que non », répond le premier ministre. Fischer – ex-militant gauchiste devenu ministre ce, celui de M6, n’a pas été de tout réactive et compétitive ». Il redoute « Je vous remercie », déclara George W. Bush, Jacques Chirac écourte alors la séance : « Nous des affaires étrangères – , n’a pasdemandé d’ex- repos. Il a fallu imaginer un apparte- que la loi « ait un effet dissuasif sur lorsqu’il eut répondu à la sixième question, ne avons tenu à vous dire, ce qui était normal – et en plication de texte. Jospin était-il mandéliste ou ment chaleureux mais discret dont le l’investissement et le recrutement » et laissant pas le soin à son hôte, le premier minis- primeur – comment s’était passé le dîner de ce soir. lambertiste ? Le ministre des affaires étrangères décor et l’ameublement ne volent pas la qu’elle ouvre une « période d’incerti- tre suédois, de clore la conférence. (...) Maintenant vous savez tout et maintenant je allemand a su poser les bonnes questions, en con- vedette aux locataires. Et trouver les cou- tude » pour les entreprises. Côté français, les questions étaient libres, mais vous souhaite une bonne soirée. » Il emmène Lio- naisseur. leurs qui passent bien à l’image. Le déco- la communication tout aussi verrouillée. nel Jospin, qui aimerait parler encore un peu. Lire page 7 MM. Chirac et Jospin avaient décidé de s’afficher Si, officiellement, « la France parle d’une seule Arnaud Leparmentier rateur de « Loft Story » explique au et notre éditorial page 15 ensemble dans la soirée, en plein sommet, histoi- voix », les réunions internationales sont le théâ- Monde comment il a procédé. p. 26 re de faire baisser la pression après le vif échange tre d’une étrange guerre froide au sommet de Lire nos informations page 9 f www.lemonde.fr/restructurations Elysée-Matignon sur le passé trotskiste du pre- l’exécutif, où Jacques Chirac a l’avantage institu- et un point de vue page 16 f www.lemonde.fr/loftstory L’« erreur » POINT DE VUE de Mgr Pican L’alibi des chiffres par Raymond Forni EPUIS bientôt cinq ans, die universelle (CMU). Elle met en renouant avec le volonta- place l’allocation personnalisée pour risme, la gauche a fait l’autonomie (APA). Et elle souhaite Dvoter des lois pour lutter résolument accroître la protection efficacement contre le chômage et des salariés dans l’entreprise à tra- SPERONE WESTWATER les inégalités, pour défendre les vers la loi de modernisation sociale. droits des plus fragiles. Face à son On s’est focalisé sur les disposi- ART CONTEMPORAIN bilan, exemplaire dans le domaine tions de cette loi qui concernent les social, l’opposition se contente de licenciements, car l’actualité a mon- Richesses Mgr PIERRE PICAN combats de chiffres : on se demande tré la brutalité de certaines décisions parfois si elle n’a pas abdiqué en et le désarroi des salariés menacés L’ÉVÊQUE de Bayeux, poursuivi faveur d’un Medef devenu, à sa pla- de perdre ce qui faisait leur vie. Face de Bâle pour « non-dénonciation d’attein- ce, le contradicteur de la majorité. à ces inquiétudes, face à cette vulné- La plus importante foire d’art contem- tes sexuelles et mauvais traitements Ne faisons pas semblant d’oublier rabilité, il était normal que la gauche à enfants » dans l’affaire de l’abbé ce qu’était la conviction de beau- réagisse et que des solutions soient porain du monde se tient à Bâle jus- Bissey a persisté à rejeter l’idée de coup d’hommes politiques et d’éco- trouvées grâce au débat parlementai- qu’au 18 juin.
Details
-
File Typepdf
-
Upload Time-
-
Content LanguagesEnglish
-
Upload UserAnonymous/Not logged-in
-
File Pages34 Page
-
File Size-