Commerce Et Navigation.Indd

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LE COMMERCE ET LA NAVIGATION DE L’ALGÉRIE PAR F. ÉLIE DE LA PRIMAUDAIE REVUE ALGÉRIENNE ET COLONIALE. JUIN 1860. Livre numérisé en mode texte par : Alain Spenatto. 1, rue du Puy Griou. 15000 AURILLAC. D’autres livres peuvent être consultés ou téléchargés sur le site : http://www.algerie-ancienne.com Ce site est consacré à l’histoire de l’Algérie. Il propose des livres anciens (du 14e au 20e siècle) à télécharger gratuite- ment ou à lire sur place. REVUE ALGÉRIENNE ET COLONIALE. JUIN 1860. LE COMMERCE ET LA NAVIGATION DE L’ALGÉRIE AVANT LA CONQUÊTE FRANÇAISE. Encore un mot sur cette époque intéressante du moyen âge, où la France trouve pour l’ouvre de civilisation quelle accomplit en Algérie de si précieux encouragements. Carrette. AVERTISSEMENT. Les anciens portulans dont je me suis servi pour composer cette description de l’Algérie au moyen âge sont au nombre de dix : 1° Le recueil de Visconti, dont l’original existe à la biblio- 2 COMMERCE ET NAVIGATION DE L’ALGÉRIE thèque impériale de Vienne. Ce portulan, le plus ancien du moyen âge, est aussi l’un des plus exacts. Il contient plusieurs cartes marines très étendues et porte l’inscription suivante : Petrus Visconte de Januâ fecit istas tabulas anno Domini MCCCXVIII. 2° L’atlas catalan de l’an 1375, dessiné par Jacques Ferrer, navigateur de Majorque, qui fait partie des manuscrits de la Bibliothè- que impériale(1). Il a été publié dans le tome XIV, IIe partie, des Notices et Extraits des Mss., avec un mémoire de MM. Buchon et Tastu. On le trouve aussi dans le recueil du vicomte de Santarem(2). Le savant Walc- kenaer avait signalé en 1819 l’existence de ce précieux document. 3° Le portulan de la bibliothèque Pinelli, qui porte la date de 1384 et a été publié par le vicomte de Santarem. 4° Une carte pisane du quatorzième siècle, provenant d’une ancienne famille de Pise et publiée par M. Jomard(3). 5° L’atlas composé par Francesco et Domenico Pizzigani et dessiné par un certain Marc, Vénitien, avec cette inscription : Ex apogra- pho tabulae fratrum Pizziganorum, anno Domini MCCCLXVII(4), 6° Celui d’Andrea Bianco, de Venise, de l436, dont quelques cartes ont été publiées par Formaleoni. 7° Une mappemonde catalane, achetée à Florence par le car- dinal Despuig, et conservée à Palma, dans la bibliothèque du comte de Montenegro, portant cette épigraphe : Gabriel de Vallsequa la feta en Malorcha lany 1438(5). 8° Un manuscrit contenant huit cartes marines dessinées vers 1472 par Grazioso Benincasa, d’Ancône, et par son fi ls. 9° Le portulan de Fréduce, autre navigateur ancônitain, qui porte la date de 1497. _______________ 1. Fonds ancien, n° 6816, in-folio maximo. 2. Recherches sur la priorité de la découverte des pays situés sur la côte occidentale de l’Afrique, au delà. du cap Bojador, avec atlas. Paris, 1841. 3. Les Monuments de la géographie, ou Choix de Mappemondes, planisphères, atlas et cartes du moyen âge, européennes et orientales. 4. Cette date n’est pas certaine. « Le soin qu’on a mis à dessiner ces cartes, dit Bossi , les roses des vents qui les accompagnent, et surtout le nom de Pizzigani, qui parait se rattacher à une époque postérieure, puisqu’on trouve des savants de ce nom qui ensei- gnaient la géographie vers le milieu du quinzième siècle, tout engage à donner à cet atlas, très- intéressant d’ailleurs, une origine plus récente. 5. On trouve ces mots écrits au verso de la carte : Questa ampia pesse di geografi a fi t pagata da Americo Vespucci CXXX ducati d’oro di marco. TABARKA ET LA CALLE. 3 10° Celui de Battista Agnesi, navigateur génois, de l’an 1524. Une carte du dépôt de la marine, de 1737, m’a fourni aussi quelques renseignements utiles. CHAPITRE I. TABARKA ET LA CALLE. L’île et le port de Tabarka. — Établissement des Génois. Mers- el-Kharez. — La pêche du corail. — Fondation du Bastion de France. — Thomas Linchès et Carlin Didier. — Traité de 1604. — Sanson Napo- lon. — Traité de 1628 et rétablissement du Bastion de France. — État des dépenses de l’établissement. I L’île et le port de Tabarka. — Établissement des Génois. Tous les anciens portulans mentionnent l’île de Tabarka et lui assignent la même position à l’entrée d’une baie ouverte, formée par l’embouchure d’une rivière. Comme établissement commercial, cette île avait au moyen âge une grande importance. Elle était à cette époque séparée du rivage par un bras de mer ; une digue, construite en 1741 par le bey de Tunis, la réunit aujourd’hui à la terre ferme. Au neuvième siècle, l’île de Tabarka était renommée par le grand nombre de navires qui s’y rendaient de l’Espagne arabe; mais en 960, s’il faut en croire Ebn-Haukâl, son port n’était plus visité par les marchands, et la ville qui lui faisait face sur le rivage n’existait même plus. Vers le milieu du douzième siècle les négociants chrétiens commencèrent à se montrer sur cette côte. Les Pisans, qui avaient obtenu des souverains de Tunis le privilège de la pêche du corail, depuis le râs-el-Menchâr (cap Serrat) jus- qu’au golfe de Bône, y parurent les premiers (1) ; ils furent bientôt suivis parles Catalans et les Génois, et, à dater de ce moment, l’île de Tabarka _______________ 1. Fanucci, Storia de tre celebri popoli dell’ Italia, t. II, p. 49. 4 COMMERCE ET NAVIGATION DE L’ALGÉRIE redevint ce qu’elle avait été dans les premiers siècles de la domi- nation musulmane, une station de commerce très importante et très fréquentée. Pendant la belle saison, un marché permanent se tenait sur les bords de l’Oued Zân (la rivière des chênes), et le trafi c qui s’y fai- sait était considérable. Le corail et les peaux, sur lesquelles il y avait un grand profi t, fi guraient en première ligne dans le commerce d’ex- portation, puis venaient les laines, les céréales, la cire et le miel. Les marchands chrétiens achetaient aussi des chevaux, qui étaient presque tous transportés en Italie et qui s’y vendaient très avantageusement. On connaît l’antique renommée des chevaux numides, dont rien n’égalait la rapidité, dit le poète Némésien, et qui semblaient, à mesure que la course échauffait leur sang, acquérir de nouvelles forces et uns plus grande vitesse. Au moyen âge, les chevaux moresques, faciles à manier et durs à la fatigue, étaient toujours recherchés pour leur douceur et pour la sûreté de leur pied. Et Bekri vante la légèreté et la vigueur de ceux que l’on élevait de son temps dans le Djebel Aourès(1). L’île de Tabarka, où se retiraient les marchands avec leurs navires, n’a guère qu’un mille de circonférence; c’est un rocher stérile, presque inaccessible du côté de la mer, et descendant en pente douce vers le midi, où il se termine en pointe et forme avec la côte deux bons mouillages. La baie occidentale est la plus sûre : une ligne de rochers qui se prolonge à l’ouest la met à l’abri de tous les temps; mais elle est seulement praticable pour les grandes barques et les sandals du pays. Il arrive aussi quelquefois que la mer, soulevée par les vents du nord, passe par-dessus les rochers et cause un ressac très violent; ce danger est surtout à craindre en hiver. Le port de l’est, accessible à toute espèce de navires, ne présente pas la même sûreté pendant la mauvaise saison, mais en été on peut y mouiller sans aucune crainte. Presque partout on trouve une profondeur convenable et un bon fond de sable. Des restes de constructions semblent attester l’existence d’un ancien môle; ils ont été en grande partie dispersés par la mer; mais quelques débris apparaissent encore à fl eur d’eau. Les navires qui allaient autrefois _______________ 1. La province de Constantine fournit encore aujourd’hui les meilleurs chevaux de l’Algérie. TABARKA ET LA CALLE. 5 charger du blé à Tabarka mouillaient ordinairement dans le port de l’est, derrière cet ancien abri. En 1543 ce point important du littoral africain devint la pro- priété exclusive d’une famille génoise. Le fameux corsaire Torr’oud (Dragut), le fi dèle lieutenant de Khaïr-ed-Din, avait été fait prisonnier sur les côtes de la Corse pendant qu’il s’amusait à répartir entre lui et ses compagnons le butin fait sur les pauvres âmes chrétiennes. La république de Gênes, à laquelle il s’était rendu redoutable, refusa longtemps toute rançon pour sa délivrance ; elle consentit enfi n à lui rendre sa liberté par l’entremise d’un marchand noble, du nom de Lomellini, qui, pour prix de son intervention, obtint de Khaïr-ed-Din la petite île de Tabarka en toute propriété. Une colonie génoise vint s’y établir et prospéra rapidement. D’Avity parle de cet établissement dans sa Description de l’Afrique : «Les Génois, dit-il, ont à Tabarque une bonne forteresse munie d’artille- rie, avec une garnison de deux cents soldats. Pour entretenir la liberté du commerce, ils paient six mille écus aux pachas de Tunis et d’Alger, qui, outre cela, tirent encore trente mille doubles de la pèche du corail autour de l’île; mais les Génois sont obligés de souffrir vis-à-vis d’eux, en terre ferme, une garde de janissaires pour éclairer leurs mouvements.» Cette garde était soudoyée aux dépens des Génois(1). En 1724 l’île de Tabarka, qui renfermait quinze cents habitants et une garnison de quatre-vingts sol- dats, appartenait encore à la même famille.

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