Avril 2017 | N° 22 Dossier ARt nouVeAu Varia LA propriété Le FéBuRe Remigio CAntAgallinA Bruxelles Patrimoines Bruxelles 22 N° | 2017 Avril u A nouve Art Dossier Le Fébure Le propriété A L Varia A in all g A nt A C emigio r gustaVe strauVen la jubilation De ossier l’art nouveau D Caroline BERCKMANS et oliVier BerCKMANS Historiens de l’archItecture AssociatIoN PouR l’étude Du BâtI (aPEB) maison de saint Cyr, square ambiorix 11, Bruxelles-extension est (2016 © aPeB). ARChiTECTE D’oRIGINE SCHAERBEEKOISE, GUSTAVE STRAUVEN CONNAÎT UNE CARRIÈRE BRÈVE ET FULGURANTE. TRAVAILLEUR ACHARNÉ, ON LUI CONNAÎT PRÈS DE 70 BÂTIMENTS, SITUÉS POUR LA PLUPART À BRUXELLES PARMI LESQUELS QUATORZE SONT À CE JOUR CLASSÉS. Un moment tombé dans l’oubli, il est aujourd’hui remis à l’honneur notamment par le biais d’un site Internet qui lui est entièrement consacré. Le présent article retrace brièvement la vie de ce concepteur hors norme, de ses influences à ses innovations remplies d’originalité et de hardiesse qui caractérisent mieux qu’aucune signature ses compositions. audacieux, virtuose, et même fan- en 1892, âgé de seulement quatorze tasque dans ses meilleures réa- ans, gustave entame une formation lisations, gustave strauven (fig. 1) d’architecte à l’école saint-luc de appartient à la seconde génération schaerbeek. gratifié d’un premier de l’art nouveau. la carrière par- prix, il en sort diplômé trois ans plus ticulièrement courte de cet archi- tard. en 1896-1897, strauven effec- tecte précoce – 1898 à 1914 – atteint tue un stage dans l’atelier de victor déjà son sommet en 1900, lorsque, Horta. au début de l’année 1898, âgé d’à peine 21 ans, il conçoit il part poursuivre sa formation à l’exubérante maison de saint cyr. Zurich, dans le bureau des archi- tectes alfred chiodera et theophil tschudi. en parallèle, il s’implique itinéraire D’un dans la fondation d’une revue d’art Bruxellois décoratif baptisée La Gerbe, dont le premier numéro sort en février gustave strauven naît à schaerbeek 18981. à côté d’autres architectes, F ig . 1 le 23 juin 1878. ses parents, Pierre- comme Paul Hamesse et armand Portrait de gustave Strauven réalisé à Zurich en 1898 par l’atelier J. gutzler °022 - avril 2017 arnold (1839-1884), limbourgeois, van Waesberghe, strauven y publie (coll famille mottay-Strauven). et catherine backaert (1838-1915), les dessins de projets « modernes » : schaerbeekoise, se sont mariés dans le domaine des arts appliqués N en 1868. respectivement jardinier – couverture pour la revue, sys- et servante, ils allaient s’installer tème d’éclairage, porte-montre… – à schaerbeek et y devenir cabare- mais également en architecture tiers. gustave est le cadet de sept – groupe de six immeubles à Zurich enfants, dont Émile (1871-1926), et maison à la montagne de la cour louis (1873-1935) et félix (1876- à bruxelles. on y lit, en outre, que 1934). strauven participe à un concours Bruxelles Patrimoine 061 guStavE StRauven sible) ou encore vélos et automo- biles à une seule roue. breveté en 1909, son monte-plats rationnel « système strauven » sera com- mercialisé après-guerre par ses frères louis et félix. c’est avec ce dernier, également dessinateur et architecte, que gustave s’installe pour quelques temps à tournai, entre fin 1903 et 1905 environ. en dix ans, de 1903 à 1913, strauven enchaîne près de 50 réalisations, dont une dizaine à tournai et deux à ninove. neuf d’entre elles sont co-signées par félix2. à bruxelles, il construit pour un autre de ses frères, Émile, deux immeubles d’angle avec café au rez- de-chaussée3. gustave s’y domici- liera successivement, accompagné de sa mère et de ses frères, gérants des cafés. en mars 1914, l’architecte conçoit ses trois derniers immeubles, ave- nue chazal à schaerbeek, dont deux ne seront pas réalisés, sans doute suite au déclenchement de la guerre. on perd ensuite la trace de strauven entre juillet 1914, date d’obtention de son dernier brevet d’invention, et juillet 1916, quand il répond positivement à l’appel au F ig . 2 F ig . 3 service de tous les belges nés entre er maison de Saint Cyr, square ambiorix 11, Rue luther 28, Bruxelles-Extension Est le 30 juin 1876 et le 1 juillet 1898. il Bruxelles-Extension Est (2016 © aPEB). (2016 © aPEB). rentre alors comme soldat de deu- xième classe dans le corps d’ins- truction des auxiliaires. mobilisé le d’école communale à etterbeek. sonnelle deux ans plus tard (rue 12 février 1917, strauven se retrouve tous ces projets restent cependant luther 28), qu’il n’occupera tou- moins de huit mois plus tard à l’hô- dans les cartons. tefois jamais (fig. 2 et 3). en 1900, pital militaire belge de cap-ferrat strauven obtient ses premiers en france, pour cause probable de Dans le courant de l’année 1898, brevets d’inventions. il en dépo- tuberculose pulmonaire. en juil- strauven rentre à bruxelles et sera une vingtaine jusqu’en 1914, let 1918, il est en traitement à l’hô- signe les plans de ses deux pre- dans des domaines variés : maté- pital militaire belge de faverges mières réalisations : les maisons riaux de construction « rationnels » en Haute-savoie, où il meurt de jumelles rue joseph II 148 et 150. (briques pour maçonnerie creuse, cette maladie le 19 mars 1919, à entre 1899 et 1903, l’architecte briques de verre, béton armé), élé- 40 ans. en 1923, son corps est conçoit une vingtaine de projets ments d’architecture (balustres en exhumé et transféré au cimetière de en région bruxelloise, dont la mai- ciment, toitures vitrées, poutres, schaerbeek avant d’être finalement son de saint Cyr en 1900 (square colonnes, escaliers), système de déplacé à evere. ambiorix 11) et sa maison per- chauffage central (baptisé l’invi- 062 sa ProDuCtion : Des immeuBles De rapport aux maisons De maître sur les 68 réalisations qu’on lui connaît à ce jour4, 57 sont situées à bruxelles. elles se concentrent dans les communes de la première couronne, en pleine expansion urbanistique au tournant des XIXe et XXe siècles : schaerbeek (33), où strauven habitait, l’extension est de la ville de bruxelles (13), toute proche, saint-josse-ten-noode (5), etterbeek (3), ixelles (2) et, enfin, saint-gilles (1). la production de l’architecte consiste essentiellement en des immeubles de logements. sans doute l’opportunité ne s’est-elle F ig . 4 F ig . 5 pas présentée de réaliser des pro- avenue des azalées 8-9, Schaerbeek, Palace Rue van Campenhout 51, Bruxelles- Josaphat. Carte postale antérieure à 1919 (coll. Extension Est (2016 © aPEB). grammes plus ambitieux ? Hormis Belfius Banque-académie royale de Belgique une villa en périphérie bruxel- © aRB-SPRB). loise (démolie), strauven est sur- tout l’auteur de maisons unifami- bourgeoises d’un certain standing, lorsque le jeune architecte quitte liales ou de maisons de rapport comme les nos 52 rue souveraine l’école, en 1896, l’art nouveau est entre mitoyens, conçues seules ou (6,50 m) et 51 rue van campenhout en marche et victor Horta au som- en ensemble. les nombreux rez- (5,50 m) (fig. 5), respectivement met de sa créativité. c’est l’époque de-chaussée à usage de restau- conçues pour un avocat et un tra- des grands projets de la maison du rant ou de café lui offraient l’occa- ducteur. à cela s’ajoutent nombre Peuple et de l’hôtel van eetvelde, sion de concevoir de remarquables de productions plus courantes, auxquels strauven participe en tant marquises en fer forgé. Deux réa- comme ces deux paires de mai- que dessinateur. celui-ci ressort lisations commerciales méritent sons jumelles presque identiques, profondément marqué par ses deux d’être pointées : Les Magasins l’une à ninove, l’autre boulevard ans de stage dans l’atelier du maître, Schaerbeekois, un grand maga- des Déportés 30 et 32 à tournai. qu’il remercie d’ailleurs pour la qua- sin (démoli) qui s’étirait sur deux mentionnons enfin une maison lité de la formation qu’il a reçue6. niveaux avec galerie (rue josaphat d’épicier, rue des Éburons 31. si l’on retrouve dans ses réalisa- 247-253) et le Palace Josaphat, un tions de nombreux thèmes directe- immeuble tout entier à usage de ment inspirés de l’œuvre de Horta, café (transformé), ouvrant sur les ses inFluenCes : les il ne s’agit toutefois jamais de pla- frondaisons du parc josaphat (ave- leçons Des maîtres giat. Dessinateur virtuose, strauven nue des azalées 8-9) (fig. 4). De l’art nouVeau sur développe un style propre, une ligne FonD D’éCleCtisme toute personnelle, guidée par une °022 - avril 2017 quant aux habitations unifami- inventivité exacerbée. liales, leurs commanditaires étaient lorsqu’en 1892, strauven entame N de milieux sociaux variés. quatre ses études d’architecture, c’est la le principal héritage de Horta réside sont des hôtels particuliers5, impo- grande époque de l’éclectisme. à sans doute dans l’importance de la sants par leur largeur, comme au l’école saint-luc, il est formé aux rationalité constructive, inspirée par no 127 rue Washington (8,50 m), ou styles historicistes et, notamment, l’art néogothique tel que prôné par leur hauteur, comme la maison de à l’architecture néogothique, dont eugène viollet-le-Duc et calquée saint Cyr (16 m de haut pour 4 de le vocabulaire s’imprimera durable- sur les structures présentes dans la large). D’autres sont des maisons ment dans son imaginaire. nature. la conception de l’ornement Bruxelles Patrimoine 063 guStavE StRauven ciste au langage des maîtres de l’art nouveau, apparaît déjà éton- namment abouti lorsqu’il entame sa carrière en 1898.
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