www.alinagurdiel.com REVUE DE PRESSE Date : 05 MARS 17 Page de l'article : p.30 Journaliste : Marie-Laure Delorme Pays : France Périodicité : Hebdomadaire OJD : 193448 Page 1/3 Lire La fantaisie, la poésie, la sensualité On est au début du XXe siée I e et Colette et ses amies (à gauche, l'actrice Mustdora) sont naturellement libres. Au centre, Colette au Théâtre des Mathurins, en 1906, dans « Le Désir, la chimère et l'amour» ; à droite au Moulin-Rouge, en 1907, dans « Rêve d'Egypte ». RUE DESARCHIVES/TALLANDIER RUE DES ARCHIVES/RDA RUE DES ARCHIVES/COLLECTION BOURGERON Colette et ses indomptables DOMINIQUE BONA munion avec les éléments, la chair ailes. La romancière et la femme sont La biographe et académicienne des mots. La biographe Dominique indissociables. Colette a un monde à retrace la vie de Colette et de Bona restitue, dans Colette et les elle et peu d'écrivains ont un monde à ses trois amies les plus proches siennes, une femme, une écrivaine, eux. Elle explore l'univers de manière et célèbre, à travers elles, une époque. Elle a découvert Colette sensible et non intellectuelle. Elle met les femmes insoumises par la série des « Claudine », à l'ado- la sensualité au service de l'écriture. » lescence, sans être envoûtée car y Dominique Bona a composé, avec La beauté de l'aube. Elle aimait les planait l'ombre du premier mari, Colette et les siennes, une histoire petits matins, les lueurs du jour. Elle Henry Gauthier-Villars. Dominique à quatre voix. Elle raconte Colette, avait obtenu, enfant, que sa mère la Bona a été saisie par la grâce inouïe et ses trois amies les plus proches, réveille à 3 heures et demie du matin de l'écrivaine plus tard avec, notam- de 1914 à 1954. pour aller se promener seule à la ment, La Naissance du jour et Les Elles choquent dans rencontre de la nature bleutée. Dans Vrilles de la vigne. « Colette a une fan- une époque bourgeoise le creux de l'aube, le meilleur semble taisie et une poésie débarrassées de à venir. Sidonie-Gabrielle Colette toute scorie. C'est une prose avec des Les hommes sont à la guerre. Les (1873-1954) : la joie de vivre, la com- femmes se serrent les coudes, atten- Tous droits réservés à l'éditeur GRASSET 9648170500503 Date : 05 MARS 17 Page de l'article : p.30 Journaliste : Marie-Laure Delorme Pays : France Périodicité : Hebdomadaire OJD : 193448 Page 2/3 tives à la moindre nouvelle du front. déteste être seule et rêve d'être do- Nous sommes durant l'été 1914. La minée par un homme. Sa vie entière, romancière et journaliste Colette elle chercha à être aimée et protégée accueille de 1914 à 1916, dans son par ses maris. Dominique Bona note chalet parisien de la rue Cortambert, ainsi un mélange de modernité et de à Passy, ses trois meilleures amies. classicisme dans leur allure. Elles ne La comédienne Marguerite Moreno veulent pas s'affranchir des hommes (1871-1948), la journaliste Annie de mais bel et bien des conventions. Pêne (1871-1918), la danseuse de « Elles suivent leur fantaisie sans se cabaret Musidora (1889-1957) dite souder du regard de la société. Colette Musi. Ce qui les lie : un fort goût ne s'est pas intéressée à la politique pour la liberté et un non-confor- et ne se revendiquait pas comme misme absolu. Elles font ce qu'elles féministe. Toute sa vie est un élan veulent; elles s'habillent comme vers une libertê nonpas conquérante elles veulent; elles font l'amour avec mais évidente. Unparfum de liberté qui elles veulent. Cheveux courts, entoure chacun de ses gestes. Colette bisexualité non dissimulée, passé est une femme sans chaînes. » sulfureux, liaisons avec des hommes plus jeunes, cigarette à la bouche, Quatre femmes à la fois absence de corset. Elles choquent semblables et dissemblables dans une époque bourgeoise. Elles On retrouve les épisodes les plus sont libres. Elles en savourent connus de lavie de Colette. Comme l'ivresse et elles en paient le prix. ses apparitions à moitié nue sur Dominique Bona montre com- les planches des music-halls ; ses bien leur liberté est naturelle et non liaisons brèves ou longues avec militante. Les quatre femmes ne la Natalie Clifford Barney et Mathilde portent pas en étendard. La liberté de Morny ; son attachement pour coule dans leurs veines de manière le manoir de Rozven, près de simple. Elles sont dans le rang et en Saint-Malo ; ses séjours à Verdun dehors du rang, selon leur bon vou- en 1914 et 1915 auprès d'Henry de loir. Elles choisissent leurs liens en Jouvenel ; son histoire d'amour étant à la fois des mères détachées avec Bertrand de Jouvenel, son et des amantes passionnées. Les beau-fils mineur, durant cinq ans. hommes sont au centre de leurs Mais le véritable sujet de Colette et existences. La si insoumise Colette les siennes demeure l'amitié entre est folle amoureuse du si indépen- quatre femmes à la fois semblables et dissemblables. Elles connaissent des destins différents. La comé- dienne Marguerite Moreno, dont «Toute la vie Marcel Schwob fut le grand amour, dè Colette est semble entourée de morts mais de- viendra populaire grâce à ses rôles un élan vers au théâtre et notamment en inter- une liberté prétant la Folle de Chaillot, de Jean Giraudoux ; la journaliste Annie de non pas Pêne, enfant naturelle, se rend dans conquérante les tranchées comme reporter de guerre avant d'être emportée par mais évidente » la grippe espagnole en 1918, à l'âge Dominique Bona de 47 ans ; l'actrice et réalisatrice Musidora goûte à la célébrité dans son rôle d'Irma Vep dans le feuil- dant baron Henry de Jouvenel. Un leton Les Vampires (1915-1916), de homme de gauche, ardent dreyfu- Louis Feuillade, devient l'une des sard, à la tête du Matin. Colette Tous droits réservés à l'éditeur GRASSET 9648170500503 Date : 05 MARS 17 Page de l'article : p.30 Journaliste : Marie-Laure Delorme Pays : France Périodicité : Hebdomadaire OJD : 193448 Page 3/3 muses des surréalistes, mais s'étiole la vie en en connaissant les plis et dans l'oubli et la misère à la fin de replis avec lucidité. Elle tombe par sa vie. Sidonie-Gabrielle Colette hasard, dans un tiroir, sur l'une des connaît, elle, la gloire littéraire. Elle dernières lettres de sa mère morte. aura été moins confortée en amour. « Que c'est curieux, on résiste victo- De retour de la guerre, le courageux rieusement aux larmes, on se tient Henry de Jouvenel n'est plus tout très bien aux minutes les plus dures. entier à elle. Colette en souffre. Et puis quelqu'un vous fait unpetit « J'assimile le mal de l'absence à signe amical derrière une vitre, on une douleur physique. » Elles sont découvre, fleurie, une fleur encore là, les unes pour les autres, face aux fermée la veille, une lettre tombe d'un coups durs. tiroir - et tout tombe. » Colette a dit : « La mort ne m'inté- Elle les dépeint de près resse pas, et surtout pas la mienne. » et de loin L'auteure du Blé en herbe vénère les Raconter mais sans fiction. L'au- animaux, la nature, l'eau, le jasmin, teure de Clara Malraux - Nous les livres. Dominique Bona souligne avons été deux (Grasset, 2009) a l'amour de la vie de ses quatre héroïnes. «Elles n'éprouvent pas de culpabilité et sont deplain-pied avec la vie. Les quatre amies sont «La mort ne ce qu'on appelle de bonnes vivantes. Elles affrontent les chagrins sans se m'intéresse laisser abattre. Elles connaissent pas, et surtout les épreuves de tout le monde, mais elles sont prêtes à recommencer la vie pas la mienne» comme personne. Elles sont prêtes, Colette chaque matin, à revivre une journée dans sa plénitude. Elles sont toujours ravies de vivre. » Elles ne s'excusent pas d'être heureuses. Dominique écrit, à l'image de ses héroïnes, une Bona nous les dépeint à la fois de biographie non conventionnelle. près et de loin. Car, effectivement, Tout est vérifié mais tout est porté les épreuves ne manquent pas. Elles par la narration. Portraits vivants, doivent travailler durement pour mise en scène, sens des destinées, subvenir à leurs besoins, elles sont refus de l'exhaustivité. L'écrivaine trompées et abandonnées par les des destins de Romain Gary et de hommes de leur vie, elles endurent Berthe Morisot refuse le mélange la souffrance physique et les deuils du vrai et du faux quand elle s'at- douloureux, elles connaissent les tache à son travail de biographe. humiliations dans leur parcours « J'ai raconté la vie de personnages professionnel, elles voient leurs si romanesques que j'ai pu constater rêves soufflés par le passage des que la réalité est parfois plus ima- années. Mais, à chaque fois, l'aube. • ginative que la fiction. » La mère dè Colette lui disait: «Regarde! » MARIE-LADRE DELORME Dominique Bona regarde les quatre amies danser, chanter, aimer, fes- toyer, travailler, cuisiner sans jamais peser de son regard d'écrivaine du XXIe siècle. Elle reste au plus près d'elles, comme elles sont au plus près de la vie. Colette enlevait les commentaires pour laisser place aux sensations. Dominique Bona nous attache à elles de la même manière. Les quatre scandaleuses offrent une leçon de vie, celle de COLETTE ET LES SIENNES, DOMINIQUE BONA l'amour et de l'allant, qui ne dit GRASS ET 430 P, 22 € jamais son nom. Colette savoure Tous droits réservés à l'éditeur GRASSET 9648170500503 Date : 09 MARS 17 Page de l'article : p.2-3 Journaliste : Françoise Dargent Périodicité : Hebdomadaire Page 1/5 'ÉVÉNEMENT itteraire onDominiquae « Colette s'est consolée auprès des femmes » Marguerite Moreno, la comédienne DOSSIER classique, Musidora, la coqueluche du cinematographie, Annie de Dans «Colette Pêne, la journaliste tout-terrain en 1914, ces trois femmes rejoi- et les siennes», gnent Colette sous son toit L'aca- démicienne Dominique Bona a l'académicienne choisi de raconter cet episode peu évoque connu de la vie de l'écrivain LE FIGARO - Pourquoi avoir décide la romancière de vous intéresser a cette période précise de la vie de la romancière7 à travers Dominique BONA - Je ne voulais pas écrire une biographie classi- le prisme que Je suis donc partie d'un episo- de qui n'a qu'une petite place dans de ses amitiés sa biographie II s'agit du moment ou elle accueille chez elle, en 1914, féminines.
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