ANALYSE ET ETUDE LITTERAIRES DE HITON DE BORDEAUX A Thesis Presented to the French Department of Mc Gill U:hive:rsi ty In Partial Fulfilment of the Requirements of the Degree of H.a.ster of Arts by J ean-M8.rcel Paquette August 1964 lNTRODUCTIOff •••••••••••••~•••••••••••••••••••••••••••••••••~~ P~ 1 PREMIERE PARTIE: MATIERE CHAPITRE PREMIER: De l'histoire A la légende •••••••••••••••••• CF..APITRE DEUXIEMEt Autour de Charlemagne ...... ~~~ .......... ~~. p~ tb DEUXIEME PART!Et CON JOINTURE CHAPITRE TROISIENE: Les éléments romanesques ••••••••••••• ••... P• a.~ CHAPITRE QUATR~Œ: Les éléments féeriques ••••••••••••••••••~• p~~ TROISmŒ PARTIE: SENEFIANCE" CHAPITRE Cn:IQ~Œ: L'aventure et ses symlx>les •••••••••••• ••.. P• 5 s- CHAPITRE SIXIEME: Colœlusion: La conta:mihation des genres • • • • • p~ ~ 1- NOTES" ••••••••••••••••••••••••• ·-· •••••••••••••••• ·-······........ p. q 1- BIBLIOGRAPHIE •·• •. • • .... •• • • • • • • • • • • • • • • • •• • • • •. •. • •. •. • • • •• • • • • P•' \ 0 ' INTRODUCTION n semblera- d 1abord paradoxal que les trois mots de MATIERE, de CONJOTh"TURE et de SIDTEFIANCE, appartenant au vocabulaire du roman cour­ tois, servent, chacun, de titre aux trois parties de cette étude eon­ sacrée à une chanson de geste du cycle carolingien~ Cela est d'O., en partie, A ce que, Huon de Bordeaux constituant une oeuvre complexe, l'objet de la présente th~se sera d'établir jus-­ qu•·~. quel point l'oeuvre, d'apparence épique, a subi la contaminatfon du genre romanesque. Les médiévistes désignent par le mot de MATIERE, 11 ensemble des sources, historiques ou littéraires, dont ont pu s'inspirer les po~tes et les romanciers du Moyen Age. Ainsi parle-t-on de "mati~re bretonne" pour les romans arthuriens, et de "mati~re antiquen pour les romans, tel que le Roman d'Alexandre, inspirés des oeuvres et des th~es de r•·antiqufté. Dans une premi~e part.tê, sous le mot de Mati~re, nous verrons de quelles sources historiques l'auteur de Huon de Bordeaux a pu tirer les personnages et l'action de son oeuvre; ce sera l'objet d'un premier chapitre. Dans un second chapitre, nous nous occuperons l considérer I 1'état de la situa ti on littéraire au XII~ si~cle: 1' entrée en sc&e des th~mes arthur:f:ens et alexandrins, ainsi que 11'état de la chanson de geste qui, depuis le XI~ si~cle, a vu sensiblement modifié le sens de l'action et des personnages épiques. Le romancier du XII~ si~cle, Chrétien de Troyes, faute du mot "esthétique" qui n'existait pas encore, utilisait le mot CONJOINTURE pour désigner 1 1'art d'animer le monde de th~mes et de personnages nés d'abord de l'histoire, puis redonnés dans une oeuvre par une conscien­ ce littéraire. tt·expression stylistique et l'organisation des struc­ tures d1'une oeuvre ont bien-tet été considérées comme faisant partie de cet art, qui est aussi une science: la CONJOlliTURE. Au chapitre troisi~me, nous verrons comment l l'int~rieur de Huon de Bordeaux, éléments épiques et éléments romanesques se sont manifestés. Un chapitre subséquent sera zonsacré à l'élément qui cons­ titue la plus grande part d'original:ité dans l'oeuvre: la Nêrie. La troisième partie a pour titre SEN~TCE, autre mot de Chré­ tien de Troyes, désignant le sens caché que l'auteur a voulu donner à son oeuvre Atravers l'Aventure d 1'un héros. $ymboles et all8gories servent A traduire ce sens. Dans le cinqui~me chapitre nous nous at­ tacherons h révéler ce sens, pour finalement tirer, au chapitre si:x:i~ me, les conclusions générales qui s'impo-sent sur 1 •·ensemble des élé- mente (source,·. esthétique et sens) que nous aurons étudiés. Nous avons utilisé, pour les fins de cette étude, la récente édition du texte primitif de Huon de Bordeaux. que vient de dormer Pierre Ruelle, aux Presses Universitaires de France, en 1960. Depuis le Moyen Age, le texte original n'avait été' édité qu'une seule fois, soit en 1S60, par François Guessard et Charles Grandmai~ son. Cette édition, comme celle de Ruelle, s'appuyait sur les trois manuscrits de Tours, de Paris et de Turin. Le manuscrit de Tours:, le plus ancien des trois, et conservant vraisemblablement 11.oeuvre ori­ ginale, ne révèle aucun nom d 1 auteur. Le poème anonyme aurait été écrit entre 1170 et 1226. Premi~re partie: MATIERE 6 CHAPITRE PREMIER: DE L'HISTOIRE A LA LEGENDE "Il est un temps pour établir les sources de 1' oeuvre; un temps pour, en 1 1 oeuvre m3me, se désalt~rer." (1) Ces muts de Gaétan Picon faisaient sans doute allusion aux études médiévales que trois gén&­ rations d'érudits, penchés laborieusement sur les textes anciens et leurs ~st~res, avaient petit A petit ~enées à une stagnation quasi totale. Cependant, on ne contestera pas la nécessité, voire la valeur des travaux d'histoire littéraire effectués vers la fin du XIX~ si&­ cle et du début du xx~. On ne contestera pas non plus que 11 av~nement d 1une quatri~me génération de médiévistes aura été le salut de la littérature du moyen âge. Avec Reto Bezzola, notamment, cette génération a rendu au domaine de la littérature ce qu1 il Y' avait de littéraire dans les oeu­ vres du moy-en Age. D'historique, la_ critique universitaire devenait ce qu 1 elle devait ~tre: une critique esthétique. C1 est avec son ~tude, sur le Sero~ d~ 1 1 Aventure et de 1 1 Amour dans les Romans de Chrétien de Troyes, que Bez zola ouvrait une ~e nouvelle des études médiévales. Les sour­ ces de l'oeuvre qui avaient été jusque lA la principale préoccupation des médiévistes ne devenaient objets d'étude que si elles apportaient quelques indications sur la valeur littéraire de 1' oeu:vTe~ Ainsi le procédé qui consiste, pour l'auteur du moyen !ge, A faire passer des peraonnages du plan de 1 1historicité au pla.'rl de la. légende n'est-il' plus considéré comme objet d'étude purement historique, mais: bien comme un des principes fondamentaux de l'esthétique littéraire, particuli~rement en ce qui concerne l'éla.~ration des po~mes épique~~ Aussi remarque-t-on que, dans Huon de Bordea.tpc, les sources historiques transformées en valeurs littéraires, constituent une part important de l'économie littéraire de l'oeuvre. Ces sources historiques de Huon de Bordeaux ont été longuement étudiées par G. Paris et A. Longnon; nous retenons pour les ·chapitres subséquents 1'1étude des sources purement littéraires établies par les travaux de Voretzsch, de Scheludko et de Krappe, et que nous signa­ lerons au passage A mesure que ces sources s' av~reront utiles à 1 t a."'la­ lyse de 1 1 oeuvre. Bornons-nous ici aux sources historiques et au pro­ cédé qui les fait passer de l'histoire A la légende littéraire~ "La. légende a le désir pour p~re, pour m~re la circonstance" (2), écrit GUnter dans son étude sur l'origine ps.ychologique des légendes. Etymologiquement le mot légende vient de legenda,"choses devant 3tre lues".La légende prit naissance dans le réfectoire des monast~res o~ le moine devant faire lecture de la vie des saints pendant le repas, · était convié ~ en rédiger lui-m3me le texte d'apr~s les faits histori­ ques contenus dans les Acta Sanctorum. Le clerc avait 11 enti~re liber­ té de traiter le suj~t comme il l'entendait, et l'on ne tarda pas à se livrer aux jeux de l'imagination. Puis ces légendes entr~rent dans la vie profane, probablement par les pélerins, h8tes des monast~es qui entendaient au réfectoire ces récits merveilleux. LA encore, on peut facile:nent se 11 imaginer, la légende devait subir quelques modi­ fications au point qu 1 entre les données historiques des Acta et 1' "his­ toire vraie" que 11 on pouvait se faire raconter à l'auberge, il n'y avait plus A s~~ reconna!tre: le saint qui avait été dévoré par les lions finissait par manger lui-m3me les lions, et la sainte brdlée sur un btlcher avait tat fait de devenir un cierge d'autel. Ce qui était coutume monastique n1a pas tardé A devenir coutume littéraire, le mo­ nast~e et le salon Iittéraire co!ncidant tr~s souvent au moyen B.ge~ Le po~te de notre légende raconte comment Huon iua le fils de Charlemagne, Charlot, apr~s que celui-ci l'eut attiré dans un guet­ apens. C'est lA le premier ressort de l'oeuvre qui lancera dans une s-3rie d'aventures le con:tte Huon et son entourage. Les critiques des sources historiques ne voient aucun rapport entre le Charlot de 1' oeu- vre et Charles le Jeune, fils atné de Charlemagne, qui mourut de ma­ ladie, ~gé de pr~s de quarante ans~ Aucun détail de la vie du person­ nage historique ne concorde avec notre Charlot, léger et insoumis, qui mourra de mort tragique des mains d'Ruan. Cependant les Annales Bertiani nous parlent d'un certain Charles, roi d'Aquitaine, fils de Charles le Chauve et de la reine Errnentude qui aurait vécu de S47 ~ S66. Frivole et insoumis ~ l'autorité paternelle, il aurait trouvé la mort ~ la suite d'un drame avec un noble du pays. Le Reginonis Chronicon est plus explicite sur l'incident et raconte les circonstan­ ces précises de la mort de Charles: jaloux de la bravoure et de la haute renommée d'Un noble du pays, le fils de Charles le Chauve l'au­ rait provoqué au combat en lui tendant une embuscade. Le jeune prince aurait reçu au cours du combat un coup d'épée mortel dont il serait mort deux ans plus tard.
Details
-
File Typepdf
-
Upload Time-
-
Content LanguagesEnglish
-
Upload UserAnonymous/Not logged-in
-
File Pages107 Page
-
File Size-