Licence LMFA “Communication Interculturelle et Langues du Monde” - CILM Une expertise culturelle. Auteur: Ibtissam SAÏD HADDAD, [email protected] Cours ICL 2A 01 c « Introduction à la communication interculturelle » Institut National des Langues et Civilisations Orientales (INALCO) Filière Communication et Formation Interculturelles (CFI) Paris 2011 Sommaire SOMMAIRE......................................................................................2 1) PRÉSENTATION SYNTHÉTIQUE DE L’OBJET DE L’EXPERTISE. 3 2) LES RÉFÉRENCES À DES EMBLÈMES : UNE CULTURE LINGUISTIQUE DU GHETTO............................................................4 3) NORMES, RÈGLES ET VALEURS................................................6 4) CROYANCES ET CONNAISSANCES...........................................8 5) MÉMOIRE COLLECTIVE..............................................................9 CONCLUSION GÉNÉRALE...............................................................11 ANNEXE..........................................................................................12 1) Présentation synthétique de l’objet de l’expertise Rap. Ces trois lettres peuvent évoquer dans l'inconscient commun différents clichés : entre ghettos noirs américains, banlieues françaises, bling-bling, et autres racailles des cités. Relayé dans les médias à chaque voitures brulées dans les banlieues françaises et à chaque « dérapage médiatique » de rappeur, le rap a trop souvent été stigmatisé et relégué au rôle de trouble fait dans la société. Mais que reste t-il de sa dimension artistique et culturelle? C'est dans le but de redonner toute son authenticité et sa grandeur culturelle que j'ai choisi pour mon expertise d'une communauté culturelle le Rap (en aillant pour grande référence le rap français). Jokno, Doolayz et Devil B en concert Comme pour toute expertise culturelle, j'aborderai dans mon dossier différentes parties : 1. Références à des emblèmes : une culture linguistique du ghetto 2. Normes et valeurs de références : une culture « made in street » 3. Croyances et connaissances de références : techniques artistiques et censure 4. Références à un mémoire collective : de Nelson Mandela a Tupac, les références historiques du rap Setekh en studio Pochette album Don Léon Ce que j'apporterai en plus à mon analyse culturelle c'est une interview filmée de rappeurs. En effet, dans ma vision d'une étude de communauté, il faut interagir avec celle-ci et c'est dans cet objectif et pour mieux comprendre les références culturelles de différents rappeurs que j'ai choisi d'avoir un entretien avec quatre d'entre eux. Je mettrai également quelques citations de rappeurs que j'avais interviewé l'année précédente. Alors enfilez vos baggy et vos casquettes à l'envers pour un voyage au plus profond des banlieues françaises en passant par le 7.8/9.3/9.4 ect accompagné des meilleurs MC au plus bon flow.₁ Flyer d'un concert 2) Les références à des emblèmes : une culture linguistique du ghetto Personnalités, oeuvres, lieux et pérériodes : à la genèse du rap 2.1/ Le rap, fruit de différents courants musicaux Les musicologues considèrent que le rap à pour influences lyricales la tradition des griots africains, ces poètes et musiciens qui se décrivaient et indiquaient leurs conditions de vie et de celles de leurs contemporains dans un monde en crise. Cependant, les racines les plus directes du rap remontent à la fin des années 1960 et à l’apparition des Last Poets, un collectif de jeunes noirs militants ayant mis leur rage en rimes et en percussions afin de transmettre leurs messages révolutionnaires. Les influences musicales principales sont, quant à elles, bien évidemment la soul et la funk. Pochette d'album du groupe Last Poets Vidéo du concert des Last Poets « Niggers are scared of revolution » http://www.youtube.com/watch?v=-LKmd5el9sI Mais le père fondateur de la culture hip-hop qui a vu naître le rap est un dénommé Clive Campbell, plus connu sous le nom de Kool Herc, un DJ fasciné par les disques de James Brown. Lors d'une soirée qu'il anime en 1973, il a la géniale idée d'utiliser deux platines afin de pouvoir enchaîner sans pause les morceaux et de faire durer les breaks, ces passages rythmiques où tout disparaît au bénéfice du beat₂, du tempo nu. Dès lors, ses soirées deviennent célèbres, invitant danseurs, et des célébrités de chaque quartier ayant le rôle "d'ambianceurs". Photo du DJ Kool Herc Peu à peu, ces ambianceurs vont mettre en rimes leurs messages de la manière la plus originale et la plus rythmée possible. Des rivalités vont apparaître au fil des soirées entre chaque ambianceur donnant lieu à des joutes verbales qui déchaînent les foules. C’est la naissance des premiers MC, les Maîtres de Cérémonie, des premiers rappeurs et, par là même, de toute la culture Hip-Hop qui va se répandre peu à peu dans tout New-York. 2.2/ … Le rap: des ghettos noirs américains... Le hip-hop fait ses débuts aux États-Unis vers la fin des années 70 dans les ghettos noirs américains. Au début des années 80, le mouvement prend son envol avec de grands rassemblements « bloc party » où s'affrontent danseurs, grapheurs, DJ et MC. A cette époque, le style musical est très funky et électronique avec des basses très lourdes, on sample₃ déjà les tubes de James Brown et les scratches₄ deviennent très fréquents. Afrika Bambaataa, l'un des premiers DJ du hip-hop, en voyant ses amis faisant partie de gangs mourir sous les balles, décide de créer quelque chose de positif pour que les siens puissent se sortir du cycle infernal de la violence. C'est à ce moment que les rappeurs vont pour la première fois s'engager socialement et faire une description sans agréments de leur environnement délabré. Vidéo concert d'Afrika Bambaataa « Peace, Unity, Love and Having Fun », années 1980 http://www.youtube.com/watch?v=thsy5_Y2tZ8 "Je suis venu te prendre la tête pour te faire voir ce qu’il y a derrière les étoiles. Laisse tomber les ondes négatives qui guident tes pas vers la violence et suis nous, tu découvriras alors la puissance de la créativité qui sommeille en toi". Afrika Bambaataa Le groupe Public Enemy redonne un second souffle au rap en 1985-1986 en délaissant le côté festif pour dénoncer les inégalités sociales et raciales. Au début des années 90, c'est la véritable naissance du rap dans l'esprit plus revendicatif où les textes prennent une importance capitale. Le style musical évolue aussi et on assiste à la naissance des monstres sacrés comme le Wu-Tang Clan, Dr Dre, Snoop Dogg, NWA. En 1995-96, le rap américain change définitivement avec des artistes comme 2Pac, Notorious BIG, Coolio, KRS One, LL Cool J puis les Fugees, Nas, Jay-Z et la création de labels très puissants comme Death Row ou Def Jam. Mosaïque de pochettes d'albums de rappeurs américains [Tupac, Dr Dre, Snoop Dogg, Eminem, Notorious BIG ect... 2.3/ … ... Aux banlieues françaises La France est sans conteste la deuxième nation du rap dans le monde. Le rap français est un courant musical qui provient de l'assimilation du rap américain par la jeunesse française. Au fil des année, il élabore progressivement sa propre personnalité, oscillant entre revendication violences socio politiques, messages positifs ou festifs et tentation commerciale. Le rap devient rapidement très populaire en France, notamment grâce à sa large diffusion dans les nouvelles radios libres à partir de 1984. C'est à la fin des années 1980 que le rap français apparaît avec les premiers freestyles₅ de NTM, Assasin, MC Solaar, I AM et Ministère A.M.E.R. Le rap français naît donc avec un ton revendicatif et des textes évoquant le racisme, la précarité, le chômage ou la violence, il décrit la vie dans les banlieues desquelles il est issus avec des textes crus; des thématiques plus inspirées de Public Enemy que du rap festif. Son succès provoque un véritable phénomène de société : la jeunesse des banlieues redécouvre le plaisir de jouer avec la langue, de manipuler les mots, les sons et les sens. Pourtant, c'est le rap positif, léger et funky qui envahit la scène rap en France avec Alliance Ethnik, Ménélik, Réciprok, Doc Gynéco etc. Le rap devient une porte vers la réussite et la célébrité. Il commence à vendre et devient plus dansant, les textes ont un contenu social moins marqué et donc plus acceptable par le grand public. De plus, des labels se fondent, des crews ₆ se forment, on assiste à la naissance du rap business qui fait des ravages aux Etats-Unis. La radio Skyrock devient la radio rap en France et va énormément participer à la promotion des nouveaux groupes. Le rap français se divise alors en deux: • Le rap commercial qui passe partout et génère beaucoup d'argent • Le rap underground ₇ qui sera même boycotté et qui ne rapporte presque rien mais où les MC aiguisent leur style qui plaît à la masse. Mais ce ne sont pas les artistes qui dérivent, mais les maisons de disques qui sortent les titres les plus commerciaux des albums et véhiculent une image fausse de l'artiste. C'est alors que les labels indépendants se forment et des groupes s'unissent contre cette médiation et ces maisons de disque qui tuent le rap. En 1999, la nouvelle école lâche ses premières bombes épaulées par les anciens et par Skyrock, qui devient indispensable pour lancer un album. On assiste au succès de Pit Baccardi, Freeman, Bisso na Bisso, Saïan Supa Crew et bien sûr du 113 et de leur crew la Mafia K-Fry. Le rap renaît ici et outre-Atlantique où la guerre coast to coast, (ayant entraîné la mort de 2Pac et de BIG), est terminée, l'avancée se poursuit vers le nouveau millénaire. Terminé le temps où l'on enregistrait dans les caves sur des vinyles de James Brown, aujourd'hui, on enregistre en studio avec des productions musicales d'aussi bonne qualité que les textes. De plus, c'est au niveau du son que le rap évolue réellement, les instrus₈ deviennent plus électroniques.
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