Famille Sous-famille mannii (Mayer, 1851) Pierinae la Piéride de l’Ibéride

Statut Vulnérable dans ses stations naturelles d’origine, cette Piéride a affi ché une spectaculaire expan- sion dans les habitats urbains de substitution au cours des dernières années. RE UGAN

CR Denis J

EN

VU

NT

LC Franche-Comté

DD

NA

NE Bourgogne

Europe – LC – LC

Mâle (Haute-Saône, 2011).

Écologie et biologie Description et risques de La Piéride de l’Ibéride est une es- confusion pèce xéro-thermophile d’origine méri- Pieris mannii présente un imago dionale qui, dans ses habitats naturels, légèrement plus petit que la Piéride du reste localisée dans des sites rocheux ou Navet et la Piéride de la Rave, avec les- rocailleux, de préférence sur sol calcaire, quelles elle peut être aisément confon- dans les biotopes abritant diverses Ibé- due, bien que volant plus lentement. La rides, notamment l’Ibéride des rochers coupe des ailes est plus arrondie (princi- (Iberis saxatilis) et l’Ibéride à feuilles de pal critère de distinction avec P. rapae), lin (Iberis linifolia). et surtout l’apex des ailes antérieures Elle semble s’être adaptée récem- présente une grosse tache noire dont le ment (après 2007) à un habitat péri- prolongement distal descend assez bas urbain où elle retrouve les conditions le long du bord externe, et dont l’extré- Difficulté de favorables à son développement : jardins mité proximale, le long de la côte, est détermination pentus des lotissements, agrémentés tronquée, rectiligne, nette et oblique, de nombreuses plantes horticoles de alors que cette tache se prolonge pro- rocailles et exposés au sud, aux gradins gressivement et davantage en direction séparés par des murets de soutènement de la base le long du bord costal chez les assurant un milieu xérothermique de espèces voisines. substitution. L’adulte longe les parois les La tache de l’espace 3 est toujours plus ensoleillées : façades de maisons très grosse, de forme quadrangulaire et murs de séparation, et butine volon- (circulaire chez P. rapae), souvent fl oue tiers les Lavandes et les Buddléias. Les du côté interne, généralement concave femelles déposent leurs œufs isolément, du côté externe, lequel chez les femelles préférentiellement sur la Corbeille-d’ar- se ramifi e le long des nervures jusqu’au gent (), au revers des bord externe. Grisâtres et moins éten- feuilles portées par les rameaux les plus dues chez les sujets de la génération ombragés. Des pontes ont également été vernale, les macules sont souvent plus observées sur la Corbeille-d’or (Alyssum noires et mieux marquées chez les indi- Diagramme saxatile). Dans les jardins, les femelles à vidus estivaux. écologique la recherche de plantes-hôtes sont sou- vent leurrées par le feuillage des Coto- Au vol, l’espèce peut aisément être 4 Chaud néasters et des Oliviers. L’état larvaire prise pour P. napi (aspect très blanc, 3 dure quatre semaines et la nymphose taches d’un noir profond chez les indivi- 2 s’effectue principalement à l’écart de la dus fraîchement éclos). Posée, elle peut 1 plante, dans les anfractuosités des murs, être facilement confondue avec P. rapae. Humide Sec ainsi que sous leurs chaperons, sous les linteaux des portes et des fenêtres. Les chrysalides présentent deux coloris : gris Froid moucheté (le plus fréquent) ou vert (net- tement plus rare).

180 Rev. sci. Bourgogne-Nature - Hors-série 13-2013 UGAN Denis J

Femelle (Haute-Saône, 2010). UGAN UGAN Denis J Denis J

Femelle à la ponte sur Iberis sempervirens (Haute-Saône, 2011).

Femelle sur Iberis sempervirens (Haute-Saône, 2011).

Atlas des papillons de jour de Bourgogne et de Franche-Comté (Rhopalocères et Zygènes) 181 Distribution n’inspire donc plus de crainte, tant ce phénomène a été intense et tant les Ibé- OINOT Espèce euro-méditerranéenne. rides ornementales sont répandues. Elle

La première occurrence naturelle est donc désormais considérée comme Claude V découverte en Franche-Comté fut signa- non menacée, ce qui ne doit pas occul- lée par DESCIMON (une femelle en 1960 ter les risques pesant sur ses habitats dans le Jura, à Baume-les-Messieurs). naturels : régression des stations abri- Le site a récemment été dénaturé par un tant les plantes-hôtes exploitées par les pacage ovin conservatoire dont l’instau- populations xérothermiques relictuelles, ration a entraîné une modifi cation pro- embroussaillement, fauches inconsidé- fonde de la strate herbacée et fl orifère, rées, surpâturage, piétinement… avec recul des Iberis. Il est peu probable que le papillon s’y développe encore Orientations de gestion et actuellement. mesures conservatoires En revanche, il existe de petites Il convient de s’assurer de la protec- populations découvertes en 2001 qui tion des stations de peuplement naturel, se maintiennent dans l’extrême Sud du qui hébergent par ailleurs un cortège département du Jura, dans la vallée de fl oristique remarquable et qui sont les la Bienne. seules à garantir un maintien durable Concernant les peuplements ré- de l’espèce au cas, certes peu probable, cents sur des biotopes urbains de substi- où l’engouement pour les Ibérides de Pariade, femelle rétive au centre (Côte-d’Or, 2011). tution, il semble que l’espèce soit arrivée rocaille s’amenuiserait soudainement. en Franche-Comté après 2008, à partir des populations suisses et alsaciennes UGAN en pleine expansion (ZIEGLER, 2009 ; OINOT FELDTRAUER & FELDTRAUER, 2009), pas- Denis J sant par la Trouée de Belfort et la vallée Claude V du Doubs jusqu’aux plateaux vésuliens en Haute-Saône et à la dépression sous- vosgienne. Jusqu’en 2010, il n’existait aucune donnée certaine en Bourgogne (les men- tions alors connues étaient vraisembla- blement issues d’erreurs de détermina- tion). L’espèce a été observée durant l’été 2011 en plusieurs localités de la Côte-d’Or, le long de la côte dijonnaise Accouplement, femelle à gauche (Haute-Saône, 2011). Chenille âgée sur Iberis sempervirens (Côte-d’Or, 2011). jusqu’à Beaune. UGAN Le processus ayant conduit à son UGAN apparition en Bourgogne n’est pas élu- Denis J cidé, car il n’a pas été constaté de liaison Denis J avec les populations méridionales les plus proches qui évoluent dans le dépar- tement de l’Ain – où l’on constate une explosion des populations depuis 2010 – et dans la vallée du Rhône. Il n’est pas impossible que l’extension de l’espèce soit favorisée par la dispersion passive de pontes déposées sur les plants hor- ticoles diffusés par les jardineries (ES- SAYAN OSEPH UGAN OINOT , J , J & V , 2012). Femelle pondant sous une feuille d’Iberis sempervirens Chenille en pré-nymphose (Haute-Saône, 2011). (Haute-Saône, 2012). Phénologie Espèce plurivoltine, paraissant en OINOT trois générations bien distinctes : de la ARADAN mi-avril à la mi-mai, de la mi-juin à la Claude V mi-juillet, d’août à la mi-septembre. En 2011, des émergences en octobre ont montré l’existence d’une quatrième gé- Jean-François M nération partielle. Dates extrêmes : 27 mars – 27 oc- tobre. Œuf sur Iberis sempervirens (Doubs, 2011). Atteintes et menaces Le cas de cette espèce conduit à un ARADAN constat pour le moins troublant : initiale- ment considérée comme en danger cri- tique d’extinction en Franche-Comté au

vu de sa rareté et de l’extrême spécifi cité Jean-François M de ses habitats nature ls, elle a colonisé en moins de trois ans de nouveaux ter- ritoires en profi tant de la présence de plantes-hôtes de substitution dans les milieux anthropisés. Son statut actuel Chenille néonate sur Iberis sempervirens, dévorant la coquille Chrysalide sur Iberis sempervirens (Côte-d’Or, 2011). de son œuf (Doubs, 2011).

182 Rev. sci. Bourgogne-Nature - Hors-série 13-2013 UGAN ARADAN Denis J Jean-François M

Chrysalide (Doubs, 2011). UGAN Denis J

Chrysalide femelle de douze jours, avant Femelle (Haute-Saône, 2012). l’émergence (Haute-Saône, 2011).

18 9000 OINOT n = 87 UGAN

15 7500 Claude V Denis J

12 6000

9 4500

6 3000

3 1500

Amas de chrysalides sous un linteau Mâle (Côte-d’Or, 2011). 0 (Haute-Saône, 2011). 12345678910111213141516171819202122232425262728293031323334353637383940414243444546474849505152 Janv. Févr. Mars Avr. Mai Juin Juil. Août Sept. Oct. Nov. Déc.

Phénologie de Pieris mannii.

avant 1970 1970 - 1999 2000 - 2011

Distribution de Pieris mannii en Bourgogne et Franche-Comté.

Atlas des papillons de jour de Bourgogne et de Franche-Comté (Rhopalocères et Zygènes) 183