Erratum Une coquille s’est glissée sur la couverture du numéro de juin 2017. Il fallait lire : « Le communisme disparaîtrait demain, comme a disparu l’hitlérisme, que le monde moderne n’en poursuivrait pas moins son évolution vers ce régime de dirigisme universel auquel semblent aspirer les démocraties elles-mêmes. » Georges Bernanos Sommaire | juillet-août 2017 Éditorial 4 | Quand l’amour change le cours de l’histoire › Valérie Toranian Dossier | Quand l’amour change le cours de l’histoire 8 | Jean d’Ormesson. « Nous aimons ces feuilletons amoureux qui pimentent la vie politique » › Valérie Toranian 17 | Les amants du Nil : Antoine et Cléopâtre selon Shakespeare › François Laroque 25 | La guerre sans amour › Clara Dupont-Monod 33 | Henri VIII et Anne Boleyn, un séisme religieux › Cédric Michon 39 | Henri IV et Charlotte de Montmorency : une nouvelle guerre de Troie ? › Catherine Valenti 47 | Louis XIV, les femmes et le pouvoir › Jean-Christian Petitfils 54 | Emmanuel de Waresquiel. « Les révolutionnaires ne supportaient pas le pouvoir des femmes de la noblesse » › Valérie Toranian 65 | Eugénie les larmes aux yeux › Sébastien Lapaque 71 | Henriette et Joseph Caillaux : presse, politique et vie privée › Jean-Yves Le Naour 78 | Eleanor Roosevelt, First Lady of the World › Claude-Catherine Kiejman 93 | Wallis Simpson, femme fatale ? › Jean-Pierre Naugrette Littérature 102 | La Fontaine. Une école buissonnière › Érik Orsenna 110 | La révolution de 1789 dans l’histoire et la littérature française de 2016 › Marc Fumaroli 2 JUILLET-AOÛT 2017 130 | Germaine de Staël intempestive › Michel Delon 137 | Retour à Tipasa › Sébastien Lapaque 143 | De la patrie et des étrangers › François de La Mothe Le Vayer Études, reportages, réflexions 148 | Discours sur la vertu › Xavier Darcos 156 | Wagner affabulateur ? › Ulrich Drüner 162 | L’Europe à 29 euros › Kyrill Nikitine 167 | La beauté vaut-elle de l’or ? › Annick Steta 174 | L’amour sous Macron › Marin de Viry Critiques 180 | LIVRES – Histoire de la collaboration : la fin de l’ère Paxton › Robert Kopp 183 | CINÉMA – Trois femmes › Richard Millet 186 | EXPOSITIONS – Au carrefour des Afriques › Bertrand Raison 189 | EXPOSITIONS – Hommage aux photographes de guerre › Olivier Cariguel 192 | DISQUES – Boulez, un hommage venu du Proche-Orient › Jean-Luc Macia Les revues en revue Notes de lecture JUILLET-AOÛT 2017 3 Éditorial Quand l’amour change le cours de l’histoire En France, nous sommes très intéressés par la vie amou- reuse de nos dirigeants, à l’égard desquels nous sommes parfois indulgents, parfois totalement intransigeants », s’amuse Jean d’Ormesson, qui évoque avec gourmandise «dans un grand entretien les histoires d’amour au sommet de l’État, celles qui ont fait tanguer le pouvoir ou changé le cours de l’histoire. « Avec Emmanuel Macron, dont les amours s’annoncent très conve- nables, nous serons donc affreusement déçus ! », ajoute-il, malicieux. Selon Jean d’Ormesson, l’image de François Hollande à scooter por- tant un casque à la une de la presse people lui aura probablement été fatale, car le ridicule tue aussi sûrement qu’une assemblée de fron- deurs. Mais le ridicule tue-t-il vraiment en politique ? Quand l’amour s’invite au sommet de l’État, le dérèglement des sens peut conduire le pays aux portes de la guerre. Ainsi Henri IV, fou amou- reux de Charlotte, dame de compagnie de sa femme, la reine Marie de Médicis. Elle se réfugie avec son mari le prince de Condé aux Pays-Bas pour contrarier les projets du monarque. « Henri IV a engagé des pré- paratifs militaires, à la grande stupéfaction de ses ministres, qui peinent à croire que le dépit amoureux du roi puisse constituer un casus belli » contre les Pays-Bas espagnols, écrit Catherine Valenti. Cette « guerre de Troie » n’aura finalement pas lieu. Un fou nommé Ravaillac a entre- temps planté son couteau dans le cœur du Vert-Galant. 4 JUILLET-AOÛT 2017 Louis XIV, son petit-fils, déclare en 1665 à ses ministres les plus proches : « Je vous ordonne que si vous remarquiez qu’une femme, quelle qu’elle puisse être, me gouverne le moins du monde, vous ayez à m’en avertir. Je ne veux que vingt-quatre heures pour m’en débar- rasser et vous donner contentement. » Car à l’âge de 20 ans, nous rappelle Jean-Christian Petitfils, le jeune roi, véritablement ensorcelé par la nièce du cardinal Mazarin, avait failli sacrifier l’union promise avec Marie-Thérèse d’Espagne. L’influence deme M de Maintenon sur le monarque vieillissant, même si elle divise les historiens, n’est pas douteuse. Quand ses ministres venaient travailler avec lui, poursuit l’historien, « de temps en temps, Louis se retournait vers elle : “Qu’en pense Votre Solidité ?”. » Aliénor d’Aquitaine emprisonna quinze ans durant dans un « étroit filet » le désir du jeune Louis VII, raconte Clara Dupont-Monod. « “Rien d’étonnant, tant étaient vifs les charmes corporels dont Aliénor était gratifiée”, raillent les troubadours » du XIIe siècle. Femme de pouvoir impétueuse et scandaleuse, elle quitte son époux pour Henri Plantagenêt, futur roi d’Angleterre, de onze ans son cadet… qu’elle décidera de renverser pour placer leur fils Richard Cœur de Lion sur le trône ! « A-t-on jamais vu une reine s’insurger contre son mari, soulever ses fils contre leur père ? Aliénor le fit. Elle perdit. » Autre perdante, l’impératrice Eugénie, à laquelle Napoléon III prêtait une puissante intuition en matière politique, et qui assistait au Conseil des ministres, raconte Sébastien Lapaque. L’impératrice ne pensait qu’à son fils. « Toutes les manœuvres, tous les périls et toutes les combinai- sons de l’impératrice Eugénie [...] s’expliquent par sa volonté de voir cet enfant adoré monter sur le trône. » La défaite de Sedan en décida autrement. François Mitterrand, durant ses deux mandats, sanctuarisa ses amours avec Anne Pingeot en comptant sur la bienveillance et la dis- crétion de tous ceux qui savaient. En ce temps-là (c’était il y a trente ans, c’était il y a un siècle…), l’exigence de transparence était consi- dérée comme une obscénité, la marque des vulgaires ou des régimes totalitaires. Maintenant, le privé n’existe plus. Est-ce une forme de modernité ou de régression ? « Marie-Antoinette construit quelque JUILLET-AOÛT 2017 5 chose d’extrêmement moderne qui est l’apparition, au cœur du pou- voir, d’un espace privé [...] une séparation entre la vie publique et la vie privée des princes », analyse Emmanuel de Waresquiel. Pour les révolutionnaires, ce « privé » relève de la manipulation et du complot. L’organisation par Marie-Antoinette d’un espace clos sera un chef d’accusation retenu par le Tribunal révolutionnaire. Impossible, enfin, d’évoquer l’amour face à la raison d’État sans que surgisse l’image de Wallis Simpson, une Américaine deux fois divorcée pour laquelle Édouard VIII, roi d’Angleterre, abdiqua en 1936. Et surtout rendons-lui hommage ! Car, écrit Jean-Pierre Naugrette, le roi, comme une partie de l’aristocratie anglaise, était fasciné par Hit- ler et le nazisme, seuls remparts, selon eux, contre le communisme. « Elle lui a été fatale, au sens d’une femme qui précipite le destin d’un homme, mais elle a peut-être, sans le vouloir, fait pencher la balance pour sauver l’Europe. » Valérie Toranian 6 JUILLET-AOÛT 2017 QUAND L’AMOUR CHANGE LE COURS DE L’HISTOIRE 8 | Jean d’Ormesson. « Nous 54 | Emmanuel de Waresquiel. aimons ces feuilletons « Les révolutionnaires ne amoureux qui pimentent la supportaient pas le pouvoir vie politique » des femmes de la noblesse » › Valérie Toranian › Valérie Toranian 17 | Les amants du Nil : 65 | Eugénie les larmes aux yeux Antoine et Cléopâtre selon › Sébastien Lapaque Shakespeare › François Laroque 71 | Henriette et Joseph Caillaux : presse, politique 25 | Aliénor d’Aquitaine, et vie privée la guerre sans amour › Jean-Yves Le Naour › Clara Dupont-Monod 78 | Eleanor Roosevelt, First 33 | Henri VIII et Anne Boleyn, Lady of the World › Claude-Catherine Kiejman un séisme religieux › Cédric Michon 93 | Wallis Simpson, femme 39 | Henri IV et Charlotte fatale ? › Jean-Pierre Naugrette de Montmorency : une nouvelle guerre de Troie ? › Catherine Valenti 47 | Louis XIV, les femmes et le pouvoir › Jean-Christian Petitfils « NOUS AIMONS CES FEUILLETONS AMOUREUX QUI PIMENTENT LA VIE POLITIQUE » › Entretien avec Jean d’Ormesson réalisé par Valérie Toranian Amour, gloire et pouvoir : Jean d’Ormesson passe en revue les passions des puissants. De Cléopâtre aux présidents de la Ve République, notre grand académicien national, toujours aussi haut dans le cœur des Français, nous invite à une promenade galante dans les coulisses de l’histoire. Revue des Deux Mondes – Si je vous dis : amour, passion et politique... quelles sont les images qui vous viennent à l’esprit ? «Jean d’Ormesson Il me vient plusieurs exemples. Le premier, évident, est celui du roi David. Marié, il tombe amoureux de Bethsa- bée, la femme d’Urie, l’un de ses généraux. De cet amour fiévreux et bouleversant – qui faillit déchoir David de son trône – naît Salomon. Le fils reproduit le même cas de figure avec la reine de Saba. Autre exemple, encore plus fort, qui a véritablement changé le cours du monde : Cléo- pâtre, la maîtresse de César, mère de Césarion. La reine tombe amou- reuse de Marc-Antoine ; avec son amant, elle défie Octave, le fils adop- 8 JUILLET-AOÛT 2017 JUILLET-AOÛT 2017 quand l’amour change le cours de l’histoire tif de César ; ils sont tous les deux battus lors de la fameuse bataille d’Actium et se suicident un an plus tard. Octave devient l’empereur Auguste et l’Égypte une possession romaine, ce qui marque l’origine de l’Empire romain. Autre exemple : Béré- Jean d’Ormesson, membre de nice et Titus. Si leur mariage avait eu lieu, l’Académie française, est écrivain l’Empire romain aurait été orientalisé ; mais et journaliste.
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