Histoire De Vie De Maître Kichenin Sont Innombrables

Histoire De Vie De Maître Kichenin Sont Innombrables

Florence CALLANDRE - BARAT LE LOU I BOUJ ANKOR HISTOIRE DE VIE DE MAÎTRE RENÉ KICHENIN PREMIER BÂTONNIER MALBAR DE LA RÉUNION SURYA EDITIONS Florence CALLANDRE - BARAT LE LOU I BOUJ ANKOR HISTOIRE DE VIE DE MAÎTRE RENÉ KICHENIN PREMIER BÂTONNIER MALBAR DE LA RÉUNION Préface de Professeur Laurent Sermet Illustration de couverture : René Kichenin en 1963 Huile sur toile d’Agnès Kichenin, née Mourougaïane - Virapoullé, (37,5 cm x 45 cm), 2013. SURYA EDITIONS Surya Editions, La Réunion, 2013 ISBN : 978-2-918525 - 93 - 6 Tous droits de traduction, de reproduction, et d’adaptation réservés pour tous pays. Toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit (électronique, mécanique, photocopie, quelque système de stockage et de récupération d’information) des pages publiées dans le présent ouvrage, faite sans l’autorisation écrite de l’auteur, est illicite et constitue une contrefaçon. SOMMAIRE Avant-propos Préface Introduction Premier chapitre : Un Ego respectueux de l’Alter Deuxième chapitre : Un Civiliste réputé aux Assises Troisième chapitre : L’Énergie du Trident Quatrième chapitre : L’Indépendance de La Réunion Conclusion : La mort du loup Personnes citées par Maître René Kichenin Petit glossaire de termes juridiques Ouvrages de référence AVANT-PROPOS Je venais d’offrir à Madame Agnès Kichenin, née Mourougaïane-Virapoullé, la copie d’un film qu’elle m’avait autorisée à réaliser, lors d’une cérémonie à Kâli officiée dans son koylou familial à Sainte-Rose à laquelle elle m’avait invitée, quand elle me dit à propos de son mari : « René ne va pas très bien. Il a besoin de communiquer. Si je connaissais seulement un dixième de ce qu’il connaît… » Je dis alors à celui-ci un peu plus tard : « Vous devriez écrire un livre. Un de mes collègues, Jean-François Hamon1, dit souvent que parler soigne et écrire guérit. » Il me répondit : « Vous l’écrivez et je vous donne l’autorisation de publier. Je n’ai pas envie d’écrire sur moi. Souvent, on est venu me voir pour me dire : ‘ Il faut écrire !’. Je n’ai pas le temps. Je ne veux pas écrire sur moi, mais que les autres écrivent sur moi, oui… En bien ou en mal, ça ne fait rien. Oui, on peut dire du mal aussi, oui… j’admets. J’en ai vu des vertes et des pas mûres ; de toutes les couleurs. J’ai vu tout ça. (…) » C’est à ce moment qu’est né le projet initial de recueillir le récit de vie de Maître René Kichenin, le premier bâtonnier malbar de La Réunion, qui a préféré ne pas rédiger lui-même, je pense, uniquement par pudeur, peut-être par lassitude, ou pour éviter les critiques de ceux qui verraient dans ce texte, une simple autobiographie panégyrique. L’année de mon baccalauréat, mon père me confiait qu’il souhaitait que je fasse des études de droit pour devenir avocate. Mais, à ce moment, j’avais une représentation très austère de ce pouvaient être ces études. À tort ou à raison, j’imaginais qu’un étudiant de droit passait le plus clair de son temps à apprendre par cœur des textes de Loi... Ayant soif de liberté, de voyages à travers le Monde et craignant de « disparaître » dans le Code civil ou le Code pénal, je m’orientais vers la sociologie2 avant de me spécialiser plutôt dans l’ethnologie puis l’anthropologie3. Mon père avait lui-même refusé de suivre les conseils de sa mère qui le poussait à devenir fonctionnaire de police parce qu’elle admirait son gendre, attaché de Préfecture. Nous avons tous deux suivi notre intuition plutôt que la volonté de nos parents et tout me semble aujourd’hui bien mieux ainsi. Ceci-dit, il aurait certainement été plus fier de pouvoir dire à ses amis que sa fille était avocate au barreau plutôt qu’enseignante et même chercheure. Ou peut-être pensait-il tout simplement que j’avais les qualités requises pour réussir dans ce corps de métier. Aujourd’hui, je ne regrette pas d’avoir choisi la sociologie, l’ethnologie, et l’anthropologie qui font prendre conscience des dangers de l’enfermement culturel et de l’importance de la liberté individuelle, surtout qu’une fois diplômée de droit j’aurais sûrement préféré défendre les victimes plutôt que les coupables, même si n’est pas toujours coupable celui qu’on croit et si comme me disait un jour Laurent Sermet, « L’objectif est de faire éclater la vérité. » Tiger, mon mari anthropologue, plaisante à moitié parfois, quand il me trouve persuasive : « Tu aurais dû obéir à ton père. Tu aurais fait une bonne avocate ! » ou quand nous partageons une « enquête de terrain », et quand je suis trop inquisitrice : « Tu aurais fait un excellent commissaire de police… » Il est vrai que les termes d’« enquête », d’« interrogation », d’« informateurs », comme l’expression « obtenir des informations », très communs à propos des travaux dits « de terrain » en anthropologie, ont de fortes connotations juridico-policières. Mais il est vrai aussi que ces travaux supposent un regard qui ne doit être, ni trop distant, ni trop empressé, ce qui représente toute la difficulté de la recherche dans cette discipline, la qualité essentielle d’un anthropologue étant la capacité 1 Jean-François Hamon est Professeur des Universités à l’Université de La Réunion. 2 D.E.U.G. de sociologie, licence de sociologie option ethnologie, maîtrise en sociologie du développement, à l’Université d’Aix-en-Provence. 3 D.E.A. d’anthropologie de la quotidienneté et doctorat d’anthropologie, « nouveau régime », de l’Université de La Réunion, soutenu à l’I.N.A.L.C.O. de Paris. d’avoir de l’empathie, pour se mettre à la place de l’autre. Il lui est impératif d’écouter, de voir, de comprendre, d’apprendre la langue et la culture des membres des sociétés qu’il étudie, en prenant le risque de s’imprégner de leurs thèmes obsessionnels, récurrents, de leurs idéaux, de leurs angoisses. Ce domaine de la loi qui me paraissait rébarbatif quand je quittai à peine le lycée, la tête pleine de rêves, me semble aujourd’hui bien plus intéressant qu’autrefois. J’y vois, au-delà de l’immense pouvoir des mots, la protection et la défense d’autrui, dans un monde où la question d’une justice égale pour tous fait l’objet d’un débat permanent et où il est bon de trouver si nécessaire, un défenseur intègre. J’en ai eu la preuve le jour où Pierre Crégut, mon ami avocat, enseignant-chercheur à l’Université, a trouvé les arguments irréfutables qui m’ont permis d’échapper enfin à une situation professionnelle particulièrement injuste. Devant la proposition de Maître René Kichenin, j’ai pensé bien vite qu’écrire la biographie d’un avocat élargirait mon champ de recherche à un domaine que je ne connais pas. Ce nouveau défi me permettrait d’emblée l’objectivation nécessaire à toute étude anthropologique et m’épargnerait les ruptures épistémologiques4. De plus, l’enracinement et le renom de Maître Kichenin me donneraient l’opportunité de transmettre de nouvelles et belles connaissances sur le monde du droit dans la société réunionnaise, des connaissances autres que celles de l’architecture sacrée et de la représentation divine du Sanathana-dharma5 auxquelles j’ai consacré mes années de thèse. Faire un détour par le droit est aussi une chance de rendre hommage, d’une certaine façon, à la mémoire de mon père décédé brusquement, un jour de fête entre amis, voilà déjà huit ans. Merci infiniment à Agnès, l’épouse de René Kichenin, qui m’a apporté un soutien indéfectible au fil des interviews et dans la rédaction de l’ouvrage et qui a même accepté de réaliser un portrait à l’huile de son époux à partir d’une photo, pour en faire notre première de couverture, photo d’identité choisie par Chendra, leur fils aîné, Agnès et moi-même parmi plusieurs portraits en noir et blanc. C’est l’expression la plus naturelle et la plus fidèle qui a guidé notre choix. Axel Kichenin, un des cousins germains de René Kichenin, et deux de ses collaborateurs à « Trident », Paul Hoarau et Joseph Varondin, m’ont tous trois accordé un temps précieux à m’aider à saisir les nuances de sa personnalité, à la fois française, réunionnaise et tamoule que je synthétise sous le terme créole, malbar, l’un porté par l’affection du sang, les deux autres par l’amitié mais tous faisant preuve d’une capacité d’objectivation exceptionnelle pour des proches, d’une belle lucidité et d’un sens analytique puissant. Qu’ils en soient tous trois remerciés. 4 Techniques comme la critique des prénotions d’Emile Durkheim (Le métier de sociologue) ou la lecture paradigmatique de Roland Barthes (Système de la mode) qui nous permettent de rompre avec les préjugés, les connaissances préétablies sur notre sujet pour en construire l’objet de manière plus scientifique. 5 Les Hindous (terme qui désignait les pratiques religieuses des habitants des berges du fleuve Indus, cours d’eau qui prend sa source au mont Kailash, dans l’Himalaya et se jette par un immense delta dans la mer d’Oman) préfèrent définir leurs pratiques religieuses par l’expression imagée de sanatana-dharma qui mot pour mot se traduit par éternité et loi, autrement dit manière de vivre éternellement selon la loi qui prescrit les devoirs de chaque individu en fonction de son appartenance sociale et son sexe. Il s’agit d’une religion constituée de nombreuses tendances rituelles et spirituelles différentes dont l’objectif commun est de s’élever au cours de chaque nouvelle renaissance pour enfin s’en libérer (moksha).

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