Depuis plus dé deux cent cinquante ans, des parcellaires et des traces d'habitats fo ssiles fo nt l'objet de recherches dans les fo rêts alsaciennes et lorraines du nord du massif vosgien. Ces vestiges ont régulièrement été considérés comme gallo-romains et attribués à une culture particulière dite « des sommets vosgiens ». À la fin des années soixante-dix et dans les années quatre-vingt, François Pétry à partir de la fo uille du site du Wasserwald (Haegen, 67), a publié l'essentiel des données et mises au point sur ces vestiges (1). Ces dix dernières années, de nouvelles Une bibliographie complète sur le sujet découvertes ont renouvelé la problématique de ces recherches. (1) - est présentée dans François PÉTRY, LE PRO BLÈME DE LA « CULTURE « Les agglomérations des sommets vosgiens» DES SOMMETS VOSGIENS» dans Jean-Luc Massy (dir.), LES AGGLOMtRATIONS SECONDAIRES DE LA LORRAINE, ANNALES LITTtRAIRES Un peu plus de cent-vingt parcellaires fossiles ont été recensés dans DE L'UNIVERSITt DE FRANCHE-COMTt, les arrondissements de Saverne (67) et de Sarrebourg (57). Leur datation 1997, p. 399-404· est loin d'être assurée et leur attribution quasi systématique (2) - Par exemple : site du Kessel à la limite à l'Antiquité une erreur. François Pétry avait déjà contesté l'ancienneté des communes lorraines de Hultehouse É de certaines constructions ou aménagements (2) ; ces remises en cause et de Garrebourg (François P TRY, se sont multipliées et certains sites lorrains sont maintenant à dater « Les sanctuaires de la culture gallo-romaine des périodes médiévale et moderne. Les importantes concentrations des Sommets Vosgiens, à la lumière des de ruines de bâtiments dites antiques de l'Altdorf (Dabo et Walscheid, fo uilles du Wasserwald (commune de Haegen, 57), ou de la Croix du Hengsbourg (limite de Walscheid et d'Harreberg, Bas-Rhin) », DANS ASPECT DE LA RELIGION CELTIQUE 57) illustrent bien ce phénomène. Ces sites ont en effet livré des lots ET GALLO-ROMAINE DANS LE NORD-EsT XIIe XVIIe de céramiques s'échelonnant du au siècle et peuvent être DE LA GA ULE À LA LUMIÈRE DES DtCOUVERTES identifiésmaintenant à des villages disparus. RtCENTES, ACTES DE LA RENCONTRE ARCHtOLOGIQUE Sur d'autres sites, les structures antiques semblent avoir été réaménagées DE SAINT-Olt DES VOSGES, 7-8 OCTOBRE 1988, et modifiées à des périodes plus récentes. La lisibilité et l'attribution Saint-Dié, 1989, p. 84. chronologique de ces vestiges sont alors plus difficiles (3). L'absence 3) - Exemples mosellans récents : parcelle 15 d'indices chronologiques sur de nombreux autres parcellaires rend à Vilsberg, Freiwald à Troisfontaines, actuellement impossible leur datation. Sommets des Picards à Harreberg. NO 4 SEPTEMBRE 2005 LES BÂTIMENTS DES HABITATS ET DES PARCELLAIRES FOSSILES DU MASSIF VOSGIEN 225 - . < É (4) - Jean-Denis Laffite, tienne Dambrine, Pour le Haut Empire, période ayant fait l'objet de recherches approfon­ Jean-Luc Dupouey et Murielle Georges-Leroy, dies, les sites datés présentent d'importantes diversités. À côté «Le parcellaire gallo-romain de la forêt de véritables villages organisés autour de chemins bordés de murs domaniale de Saint-Amond à Favières comme au Wasserwald, (treize cas), existent d'autres fo rmes d'occupa­ (Meurthe-et-Moselle) », REVUE ARCHtOLOGIQUE tions : agglomérations sans trame parcellaire visible (Fallberg, DE L'EsT ET OU CENTRE-EsT, 51, 2001-2002, Erckatswiller, 67), petits hameaux de quelques constructions (Croix­ P· 465-476. Guillaume, Saint-Quirin, 57), successions de parcellaires avec des Michel Mangin, Jean-Louis Courtalon, bâtiments isolés (Quatre-Chemins et Saveux, Saint-Quirin, 57), Philippe Fluzin et Éric Laclos, «Villages, forges établissements de type villae (?) (Foeschen, Troisfontaines, 57) et et parcellaire aux Sources de la Seine : sanctuaires isolés au milieu de parcellaires (Freiwald, Troisfontaines, 57)_ l'agglomération antique de Blessey-Salmaise Le principal point commun de ces sites semble être le fait qu'ils appar­ (Côte d'Or) », ANNALES LITTtRAIRES DE tiennent à un terroir préservéet fossilisé par le couvert fo restier_ Des L'UNIVERSITt DE FRANCHE-COMTt, 2000, vol. 700. terroirs comparables ont été étudiés récemment en Lorraine et en Bourgogne (4) ; ces recherches rendent les découvertes des fo rêts vosgiennes moins marginales dans le schéma de l'occupation rurale gallo-romaine. Topographiquement, la position de ces parcellaires fossiles vosgiens mérite également une mise au point. Les sites se trouvent sur les parties hautes des premiers reliefs gréseux du massif vosgien, à proximité du Col de Saverne (411 m) et aux débouchées des principales vallées à des altitudes comprises entre 350 et 500 m_ L'appellation « sommets vosgiens» est probablement exagérée car les points les plus élevés de ce secteur géographique culminent entre 800 et 1000 m d'altitude (Grand Rosskopf, Donon), et les reliefs occupés par les sites n'ont rien de zones montagneuses inhospitalières mais ressemblent davantage à des collines_ ÉTAT DE LA DOCUMENTATION SUR LES BÂTIMENTS Un rapide inventaire bibliographique associé aux découvertes inédites a permis de recenser cent-vingt bâtiments. Ce chiffre arbitraire est un pâle refletde la réalité du secteur géographique concerné. La plupart des sites n'ont pas été prospectés systématiquement et les rares fouilles ont à chaque fo is accru de façon significative le nombre de bâtiments reconnus_ L'étude minutieuse de deux enclos (Ll et L2) du village gallo-romain du Wasserwald (Haegen, 67) a par exemple, multiplié par trois le nombre de bâtiments et la fo uille programmée de la Croix-Guillaume (Saint-Quirin, 57) a permis de mettre au jour quatre nouveaux bâtiments sur un site qui n'en comprenait au départ qu'un seul. > 226 LES BÂTIMENTS DES HABITATS ET DES PARCELLAIRES FOSSILES DU MASSIF VOSGIEN . NO SEPTEMBRE 2005 4 - Dans le cadre de l'architecture de terre Sur ces cent-vingt bâtiments, trente-sept ont fait l'objet de fo uilles (5) - et quinze de simples relevés. La documentation disponible est très et de bois, le mot « solin » désigne inégale, allant du simple croquis aux plans détaillés. des alignements plus ou moins soignés Le faible enfouissement des vestiges est également une source de pierres posées sur le sol, isolant de problème. Les solins (5) de pierres, les supports de poteaux en bois les superstructures en bois des bâtiments et les murs affleurent dans l'humus fo restier. Malgré la fossilisation de l'humidité du terrain, en premier lieu par la fo rêt, la végétation (chablis, racines) et les travaux forestiers ont la sablière basse. entraîné ou entraînent toujours des destructions. La nature même (6) - Voir note 1 du substrat, composé de sable de grès, n'est pas propice à la bonne conservation des sols de circulation contemporains des bâtiments ou des traces des creusements. Les découvertes d'objets et de céramiques sont rares. Cette pauvreté rend difficile la détermination des fonctions des constructions et ne fa cilite pas les datations précises. LA PÉRIO DE ANTIQUE. MODE DE CONSTRUCTION DES BÂTIMENTS To us les bâtiments datés de l'Antiquité sont des constructions en bois. Les ressources locales sont probablement à l'origine du choix de ce matériau. Sur la carte de Peutinger légèrement postérieure aux datations admises pour l'occupation de nos sites (10/20 à 260/270 ap. J.-c.), le secteur est dénommé Silva vosagus. Ce document retrace probablement une situation antérieure à la fin du Ille siècle et il est probable qu'une partie du massif, notamment les zones aux altitudes supérieures à 600 mètres ou les secteurs à fo rte déclivité, ait conservé un couvert fo restier au Haut-Empire. La variété des soubassements utilisés pour ces bâtiments en bois a permis d'établir une première typologie des constructions (6) . Quatre types de supports ont été mis en œuvre : La première technique consiste à placer l'armature de bois sur de larges murets en pierre sèche à double parement et remplissage de blocaille et de terre (fig.1 nOl à 17). Ces murets de 0,8 m à 1,5 m de large étaient peu fo ndés dans le sol (environ 0,2 m) et ne dépassaient pas 0,8 à 1 m de haut. Le parement du muret est varié. À côté de constructions soignées en moellons (ensemble T du Wasserwald), on remarque des bâtiments plus sommaires et réalisés avec de gros blocs de grès non taillés (bâtiment 1 de la Croix-Guillaume). La plupart de ces murets ont été retrouvés effondrés et cet état rend difficile l'étude de l'armature en bois. Dans deux angles des bâtiments 2 et 4 de la Croix­ Guillaume (fig.1 n012 et 13), des logements pour des poteaux verticaux de section rectangulaire étaient encore visibles. Des systèmes de sablières ou d'élévations de type Block Bau sont éventuellement possibles, mais l'état des murets ne permet pas de le prouver. NO SEPTEMBRE 2005 LES BÂTIMENTS DES HABITATS ET DES PARCELLAIRES FOSSILES DU MASSIF VOSGIEN 227 4 - . < / //--<.,r' ", A ( ,. "" , \ \ \ \ ) '\ \ " / \ / /" \ " / [[jj \ 4 /- 5 D g \ 6 2 " 1 ~ 3 non fouillé -- - , -- ...--- \ , _ \ 1 C I, j\ , , 1 1 \ '. , , _\ \ , \, --- \ --' - \ , l- --- - - - 1 __ \ \,/ /..Y' 7 , ----­ \ -- 8 \,- - 10 9 '--0 \ 11 non fouillé non fouillé non fouillé- - \Cf � 1:1'2 15 13 14 encoche Légende 17 c=:J mur en pierre sèche •• bloc de pierre au moins 2 espaces couverts rocher _ o 20m Fig 1 - Bâtiments gallo-romains en bois à soubassements en pierres sèches à double parements 1 Wasserwald, Haegen, 67 (Fuchs 1914), bâtiment Ml 10 Trois-Saints, Walscheid, 57, inédit 2 Deux-Croix, Saint-Quirin, 57 (Keune, Welter 1906, P.379) 11 Wasserwald, Haegen, 67, (Fuchs 1914), ferme T 3 Wasserwald, Haegen, 67 (Pétry 1978, P.373) bâtiment B 12 Croix-Guillaume, Saint-Quirin, 57, bâtiment 4 (inédit) 4 Croix-Guillaume, Saint-Quirin, 57 , bâtiment 1 état 2 13 Croix-Guillaume, Saint-Quirin, 57, bâtiment 2 (Heckenbenner,Meyer 1996, fig 10) (Heckenbenner, Meyer 1996, fig 10) 5 Schantzkopf, Harreberg, 57, inédit 14 et 15 Deux-Croix, Saint-Quirin, 57 6 Wasserwald, Haegen, 67 (Fuchs 1914), bâtiment P (Keune, Welter 1906 .
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