
FORÊT ET COMMUNICATION Groupe d’Histoire des Forêts Françaises Le présent ouvrage est le fruit du programme de recherche, initié en 2009 par le Groupe d’Histoire des forêts françaises et l’Université catholique de Louvain (UCL) : Textes réunis et présentés par « Arbre, forêt et bois, politiques et communications XVIe-XXIe siècles ». Sous la direction Charles DEREIX, Christine FARCY d’Andrée CORVOL-DESSERT (CNRS, ENS Ulm Paris, France) et de Christine FARCY (Université Catholique de Louvain, Belgique), le programme d’étude a fédéré des et François LORMANT chercheurs français et belges issus de dif érents horizons disciplinaires : Histoire, Économie, Sociologie, Ethnologie, (Bio-)géographie, Droit, Sciences politiques et Sciences de la Communication. Ce programme est parti du constat qu’au cours de l’histoire, les représentations sociales de l’arbre et de la forêt ont été forgées par l’utilisation de leur image à des f ns diverses, religieuses, politiques voire commerciales. Aujourd’hui, arbres et forêts bénéf cient d’une image globalement positive. Cette image peut cependant FORÊT s’avérer Le présenttrès éloignée ouvrage de est la lesituation fruit du économiqueprogramme de et recherche, sociale vécue initié enpar 2009 les acteurspar le directementGroupe d’Histoire concernés des parforêts le devenirfrançaises des et espaces l’Université forestiers catholique que sont de lesLouvain propriétaires, (UCL) : les« Arbre,gestionnaires forêt et etbois, autres politiques partenaires et communications de la f lière-bois. XVIe- XXIeParfois siècle considérés ». Sous la comme direction les détenteursd’Andrée CORVOL symboliques-DESSERT d’un (CNRS, bien ENS qui Ulm appartiendrait Paris, France) à ettous, de Christineles propriétaires FARCY (Université forestiers voientCatholique leur légitimitéde Louvain, s’éroder. Belgique), Ils le observent programme avec d’étude crainte a fédéré le fossé des sechercheurs creuser françaisentre le ET COMMUNICATION publicet belges et eux. issus Ils deconstatent différents que horizons leurs actesdisciplinaires de renouvellement : Histoire, Économie, et d’exploitation Sociologie, de leurEthnologie, forêt font (Bio de-)géographie, plus en plus Droit, souvent Sciences l’objet politiques de contestations. et Sciences de la Communication. HÉRITAGES, REPRÉSENTATIONS ET DÉFIS L’objectif Ce programme du programme est parti était du doncconstat de qu’au comprendre cours de la genèsel’histoire, de les ces représentations contradictions etsociales paradoxes de l’arbre et ensuite et de de la proposerforêt ont lesété lignes forgées de par force l’utilisation d’une communication de leur image à forestière des fins FORÊT ET COMMUNICATION nouvelle,diverses, susceptiblereligieuses, depolitiques contribuer voire à une commerciales meilleure compréhension. Aujourd’hui, entrearbres les et forestiers forêts etbénéficient le public, voired’une àimage une réconciliation globalement positive autour. d’enjeuxCette image de sociétépeut cependant partagés. s’avérer très éloignée de la situation économique et sociale vécue par les acteurs directement concernés par le devenir des espaces forestiers que sont les propriétaires, les gestionnaires et autres partenaires de la filière-bois. Parfois considérés comme les détenteurs symboliques d'un bien qui appartiendrait à tous, les propriétaires forestiers voient leur légitimité s’éroder. Ils observent avec crainte le fossé se creuser entre le public et eux. Ils constatent que leurs actes de renouvellement et d'exploitation de leur forêt font de plus en plus souvent l'objet de contestations. FARCY L’objectif du programme était donc de comprendre la genèse de ces contradictions et paradoxes et ensuite de proposer les lignes de force d’une communication forestière Lenouvelle, Groupe susceptible d’Histoire de des contribuer Forêts Françaisesà une meilleure est compréhensionune association entre interdisciplinaire les forestiers et de scientifile public, ques voire qui àanalysent une réconciliation le patrimoine autour sylvicole d’enjeux et de communiquent société partagés au. public le résultat de leurs travaux. et François LORMANT Textes réunis et présentés par Charles DEREIX, Christine Charles DEREIX, Photographie de couverture : Fotolia. ISBN xxx xxx xxx xxxx Prix : 32,50 € ISBN : 978-2-343-09043-6 32,50 € Sub tegmine fagi Walloniae 1… Quelques « Belles images » de la forêt wallonne dans la bande dessinée Luc COURTOIS2 Le géographe vous le dira : l’arbre est partout ! Dans les rues de Paris comme dans le parc de Versailles, dans la plantation de bonzaïs de votre étagère, comme dans la haie vive de mon jardin. En ce sens, l’arbre est aussi omniprésent dans la bande dessinée, sans qu’il soit réellement possible d’en dresser une nomenclature pertinente en termes de représentation. La forêt, c’est autre chose. Un ensemble forestier n’est pas l’autre : le relief, l’hydrographie, les essences, l’habitat, etc., contribuent sans conteste à singulariser les espaces et à nous en donner des représentations caractéristiques, que la bande dessinée peut mobiliser : c’est cette connivence spontanée entre lecteur et dessinateur qui fait que nous reconnaissons au premier coup d’œil la forêt amazonienne de Palombie chez Franquin3 ou les paysages campagnards du Brabant wallon chez Hergé4. Et 1 Réminiscences sylvestres de latiniste, quand la forêt rime avec la « dolce vita » de la propagande impériale : Tityre, tu patulae recubans sub tegmine fagi siluestrem tenui Musam meditaris auena ; nos patriae finis et dulcia linquimus arua (VIRGILE, Bucolique I,1) : « Tytire, tandis que toi, allongé dans l'ombre d'un grand hêtre, tu répètes un air champêtre sur tes légers pipeaux, nous, nous abandonnons le pays de nos pères et ses douces campagnes »… 2 Professeur d’Histoire, Faculté de philosophie, arts et lettres, Institut d'analyse du changement dans l'histoire et les sociétés contemporaines (IACCHOS), Université catholique de Louvain, Belgique. 3 Il s’agit évidemment de la forêt amazonienne. Voir, par exemple A. FRANQUIN, Le Nid des marsupilamis (Spirou et Fantasio, t. 12), Dupuis, 1960, passim. Pour suivre la production « de Töpffer à nos jours », il existe un répertoire bisannuel des albums publiés en langue française, véritable « bible » du bédéphile : M. BÉRA, M. DENNI et P. MELLOT, Trésors de la bande dessinée. BDM. Catalogue encyclopédique et Argus. 2015-2016, 20e éd., Paris, 2014. On s’y référera pour l’identification de tous les albums cités ici. 4 Voir ici D. MARICQ, Hergé côté jardin. Un dessinateur à la campagne, s. l. [Bruxelles], s. d. [2011], consacré au Brabant wallon inspirateur d’Hergé. Ainsi, par exemple, l’auteur cite, p. 152-153, la première vignette de paysage dans Tintin et les Picaros (Les aventures de Tintin, t. 23), Casterman, 1975, qui effectivement, pour qui connaît les lieux situés à moins de dix kilomètres de Louvain-la-Neuve, présente une vue du village de Céroux au sortir du hameau de Ferrière, où Hergé habitait… 133 Luc COURTOIS ici, le choix de tel ou tel massif arboré n’est jamais anodin ! C’est donc aux figurations – réelles et imaginaires, nous allons le voir – de LA forêt wallonne que cet article est consacré5. La forêt, d’accord, mais pourquoi la forêt wallonne ? Simplement parce que le hasard des sollicitations de recherche nous a amenés à nous intéresser aux ancrages régionaux (paysager, notamment) de la bande dessinée francophone belge dès les années 19906, et parce qu’il faut une grande familiarité avec les paysages réels d’une région pour en repérer les transpositions iconographiques : si nous reconnaissons au premier coup d’œil le paysage des Hautes Fagnes chez Comès, nous sommes beaucoup moins assurés quand il s’agit de terroirs français, par exemple, moins familiers ! D’autant que les paysages sont aussi « mentaux » et que leur traitement diffère sensiblement chez le géographe ou chez le dessinateur de bande dessinée. Si tous deux ramènent la richesse de ce que l’œil perçoit aux deux dimensions d’une carte ou d’une vignette, les règles de la réduction ne coïncident pas forcément : d’un côté les principes rigoureux d’une représentation « objective », de l’autre les préoccupations narratives ou sémiologiques qui peuvent amener l’artiste à « suggérer » un référent par un détail « codé » connu de ses lecteurs. Comme nous, les créateurs de bandes dessinées traversent la vie avec les souliers de leur enfance : sans qu’ils s’en aperçoivent, se constituent dans leur esprit (et le nôtre), par superposition de strates affectives sédimentaires, tantôt réelles (les vacances en Ardenne), tantôt imaginaires (les frissons du Petit Poucet égaré dans sa noire futaie), des « images mentales » qui conditionnent en retour notre regard. Au-delà de ce qui est perçu, c’est donc toute la densité imaginaire d’un paysage « reconstitué » que le dessinateur exprime. Il ne faut donc pas chercher nécessairement dans le traitement des paysages un réalisme géographique auquel aucun auteur ne prétend. Mais, à travers le foisonnement d’images produites cependant, que de références, manifestes ou implicites, massives ou subreptices, à l’espace wallon et, en l’occurrence, à ses forêts ! 5 Sur l’histoire de la bande dessinée franco-belge, voir les « classiques » : Introduction à la bande dessinée belge (Catalogue de l’exposition organisée à la Bibliothèque royale Albert Ier, t. 30), sous la dir. de K. BAAN, Bruxelles, 1968 ; C. MOLITERNI, Histoire de la bande dessinée d'expression française, Ivry, 1972 ; D. LAET et Y. VARENDE, Au-delà du septième art. Histoire de la bande dessinée belge (Textes et documents. Chroniques belges, t. CCCXXII), Bruxelles, 1979 ; H. FILIPPINI, J. GLÉNAT, T. MARTENS, et N. SADOUL, Histoire de la bande dessinée en France et en Belgique des origines à nos jours, nouv. éd., Grenoble, 1984. 6 L'imaginaire wallon dans la bande dessinée (Publications de la Fondation wallonne P.- M. et J.-F. Humblet. Série Études et documents, t. 1), Études réunies et éditées par L. COUTOIS, Louvain-la-Neuve, 1991. 134 Quelques « Belles images » de la forêt wallonne dans la bande dessinée Ill. 1. La bataille de la forêt de Teutberg : « Quintili Vare, legiones redde ! »7. J. MARTIN, Les Légions perdues (Les Aventures d'Alix, t. VI), © Casterman, 1965, p. 42, vignette 5.
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