Document generated on 09/28/2021 3:33 a.m.

Ciné-Bulles Le cinéma d'auteur avant tout

La Force est avec George! : Episode II — Attack of the Clones Philippe Lemieux

Volume 20, Number 4, Fall 2002

URI: https://id.erudit.org/iderudit/33329ac

See table of contents

Publisher(s) Association des cinémas parallèles du Québec

ISSN 0820-8921 (print) 1923-3221 (digital)

Explore this journal

Cite this review Lemieux, P. (2002). Review of [La Force est avec George! / Star Wars : Episode II — Attack of the Clones]. Ciné-Bulles, 20(4), 50–51.

Tous droits réservés © Association des cinémas parallèles du Québec, 2002 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/

This article is disseminated and preserved by Érudit. Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal, Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to promote and disseminate research. https://www.erudit.org/en/ cotip dt star 's: II

La Force est avec George!

PAR PHILIPPE LEMIEUX

C'est en voulant jouer avec Il y a 25 ans, dans un cinéma près de chez celui d'une génération de cinéphiles qui en la forme traditionnelle de la critique que Philippe vous... Star Wars: Episode IV - A New Hope étaient dépourvus en 1977. Malgré la proli­ Lemieux, passionné pour prenait l'affiche et révolutionna l'industrie du fération du cinéma fantastique de ces dernières tout ce qui est Star Wars, cinéma commercial. Le cinéma de science- années, notamment les premiers chapitres des nous livre deux textes, à la fois complémentaires et con­ fiction connut un essor considérable, le public séries de films Harry Potter (Columbus, 2001) tradictoires, exposant les réclamait de nouveau des effets spéciaux et la et The Lord of the Rings (Jackson, 2001), Star points de vue subjectifs opposés que l'on peut adop­ mise en marché d'un film devint aussi Wars demeure le titre le plus ancré dans la ter à l'égard du dernier film importante que le film lui-même. Le mot clé à culture populaire. Ce deuxième épisode de la de . Hollywood est désormais blockbuster et nouvelle trilogie poursuit la quête mythique du l'industrie des produits dérivés ne se limite plus jeune Anakin et le spectateur averti commence à la montre de Mickey Mouse. Aujourd'hui, à y déceler le plan global de Lucas qui aboutira George Lucas nous offre le cinquième film de en mai 2005. À la manière d'une symphonie, sa saga, mais le deuxième épisode si l'on plusieurs thèmes récurrents se croisent et se considère l'ordre chronologique de l'histoire. répondent: les machinations politiques du Depuis le lancement du premier épisode, The chancelier , le destin d'un et l'équi­ Phantom Menace, deux points de vue incon­ libre de la Force qui gouverne toute l'existence ciliables s'affrontent: celui du fervent enthou­ dans l'univers. Plusieurs scènes d'Attack of the siaste qui voit dans Star Wars un renouvel­ Clones font écho à des moments importants des lement du «monomythe» de Joseph Campbell autres films, particulièrement lorsque Anakin et celui du détracteur qui accuse Lucas retrouve sa mère sur Tatooine et visite la ferme d'exploitation commerciale dans la redondance où Luke, son fils, sera éventuellement élevé. narrative. Comme dans tout bon argument, la D'autres leitmotivs viennent ponctuer ce vérité se trouve sans doute dans le croisement mouvement: la tentation du bien par le mal, la des pôles. soif du pouvoir, et une simple blessure prend une importance démesurée lorsque Anakin Attack of the Clones poursuit l'évolution du perd son bras. Il s'agit déjà de la première étape personnage d'Anakin Skywalker, dont le destin de sa métamorphose en homme mécanique... est de devenir , le mal incarné de la trilogie originale. Une dizaine d'années après les événements présentés dans le premier épi­ The Phantom Menace, généralement mal reçu sode, The Phantom Menace (Lucas, 1999), un par la critique en 1999, ne doit pas être jugé à conflit se trame au sein de la République. Un part des autres films dont il est le chapitre groupe de sénateurs dissidents préparent un d'introduction, une mise en place globale des coup d'État et les , trop peu nombreux, éléments narratifs essentiels aux cinq autres cherchent à découvrir le fond de cette histoire chapitres. Attack of the Clones ne souffre pas avant qu'il ne soit trop tard. Le film évolue dans de telles obligations et se rapproche beaucoup le montage parallèle de cette enquête menée plus de l'esprit de la trilogie originale que le par Obi-Wan Kenobi (Ewan McGregor) et pouvait ce dernier film. L'humour offert par les l'éclosion de la relation amoureuse qui se tisse échanges verbaux entre C-3PO et R2-D2, la entre Anakin (Hayden Christensen) et la tension amoureuse qui se développe entre nos sénatrice Padmé Amidala (). deux protagonistes et les situations qui rappel­ Éventuellement, les deux récits se recoupent dans lent les films à épisodes des matinées cinéma­ un dénouement explosif, qui conclut l'aventure tographiques des années 1930 (incluant le titre de cet épisode tout en suggérant quelques élé­ du film et l'utilisation de volets pour passer ments clés du prochain. d'une scène à une autre) contribuent tous à l'ef­ fet d'émerveillement et de nostalgie qui plane L'intention première de Lucas a toujours été de sur ce film. L'univers de Flash Gordon n'est 50 créer un mythe à l'image du monde moderne, jamais très loin chez . Attack of the Clones

«Yoda accède finalement au statut de personnage à part entière.»

Comme cet épisode a lieu une dizaine d'années réussit encore une fois à faire évoluer la techno­ après le précédent, le rôle d'Anakin se doit d'être logie du cinéma, une évolution qui, finalement, interprété par un acteur plus mature que le der­ bénéficiera à tout le monde. nier. Fidèle à son habitude, Lucas ne repêche pas ses joueurs dans les eaux du star-system Poursuivant l'expérimentation entamée dans hollywoodien, préférant plutôt voir son per­ The Phantom Menace, Attack of the Clones sonnage que la vedette à l'écran. C'est ainsi que présente une panoplie d'effets numériques Hayden Christensen, acteur canadien peu con­ impressionnants. La planète Kamino (où les nu, remplace le jeune dans le rôle clones sont cultivés), Coruscant, la planète cen­ d'Anakin Skywalker. Christensen est chargé non trale de l'univers, l'usine de droïdes et l'arène seulement de livrer une performance crédible d'exécution de Geonosis offrent tous des mais aussi de faire le pont entre le jeu de son environnements fascinants et des scènes à cou­ prédécesseur et le personnage que nous con­ per le souffle. La poursuite en véhicules flot­ naissons tous de la trilogie originale. Passant tants du début du film, un hommage évident à d'un jedi arrogant et un peu naïf à un jeune Blade Runner (Scott, 1982), est si complexe qu'il homme amoureux mais souffrant d'un profond faut plus d'une projection avant d'en absorber conflit moral, Christensen éblouit par la justesse pleinement tous les détails. Plusieurs nouveaux de son jeu et par sa capacité à passer d'une émo­ personnages numériques interprètent d'impor­ tion à une autre. Il suffit de citer la scène du décès tants rôles: les ingénieurs responsables des clo­ de sa mère dans laquelle il sombre momen­ nes, les insectes géants de Geonosis et Dexter tanément dans le côté obscur de la Force. Jettser, un chef cuisinier à quatre bras qui aide Christensen accomplit cette transition sans aucun Obi-Wan dans son enquête. Par contre, c'est un dialogue et l'expression qui se dessine sur son personnage récurrent de la saga qui vole la visage suffit à convaincre le spectateur que ce vedette aux autres acteurs, virtuels et réels. personnage ne maîtrise pas ses émotions. Cette fois, Yoda n'est pas une marionnette com­ plexe manipulée par Frank Oz, mais un acteur Il est impossible de faire la critique d'un film de virtuel capable de marcher, de se battre et surtout de vaincre Dooku dans un prodigieux Star Wars: Episode II • Star Wars sans discuter des innovations techno­ Attack of the Clones logiques qui l'accompagnent inévitablement. combat au sabre laser. Son visage est main­ D'abord et avant tout, cet épisode est le premier tenant capable d'exprimer les émotions les plus 35 mm/coul. / 143 min / 2002 / fict. / États-Unis film américain à grand déploiement à avoir été subtiles, et Yoda accède finalement au statut de entièrement tourné à l'aide de caméras numé­ personnage à part entière. Réal.: George Lucas riques. La mort certaine de la pellicule comme Scén.: George Lucas et Jonathan Haies support cinématographique approche à grands Une ponctuation finale, la musique de John Image: David Tattersall pas grâce à Lucas, qui comprend bien les avan­ Williams, vient enrober l'œuvre de Lucas d'une Mus.: lohn Williams Mont.: Ben Burtt tages financiers et artistiques du support numé­ atmosphère musicale qui souligne ses thèmes Prod.: George Lucas rique. Le Festival de Cannes a d'ailleurs offert récurrents tout en offrant un présage des hor­ et Rick McCallum aux cinéphiles de la Croisette une projection reurs à venir. La pièce «Across the Stars», qui Dist.: Twenty Century Fox Film numérique du film en avant-première. La beauté accompagne Anakin et Padmé dans leur périple Int.: Ewan McGregor, et la netteté des images d'Attack of the Clones amoureux, est la fois mélodique et dramatique, Natalie Portman, Hayden mettent définitivement fin au débat entourant la Christensen, Christopher digne de l'œuvre épique qu'est Star Wars: Lee, Samuel L. Jackson, lan qualité de la vidéo numérique et George Lucas Episode II - Attack of the Clones. • McDiarmid, Jimmy Smits 51