EUZHAN PALCY Rue Cases-Nègres DOSSIER 186 COLLÈGE AU CINÉMA L’AVANT FILM L’affiche 1 Film d’époque Réalisatrice & Genèse 2 Euzhan Palcy SYNOPSIS Acteurs 4 L’empire colonial français est à son apogée, LE FILM l’Exposition coloniale de 1931 va se tenir à Paris. À la Martinique, l’esclavage a été aboli en 1848, mais Analyse du scénario 5 les Blancs « békés » contrôlent toujours l’écono- Le sacrifice d’une grand-mère mie et les Noirs sont toujours misérables, travail- lant pour quelques sous dans les plantations de Découpage séquentiel 7 canne à sucre. Dans la bourgade de Rivière-Salée, les békés vivent dans de somptueuses villas, les Personnages 8 Noirs dans des cases de bois et de paille alignées Relations d’apprentissage dans ce lieu-dit : rue Cases-Nègres. La journée, les parents travaillent aux champs, et Mise en scène & Signification 10 les enfants vont à l’école, obligatoire pour tous Une chronique depuis la loi républicaine de Jules Ferry. Lorsque en touches impréssionnistes arrivent les vacances, les enfants, livrés à eux- mêmes à leur plus grande joie, sont les maîtres de Entretien 13 la rue Cases-Nègres. Puis vient la rentrée des classes. José, 11 ans, est un bon élève, curieux et Analyse d’une séquence 14 attentif. M’man Tine, la grand-mère affectueuse qui Fin d’une époque dans la vie de José élève José, fait tout pour qu’il puisse, grâce à l’ins- truction, vivre une vie meilleure que la sienne, elle qui s’est échinée au travail. L’instituteur noir, qui a AUTOUR DU FILM écrit au tableau que « l’instruction est la clé qui ouvre la deuxième porte de notre liberté », estime que José Histoire de la Martinique 16 peut obtenir une bourse. Sage du village et mé- moire de la communauté, M. Médouze a pris José La négritude et sa descendance 18 sous son aile et lui apprend de nombreuses choses sur la vie, la nature, le passé d’esclaves de leurs Bibliographie & Petites infos 20 ancêtres. Mais un jour, José le trouve mort. José obtient son certificat d’études puis, par concours, un quart de bourse, insuffisant pour lui permettre de payer ses études. Alors M’man Tine quitte le village pour aller vivre avec José à la capi- tale, Fort-de-France. Elle travaille encore plus dur qu’avant, lavant, reprisant, repassant le linge des propriétaires. Quand, par ses bons résultats, José Les dossiers ainsi que des rubriques audiovisuelles sont disponibles se voit attribuer une bourse complète, M’man Tine sur le site internet : www.lux-valence.com/image peut enfin souffler. Rassurée sur le sort de son petit Base de données et lieu interactif, ce site, conçu avec le soutien du CNC, est un outil au service des actions pédagogiques, et de la diffu- José, elle peut mourir. « M'man Tine est allée dans sion d’une culture cinématographique destinée à un large public. l'Afrique de M. Médouze. » José va continuer à étu- Édité par le : Centre National du Cinéma et de l’Image Animée. dier à Fort-de-France, mais il emportera avec lui sa Remerciements : Euzhan Palcy, Carlotta Films rue Cases-Nègres. Photos de Rue Cases-Nègres : Carlotta Films. Conception graphique : Thierry Célestine – Tél. 01 46 82 96 29 Impression : I.M.E. 3 rue de l'Industrie – B.P. 1725112 – Baume-les-Dames cedex Direction de la publication : Idoine production, 8 rue du faubourg Poissonnière – 75010 Paris [email protected] Achevé d’imprimer : décembre 2010. L’AVANT FI LM L’AFFICHE Film d’époque La typographie du titre, comme le motif de la bordure du le visage de José est tout à fait identifiable et contraste avec cet cadre interne à l’affiche, sont dans le pur style art déco. Cela anonymat. C’est le sacrifice de l’une d’entre eux, M’man Tine, donne deux indications sur le film : il se déroule dans les usée par l’âge et le travail, et qui continue à s’échiner dans les années 30 et il s’inscrit dans la vague des années 70 du film champs puis dans les ménages, qui permet à José de s’extraire «rétro ». Le cadre évoque aussi une « photo-souvenir », celle – l’affiche le montre littéralement – de sa condition sociale. d’une époque reconstituée cinquante ans plus tard. La présence très forte de José, son regard très ouvert, tourné Le titre « Rue Cases-Nègres » n’est pas un véritable nom de vers le haut comme vers un avenir plein d’espérance, donne rue, mais le nom conventionnel qui désignait depuis des lustres, une dimension épique à l’affiche. Sa tête, coiffée d’un chapeau en Martinique, l’endroit où, d’abord les esclaves puis les tra- de paille doré, est comme un soleil sur un fond de ciel qui vailleurs « libres », vivaient dans des cases de fortune près des évoque directement le drapeau français : bleu du ciel, blanc champs de canne où ils travaillaient. Pour qui l’ignore, ce titre des nuages et rouge « poétique », sans justification réaliste, évoque à la fois le temps de la colonisation (les « nègres ») et s’affirmant comme une marque de colère, de révolte. Ces cou- d’une forme d’apartheid (« cases »), implicitement donc celui leurs rappellent aussi que la Martinique fait aujourd’hui partie de l’esclavage. La mention très visible en haut du cadre, de la France. « Gouvernorat de Martinique – Rivière-Salée – août 1930 » localise (commune à l’ouest de la baie de Fort-de-France) et date précisément les faits, indiquant le statut juridique du lieu : époque coloniale, sous l’administration d’un gouverneur, langue officielle : le français. L’affiche inscrit en bas, sous le visage de José, les champs de canne et ceux qui y travaillent. Elle indique ainsi qu’en arrière- plan du film se situe la cause directe, économique, de l’exis- tence de ces rues Cases-Nègres comme de la vie de José : la canne comme source de richesse (surtout en 1930) pour ceux PISTES DE TRAVAIL à qui elle appartient, et d’exploitation pour les travailleurs • Faire distinguer les deux parties de l’affiche : la partie noirs qui la coupent. L’accent est ainsi mis sur l’aspect humain encadrée (images, titre, indications de temps et de lieu), et du film et son propos social. la partie située sous le cadre, informative, avec essentielle- Dans la disposition des éléments de l’affiche, la canne déborde ment les « crédits ». sur le visage « colossal » de José qui donne le sentiment d’éma- • Que signifie ce cadre ? À quoi fait-il songer ? Quel est le ner héroïquement de ces champs et des travailleurs dont il est style choisi pour l’ornement du cadre et la typographie du le fruit, et parmi lesquels une femme en noir, à droite, paraît le titre ? À quelle époque cela renvoie-t-il ? contempler. En bas, en effet, les travailleurs sont anonymes, de • Quelles scènes du film sont évoquées par les images figu- dos ou trop éloignés pour qu’on puisse les identifier. En haut, rant dans ce cadre ? 1 RÉALISATRICE GENÈSE Euzhan Palcy1 Filmographie Débuts Née à la Martinique en 1956, Euzhan Palcy passe son enfance au Gros-Morne. Elle 1974 La Messagère (TV) s’initie au cinéma à la salle paroissiale du village, puis à Fort-de-France. Elle a une 1982 L'Atelier du diable (CM) 1983 Rue Cases-Nègres douzaine d’années quand, en 1968, elle assiste au village à une projection d’Orfeu 1989 A Dry White Season Negro. Le film de Marcel Camus (1958) est pour elle un choc déterminant : voir sur (Une Saison blanche et sèche) un écran des Noirs qui s’aiment et s’embrassent comme des Blancs est une révéla- 1990 Comment vont les enfants ? tion. Elle découvre aussi l'ouvrage de Joseph Zobel, La Rue Cases-Nègres, que lui 1991 Siméon offre sa mère que ce livre touchait aux larmes. Dès l’adolescence, alors qu’elle cares- 1994 Aimé Césaire : se déjà le rêve de devenir réalisatrice, elle songe à adapter son livre de chevet. À dix- A Voice For History neuf ans, elle anime une émission de poésie dans une télévision locale et sort un 1998 Le Combat de Ruby Bridges (TV) disque de chansons enfantines (elle est soprano colorature). En 1974, elle écrit et 2001 The Killing Yard réalise un téléfilm avec son frère Joël : la diffusion de La Messagère à la télévision 2006 Parcours de dissidents antillaise est un succès. Ce titre représente Euzhan Palcy de manière emblématique, (documentaire) elle qui conçoit le cinéma comme une mission, sans militantisme, mais avec le 2007 Les Mariés de l'Isle Bourbon (TV) besoin viscéral de dénoncer les injustices. Sa grande volonté calme où couve la révolte ainsi que sa fine beauté évoquent un autre messager charismatique de la cause noire, le chanteur jamaïcain de reggae rastafari Bob Marley. Encouragée par son père, elle poursuit à Paris des études de théâtre, de littérature, puis de cinéma à l'École nationale supérieure Louis-Lumière. Après avoir été assistante, elle réalise en 1982 un court métrage pour France 3, L'Atelier du diable, un conte où un enfant s'aventure dans la mystérieuse maison d'un vieux « sorcier » qui vit reclus avec son coq de combat. Genèse du film Peu après, elle rencontre François Truffaut qui la parraine. Puis arrivent deux jeunes producteurs, Michel Loulergue et Jean-Luc Ormières et surtout le producteur et dis- tributeur Claude Nedjar (Lacombe Lucien de Louis Malle, La Guerre du feu de Jean-Jacques Annaud, etc.) et la société de Louis Malle (la Nef). Euzhan Palcy obtient pour le scénario adapté de La Rue Cases-Nègres, à l’unanimité du jury, l’avance sur recettes du Centre National de la Cinématographie.
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