S o MM a i r e • Journal littéraire Michel crépu 9 Bizub, Le Bihan, Gillet, Guilbert, d’Azay, Zorgbibe, Boddaert... • hommage eryck de rubercy 19 Reconnaissance à Hector Bianciotti • ÉTUDES, REPORTAGES, RÉFLEXIONS laurent Fabius 25 Remarques sur la situation de la France à quelques jours de l’élection présidentielle renaud girard 33 Carnets de route La Grèce, de justesse, se maintient dans la zone euro Jean-yveS boriaud 42 Une si chère Grèce ! alain bienayMé 50 L’art de réformer annick Steta 61 La bataille de l’eau Marin de viry 68 Rire du socialisme actuel en compagnie de Jules Michelet eryck de rubercy 72 Roberto Peregalli : de l’impermanence des choses et des lieux 2 sePteMBRe 2012 • un nouveau théâtre politique Jean-paul cléMent 85 Le centre disparu. De 1789 à la Première Guerre mondiale jacqueS de Saint victor 104 Les deux populismes alain-gérard SlaMa 122 Droite : que faire ? • le goût de la CRITIQUE angelo rinaldi 137 Entretien et eryck de rubercy Romancier, critique de profession véronique gerard powell 151 Louis Gillet, écrivain d’art olivier cariguel 157 Jean José Marchand, critique et homme-bibliothèque • CRITIQUES • livres Frédéric verger 163 Mandelstam • expositions robert kopp 173 Laurent Le Bon au Centre Pompidou Metz • Musique Mihaï de brancovan 180 De Rameau à Marco stroppa • disques Jean-luc Macia 183 Ces chers disparus : Leonhardt et Fischer-Dieskau • noteS de lecture 187 gérard Mairet par Henri de Montety, williaM MarX par Pauline Camille. 3 Éditorial Et maintenant e premier mot de cet éditorial de rentrée sera pour Hector Bianciotti, disparu en juin dernier. Hector Bianciotti, Eryck l de Rubercy le rappelle dans ce même numéro dans un texte d’hommage, était l’élégance même : bienveillant, attentif, discret. C’était un bonheur de passer du temps avec lui. Il avait choisi, lui l’Argentin, de vivre en Europe : de la lointaine pampa au fauteuil de l’Académie française ! Il n’est pas de parcours plus symbolique pour un écrivain. L’amour qu’il portait à la langue française, on peut dire que ses livres en témoignent comme peu d’autres. Ensuite la Syrie, bien sûr. Comment parler d’autre chose que de ce qui se passe aux portes d’Alep ? L’ancien président Sarkozy a éprouvé le besoin de donner son avis sur les lenteurs de la diplomatie hollandienne. Le créneau était bien choisi : pendant que l’actuel pré- sident se promène en short avec Dame Valérie, des enfants meurent de la main de Bachar al-Asad. « Il y a des similitudes avec la Libye », a rappelé Nicolas Sarkozy. C’est possible, mais il n’est pas sûr que ce qui a été possible en Libye le soit en Syrie, où les enjeux géostra- tégiques sont d’une autre nature – ce qui ne change rien, faut-il le dire, à l’urgence morale d’agir. On voit mieux maintenant, quoiqu’il n’y ait rien à regretter de la chute de Kadhafi, quelle a pu être l’illusion d’une guerre menée comme « in vitro ». Les métastases de l’islamisme radical au Mali sont 5 éditorial la conséquence directe de la chute du colonel fou : c’était une bonne chose de faire tomber Kadhafi, c’était une erreur de croire que cela pouvait se produire à l’intérieur d’un espace clos qui n’aurait plus eu, une fois tombé le tyran, qu’à se développer de lui-même, vers les cimes radieuses de la démocratie. Il faut dire que les derniers résul- tats électoraux libyens sont de nature à réconforter les esprits. En Syrie, l’impasse est autrement redoutable. Bachar al- Asad n’a plus l’ombre d’une légitimité et même en imaginant qu’il « gagne » la bataille d’Alep à force de bombes, cette victoire serait d’une telle nullité qu’elle ne ferait qu’accélérer le processus de sa chute. Mais Asad, on s’en doute chaque jour un peu plus, ne gagnera pas la bataille d’Alep. L’avenir politique de la Syrie, avec ses deux mille ans de présence chrétienne, est devant nous comme un terri- fiant inconnu. Puissent nos politiques de tous bords se montrer à la hauteur des vrais enjeux de cette guerre atroce. Un point d’équilibre entre deux cultures religieuses ne pourra pas s’effondrer sans entraî- ner avec lui une formidable catastrophe historique. Cela rend notre actualité politique nationale à ses vraies pro- portions, qui, certes, ne sont pas négligeables. Jean-Paul Clément, Jacques de Saint Victor et Alain-Gérard Slama débroussaillent ici le nouveau paysage politique d’après-présidentielle, dominé par trois faits majeurs : l’effacement, pour ne pas dire la disparition, du centre ; la santé du populisme, phénomène qui reste à analyser ; l’avenir de la droite post-sarkozyenne. Bonne lecture, M.C. 6 journal littéraire • michel crépu Bizub, le Bihan, Gillet, Guilbert, d’azay, Zorgbibe, Boddaert... journal littéraire Bizub, le Bihan, Gillet, Guilbert, d’azay, Zorgbibe, Boddaert... n michel crépu n amedi Toujours ce merveilleux juillet gâché par les gros camions de Sla rentrée littéraire de septembre. Autant envie de parler des « romans de la rentrée » que de lire un article de Jean-Marc Ayrault (je préfère le lire en allemand, langue dont il eût dû user lors de son discours de politique générale, au moins cela eût créé une sorte d’électrochoc). Une petite envie de poésie, alors ? Le long du sentier, les coquelicots font des pastilles rouges à l’or mûr des blés. Cette nuit, il y a eu de l’orage sur Fontainebleau, les branches des arbres faisaient un bruit de ressac, tandis que dans les couloirs déserts du château, l’ombre de l’Empereur se tournait soudain vers moi : « Vous cherchez quelqu’un ? La gloire n’est plus ici… » Sur la colline d’en face, le village de Bromeilles, où résidait Henri Troyat, indifférent à la tourmente de cette nuit. Qui lit encore Troyat ? Ce Russe d’autrefois qui fut l’un des plus jeunes élus du Quai Conti… Philippe de Saint-Robert, avec qui je partageais hier chez Lipp une assiette d’œufs en gelée, me disait que l’on ne peut pas se présenter à l’Académie si l’on a moins de 75 ans. Il paraît, me dit-il, que la secrétaire perpétuelle, Mme Hélène Carrère d’Encausse, en a décidé ainsi. Je n’arrive pas à le croire. J’aime bien Saint-Robert, avec son côté écrivain des fifties resté bloqué au compteur, jusque dans la coupe de cheveux, d’un revenez-y des studios Harcourt. Cela faisait une éternité que je n’avais mis les pieds chez Lipp, croisant 9 journal littéraire Bizub, le Bihan, Gillet, Guilbert, d’azay, Zorgbibe, Boddaert... Dantzig au pied de l’escalier qui mène au « haut » de la brasserie. Le « haut » de Lipp est pour les touristes ou les gens qui travaillent – et c’était absolument le cas de Dantzig, aux prises avec une réunion de représentants de Grasset. Le « bas » de Lipp est simplement pour les gens du petit monde littéraire ou du cinéma qui désirent être vus. Non que ce fût mon cas, mais c’était Saint-Robert qui m’invitait et je le repérais tout de suite, de dos, à sa fameuse coupe, déjà attablé. Un côté Jean Marais, au fond, qui fait de Philippe un aimable dinosaure de la belle époque capable de dire par exemple : « Mme de… une grande amie à moi. » Plus personne, à part Saint-Robert, ne dit : « une grande amie à moi », ce sont là les ultimes passerelles sémantiques que l’on peut encore emprunter en direction d’un monde littéraire qui s’est peut-être bien achevé sur le claquement du pistolet que Montherlant a braqué sans trembler sur sa tempe, ce jour de septembre 1972. Saint-Robert est resté très fidèle à la mémoire de Montherlant, dont on « fête » justement l’anniversaire de la mort ; il a raison, bien que tout le monde s’en moque. (Tout comme on se moque éperdument de l’anniversaire de Pascal, de Rousseau, de qui sais-je encore.) Montherlant vieillit admirablement mieux que beaucoup de ses contemporains, je ne parle pas de Gide, déjà englouti aux trois quarts, mais même un Mauriac, pourtant a priori bien équipé pour le posthume, ne me semble pas à l’abri. Aussi quel trouble ne m’a-t-il pas saisi, récemment, à la lecture du Bloc-notes (j’y cherchais des anecdotes au sujet de Marc Sangnier) : ce ton compassé, ces fameux « traits » si attendus, brillants certes, de vrais diamants comparés à d’autres, mais tout cela figé, comme déjà recouvert d’une mousse invisible. Vite, j’ai refermé, saisi d’horreur à la pensée que Mauriac pourrait me décevoir ! Ce serait le bouquet. Montherlant, lui, a su rester ce voyou hautain dont il s’est plu à jouer le personnage. Comédie ? Et alors ? Les textes sont là, dans leur voyouterie sèche, intelligente, libre… Ce passage, dans un des Carnets, où il s’attarde à la vue de Gilles de Rais, sur le chemin du supplice, entouré de femmes priant pour lui. Et Montherlant observe : c’est ça le christianisme, le vrai, le christianisme qui a de la gueule ; des femmes du peuple, des lavandières, priant pour un monstre. Que c’est bien de remarquer cela ! 10 journal littéraire Bizub, le Bihan, Gillet, Guilbert, d’azay, Zorgbibe, Boddaert... lundi Au courrier, cet essai d’Edward Bizub, aux éditions Classiques Garnier : Beckett et Descartes dans l’œuf (1), enquête critique aux sources de l’œuvre beckettienne, le point de départ étant ce poème : « Whoroscope », grâce auquel le jeune Beckett remporta à Paris en 1930 un concours de poésie qui fit parler de lui, mais ce n’était qu’un début.
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