L'Aventure Tapie Du même auteur Les Vrais Patrons du football Solar, 1989 Olympique de Marseille : les années Tapie (avec Alain Roseghini) Solar, 1990 Le Chantier du siècle Le tunnel sous la Manche Solar, 1991 L'Aventure Tapie Enquête sur un citoyen modèle La première édition de cet ouvrage a paru dans la collection « L'épreuve des faits » EN COUVERTURE : Photo Bill Swersey, New York, 1988 © AFP ISBN 2-02-019470-8 (ISBN 2-02-012988-4, 1 publication) © Éditions du Seuil, mars 1992, février 1993 Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal. Préface à la nouvelle édition La première édition de L'Aventure Tapie est sortie en mars 1992, quelques semaines avant le scrutin des élections régionales. Un an plus tard, Bernard Tapie joue toujours du trampoline. Il a enchaîné à un rythme fou les pirouettes. Retombera-t-il sur ses pieds, prêt à rebondir, toujours plus haut, ou s'écrasera-t-il à côté des agrès ? Il ne le sait peut-être pas lui-même. Depuis, le président de l'Olympique de Marseille (son titre le plus sûr) a accumulé les échecs, tant sur le plan politique que sur le plan économique. Il faut pourtant se garder d'en tirer des conclusions définitives sur son avenir. L'expérience montre que Tapie a, pour le meilleur ou pour le pire, surgi là où l'on ne l'attendait plus, là où ses adversaires croyaient l'avoir éliminé. Néanmoins, il a déjà montré toutes les facettes de son caractère ; chacune de ses déclarations a mis en lumière ses pratiques. Il ne fait que confirmer. Ainsi de sa réaction à la sortie du livre. Sur un plateau de télévision, en partie consacré à l'ouvrage, il brandit quelques photos de lui, jeune, au volant d'une Formule 3, un casque-bol vissé sur la tête. « Alors, hein, je n'ai pas fait de Formule 3? », m'interrogea-t-il. Ma réponse est inchangée : certes, il avait bien couru en Formule 3, mais jamais pour les marques prestigieuses qu'il citait, Matra ou Panhard. Il balaya la précision d'un revers de main : il y a finalement pour lui peu de différence. Feignait-il d'ignorer la nuance oU était-ce une preuve supplémentaire d'une tendance à la mythomanie ? Bref, le but de cette courte réactualisation * n'est donc pas de * Pour des raisons de fabrication, l'évolution des chiffres intervenue depuis janvier 1992 sur les sociétés n'a pas été modifiée dans les chapitres concernés ou dans les annexes qui redécouvrir le personnage. En revanche, Bernard Tapie ayant été plusieurs fois au centre de l'actualité, il semble utile de compléter une trajectoire qui a, incontestablement, connu un tournant au cours de l'été 1992. Après dix ans d'affaires habilement présentées comme des succès, une entrée en politique foudroyante récompen- sée par un éphémère maroquin de ministre, et de brillants scores en vélo ou à l'Olympique de Marseille, Bernard Tapie a enregistré de très cinglants revers qui l'ont en grande partie discrédité. Qu'il revienne ou non sur le devant de la scène, Tapie ne sera plus jamais le même. Il n'aura plus cette image extraordinaire dans le public, bien que la capacité d'oubli de l'opinion paraisse parfois sans limite. La saga continue L'aventure reprend donc à la veille des élections régionales. Bernard Tapie dira, quelques jours après le scrutin, dans l'eupho- rie de sa nomination au ministère de la Ville, que la campagne en Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) a été « propre, claire, nette, sans magouilles ni compromissions. Même le Front national a été remarquable » Il serait facile d'apporter point par point la démonstration du contraire. Qu'importe, sa campagne a surtout été ultra-médiatique ; c'est celle qui, avec le Nord-Pas-de-Calais (NPDC), intéressait le plus car, dans les deux zones, les partis traditionnels (UPF en PACA et PS en NPDC) étaient sérieusement secoués par des forces nou- velles, délicates à contrôler ou à classer : le Front national et Bernard Tapie dans le Sud ; les Verts et Jean-Louis Borloo dans le Nord. Par tactique et par goût, Tapie choisit une stratégie qui avait porté ses fruits lors des élections législatives. Il délaisse le contact reprennent l'ensemble des sociétés et l'organigramme du groupe au fil des ans. De même pour la mise à jour des cessions. Adidas. TF1, Terraillon. Toutes ces données sont intégrées dans les notes en fin d'ouvrage. direct pour revenir à des vecteurs plus sûrs. Visiblement, comme beaucoup d'hommes politiques, Bernard Tapie rechigne à faire un travail de terrain, dont les retombées n'apparaissent pas immédia- tement. D'ailleurs, le député des Bouches-du-Rhône s'y sent mal à l'aise, comme il semble être mal à l'aise dans un département qui n'est pas le sien, une ville, Marseille, qu'il ne comprend et n'aime toujours pas. Plusieurs observateurs l'ont ainsi entendu tenir, en privé, des propos très désagréables sur les Marseillais. « C'est simple, explique-t-il un jour à un journaliste, les Bouches-du- Rhône, c'est l'Afrique ; les Alpes-Maritimes, l'Afrique du Sud ; le Var, le Centre-Afrique » Cette méfiance, notamment vis-à-vis des Marseillais, ne date pas d'aujourd'hui. Richard Armenante, adversaire farouche de Bernard Tapie et adjoint à l'économie de Robert Vigouroux, se souvient qu'en 1986 au sortir d'un rendez- vous avec Gaston Defferre, le futur repreneur de l'OM s'était laissé aller à une diatribe assez imagée qui se terminait dans un langage tout aussi vert : « Et les Marseillaises ne sont même pas b... » Manque de sympathie pour la région ou manque de motivation, Bernard Tapie ne mène pas une bonne campagne. Il sera, à quelques jours du scrutin, obligé de changer radicalement de stratégie. Le président de l'OM s'est déjà usé à batailler avec les appareils fédéraux du parti socialiste pour la désignation des têtes de liste et pour leur composition. Le problème est très net dans le Var où la campagne électorale débute sous le leadership du navigateur et ex- secrétaire d'État, Alain Bombard, avant de se diviser en deux : une liste socialiste menée par Maurice Janetti et une liste Énergie- Sud conduite par le couturier Daniel Hechter, ancien président du Paris SG et du RC Strasbourg, qui possède une résidence secondaire dans le département mais qui n'était pas particulière- ment connu pour ses idées de gauche ni pour son combat contre Jean-Marie Le Pen. La liste du Var est d'ailleurs très show-biz avec la participation du chanteur Enrico Macias. Même tableau dans les Hautes-Alpes. Le parti socialiste, déjà bien malmené dans la région et dont la tradition est d'exclure les dissidents, a laissé se détériorer la situation. Une mésentente qui coûtera à Bernard Tapie deux postes de conseillers régionaux. Pour les autres départements, les listes Énergie-Sud, ont, sur le papier, bonne figure avec deux ministres (Jean-Louis Bianco, dans les Alpes-de-Haute-Provence, Élisabeth Guigou, dans le Vau- cluse), et le professeur Léon Schwartzenberg (qui démissionnera le 18 décembre 1992) dans les Alpes-Maritimes. Tapie, Hechter, Bianco, Guigou, Schwartzenberg, un quintette séduisant, média- tique, riche mais disparate qui déroutera certains électeurs. Au sein de l'équipe, Élisabeth Guigou et Léon Schwartzenberg, eux- mêmes très gênés par ce mélange des genres, tentent régulièrement de se démarquer de Bernard Tapie sans trop s'en éloigner. L'énarque Jean-Louis Bianco, fils de bonne famille, est quant à lui séduit par le personnage, comme on l'est souvent pour une bête de scène. Jean-Louis Bianco rejoint ainsi Jacques Attali et François Mitterrand qui s'amusent beaucoup de la conversation de ce fils du peuple, de ses prouesses ou de ses excès. Il faut dire que le président de l'Olympique de Marseille défriche le terrain à la hache. Il abat ainsi beaucoup de travail mais fait parfois d'énormes dégâts. Le tout, comme le veut depuis quelques années une tradition nationale, dans le contexte d'une campagne électorale très pauvre en idées. « Je l'ai vu bâcler des opérations sur le terrain, semant Élisabeth Guigou dans sa course, faisant des escapades au pas de charge avec des formules sans consistance. Et puis ici ou là s'attarder auprès d'un jeune " rapeur " qui ne votera pas et lui faire la morale pendant une demi-heure sur la drogue, la délinquance », explique un observateur Les méthodes de Bernard Tapie restent les mêmes, toujours brutales, assez efficaces, parfois périlleuses. Économie, sport, politique, le président de l'Olympique de Marseille aime défier le danger. D'entrée de jeu, lors de son premier meeting devant un public clairsemé, il provoque : « Si Le Pen est un salaud, ceux qui votent pour lui sont également des salauds. » La classe politique fera mine de s'offusquer, notamment le parti socialiste. Mais beaucoup pensent tout bas ce que Bernard Tapie énonce bien fort. « Je ne sais pas si c'est le qualificatif le plus adapté, explique le ministre d'État, Michel Delebarre. J'ai quelquefois le sentiment qu'il est en dessous de la réalité » En fait, l'opinion a la mémoire courte car Bernard Tapie s'était déjà exprimé de façon identique sur le sujet lors de sa bataille législative dans la sixième circonscrip- tion des Bouches-du-Rhône.
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