FORMULE TAG Lancé En 1983 Pour Mike Birch, Formule TAG Reste Dans L’Histoire Comme Le Premier Maxi-Catamaran

FORMULE TAG Lancé En 1983 Pour Mike Birch, Formule TAG Reste Dans L’Histoire Comme Le Premier Maxi-Catamaran

65 Texte Dominic Bourgeois. MAXI-CATAMARAN LES TROIS VIES DE FORMULE TAG Lancé en 1983 pour Mike Birch, Formule TAG reste dans l’histoire comme le premier maxi-catamaran. Un voilier précurseur qui passera de main en main, multipliera Vive le Canada… Après sa victoire les tours du monde, les abandons, les démâtages et même un chavirage avant d’ouvrir lors de la Route du Rhum 1978, Légende accroche. Mike Birch est le navigateur canadien encore une nouvelle voie, désormais vers la propulsion solaire. Légendelégende le plus connu : pour la première édition de la transat Québec/Saint-Malo, il fait construire à Montréal un catamaran de 80 pieds avec les L’interview de Fred Dahirel et la visite guidée technologies avancées de Canadair. de Formule TAG sur www.voilesetvoiliers.com CHRISTIAN FÉVRIER 66 67 FORMULE TAG ormule TAG est sans conteste le plus incroyable maxi-multi- coque du troisième millénaire ! À son compteur, des centaines de milliers de milles, une vie à rebondissements marquée par Fune succession de skippers de renom et un palmarès remarquable : pre- mier voilier à franchir la barre sym- bolique des 500 milles en 24 heures (512,5 milles en 1984), vainqueur de Monaco-New York en 1985, déten- teur du Trophée Jules Verne en 1994 (74 jours 22 heures 17 minutes), et toujours «record-ship» de la traversée de l’Atlantique Sud en 2005 (11 jours 10 heures 22 minutes). Sa genèse remonte à la première Route du Rhum, en 1978. Mike Birch qui, deux ans auparavant, avait déjà terminé deuxième de la transat an- glaise (OSTAR) sur un petit trimaran de 31 pieds (Third Turtle), s’impose magistralement, 98 secondes devant le grand favori Michel Malinovsky ! À quarante-sept ans, l’ex-bûcheron aux multiples facettes, convoyeur de bateau et bricoleur de génie, de- vient immédiatement une star de la voile océanique. Dans la foulée de ce succès, le Canadien fait appel au Bri- tannique Nigel Irens pour dessiner CHRISTIAN FÉVRIER un catamaran de 15,24 mètres, Vital, avec lequel il termine troisième de habituelles : Royale II (22,50 mètres) Mike Birch va la Route du Rhum 1982 malgré une pour Loïc Caradec et Philippe Fac- marquer la course sérieuse blessure à la main au départ que ; Fleury Michon VII (24,50 mètres) océanique de son de Saint-Malo. pour Philippe Poupon ; Charente empreinte pendant Les catamarans correspondent Maritime II (24,50 mètres) pour plus de trente ans ! alors à la tendance majeure en ter mes Pierre Follenfant et Jean-François d’architecture. Ils trustent les vic- Fountaine… Sortent du lot l’im- toires océaniques et, en vue de la pre- probable foiler Charles Heidsieck IV mière transat entre Québec et Saint- (25,80 mètres) d’Alain Gabbay qui Malo créée à l’occasion du 450e an- ne pourra rallier le Québec, ainsi que niversaire du voyage de Jacques William Saurin (27,10 mètres) d’Eu- Cartier, les skippers font construire gène Riguidel, plus grand trimaran des multicoques aux tailles alors in- de l’époque construit dès 1982 ! UN CATA DE 80 PIEDS ANNIE FYOT La société à capitaux TAG (Techni- ques d’avant-garde) du Saoudien tout, il fallait naviguer et ce dès la mise TAG faisait 80 pieds, mais Mike Birch «Heureusement, Canadair nous a Dans sa version d’espoir de tout un pays. Las, lors de Akram Ojjeh étant partenaire de à l’eau en présence de Pierre Elliott et Nigel Irens étaient restés conserva- fourni des tissus très fins et poreux d’origine, Formule la descente du Saint-Laurent vers l’épreuve, Birch a quartier libre Trudeau, Premier ministre du Canada teurs en termes de voilure par rapport pour bien purger l’air, et nous avions TAG s’est avéré l’océan, son manque de toile lui fait pour faire construire le plus per- qui se trouvait face à une virulente à leurs concurrents. Le plan de forme choisi le Kevlar pour les bordés avec des sous-toilé face irrémédiablement perdre le contact formant des multicoques. «Les orga- crise d’indépendance du Québec !» s’inspirait fortement de son prédé- renforts en carbone pour les zones de à ses concurrents : avec le groupe de tête emmené nisateurs de la transat Québec/Saint- Focalisés sur la longueur, tous les cesseur Vital mais avec une construc- liaison (livet, quille), reprend l’archi- il faudra attendre par Charente Maritime II, Royale II Malo ont tout simplement contacté le coureurs avaient commandé des mul- tion extrêmement sophistiquée pour tecte. Formule TAG avait des formes dix ans pour que et Fleury Michon VII. De plus, le plus célèbre des navigateurs canadiens, ticoques de 22 mètres et plus : Formule l’époque. À l’origine, Canadair – so- assez traditionnelles avec des bordés Peter Blake et Robin skipper constate que le catamaran précise Nigel Irens. L’accord s’est fait ciété dont TAG détenait des parts –, droits et un pont plat : il n’a donc ja- Knox-Johnston manque de volume à l’avant. et je suis parti au Canada en octobre qui réalisait des empennages en mais eu de problèmes structurels…» optimisent cette Installé à La Trinité-sur-Mer, Mike superbe plate-forme. 1982 pendant un an pour suivre la composite, voulait utiliser un auto- Birch fait immédiatement cou- construction de Formule TAG : toutes clave pour compacter le préimprégné per les étraves sur sept mètres puis les pièces étaient fabriquées à Mon- POUR LA PREMIÈRE QUÉBEC/ comme il le faisait pour les éléments UN GRÉEMENT TROP écarter les bordés d’une dizaine de tréal puis transportées à Québec parce d’avion, mais les pièces étaient trop CONSERVATEUR centimètres… tout en rallongeant qu’il fallait faire un show pour la mise SAINT-MALO, LES SKIPPERS FONT grandes ! Il fallut donc construire un ces mêmes étraves d’une quaran- à l’eau… C’était un peu surréaliste car four pour chauffer à 120 degrés et Après s’être échauffé lors des taine de centimètres. Un nouveau CHRISTIAN FÉVRIER le hangar accueillait aussi des concerts CONSTRUIRE DES MULTICOQUES multiplier les prouesses techniques, courses du SORC 1984 en Floride, mât, quatre mètres plus haut que le Au Grand Prix de la Martinique, Formule TAG de musique classique pendant que nous comme le plus grand élément compo- Formule TAG rejoint le Québec en précédent, trône désormais au-des- lève pour la première fois la patte… utilisions des meuleuses. Et puis sur- AUX TAILLES INHABITUELLES. site en préimprégné jamais élaboré. grand favori, du moins en porteur sus de la plate-forme. Nigel Irens 68 69 FORMULE TAG À bord d’Enza New Zealand : Peter Blake (skipper), Robin Knox-Johnston, Paul Stanbrigh, David Alan-Williams, Dod Whright, Ed Dandy, l’équipage victorieux du Jules Verne 1994. d’une demi-tonne, les deux dérives cassées sont changées, mais surtout les fonds de coque sont modifiés par l’ajout d’une semelle d’une vingtaine de centimètres (pour rehausser le ba- teau dans la mer) sous la direction de David Alan-Williams. Le gain de performance est sensible et le comportement plus sain dans le gros temps. Ce qui tombe bien : la tentative de 1994 sera marquée par des conditions dantesques avec une énorme tempête au cap Horn puis une encore plus méchante avant l’ar- rivée en Bretagne. Ce qui fit dire à Angus Buchanan, équipier de Blake : «Parfois, surtout la nuit, ce bateau était le dernier endroit au monde où nous voulions être ; à d’autres moments, on n’aurait pas laissé sa place HENRI THIBAULT/DPPI pour tout l’or du monde !» Véritable mé- L’équipage de Peter Blake et Robin Knox-Johnston a connu les pires conditions de mer et de vent autour du monde et lors de son atterrissage sur Ouessant… après soixante-quatorze jours de mer ! CHRISTIAN FÉVRIER CHRISTIAN FÉVRIER encore : «Le plan de voilure avait sé- Mais il faut une revanche au skip- Pour sa deuxième géant. Formule TAG démâte dès la Après trois saisons, la compétition Formule TAG, rebaptisé Enza New Zea- rieusement handicapé le bateau pour per et sa monture aux formes de tentative première étape… mais récupère son semble terminée pour le grand cata- land, gagne 1,50 mètre (25,90 mètres Québec/Saint-Malo. C’était un profil Tornado géant. En décembre 1984, (victorieuse) sur le premier espar pour terminer le tour, maran, acheté par le Canadien Tom contre 24,40 mètres), un mât de classique en aluminium de Sparcraft et période où les nouvelles épreuves Trophée Jules Verne, avant de s’aligner à une nouvelle Curry pour faire du charter… 31 mètres (contre 27,13 mètres), nous étions les premiers à utiliser des naissent comme des champignons, Enza New Zealand course, toujours en équipage, entre près de 100 mètres carrés au portant, chariots sur les lattes de grand-voile. Mike Birch prend part à la première a été profondément Monaco et New York dont le départ 500 litres de ballast arrière et une Mais ils n’étaient pas assez solides et il Route de la Découverte, entre Ca- modifié : plus long, est donné le 10 octobre 1985. PREMIÈRE RENAISSANCE nacelle centrale ! a fallu que Mike monte au mât par un dix et Saint-Domingue face à trente plus toilé, plus Cette fois, ça y est : le succès est Fin janvier 1993, les trois préten- froid de canard pour tarauder. Comme concurrents. Et finit troisième ! volumineux au enfin au bout de la route et Formule Six ans plus tard, dans leur souhait dants appareillent à quelques jours niveau des flotteurs. d’habitude, il ne portait pas de chaus- L’été suivant, Gérard Petipas or- TAG gagne sa première transat. Mal- de s’attaquer au Trophée Jules Verne d’intervalle.

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