Fugace Passage De La Démocratie Au Burundi

Fugace Passage De La Démocratie Au Burundi

1 Fugace1 Passage de la Démocratie au Burundi Vingt ans après -Rétrospective- Contribution à la Commission Vérité et au Mécanisme de Justice Transitionnelle Dossier de Rose Ntwenga, Montpellier, le 5 avril 2014. Le 6 avril 2013, les autorités politiques actuelles du Burundi ont officiellement renoncé à poursuivre les meurtriers du Président Cyprien Ntaryamira. Les lignes suivantes sont une sélection de temps forts de la seconde tentative d’introduction de l’esprit de démocratisation au Burundi de 1992 à 1994. Pour mémoire, la première tentative entre 1959 et 19652, est celle de la génération de nos parents, précurseurs du Burundi moderne. Avec l’avènement de la première république le 28 novembre 1966, les Hima burundais et rwandais dit Tutsi ont installé une dictature « émaillée » de génocides des Hutu du Burundi. 1992 - 1994, deuxième élan pour la Démocratie Dans un climat d’extrême adversité entretenue par les tenants des dictatures Hima successives, les candidats démocrates lâchent une importante concession. Par la suite, ce compromis s’est avéré avoir été une erreur fatale. 1992, le renoncement Au cours de cette année 1992, Melchior Ndadaye s’est résolu au nom du Front pour la Démocratie au Burundi (FRODEBU)3, à renoncer - sans l’expliciter - à inscrire la poursuite du crime de génocide dans le programme d’action du Parti. Pour parvenir à cette décision importante, plusieurs individualités récemment intégrées à son entourage immédiat4 se sont relayées pour embrouiller son jugement par un jeu de faux raisonnements et d’isolement tactique ponctuel5. Malgré toutes les descriptions faites sur l’inconsistance de leur engagement à ses côtés (à cause d’un passé de violence6 contre les Hutu en 1972-19737), Melchior Ndadaye n’a pas été en mesure de se dégager de leurs recommandations. « - Le crime de génocide se range dans la catégorie des délits imprescriptibles ! » lui ont rappelé d’autres interlocuteurs. Malheureusement, après quelques argumentaires peu convaincants, mais, obstinés en provenance de cet entourage, « Ne pas exhumer le passé » (Nta kuzura Akaboze) s’est tranquillement imposé comme marche à suivre. Pourtant, dans leur ensemble, les membres fondateurs du FRODEBU, n’ont-ils pas fui le Burundi pour échapper à l’entreprise meurtrière des Hima burundais et rwandais dit Tutsi au cours du Génocide des Hutu8 de 1972-1973 ? Déroutés par ce constat d’évitement du problème central dans l’Histoire récente du Burundi, les Superviseurs des Bâtisseurs, les Gardiens de la Mémoire et les Dépositaires des différents clans Hutu, se sont alarmés au point de pressentir un danger sur le sentier désormais emprunté. Pour eux, les fondateurs du FRODEBU ne se sont pas rendu compte de leur défaite morale. C’est pourquoi, ils se sont senti le devoir de prévenir une à une, plusieurs personnes de 2 mon groupe d’âge9, comme Alexis Hatungimana10 dit Bucucu du quartier de Kamenge et d’autres, témoins et survivants des atrocités avec leurs conséquences multiples. Melchior Ndadaye Alexis Hatungimana Jean Helène Pierre Buyoya Président du Burundi Gardien de la Mémoire Journaliste à RFI Président du Burundi 1993, 10 juillet – 21 octobre 1987-1993, 1996-2000 « -Vous devez témoigner, vous devez intervenir… », ont-ils expliqué. « En plus de témoigner, ont-ils insisté, à mon attention particulière11, tu devras parler des Aînés12. Car, toi, à la différence de Bucucu, tu les connais tous ! ». Pour m’aider dans cette démarche, ils m’ont orientée vers Jean Hélène13, le correspondant de Radio France Internationale (R.F.I.) au Kenya à cette époque. Dans ce pays, un microcosme de zaïrois Mulelistes, de Hima rwandais (certains devenus kenyans) et de Hutu burundais survivants au Génocide de 1972-1973 se côtoyaient depuis des années, allant jusqu’à fréquenter les mêmes églises. Pour un éclairage destiné au grand public de la réalité méconnue du Génocide des Hutu du Burundi de 1972-1973, il était intéressant que le journaliste international interroge l’un des chefs Mulelistes zaïrois, établi au Kenya, en tant que réfugié. Il avait participé avec ses hommes à l’Invasion du Sud du Burundi à la fin du mois d’avril et début mai 1972. « -Qui les avait recrutés ? -Quel était leur lien avec les Hima burundais et rwandais dit Tutsi ? Etc. » ont-ils ajouté. Régulièrement, depuis cette renonciation incompréhensible, des informations en tous genres, en provenance des dépositaires, me sont parvenues par divers canaux. Le 9 mars 1992 : Le vote pour une nouvelle Constitution14 Cinq jours auparavant, Eugène Nindorera, président de la Ligue Burundaise des Droits de l’Homme, ITEKA, adresse un courrier au Major Pierre Buyoya dans lequel il attire son attention sur les conditions inquiétantes du déroulement de la campagne de sensibilisation publique sur le Référendum Constitutionnel. (Voir annexe 2) Toutefois, la nouvelle constitution est votée et, de fait, consacre le multipartisme au Burundi après 27 ans de parti unique. Pour rappel, la création de Ligues des droits de l’Homme au Burundi a été imposée au Major Pierre Buyoya par les occidentaux à la suite de l’opération militaire sanglante contre les populations Hutu des communes de Ntega et Marangara au Nord du Burundi, frontalières du Rwanda. A partir de la mi- 3 août 1988, en effet, près de trois mille familles ont été tuées conjointement par l’Armée burundaise et les exilés Tutsi en armes. Deux ans plus tard, en 1990, le souci du respect des droits de l’Homme a été consolidé au Sommet France-Afrique avec le « Discours de la Baule15 » dans le cadre de la démocratisation prônée par le président français, François Mitterrand. Au cours de cette année 1992, un autre fait majeur se produit L’émetteur de la Radio Muhabura16 est déménagé du Sud de l’Ouganda pour son installation, avec l’accord du Président Pierre Buyoya, au sud de la ville de Bujumbura. Muhabura (Le Repère) était déjà l’appellation du journal de mobilisation au service du Front Patriotique Rwandais (F.P.R.)17 édité antérieurement à Bujumbura (Burundi), d’après Anicet Karege18. Le premier monitoring officiel remonte au 2 juillet 1992, 6.400 Khz, bande irrégulière adossée à 49 mètres (BBC-M, Naïrobi). Ce déménagement s’expliquait par la volonté de mieux couvrir le Sud du Rwanda. La bande annonce était : « This is the Radio Muhabura. Radio Muhabura, the voice that repatriates the voice of the R.P.F. inkootanyi. » J.P. Chrétien & J.F. Dupaquier falsificateurs par Omission Anicet Karege Jean-Paul Puts, intervenant au TPIR Début octobre 1993, le Président Melchior Ndadaye ordonne la fermeture, à Bujumbura, de cette antenne rebelle, étrangère au pays, ainsi que l’arrêt des aides publiques versées au F.P.R. par les précédents dirigeants du Burundi. Ces aides duraient depuis l’avènement en 1966 des dictatures Hima successives. Aujourd’hui, il revient au Président Pierre Buyoya de fournir les raisons de cette importante sujétion de l’Etat « indépendant » du Burundi à une formation d’exilés Tutsi rwandais avec leur bras armé, le Front Patriotique Rwandais. Le 1er octobre 1990, les troupes du F.P.R. ont envahi le Rwanda en passant par le poste-frontière de Kagituma (Ouganda). Dès cette offensive, les réfugiés Tutsi rwandais, installés au Burundi à partir de novembre 1959, ont organisé en toute liberté des manifestations culturelles et des collectes d’argent pour soutenir l’effort de guerre. Les combattants et les sympathisants du F.P.R. ont circulé librement au Burundi, en territoire « ami », quasi conquis à leur cause. Ils ont été les seuls à ne pas avoir été concernés par les nombreux couvre-feux décrétés à la suite du coup d’Etat du 21 octobre 1993 et de la guerre qui a suivi. Il faut se souvenir que depuis la création de l’Armée de Libération du Rwanda (l’A.L.R.) en 1964 à Bujumbura, les réfugiés Tutsi sont armés. Cette présence guerrière au Burundi avait suscité une Conférence à Goma, (Zaïre) les 18-20 mars 1967.19 Une déclaration commune entre le Général Mobutu (Zaïre), le Colonel Micombero (Burundi) et le Président Kayibanda (Rwanda), avait abouti à l’injonction aux réfugiés Tutsi rwandais installés au Burundi de déposer les armes dans un délai d’un mois. Signalons que, la Radio Muhabura a émis à partir de mars 1991, à titre d’essai, des bulletins d’information et de propagande sporadique, c’est-à-dire, vingt-huit mois plutôt que la Radio gouvernementale (R.T.L.M.) du Rwanda, qui débute quant à elle, ses émissions, vers juillet-août 1993. 4 Pour les auditeurs sur place des deux radios, les messages de haine et de vengeance s’équivalent. Seule, la manière de les présenter est différente. Le grand public n’a retenu que la virulence des propos de la Radio Mille Collines. A quelques nuances près, cette situation de propagande en temps de conflit armé ouvert peut être comparée à une autre semblable en 1941 entre les Etats-Unis et le Japon pendant la Seconde Guerre mondiale. En effet, le thème choisi à cette époque par l’armée américaine pour mobiliser ses hommes à la contre-offensive au Japon était « Remember Pearl Harbour ! »20. Enfin, pour un minimum d’objectivité, les travaux de Reporters Sans Frontières (R.S.F.) pour le compte de l’UNESCO -rapport Médias de la Haine et l’ouvrage Rwanda : les médias du génocide-, co-écrits avec Jean Pierre Chrétien en 199521 (par la suite synthétisés par Renaud La Brosse22) auraient dû comporter quelques lignes de présentation du contenu de la Radio Muhabura dans le souci d’une meilleure compréhension des faits décriés. Artémon Simbananiye Bernard Makuza Pierre Buyoya Paul Kagame Préparation du scrutin de juin 1993 : Une condition déterminante pour l’agrément des Partis politiques en compétition. Le Président Pierre Buyoya, avec l’aval de son conseiller principal politique et diplomatique, Artémon Simbananiye,23 a imposé la présence obligatoire de quelques membres Hima dit Tutsi dans chaque parti souhaitant obtenir une existence politique légale.

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