LE CHEMINEAU DE LA MONTAGNE " LA VIE EN MONTAGNE " = Collection publiée sous la direction de = = JACQUES DIETERLEN = La Collection " La Vie en Montagne " a pour but de vulgariser la meilleure documentation technique, touristique et littéraire relative à la vie en montagne, dans ses manifestations les plus diverses. C'est ainsi que paraîtront dans cette Collection des livres de technique sur le ski, l'alpinisme, le camping en montagne, des monographies touristiques inédites sur telle région encore peu connue du public ; enfin des récits ou histoires, inspirés par la vie émouvante et merveilleuse dans les montagnes, en toute saison et en tout lieu. Cette Collection pourra être mise entre toutes les mains. Elle sera la lecture favorite du skieur, de l'alpiniste, du campeur, du touriste, de tous les amis de la montagne, le recueil de souvenirs et d'études indispensable à tous, la bibliothèque la plus vivante, la plus instructive et la plus agréable. L'APPEL DU HOGGAR, par Roger Frison-Roche. Prix : 10 fr. LES BATAILLES POUR L'HIMALAYA, 1783-1936, par C.-E. Engel. Prix : 15 fr. CIMES D'OISANS, par Jacques Bœll. Préface de Lucien Devies. Prix : 15 fr. LE SKI POUR TOUS, par André Hermann et Jacques Dieterlen. Prix : 15 fr. SKI DE PRINTEMPS, par Jacques Dieterlen. Prix : 15 fr. KARAKORAM. Expédition française à l'Himalaya — 1936 —, par Jean Escarra, Henry de Ségogne, Louis Neltner et Jean Charignon. Prix : 16 fr. Chaque volume illustré de croquis et de hors-texte en héliogravure. " LA VIE EN MONTAGNE " JACQUES DIETERLEN LE CHEMINEAU DE LA MONTAGNE Préface de Henry RIPERT FLAMMARION ŒUVRES DE JACQUES DIETERLEN LES FILS DE LA NEIGE (Éditions de la Revue du ski). 15 francs. LE SKIEUR A LA LUNE (Éditions de la Revue du ski). 12 francs. CYPRIENNE, ou LA SKIEUSE AU SOLEIL (Éditions de la Revue du ski), 12 francs. LE SKI POUR TOUS (En collaboration avec A. Hermann) (Flam- marion). 15 francs. SKI DE PRINTEMPS (Flammarion). 15 francs. Droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés pour tous les pays. Copyright 1938, text and illustration by ERNEST FLAMMARION. PRÉFACE Comment rattraper sur la route terrible où elle nous a fuis, au delà du spécieux tournant de la mort, cette âme qui ne fut jamais tout entière avec nous, qui nous a passé entre les mains comme une ombre rêveuse et téméraire ? Comment fixer l'image de ce garçon timide et effacé, qui mit toute son application à vivre une vie volontaire loin du regard des hommes ? Comment oser soulever le manteau de silence de ce mystérieux coureur de cimes, dont on peut dire après Guido Rey : « Il n'a rien révélé de son âme ; il ne laisse rien écrit de ses ambitions et de ses enthousiasmes. Il est resté idéalement silencieux, comme les monts qu'il aimait... » Que de fois ces questions sont venues frapper la pensée de ceux qui ont le mieux connu Léon Zwingelstein, tombé au pic d'Olan, le vendredi 13 juillet 1934, à l'âge de 37 ans. Dans le désarroi que leur laissait la mort de leur cher compagnon de course, ils pre- naient peu à peu conscience de leur qualité d'héritiers spirituels du disparu et hésitaient sur l'usage qu'ils devaient faire du singu- lier dépôt dont ils devenaient comptables. Deux relations de voyages, quelques notes techniques, un mince paquet de lettres, des photos en désordre et une douzaine de petits calepins couverts d'une écriture minuscule et incompréhensible pour les non-initiés, voilà ce que l'on put matériellement réunir parmi les pauvres épaves qui gisaient derrière lui. Pour le reste, on conservait de sa vie alpine le souvenir d'un petit homme râblé, avare de paroles, d'une incroyable résistance physique, opposant à toutes les adversités un calme intrépide, éclairé d'un sourire d'ironie malicieuse bien faite pour décourager les questions indiscrètes. Le bilan officiel de son activité alpine portait à son actif de quoi satisfaire les plus exigeants : une longue liste d'ascensions, de bril- lantes « premières » telles que la Pierra Menta, le Col du Diable, le Mont-Aiguille par l'itinéraire des « Tubulaires », le Col de Bionnassay, et surtout deux raids solitaires à skis à travers les Alpes, dont l'incroyable audace avait exigé une maîtrise au moins égale dans l'art de naviguer sur la neige. Mais ce ne sont pas ces réussites, si éclatantes fussent-elles, qui valurent à Léon Zwingelstein la place de choix qu'il occupa dans le souvenir de ceux qui l'ont connu peu ou beaucoup. Il était impos- sible, pour qui n'en était pas trop indigne, de ne pas ressentir dès le premier abord, la présence d'une nature forte et belle sous l'écorce d'indifférence dont il se dépouillait rarement. Ainsi on entend confusément le murmure des eaux vives de l'Oisans à travers les talus de pierrailles qui les recouvrent. Mais ceux qui ont eu le privilège de vivre dans son amitié savent, seuls, les trésors qui se cachaient dans ce cœur sensible et avide de sympathie. Par pudeur ou gaucherie, il s'exprimait difficilement et se contentait d'un accord tacite. Son âme méditative, à la recherche continuelle du vrai et du beau, s'élevait sans peine au mystérieux royaume de la poésie. Pourtant, il ne lisait pas les poètes, mais il écoutait et regardait, en amitié avec les choses. De telles dispositions l'avaient conduit naturellement à cet amour sans cesse grandissant pour la montagne et pour la vie en montagne. Il s'y trouvait chez lui, loin des calculs des hommes. Là seulement il pouvait se livrer de tout son être à cette « action, sœur du rêve », dans une sorte de domaine enchanté, fait à sa mesure. Avec l'âge et les dures expériences de la vie, il trouva bien plus que de vaines et stériles victoires sur la roche et la glace ; il parvint pas à pas, et au prix de quelles souffrances, à la plus difficile conquête de l'homme, à cette perle infiniment précieuse pour laquelle tout peut être sacrifié : la possession de soi et la paix intérieure. C'est tout ce trésor épars qu'entreprit de rassembler et de sauver Jacques Dieterlen, pour en former l'héritage spirituel du Chemi- neau de la Montagne. Tâche très ardue pour qui n'avait connu le disparu qu'à travers des récits de courses et un petit article « in memoriam » d'Étienne Bordeaux, le Philosophe du livre, l'ami le plus fidèle et le plus proche. Entreprise d'autant plus méritoire, qu'elle supposait un don de sympathie et d'intuition que l'on rencontre rarement. Du premier contact avec la vie extérieure de Léon Zwingelstein, Jacques Dieterlen avait déjà tiré un chapitre important de son ouvrage Les Fils de la Neige où il retraça les péripéties des grands raids à skis de notre ami. Mais ce n'était là qu'un essai, et cet écrivain devait sentir très tôt une curiosité grandissante pour la personnalité même de son héros, qui lui semblait dépasser la mesure de ses actions les plus surprenantes. Il voulut remonter aux sources, questionner les amis, les compagnons du grand silencieux, consulter les petits calepins presque illisibles, méditer devant les photos déjà jaunies, toucher de ses mains les pauvres reliques : la tente, le piolet, le sac usé. Travail de chartiste que de suivre, à travers de maigres documents et des témoignages patiemment rassemblés, le fil d'une destinée capricieuse, traversée de zones d'ombre et de repliements muets. Il voulut aussi reprendre les traces, respirer l'atmosphère, revivre la vie du disparu ; et c'est ainsi qu'on le vit refaire des étapes entières du grand raid, skis aux pieds, sac au dos, frapper à la porte des mêmes auberges, questionner inlassablement les paysans et les guides qui l'avaient vu passer. L'été venu, on le retrouva au cœur de l'Oisans, campant en com- pagnie du Philosophe, sous une petite tente jaune, au plan du Carrelet, au Col des Avalanches, à la Tête de la Maye, parlant peu et se nourrissant de l'humble pitance des vieux oisanais. Car c'est bien à écouter les torrents, à guetter le lever du jour, et à sentir la roche dure sous ses côtes, que l'on apprend les secrets du « mauvais pays ». Voici maintenant l'œuvre achevée sous nos yeux. Il ne nous appartient pas de la louer ni de la critiquer dans cette forme presque épique que lui a donnée son auteur. Nous pouvons toutefois marquer que le sentiment d'amitié qui l'anime et la fidélité scrupuleuse des contours donnent à la figure qui est évoquée une saisissante réalité. Oui c'est bien pour nous, ses compagnons de cordée, ses amis, le « vieux Zwing » qui revit dans ces pages. Le voici, marchant de son pas tranquille, à peine courbé sous son gros sac, guidant précautionneusement quelques novices dans leurs premiers pas en montagne; le voici aux prises avec la glace et le rocher, si calme et assuré au milieu des pires difficultés, qu'il semblait lié par un pacte d'amitié avec les prises les moins sûres et la neige la plus sournoise ; le voilà maintenant revenu à son campement, affairé autour de sa petite tente bien abritée contre le vent et auprès de sa cuisine savante, délectable pour lui seul. Il nous semble encore entendre ses mille petites malices traditionnelles des jours heureux, après les victoires chèrement acquises, quand il n'y avait rien d'autre à faire qu'à se laisser vivre. Les autres, nos frères alpinistes, y trouveront ample sujet de méditation, bien qu'il soit hors de question de proposer en exemple sa destinée singulière à ceux qui vont à la montagne en virtuoses ou en simples amateurs.
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