Legenda Sanctae Catharinae Mediceae Karen Veeckman Thèse 2010-2011 00701196 Université de Gand Master taal- & letterkunde Frans-Spaans Promoteur: Nathalie Roelens 1 Remerciement En premier lieu, je voudrais remercier cordialement mon directeur de thèse, Madame N. Roelens. Elle a toujours trouvé le temps de m’accompagner pendant l’accomplissement de ce travail et de me répondre rapidement en cas de questions. Je voudrais également la remercier cordialement pour partager avec moi sa connaissance du XVIème siècle, et pour m’introduire dans la culture italienne. Ensuite, je remercie aussi mes parents, qui ont fait de leur mieux pour m’assister avec leur connaissance. Finalement, je remercie mes amis les plus proches, sur lesquels j’ai toujours pu m’appuyer. Je suis très reconnaissante des quatre années que j’ai passées à la faculté de lettres. J’ai rencontré des personnes et appris des leçons qui détermineront sans doute le cours du reste de ma vie. 2 0. Introduction1 “ Le sadisme de Catherine de Médicis se manifesta dans le grand plaisir qu'elle prit à organiser des "flagellation parties" dans les prisons où elle avait jeté ses employés et amants en disgrâce, où, accompagnée de jeunes bourgeois et nobles puissants elle s'excitait jusqu'à l'orgie après avoir fait battre les captifs, quand elle ne les battait pas elle- même. Un autre plaisir de cette belle dame était de faire former des rangs des plus valeureux jeunes combattants de ses bataillons, qu'après d'intimidantes inspections elle frappait avec une verge jusqu'à les faire pleurer de supplications. Ensuite elle adoptait une ironique attitude maternelle afin de les consoler puis de choisir l'élu du moment, qu'elle gratifiait de ses insignes faveurs. On l'accuse aussi d'avoir ordonné le massacre des huguenots durant la Nuit de la Saint Barthélémy, d'avoir ordonné, assisté et exécuté en personne les tortures et les mises à mort des protestants. De la Varenne écrit : "...ivres de vin et de sensualité, les amis de Catherine et ses bourreaux dansaient sur les corps mutilés encore vivants, en s'acharnant sur les parties dont la nudité était apparente, et attachaient à leurs seins des lambeaux de chair, pénis et testicules coupés sur les victimes". ” 2 Telle est la manière dont est évoquée Catherine de Médicis, dans une série de descriptions de femmes dominatrices dans l’histoire telles que Agnès Sorel et Mata Hari, tirée d’un site web populaire3. Une brève recherche sur la Toile suffit pour obtenir ce résultat. La mauvaise réputation de cette femme prend des dimensions incroyables. Selon le site web mentionné et d’autres sources, elle serait une meurtrière et une sorcière, cruelle, extrêmement superstitieuse, elle aurait mené une vie dissolue et elle aurait consciemment ordonné (et même participé à) le massacre de milliers de 1 Illustration de couverture : François Clouet, Portrait de Catherine de Médicis, ca.1536-1572, http://de.wikipedia.org/w/index.php?title=Datei:Catherine-de-medici.jpg&filetimestamp=20061204212115, consulté le 21/05/2011 2 http://www.apothicaire.fr/femmes-dominatrices.html, consulté le 12/05/2011 3 Nous optons délibérément pour un site populaire, comme nous nous intéressons à la réputation généralement répandue de Catherine de Médicis, non seulement à ce que pensent les spécialistes. Le site ne fait mention d’aucune source. Nous ne retrouvons aucun passage dans lequel un nommé « de la Varenne » aurait prononcé la citation. 3 protestants à Paris pendant la Nuit de la Saint-Barthélemy en 1572. Elle reçoit des surnoms comme « la reine noire », « la veuve noire » ou « madame Serpente », surnom qu’aurait lancé le roi d’Espagne Philippe II. Aucun mot sur la nature de son gouvernement. Le XVIème siècle est dominé par quelques femmes fortes : Elisabeth I, la Maiden Queen de l’Angleterre ; Mary Tudor dit Bloody Mary ; Mary Stuart, Queen of Scots et Juana la Loca... Le nom de Catherine de Médicis s’intègre parfaitement dans cette liste. Comme nous allons voir, cette descendante de la célèbre famille des Médicis, reine de la France et reine-mère pendant le règne de trois de ses fils est une femme fascinante, qui mérite une étude plus détaillée. Elle est élevée en Italie, où elle est dès sa naissance victime de rudes épreuves. Elle est unie par les liens du mariage avec Henri, fils de François I, roi de France. Elle apporte la grâce et le goût italien. Mais elle ne se sent pas à l’aise à la cour parisienne : les Français n’acceptent pas d’un jour à l’autre une nouvelle princesse qui vient de l’étranger, la fille d’un simple commerçant. Ses apparences ne l’aident pas non plus à gagner les faveurs du public. En outre, à la cour, elle est négligée par Henri II et la figure de Diane de Poitiers, la maîtresse omnipotente de son mari, lui fait de l’ombre. La légende qui s’est construite autour de sa personne (à cause de son origine italienne, mais surtout après la catastrophe de la Nuit de la Saint-Barthélemy) est un développement curieux de l’histoire. Dans ce qui suit, notre but principal est de découvrir comment la légende s’est formée. Afin de mieux comprendre les mobiles de cette « reine noire », nous devrons commencer notre recherche avec une biographie plus détaillée. Quelles sont les expériences qui ont contribué à la formation de son esprit ? Quels sont les événements qui ont formé son caractère exceptionnel ? Nous comparerons les différentes biographies qui ont été dédiées à sa personne à travers les siècles. Dans un deuxième temps, nous investiguerons l’apparition et l’évolution de la légende, en particulier à l’aide d’un des pamphlets qui ont été écrits après la Saint-Barthélemy pour jeter le discrédit sur la reine-mère, son entourage et son fils. Nous tenterons de déterminer dans quelle mesure les accusations relèvent de la réalité ou de la fantaisie des pamphlétaires. Pour finir, nous jetterons un œil sur la réception de la figure historique dans la littérature postérieure. Comment la reine est-elle représentée dans un roman comme La Reine Margot d’Alexandre Dumas ? La représentation est-elle maintenue de la même manière dans l’adaptation cinématographique de Patrice Chéreau 150 ans plus tard ? Y-a-t-il une évolution dans la description qu’utilisent les historiens ? Finalement, nous essayerons de donner un portrait nuancé de cette femme intrigante. 4 0.1 Lectures Dans le premier chapitre de ce travail nous faisons une tentative d’un résumé de la vie de Catherine de Médicis. Les informations de différentes sources et biographies sont juxtaposées. Les données principaux sur sa vie proviennent des biographies écrites par Robert Jean Knecht (Catherine de Médicis. Pouvoir royal – amour maternel), Mark Strage (Vrouwen met macht), Leonie Frieda (Catherina de Medici) et Jean Orieux (Catherine de Médicis). Ces données ont été complétées par des citations de commentateurs ou historiens non-contemporaines, et par des fragments des lettres de Catherine de Médicis, qui ont été rassemblées et gardées en dix tomes volumineux au XIXème siècle grâce à H. de la Ferrière. Nous avons également tiré des informations de l’introduction par le comte accompagnant les lettres. Le deuxième chapitre se concentre sur la légende de la reine noire, telle qu’elle est représentée dans la propagande du XVIème. La source principale est un pamphlet écrit pendant le règne de Catherine : Discours merveilleux de la vie, actions et deportements de Catherine de Médicis, Royne-mère (Declarant les moyens qu’elle a tenus pour usurper le gouvernement du royaume de France, et ruiner l’estat d’iceluy) (auteur inconnu). Finalement, nous regardons de plus près la représentation de Catherine de Médicis dans La Reine Margot, un roman apparu en épisodes dans les journaux du XIXème, écrit par l’auteur populaire Alexandre Dumas, et dans le film du même nom de Patrice Chéreau. 5 1. Catherine de Médicis, la figure historique 1.1 La jeunesse en Italie (1519-1534) Catherine de Médicis, née Catharina Maria Romola, est la dernière descendante de la branche la plus vieille de la prestigieuse famille florentine des Médicis (A cette époque, les Médicis étaient en disgrâce, même en exil, après les méfaits de son grand-père Piero, voir annexe1 : arbre généaligique de la famille des Médicis). Sa mère, Madeleine de la Tour d’Auvergne, une noble française, décède immédiatement après sa naissance en 1519. La petite fille aussi est confrontée à la maladie, sa vie ne tient qu’à un fil. Plus tard, il s’avéra que, malgré quelques ennuis de santé, elle est dotée d’une très bonne santé – contrairement à la plupart de ses enfants. Son père est Lorenzo II de Médicis, duc d’Urbino. C’est à lui que Nicolas Machiavel dédie Il Principe, le fameux traité dans lequel il explique sa vision sur le concept de la gouvernance. Les ennemis de Catherine appelleront le livre « sa bible ». Après le décès précoce de Lorenzo, Catherine reste sans parents. Elle est mise sous la protection de son grand-oncle, le pape Leo X. Les Florentins utilisent le petit nom de « la duchessina » pour leur préférée. En 1527, pendant le pillage de Rome, Leo X s’enfuit et la ville de Florence prépare une révolte. Les Florentins ne sont plus favorables à l’égard de la petite Catherine4 – elle a alors huit ans. Elle est prise en otage. Dans un premier instant, les citoyens veulent l’emprisonner dans le couvent de Santa Caterina de Siena, un centre d’acceuil de malades qui n’est pas très attaché à la famille des Médicis, mais finalement on opte pour Santa Maria Annunziata delle Murate. Dans ce couvent, Catherine passera plusieurs années.
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