Jeudi 13 janvier 2011 17h30 Jeudi 11 avril 2013 17h30 Images sonores de la « religion du roi » : la messe royale à la fin du règne de Louis XIV François Couperin (1668-1733) Premier couplet du Gloria Pierre Robert (ca1620-1699) Dominus illuminatio mea Guillaume Minoret (av. 1650-1720) Sancti spiritus Michel-Richard de Lalande (1657-1726) Domine salvum fac regem Louis Marchand (1669-1732) Grand Dialogue Les Pages & les Chantres du Centre de musique baroque de Versailles Etudiants du CNSMD de Lyon Direction : Olivier Schneebeli Grand-Orgue : Thomas Pellerin, étudiant-organiste du CNSMD de Lyon Le Centre de musique baroque de Versailles propose ce soir, en collaboration avec le Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Lyon, de découvrir in situ comment pouvait se dérouler la messe ordinaire à laquelle Louis XIV assistait chaque matin, durant une bonne demi-heure, dans la chapelle du château de Versailles. Ce concert est l’aboutissement de recherches historiques sur le déroulement du cérémonial, les effectifs musicaux et les contextes pratiques d’exécution, notamment la disposition en tribune. Sans prétendre à une reconstitution liturgique de la « messe du roi » à la fin du règne de Louis XIV, cette expérimentation publique originale et nourrie par une préparation scientifique rigoureuse devrait permettre de mieux comprendre comment la musique des sous-maîtres de la Chapelle royale s’intégrait dans un processus global d’expression et de représentation de la foi du prince. Ce concert s’inscrit dans le cadre des recherches sur les musiques religieuses de la cour de France aux XVII e et XVIII e siècles menées depuis plusieurs années au sein du Pôle Recherche du CMBV et prend place dans le Colloque international « Musique de la foi, musique du pouvoir » qui se tient actuellement à l’Hôtel des Menus- Plaisirs (11-13 avril). Thomas Leconte, CMBV - 2013 Ce projet s’effectue dans le cadre du programme de recherche Muséfrem soutenu par l’Agence nationale de la recherche (ANR-08-CREA-016), en partenariat avec le Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Lyon. Programme ENTRÉE François Couperin (1668-1733) Premier couplet du Gloria (plein jeu) (extrait de la Messe propre pour les couvents de religieux et religieuses ) GRAND MOTET « depuis le commencement de la Messe, jusqu’à l’élévation » Pierre Robert ( ca 1620-1699) psaume 26, Dominus illuminatio mea PETIT MOTET « pour l’élévation », pour « tenir jusqu’à la post-communion » Guillaume Minoret (av. 1650-1720) Sancti spiritus POST -COMMUNION « que commence le Domine » Michel-Richard de Lalande (1657-1726) Domine salvum fac regem SORTIE Louis Marchand (1669-1732) Grand Dialogue (grands jeux) Images sonores de la « religion du roi » : la messe royale à la fin du règne de Louis XIV Malgré une dynamique qui s’est maintenue durant ces trente dernières années, et malgré quelques expérimentations ponctuelles qui ont laissé entrevoir des pistes prometteuses, l’étude historique, et surtout la mise en pratique des conditions d’exécution des musiques religieuses de la cour de e e France aux XVII et XVIII siècles constituent un champ d’étude encore peu exploré. Largement conditionnée par des partis-pris qui relèvent à la fois de e pratiques héritées du XIX siècle et d’impératifs économiques modernes, la perception que l’on a aujourd’hui de ces musiques religieuses de cour doit être réévaluée, à l’aune des avancées scientifiques et artistiques des dernières années. Il peut paraître aujourd’hui difficile, voire insolite, de vouloir en quelque sorte « revivifier » des pratiques étroitement liées à un cérémonial aujourd’hui révolu. Pourtant, une mise en pratique historiquement informée des conditions d’exécution des musiques religieuses de la cour de France, véritables vecteurs auditifs et visuels de la puissance spirituelle et temporelle du prince, est un paramètre essentiel pour mieux comprendre à la fois le rapport que les sujets, à travers un véritable « cérémonial » de cour, pouvaient entretenir avec leur souverain, et plus généralement la sensibilité religieuse du temps. Pour cette expérimentation, l’accent a été porté sur les questions liées au déroulement musical « à l’ordinaire » de la messe quotidienne du roi ; le répertoire musical disponible durant les dernières années du règne de Louis XIV ; les effectifs vocaux et instrumentaux dirigés par le sous-maître de quartier, leur typologie, leurs spécificités, leur placement et leur disposition, autour de l’orgue, dans les gradins de la tribune qui leur était réservée au-dessus de l’autel, face au roi. Ces différents paramètres influent à l’évidence sur les équilibres sonores, les modes de jeu, l’écoute mutuelle des musiciens mais aussi la perception de l’assistance, installée alors, selon le rang, dans la tribune royale, les galeries latérales ou au rez-de-chaussée, dans la nef et les bas-côtés. Un séminaire de recherche, qui a réuni de novembre 2012 à février 2013, à Versailles et à Lyon, chercheurs et musiciens, a permis de débattre de ces questions de façon exhaustive, à travers une étude minutieuse des sources historiques, imprimées ou manuscrites, sources d’archives, mémoires et relations contemporaines, sources figurées (tableaux, gravures, plans d’architecture ou d’aménagements intérieurs) et bien évidemment musicales, que ce concert permettra d’évaluer de manière pragmatique tout en suscitant, nous l’espérons, des réactions enrichissantes. Signalons que la documentation, multiple, réunie et étudiée dans le cadre de ce projet, sera à terme présentée, contextualisée et mise à disposition sur le portail de recherche du site du Centre de musique baroque de Versailles (http://www.cmbv.com). Des archives sonores et vidéographiques de cette expérimentation sont également réalisées à des fins scientifiques. La messe royale à la fin du règne de Louis XIV Achevée en 1710, « dernier grand chantier » (Alexandre Maral) de Louis XIV, qui en mûrit lui-même le dessein et en suivit activement les travaux, la chapelle définitive du château de Versailles constitue l’écrin ultime de l’expression de la foi du prince. Nécessairement publique, celle-ci s’exprimait en premier lieu dans les dévotions quotidiennes. À partir du règne de Louis XIII, la messe du roi consistait en une messe basse, célébrée à l’autel par un prêtre de la Chapelle-Oratoire. Depuis une date imprécise, mais peut-être sous le même règne, celle-ci était « accompagnée » de motets, chantés simultanément à l’action liturgique proprement dite. La description la plus célèbre du déroulement de la messe du roi figure dans la préface des Cantica pro Capella Regis (1665), recueil de cantiques du poète néo-latin Pierre Perrin destinés à être mis en musique par les sous-maîtres de la Chapelle du roi : Pour la longueur des cantiques, comme ils sont composés pour la messe du Roy, où l’on en chante d’ordinaire trois, un grand, un petit pour l’élévation et un Domine, salvum fac Regem , j’ay fait les grands de telle longueur qu’ils peuvent tenir un quart d’heure, étant bien composés et sans trop de répétitions, et occuper le commencement de la messe jusqu’à l’élévation. Ceux d’élévation sont plus petits et peuvent tenir jusqu’à la postcommunion, que commence le Domine . Cette description était-elle encore valable à la fin du règne ? Plusieurs sources et indices musicaux, tels l’allongement des grands motets et la raréfaction des petits motets d’élévation dans le répertoire conservé des sous-maîtres de la période 1683-1715, incitent à penser que la formule avait subi quelque évolution dès l’installation de la cour à Versailles (1682), et il est possible que l’on se contentait souvent d’un seul motet et du Domine salvum fac regem . Face à ces incertitudes, nous avons préféré conserver le cadre décrit en 1665, sans doute toujours pratiqué, du moins périodiquement. Rien n’indique si des pièces d’orgue s’intégraient à l’ensemble. À l’inverse, rien n’interdit de penser que l’orgue soulignait l’arrivée et le départ du roi, encadrant ainsi la messe proprement dite. On sait le soin que Louis XIV accordait au recrutement de ses organistes, choisis parmi les meilleurs du royaume. Le programme de ce soir donne ainsi à entendre, en guise de procession d’entrée et de sortie, deux pièces de deux des quatre organistes en poste à la Chapelle royale lors de la mise en service de la chapelle définitive : François Couperin, organiste de la Chapelle depuis 1693, et Louis Marchand, qui le fut de 1708 à 1713. Le répertoire de la Musique de la Chapelle entre 1710 et 1715 Le « programme » musical de ce concert s’appuie bien évidemment sur le répertoire qui a pu résonner dans la chapelle de Versailles, de sa mise en service (1710) jusqu’à la mort de Louis XIV (1715). Des quatre sous-maîtres – Nicolas Goupillet, Pascal Collasse, Guillaume Minoret et Michel-Richard de Lalande – qui avaient été recrutés à l’issue du fameux concours organisé au printemps 1683 pour remplacer Henry Du Mont et Pierre Robert (sous- maîtres depuis 1663), seuls les deux derniers restaient encore en place en 1710. Suite au renvoi de Goupillet (1693) et à la démission de Collasse (1704), Minoret – à son tour démissionnaire en 1714 –, et Lalande servaient ainsi six mois de l’année, dans une alternance trimestrielle (quartier). Le programme, qui donnera à entendre une élévation du premier, Sancti spiritus , et un Domine salvum fac regem du second, témoigne ainsi de cette activité. Quant au motet principal du programme, on pourra s’étonner du choix de Pierre Robert, ancien sous-maître, démissionnaire en 1683 et mort en 1699. Ce choix se trouve justifié par l’examen des « livres du roi », recueils imprimés qui, pour chaque quartier, comportent les textes des motets disponibles pour la messe du roi.
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