Document generated on 09/28/2021 4:56 a.m. Entre les lignes Le magazine sur le plaisir de lire au Québec Colm Feore Essais et bonheurs Marie-Claude Fortin Traduire Volume 5, Number 2, Winter 2009 URI: https://id.erudit.org/iderudit/682ac See table of contents Publisher(s) Les éditions Entre les lignes ISSN 1710-8004 (print) 1923-211X (digital) Explore this journal Cite this article Fortin, M.-C. (2009). Colm Feore : essais et bonheurs. Entre les lignes, 5(2), 14–17. Tous droits réservés © Les éditions Entre les lignes, 2009 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/ This article is disseminated and preserved by Érudit. Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal, Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to promote and disseminate research. https://www.erudit.org/en/ ENTRE LES LIGNES Colm Feore Essais et bonheurs Il a incarné tour à tour, et toujours avec autant de talent, Glenn Gould, Pierre Elliott Trudeau, Macbeth et le stoïque Martin Ward, le «bon» de Bon Cop, Bad Cop. L'été prochain, à Stratford, Ontario, où il habite, il jouera Cyrano de Bergerac dans une production dirigée par son épouse, Donna Feore. Entre deux épisodes du tournage de la série « 24 », à L.A., et le tour­ nage à Montréal du film The Trotsky, de Jacos Tierney, Colm Feore nous parle des livres de sa vie. PROPOS RECUEILLIS PAR MARIE-CLAUDE FORTIN PHOTO JULIE DUROCHER Entre les lignes : Dans votre enfance, ELL : Quel genre de lecture Ce genre de livres où la nourriture les livres occupaient-ils une place privilégiez-vous ? est élevée au rang de philosophie importante ? C. F. : Comme acteur, je travaille m'intéresse au plus haut point. Colm Feore : Chez moi, il y avait des toujours avec Shakespeare, Molière, ELL : Quels sont les titres qui ont dé­ livres absolument partout. Mon père Tchékhov. Pour faire ce boulot, il faut clenché votre amour des livres ? avait toujours un livre à la main. Et s'immerger dans les textes de tous C. F. : Il y a eu un moment charnière, je le trouvais ennuyeux ! Pourtant, ces génies. Alors, pour me reposer dans ma vie. J'avais 18 ans, j'étu­ aujourd'hui, je suis comme lui. Quant un peu, je lis beaucoup d'essais ou diais dans un collège, et je me cher­ à ma mère, elle nous lisait des his­ de livres pratiques. chais un boulot pour l'été. Comme toires du Dr. Seuss ou d'autres contes ELL : Par exemple ? je ne savais pas quoi faire - à l'épo­ pour enfants, nous récitait des poè­ C. F. : Comme c'est moi qui fais la que, je n'imaginais pas pouvoir ga­ mes et chantait des chansons. cuisine chez moi, j'aime beaucoup gner ma vie comme comédien -, je ELL : Cela a-t-il contribué à dévelop­ lire tout ce qui touche à la science ou me disais qu'un travail dans la GRC per votre goût pour le théâtre ? à l'éthique de la nourriture. En ce mo­ ou même pour le FBI serait sûrement C F. : Je crois que oui. Si vous lisez ment, je lis Taras Grescoe, un Mont­ un bon choix. C'étaient des jobs sûrs ! Dr. Seuss à voix haute : «One Fish réalais qui a écrit un essai intitulé Bot- J'avais rempli des formulaires pour Two Fish Red Fish Blue Fish» (ici, il tomfeeder. Il nous explique comment poser ma candidature. Mon père était récite de sa plus belle voix), ce n'est consommer le poisson d'une façon d'accord. Il me voyait déjà à Interpol ! pas loin du «To be or not to be? That éthique et pratique, en commençant Mais au collège, j'ai fait la rencontre is the question». C'est presque la par le fond - avec les crustacés, les d'un professeur de littérature qui était même musique ! Quand on nous fa­ huîtres, les homards, et en remon­ aussi écrivain, Richard B. Wright. Il miliarise, jeune, avec ce genre de tant tranquillement. Grescoe a aussi était génial ! Pour nous parler de texte, on devient sensible à la mu­ écrit The Devil's Picnik (qui vient Chaucer et de son époque, par exem­ sique de la langue. d'être traduit en français sous le titre ple, il apportait en classe des vins Le pique-nique du diable; voir la cri­ et des fromages... Les livres qu'il m'a tique dans notre section Nouveautés.) fait découvrir ont changé ma vie. »• 14 ENTRE LES LIGNES ENTRE LES LIGNES ::: HIVER 2009 I 15 ENTRE LES LIGNES ELL : Quels étaient ces livres ? rimes sont là. La musique, la mé­ ELL : Quelle relation entretenez-vous C. F. : Il y avait, entre autres, A Por­ trique, tout est là ! avec le livre en tant qu'objet? trait of the Artist as a Young Man ELL : Faites-vous souvent plusieurs C. F. : Je suis un peu... possessif. (Portrait de l'artiste en jeune hom­ lectures de front? C'est même un problème. J'achète me) de James Joyce, et Brighton Rock C. F. : Constamment. En ce moment, des bouquins sans arrêt ! Quand je (Le rocher de Brighton) de Graham je lis - en plus de mes trois éditions pars en voyage, j'en traîne une tonne Greene. On trouvait, chez Joyce, de Cyrano et de mes quatre de Mac­ dans mes bagages, et je trouve le tour des phrases extraordinaires ! C'était beth, que je vais aussi jouer l'été pro­ d'en acheter d'autres à l'aéroport. En si vif, si vivant, si élégant... (Ici, il chain - un essai qui s'intitule The vacances, s'il y a une librairie près récite des passages de mémoire...). Fruit Hunters, de Adam Leith Gollner, de l'hôtel, mes enfants savent que je J'étais complètement bouleversé. qui raconte ni plus ni moins l'his­ Ces livres ont inauguré une nou­ toire des fruits à travers le monde. velle époque dans ma vie. C'est là J'ai un autre essai qui a pour titre que j'ai appris à aimer la littérature Dangerous Games : The Uses and et le théâtre. Abuses of History de Margaret Mac- ELL : Aujourd'hui, lisez-vous par­ Millan, et d'autres livres sur la cui­ fois des romans? sine : In Defense of Food de Michael C. F. : J'ai toujours l'intention de lire Pollan, Molecular Gastronomy (Casse­ des romans, j'en ai beaucoup, ils sont roles et éprouvettes) et Kitchen Mys­ partout chez moi, mais je ne trouve teries (Les secrets de la casserole), jamais le temps ! Le dernier que j'ai tous deux de Hervé This. Je suis cu­ vais être heureux. Je peux y passer lu, c'est Cyrano de Bergerac d'Ed­ rieux. Tout m'intéresse ! La gastro­ des heures. Maintenant, on trouve mond Rostand, en français et en an­ nomie, la science, la photographie, des fauteuils et des cafés dans les glais, dans la traduction d'Anthony tout. Je veux tout savoir avant de librairies, c'est le bonheur! Mais je Burgess (qui a d'ailleurs écrit les sous- mourir, mais plus je vieillis, plus j'ai n'arrive pas à emprunter des livres. titres anglais du film de Rappeneau). l'impression de manquer de temps ! Je veux les posséder. J'aime la sensa­ Il a fait un travail formidable ! Les tion d'avoir un livre entre les mains. 30 ans culture revues arts visuels cinéma culture, littérature et société création littéraire histoire et patrimoine théâtre et musique théories, essais et analyses u-- • Z C3 E Société de développement ; ' des périodiques i I culturels québécois l www.sodep.qc.ca 16 ENTRE LES LIGNES Je déteste lire des textes sur l'écran zaine d'exemplaires de Woman : An d'un ordinateur. Quand je mémorise Intimate Geography (Femme !) de Na­ LES CHOIX DE des textes, je vois des pages qui tour­ talie Angier. C'est un essai formidable. COLM FEORE nent. Les gars, si vous voulez comprendre l'mi i .m de I .111 w< PORTRAIT DE L'ARTISTE ELL : Vous lisez beaucoup de théâtre. vos blondes, vous devez lire ce livre ! en jttUK' ln'inmc EN JEUNE HOMME Croyez-vous que même ceux qui ne L'auteure est une journaliste qui signe James Joyce font pas ce métier gagneraient à en des articles scientifiques dans le New Gallimard, Folio, York Times. Dans son essai, elle ex­ lire? 1993 C. F. : J'en suis convaincu. D'abord, plique, d'une manière claire, la biolo­ lire une pièce de théâtre qui se joue gie des femmes. Cela nous donne un la* LE ROCHER DE BRIGHTON Graham Greene 10/18, « Il y a tout, dans Shakespeare. Toute notre humanité, nos 2002 désirs, nos plaisirs, nos tragédies. Chaque fois que je le relis, je découvre des choses que je n'avais pas vues auparavant. » CyRANO DE BERGERAC Edmond Rostand Le Livre de Poche, en deux heures, c'est assez rapide. Et éclairage précieux. Grâce à cette poé­ 2007 pour le lecteur, ça donne quelque sie scientifique, j'ai vécu une véritable chose de tellement... vivant. Surtout épiphanie ! J'ai ressenti un très grand s'il lit à voix haute. La voix fait jaillir respect pour les femmes. toute la lumière du texte. En lisant les HAMLET classiques, on voit à quel point c'est ELL : Avez-vous transmis votre William Shakespeare poétique, c'est comme du cristal. amour des livres à vos enfants? Hatier, 2008 ELL : Parmi les grands textes de C.
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