BELGIQUE - BELGIE P. P. LIEGE X 9/249 Bart De Wever, Oradour : au cœur Sylvie Germain, « fürher » de Flandre ? du massacre, il y a 70 ans romancière spirituelle

Le magazine chrétien de l’événement

Qui n’a, un jour, chanté de RUE DU BEAU MUR, 45 - 4030 LIÈGE RUE DU BEAU l’Hughes Aufray ? Au point d’oublier que le troubadour a aujourd’hui 85 printemps. Se méfiant de tous les dogmatismes, il n’hésite pas à confier que

DÉPÔT LIÈGE X - P302066 DÉPÔT les valeurs qui le motivent s’inspirent des paroles premières du Christ. : 2,50 e PRIX Hugues Aufray, 2014 - N° 369

SEPTEMBRE éternel défenseur des valeurs universelles

Christian Van Rompaey « Il est facile de faire naître Annelise Detournay enquête : : © J.B. Mondino : © J.B. De « Jeunesse Ouvrière Chrétienne » analyse : y a-t-il un avenir une guerre. Mais après ? », à « Jeunes Organisés et Combatifs », pour les chrétiens d’Orient ? se demande Armand Veilleux la mutation de la JOC Couverture MENSUEL (ne paraît pas en juillet et août) - MENSUEL (ne paraît + 2 Choses vues C’est dans le détail du quotidien que se révèlent le sel et le poivre de la vie

369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel L’autre à la première place

lle est retraitée depuis peu. Déjà fois, un volontaire s’est déclaré. Elle pou- poétique qu’un enfant qui s’émerveille auparavant, elle consacrait tous vait enfin se retirer. Elle aurait pu savourer devant la magie de l’eau savonneuse. ses dimanches après-midi à du les remerciements et les ovations qu’un Pourtant, malgré son âge, le vieil homme bénévolat dans un centre de si long engagement aurait assurément prend visiblement un plaisir intense, Esoins palliatifs. Elle apprécie ce contact provoqués. Mais elle a pris les devants et autant de voir ses bulles envahir les envi- vrai avec des personnes en fin de vie, a demandé qu’on applaudisse le nouveau rons que du regard étonné des passants. quand les faux-semblants ont disparu. volontaire, si courageux d’accepter une Il sourit de toutes ses dents. Tellement Aujourd’hui, elle dispose d’un peu plus de telle charge, détournant ainsi l’attention satisfait qu’il n’a pas l’air très préoccupé temps. L’occasion de nouveaux contacts. sur quelqu’un d’autre. de vendre ses machines à bulles. À moins Récemment, elle se renseignait sur un qu’il ne s’agisse d’une technique de vente service d’accueil pour jeunes enfants. sophistiquée ? Une de ses amies, aujourd’hui décédée, Anonymat s’y était investie. C’était en quelque sorte sa bouée de sauvetage, ce qui maintenait Un anniversaire comme tant d’autres. Ex-Voto un peu de sens dans son existence. « Elle Une centaine de convives, de la bonne a choisi de mettre fin à une vie qu’elle trou- humeur, une ambiance bon enfant. Sauf « En souvenir de mon papy adoré », « Pro- vait trop lourde, mais c’est sûrement une que Michelle Martin fait partie des invi- tégez notre petite Audrey », « Que notre activité qu’elle aurait aimé poursuivre. Si je tés. Plusieurs invités la connaissent, parce amour dure toujours », « En remerciement m’y engage, je pourrais peut-être la rendre qu’ils font partie du réseau qui s’efforce de pour ma guérison »… Ces messages sont encore un peu présente… » l’accompagner dans son effort de réinser- griffonnés sur des galets entassés devant tion. Quelques-uns la reconnaissent sans une statue de la Vierge, dans un « cran », avoir jamais eu de contacts personnels sorte de petite crique du Pas-de-Calais. discrétion avec elle. D’autres ignorent sa présence. Le long du chemin des douaniers, la sta- Peut-être l’un ou l’autre ne serait-il pas tue fixe la mer. Les randonneurs y jettent C’est l’assemblée annuelle d’un journal venu s’il avait su… Qu’importe ! Celle qui un regard attendri ou moqueur, mais il local, qui poursuit sa route depuis de devait attirer l’attention ce soir-là, c’était semble que chacun respecte le geste de nombreuses années uniquement par bien celle qui fêtait son anniversaire. ceux qui ont confié là leurs souhaits les l’investissement de collaborateurs béné- plus chers. Qu’espéraient vraiment ceux voles. Un seul but : créer du lien entre les qui se sont arrêtés là, dans ce lieu d’inter- personnes et faire écho aux propositions BULLES cession sauvage ? des multiples associations actives dans le village. Une dame y assumait depuis Les bulles de savon volent un peu partout longtemps la tâche ingrate de rechercher entre les étals du marché. Sans doute un des publicités auprès des commerçants enfant, en vacances dans cette petite sta- et de relancer les mauvais payeurs. Pas tion balnéaire, est-il en train de s’amuser ? toujours gratifiant mais indispensable Au coin d’une allée du marché, un ambu- pour la survie du mensuel. Elle voulait lant, fort âgé déjà, est assis sur un tabou- arrêter depuis plusieurs années, mais ret. Entre les mains, il tient une sorte aucun candidat pour ce service incon- de canard d’où sortent à jets continus fortable et répétitif ne se présentait. Elle des séries de bulles de savon. Probable- continuait donc d’année en année. Cette ment le dernier gadget à la mode. Moins José Gérard Éditorial 3 L’appel 369 - Septembre 2014 Sommaire

Choses vues 2 L’autre à la première place Intérêts et

Éditorial 3 Intérêts, capital et démocratie démocratie Découverte 4 Hugues Aufray prend toujours ans un pays aussi complexe et divisé que la le large Belgique, où les décisions politiques sont quasi toujours le fruit de consensus et de À la Une coalitions, un parti peut-il, à lui seul, reven- 6 De Wever, « fürher » de Flandre ? Ddiquer être la voix de toute une communauté ? 8 JOC : Trois lettres, un esprit Alors que nous avions choisi de poser la question dans 10 La ferme de la différence ce numéro à propos de ce qui se passe depuis des mois en Flandre (voir pp. 6-7), voilà que l’interrogation touche aussi désormais le sud du pays. Signe En effet, si elle se met en place, la coalition « suédoise » portera au gouvernement 12 Chirurgien nomade fédéral des représentants de trois partis du Nord, qui représentent une large majorité des électeurs de cette partie du pays, et d’un seul parti du Sud, qui est loin, à lui seul, 14 Un certain Jésus « déshabillé » d’incarner 50,001% des votants de la communauté dont il est issu. Dans la Constitution et les coutumes de formation des gouvernements, rien ne s’op- Évangile à la Une pose à cette situation. Mais ce n’est pas un hasard si la loi fondamentale belge décrète 16 Septembre : notamment que le gouvernement doit compter autant de ministres francophones Réconciliations en vue que néerlandophones. Lorsqu’il a été pensé, cet article laissait bien supposer que le gouvernement devait être, dans chaque communauté, l’émanation de l’expression Éclairage politique d’une partie appréciable des électeurs. 17 En terre d’islam… « Le gouvernement sortant avait déjà failli à cette habitude », fait-on souvent remarquer, • Chrétiens arabes : en utilisant le cas d’espèce d’hier pour justifier ce qui pourrait se produire aujourd’hui. un avenir impossible ? L’affirmation n’est pas inexacte, mais les contextes et les rapports de force sont toute- • Il ne faut pas désespérer fois fort différents. de l’islam En 2010, un gouvernement où les partis du Nord du pays ne représentaient pas la • Le message originel du Coran majorité des électeurs avait été mis sur pied après 541 jours de crise. Cette fois, nous ne sommes qu’au lendemain du scrutin. Et, surtout, le différentiel entre l’expression Vu majoritaire et le poids des partis n’est pas comparable. En 2011, les trois partis fla- 21 Oradour, témoignage du martyr mands qui avaient accepté d’entrer dans le gouvernement fédéral représentaient 49% des sièges attribués à la Flandre à la Chambre des représentants, et environ 47% des Rencontre suffrages exprimés en Flandre (un calcul précis n’est pas possible en fonction du grand 24 Sylvie Germain : nombre de petits partis et de listes bilingues). « L’essentiel, ce sont les Évangiles » Les trois formations politiques n’étaient donc pas l’expression d’une majorité, mais d’un fifrelin. Si la majorité « suédoise » voit le jour en 2014, le seul parti francophone qui y prendra Ça se vit part ne représentera que 32% des sièges francophones à la Chambre et environ 26% 27 Un autre regard sur les réfugiés des votants du Sud. Alors que des décisions importantes doivent être prises pour l’avenir socio-économique Eh ben ma foi du pays, cette disparité est plus que problématique. Elle remet en cause la notion même de 28 L’art d’engendrer les guerres. démocratie au sens où on la vit en Belgique depuis 55 ans, c’est-à-dire depuis que le pays Et après ? n’a cessé d’être dirigé par des gouvernements de coalition. Dans cette affaire, les intérêts 29 Le « ministère » du redressement propres des partis et du personnel politique semblent prévaloir sur ceux de la population.

Parole Frédéric ANTOINE 30 Lever-Dieu Famille et Église : l’enquête continue ! À voir Urgent : vous avez encore jusqu’au 8 septembre pour répondre en ligne sur internet à la 31 Sous la plume d’un poilu grande enquête lancée par L’appel auprès de ses lecteurs. Pour de bons résultats, nous avons 32 À lire, à voir, à écouter… besoin de davantage de réponses. Nous comptons donc sur vous. Adresse du sondage : via le site internet de L’appel (www.magazine-appel.be) ou notre page facebook (www.facebook. 34 Une vie à soi com/lappelmagazine). Ou via l’adresse web : http://docs.google.com/forms/d/1nFQq4rtmm 35 Annonces II4QN52vNfK4zV36VLOIq13j3UAKhyzpCI/viewform?usp=send_form 4 VuDécouverte À 85 berges Hugues Aufray 369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel prend toujours le large

Avant son prochain concert en Belgique, le troubadour infatigable livre quelques réflexions bien senties. Se définissant comme politiquement incorrect, chrétien agnostique, artiste un peu en marge, Hugues Aufray garde une pêche d’enfer. Pour celui qui se méfie de tous les dogmatismes, les valeurs qui le motivent s’inspirent des paroles premières du Christ. Copyright J.B Mondino J.B Copyright VIE BUISSONIÈRE ET SCULPTURE. Pour le chanteur, les artistes ne travaillent pas. Ils passent leur temps à s’amuser…

85 printemps, Hugues Aufray Tout le monde chante. Les bébés commencent Folk song, french song revient. Bon pied, bon œil. par pleurer. C’est leur façon à eux de s’expri- Sa voix affirmée, vigoureuse, mer. La voix, c’est ce qui permet à l’être humain Dans la mémoire collective ou les bio- convaincante, impressionne. Il ne de communiquer. Pourquoi je m’arrêterais ? » graphies, il y a pourtant bien un moment àcherche jamais ses mots, mais aime déco- La retraite n’est donc pas à l’ordre du jour. où Hugues Aufray « a commencé »… Un cher quelques flèches. Pas la peine de lui « Je suis étonné quand on dit qu’un artiste premier disque de quatre chansons (dont demander pourquoi il « continue » de chan- prend sa retraite. Cela, c’est pour les gens deux de Gainsbourg, encore inconnu !) en ter à son âge : « Cela aurait l’air de dire qu’il qui travaillent. Les artistes ne travaillent 1959, une troisième place à l’Eurovision y a un moment où l’on a commencé, sourit-il. pas, ils passent leur temps à s’amuser… Je en 1964 avec Dès que le Printemps revient. Chanter, c’est naturel et je n’ai jamais arrêté. ne plaisante pas vraiment. » Puis l’ouverture vers les chansons anglo- Découverte 5 L’appel 369 - Septembre 2014 saxonnes qu’il interprétera en français. À On sent bien que ces étiquettes l’éner­ Détresse et amitié l’époque, l’anglais est moins maîtrisé par le vent. « Je suis contre l’engagement. L’enga- public, de nombreux chanteurs adaptent gement c’est l’aveuglement ! Le XXIe siècle Dans les valeurs qui définissent aussi des versions françaises. La vague yé-yé nous indique que, le monde ayant évo- Hugues Aufray, le mot amitié a une place déferle. Halliday et Mitchell se déhanchent. lué, les concepts de gauche et de droite centrale. « La fidélité en amitié est fonda- Aufray, lui, fait découvrir au sont dépassés. L’engagement a ceci de mentale. Je suis fidèle à mes sentiments. Je ne monde francophone. Puis, il reprend aussi dangereux : il vous oblige à beaucoup de sais pas désaimer quelqu’un que j’ai aimé. » des chansons de Georges Brassens ou concessions. » Pour celui qui a traversé Il poursuit : « Quand j’avais treize ou qua- Félix Leclerc. Entre deux générations et une époque ravagée par le fascisme et torze ans, je voulais faire de la sculpture et de entre deux styles, Aufray trace son (micro) aveuglée par le communisme, le constat la peinture. Le manque d’argent pour entrer sillon. Et les succès s’accumulent : San- est cinglant. « Après avoir chanté pour les aux Beaux-arts en a décidé autrement. Je me tiano, Céline, Stewball, Adieu Mr le profes- jeunes giscardiens, les communistes ne suis mis à chanter et j’ai été pris par le tour- seur, Debout les gars, Hasta Luego… m’ont plus engagé. C’est là que l’on voit que billon du succès. Mais dans mon parcours, le dogmatisme est dangereux. » les faillites ou les coups durs se sont parfois Scout jamais ! présentés. ‘Tout ce qui ne me tue pas me rend Chrétien agnostique plus fort’ disait Nietzsche. J’ai pu surmonter Alors qu’il figure au répertoire de tous les les épreuves difficiles qui m’ont été imposées chansonniers que l’on trimbale lors des Si on l’amène sur le terrain de ses convic- par certains associés. Je n’en suis pas mort. feux de camps, Hugues Aufray ajoute : tions, Hugues Aufray n’est pas moins Cela m’a évité de sombrer dans le travers de « Beaucoup de gens pensent que j’ai été disert. « Je me définis aussi comme chrétien. chanter des valeurs de partage et de ne pas scout parce que tous les scouts, qu’ils soient Les valeurs qui m’animent, je les ai trouvées savoir les vivre… Quand on est trop riche, protestants, catholiques, juifs, musulmans dans les paroles premières du Christ. On a le c’est qu’on n’a pas assez partagé ! » ou encore athées, m’ont récupéré. Pourtant, droit de penser que par sa parole, le Christ je n’ai jamais fait partie d’un mouvement nous a donné ses indications, tout à fait La mort est naturelle de jeunesse. » Né en 1929, il n’a pas encore naturelles : tu ne tueras point, tu ne voleras onze ans quand la Seconde Guerre mon- pas… Ce n’est pas extraordinaire en soi, Sa fin de vie, il la voit arriver sereine- diale éclate. « à ce moment, la France est mais le dire, c’est bien ! » Ancien élève au ment… « à 85 ans, on a le droit de consi- perturbée. Le scoutisme a plus dérer que ce n’est pas choquant ou moins disparu. Puis il a été « Les valeurs qui m’animent, je les ai trou- de disparaître. La mort est une rejeté par les gens de gauche chose naturelle pour quelqu’un qui considéraient le scoutisme vées dans les paroles premières du Christ. » qui a vécu. Cela a l’air très simple, comme de droite ou bourgeois. » mais c’est pourtant vrai. Tout C’est plus tard qu’il s’intéresse à Baden Collège de Sorèze (Tarn) chez les Domi- meurt : la nature, les saisons… Il y a la nais- Powell. Notamment lorsqu’en 2007, nicains, Hugues Aufray garde d’eux un sance, la maturité puis vient la fin. Ce qui il écrit Tendons-nous la main qui sera excellent souvenir. Leur particularité : ils est choquant, c’est la mort d’un enfant, car l’hymne du centenaire du mouvement étaient très modernes. Mais il ajoute : « Je il n’y a rien de plus sacré. » scout français, chanté devant des milliers me considère aussi comme agnostique. La mort, il l’a côtoyée jeune. La guerre, de scouts au Champ de Mars à Paris. « BP Cela veut dire que l’image d’un Dieu tradi- bien sûr. Mais aussi le suicide de son frère était un pionnier. Il a inventé l’écologie. Il a tionnel, avec une grande barbe, qui décide Francesco, d’un an son aîné. « C’est un appris aux jeunes à vivre en harmonie avec de tout et que l’on prie pour obtenir des drame que je porte. Il aurait dû faire carrière les autres, les animaux, la nature. Toutes faveurs, je n’y crois pas. Dieu n’est pas un car il avait une très belle voix d’opéra. » Un ces valeurs invitent à vivre avec l’autre, son comptable, il n’est pas là pour additionner grand frère qui avait prédit à son cadet : prochain. » ce que l’on fait de bien ou de mal. Pour moi, « Tu seras concertiste… » Francesco avait Dieu est un mystère. La vie est un mystère. » bien vu. Une sorte de fidélité envers un Inclassable encouragement. Écoute dans le vent Et une fidélité envers les gens simples, les Nature, solidarité, altruisme, antira- laissés pour compte, les différents, ceux cisme… Hugues Aufray est un peu le « J’ai devant moi une photo de Georges qui se situent à la marge. porte-étendard des valeurs universelles. Brassens, dont on dit à tort qu’il était « Protest singer » sans être trop engagé ? athée. Il y a une grande différence pourtant Stephan GRAWEZ « Je suis politiquement incorrect car quand entre athéisme et agnosticisme. L’athée a En concert le dimanche 9/11 2014 à 15h au Forum on ne peut être classé politiquement, on une certitude, tandis que moi je n’en n’ai de Liège. Une initiative du Patro et des Scouts de est forcément incorrect », s’amuse-t-il. aucune, insiste Hugues Aufray. Je suis un Soumagne. En première partie, « Les 100 choristes ». Mais derrière la dérision, c’est l’incompré- enfant de Montaigne. Je me pose des ques- : www.solmania.be hension qui domine. Car s’il a chanté de tions et j’ai des réponses qui me viennent de Billetterie : Forum-Liège ( 04.223.18.18 : www.ticketmaster.be/event/453 nombreuses fois pour des causes huma- ma conscience. » Pas étonnant que le mor- nitaires ou « pour la gauche », on le dit ceau Blowin’in the wind ait séduit le trou- Des places à gagner. Dans son numéro parfois « de droite »… Sans doute un badour, lorsque Dylan dit que la réponse d’octobre, L’appel offrira des places pour le concert de Liège. Restez donc attentifs. effet collatéral d’un concert donné pour est dans le vent… « Dylan parle souvent les jeunes giscardiens ou du soutien à la de Dieu dans ses chansons. Le vent c’est la Retrouvez l’interview complète avec Hugues Aufray sur candidature de Chirac en 2002 ? conscience. » www.magazine-appel.be (Rubrique « Les + de L’appel ») 6 À la Une L’IRRÉSISTIBLE TENTATION DE L’HISTOIRE

369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel De Wever, « fürher » de Flandre ?

Un malaise commence à étreindre une partie de la Flandre, celui de la menace d’un totalitarisme politique et idéologique, qui tendrait à s’imposer à tous. Subtilement et sournoisement. Au nom de la N-VA, et par l’entremise de son charismatique leader. Crainte non fondée ou retour de bâton d’une histoire pas si lointaine ?

orsque l’on obtient la confiance aux Flamands, 31,88% des votes et un sur trois nous l’a accor- dans sa Région, dée. » Un bémol purement et que l’on repré- stratégique puisque, dans Lsente 20,26% des élec- la suite de son message, le teurs d’un pays au niveau président de la N-VA conti- fédéral, peut-on affir- nuera à se présenter comme mer parler au nom de le chef de tous les Flamands,

tout un peuple ? Et si (N-VA) Alliantie © Nieuw-Vlaamse déclarant notamment : l’on a obtenu ces scores, SYMBIOSE. « Nous devons aussi protéger n’est-ce pas, au moins Le couple fusionnel De Wever - Flandre est-il réel ? les intérêts de la Flandre au en partie, parce qu’on niveau fédéral ». Une mission s’est présenté à des élections comme confusion d’identité, savamment entrete- qui ne peut incomber qu’au parti incar- l’unique légitime (et obligatoire) voix de nue : même à 30%, N-VA = Flandre. Une nant l’ensemble du peuple flamand… ce peuple ? symbiose complète, un couple fusionnel, Si l’on prend un peu de distance par rap- qui disqualifie tout autre parti qui oserait port aux résultats des élections du 25 mai encore s’identifier à la Flandre. Le 25 mai TENTATION dernier, ces questions ne peuvent être dernier, Bart De Wever a été très clair à écartées. Que la N-VA soit le premier parti ce propos, dès les premières phrases de Une telle velléité d’identification d’une en Flandre et même en Belgique, nul ne son speech de victoire : « Les Flamands partie à un tout porte un nom : totalita- le conteste. Mais cela lui permet-il de se ont choisi et ils ont choisi de changer. Ils risme. « Une forme de pouvoir (…) abso- confondre avec la Communauté dont il ont choisi la N-VA. » En utilisant la formule lue, ayant pour principale caractéristique est issu ? Même en étant le premier, il ne « les Flamands », comme il le fait fré- de tendre à la dissolution de la frontière représente ni la majorité, et a fortiori la quemment, et notamment lors du débat entre l’État et la société », comme le défi- totalité, d’un corps électoral. télévisé qui l’opposait à Paul Magnette, le nit l’Encyclopédie Universalis. Ou un « sys- leader du parti s’approprie à son seul pro- tème politique dans lequel l’État, au nom fit l’ensemble du peuple flamand. Ce soir d’une idéologie, exerce une mainmise sur la ET POURTANT… d’élections, comme à d’autres occasions, totalité des activités individuelles », selon il ne dira pas « une partie des Flamands » Le Larousse. Tout le discours de la N-VA, qui se résume ou « certains Flamands ». Ce n’est que L’histoire politique belge a toujours été dans la plupart des cas à celui de son pré- dans la suite de son propos qu’il nuan- marquée par la présence de partis poli- sident, tourne cependant autour de cette cera en précisant : « Nous avions demandé tiques dominants. Mais aucune de ces À la Une 7 L’appel 369 - Septembre 2014 grandes formations n’avait cédé jusqu’ici tionnaire », voulant le bien du peuple, TOUT ET RIEN à la tentation de se confondre avec l’en- est nécessairement rejeté par les politi- semble de l’État ou de la Nation. On pour- ciens en place. Bien des pouvoirs se sont Surtout si le discours du parti invite à rait ne voir dans ces paroles que du dis- bâtis sur ce mécanisme, allant dans cer- mesurer les victoires en fonction du che- cours et de l’effet de manches. Mais déjà, tains cas jusqu’à susciter eux-mêmes les min parcouru. Un exercice qui plaît beau- le fait que cette assimilation entre un actes délictueux dont ils se sont ensuite coup à son président, comme en atteste parti et l’ensemble de la population d’une désignés victimes. La N-VA n’en est pas là cet extrait de son discours de clôture composante du pays soit faite tant ad mais exploite à l’envi toutes les occasions du Congrès de février 2014, reproduit intra (quand le parti parle aux Flamands) de souligner les ostracismes manifestés à avec complaisance, comme beaucoup que ad extra (quand il parle aux Franco- son égard. Le discours de victoire de Bart d’autres, par la presse flamande : « J’in- phones) pousse à écarter cette hypo- De Wever, le 25 mai, débute d’ailleurs par vite qui me soupçonnerait d’un optimisme thèse. Comme l’écrivait le chercheur Ico ce thème : « Le courage a vaincu la vio- excessif à se rapporter à l’année bénie Maly, docteur en philosophie de l’Univer- lence. Jamais on n’a voulu utiliser autant de 2002, année de notre congrès de fonda- sité de Tilburg, « à la démocratie flamande puissance pour essayer de déconcerter les tion. Lorsque, sous la direction inspirée d’un correspond donc la nation flamande, et Flamands. » Quelques jours plus tôt, dans jeune homme inconnu, sympathique mais cette nation parle d’une seule voix à tra- son message aux Francophones, le pré- un peu dodu, nous avons voulu concevoir vers Bart De Wever », « personnification de sident commençait aussi par se plaindre : un parti pour six millions de Flamands. Un la communauté morale qui défend avec « Elio Di Rupo refuse tout débat avec moi. parti flamand de soutien populaire, un syn- orthodoxie les intérêts des ‘Flamands’. » Par contre, il ne se prive pas de m’atta- dicat de l’intérêt général flamand. (…) Ceux quer personnellement, sans me donner qui étaient déjà là à l’époque, à Louvain, se la chance de répondre. » La N-VA affirme souviendront de l’ambiance particulière. PENSÉE UNIQUE être partout considérée comme pestifé- C’était un exercice basé purement sur la foi. rée. Alors que, depuis 2012, elle compte Personne en dehors de la salle n’aurait parié Ce positionnement dépasse aussi le trente-huit bourgmestres et participe à un sou sur nous. Nous n’avions rien au-delà cadre des discours. Une partie des Fla- une centaine de majorités communales. de la force de nos convictions. Regardez- mands qui ne partage pas le point de Jusqu’à ce printemps, le parti était déjà nous aujourd’hui. » De rien à tout, est-ce là vue de la N-VA, ni de ceux qui lui sont au pouvoir à la Région flamande. Autant l’itinéraire « normal » d’un parti qui se dit proches, dénonce de plus en plus sous de postes qui lui garantissaient une capa- démocratique ? le manteau le climat malsain qui com- cité d’action incontestable. Mais adopter mence à régner en Flandre. Bien sûr, la une « attitude Calimero », pour reprendre Frédéric ANTOINE N-VA ne dispose pas de milices chargées les mots du chercheur Ico Maly, n’est-il de créer un régime de terreur parmi ceux pas le meilleur moyen de rassembler ses Ico MALY, L’idéologie politique de la N-VA, revue qui ne pensent pas comme elle. Mais supporters ? Démocratie, 2013. elle n’en a pas besoin. Les militants et les supporters du parti suffisent parfois pour dissuader d’exprimer des avis différents. FLASH-BACK « Dans ma commune, raconte un habitant de la périphérie flamande de Bruxelles, 30 janvier 1933. Adolf Hitler devient chancelier d’Allemagne. Un impressionnant je n’oserais pas mettre à ma fenêtre une cortège aux flambeaux célèbre cette victoire. Pourtant, le parti nazi était alors affiche pour un candidat Sp.a[socia - loin d’être majoritaire au Reichtag, le Parlement allemand. Lors des élections de liste]. Non, je n’oserais pas ! » Car tous les novembre 1932, il n’avait obtenu « que » 33,1% des votes (moins deux millions « bons » Flamands sont sensés soutenir de voix par rapport au scrutin précédent, survenu en août). Mais le parti national-­ la N-VA. De même, dans certaines locali- socialiste était le premier, et, fin de 1932, l’entourage du vieux président Hinden- tés, il vaut mieux ne pas avoir des goûts bourg était parvenu à le convaincre qu’Hitler était l’unique espoir du pays, notam- culturels trop ouverts au modernisme ment face au chaos et à une menace de prise du pouvoir communiste… et à la diversité. Ces choix-là ne cadrent Mussolini n’était pas non plus à la tête d’un parti majoritaire lorsqu’il est devenu Pre- pas avec ceux de la N-VA, que tous les mier ministre après sa « marche sur Rome » en 1922. Comme Hitler, il était à la tête Flamands sont supposés partager. Une d’une majorité hétéroclite… que l’un et l’autre finiront par phagocyter puis anéan- sorte de pensée unique menace ainsi de tir. Tout en établissant un climat de terreur vis-à-vis de qui ne partageait pas leurs s’installer, clouant au silence les anticon- opinions, grâce à l’aide des organisations paramilitaires qu’ils avaient mises sur pied. formistes. Une situation, qui en rappelle Dans son discours de clôture du Congrès Nazi de 1934, Hitler pouvait parler au d’autres, vécues par le passé… nom du « peuple allemand », affirmant son but : que« tous les Allemands deviennent des National-Socialistes ». « Quand notre parti n’avait que sept membres, il avait déjà deux principes : avoir une véritable idéologie. Et être, sans compromis, le seul et unique VILAIN PETIT CANARD pouvoir en Allemagne. » Tant pis pour qui n’était pas d’accord. Dans un autre discours, le führer avait été Autre comparaison possible avec les clair à ce propos : « Une nouvelle communauté est en train de se bâtir en Allemagne. » fantômes du passé : la victimisation face « Ceux qui ne peuvent même pas voir plus loin que le bout de leur nez méritent notre à l’innovation. Cette technique, qui n’a pitié plus qu’autre chose. » pas seulement été utilisée par les com- F.A. munistes, prétend qu’un parti « révolu- 8 À la Une RUPTURE ? JOC : 369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel Trois lettres, un esprit La JOC a changé la signification des initiales de son nom, en y supprimant les références « ouvrière » et « chrétienne ». À deux doigts de la béatification, Mgr Cardijn allait-il, une fois encore, se retourner dans sa tombe ? Une jeune permanente régionale, une ancienne présidente fédérale, et le responsable du CJC s’expliquent : « Le choix vient des jeunes jocistes. Il est mûrement réfléchi. »

nit pas, qui est assez statique, même eux

© JOC se détachent… » Le projet, assure Émilie, reste dans la continuite des principes fon- dateurs de la JOC creée par Cardijn. L’un de ces principes étant de donner la voix aux jeunes du milieu populaire et de les mettre au centre du mouvement et des decisions. « Ce sont eux qui guident les thématiques de campagnes, d’actions. Elles varient d’ailleurs en fonction du terrain. Dans de grandes villes comme Bruxelles ou Liège, on va surtout travailler autour de l’aspect sécuritaire, des droits des jeunes. À Charleroi, les membres ont une vision très globale des problèmes de société, avec une réflexion sur la consommation et ils veulent trouver des alternatives locales et interna- tionales. » Des thèmes qui rejoignent ceux mis en avant par l’extrême-gauche. Peut-on Jeunes JOCISTES. dès lors parler d’un noyautage du mou- Ce sont eux qui sont à la source du changement de nom. vement par le PTB ? « Loin de là ! La JOC, comme le MOC d’ailleurs, partage des idées n ne dit plus « Jeunesse Ou- et Julien Bunckens, secrétaire général du de la gauche progressiste qui envisage vrière Chrétienne » mais « Jeu- Conseil de la Jeunesse Catholique. une société plus solidaire. Les jeunes des nes Organises et Combatifs ». milieux populaires avec lesquels nous tra- Par contre, le terme « jociste » LES JEUNES À LA BARRE vaillons sont tellement dans la m… qu’ils Oreste. A l’occasion de son assemblee peuvent être attirés par les idées d’extrême- generale extraordinaire, la JOC-JOCF Pour Émilie Delcourt, ce changement gauche, mais il n’y a pas chez nous d’affiliés a decide de changer la signification de nom, n’est pas une lubie dans l’air du à un parti, quel qu’il soit ! » La JOC carolo des initiales de son nom. « La Jeunesse temps mais le choix des jeunes jocistes. s’installe cependant parfois dans la salle Ouvrière Chrétienne s’est éloignée depuis Un choix mûrement réfléchi, débattu culturelle du PTB local, « La Braise »… quelques années de l’intuition de son fon- entre permanents, avec les jeunes, dans « Nous avons relativement peu de moyens, dateur (l’abbé Cardijn) », titrait un article les différents organes de décision. Des se défend la jeune permanente. Et, à l’in- publié en janvier dernier. « Pas du tout ! », jeunes qui vivent avec leur temps, qui verse du Centre Jeunes Taboo, rattaché à répondent en chœur Émilie Delcourt, ont de nouvelles préoccupations… « Il la FGTB, avec qui nous travaillons réguliè- permanente à la JOC carolo, Marina Mir- y a bien sûr toujours de jeunes chrétiens à rement, nous n’avons pas de local sympa kès, présidente de la JOC de 1989 à 1993 la JOC, mais face à une Église qui ne rajeu- pour accueillir les jeunes, organiser des À la Une 9 L’appel 369 - Septembre 2014 ciné-débats, etc. La Braise est donc une opportu- l’époque, au moment des élections, la JOC avait FAITS nité d’étendre nos activités. Ça ne va pas plus loin, publié une affiche dont le slogan était : “À gauche nous veillons à notre identité. » toute !” » Et de rappeler, en clin d’œil, que le RESTAURATION. La col- livre La révolte des enfants de Cardijn, publié par légiale Saint-Denis à Liège ÉVOLUTION PAS RÉVOLUTION son époux, Pontien Kabongo, aumônier puis propose de visiter accompagnateur d’adultes, avait pour cou- son retable de la Pas- « Cette polémique, elle est loin d’être récente ! » verture une affiche représentant, côte à côte, sion, nouvellement restauré. réplique pour sa part Marina Mirkès. Perma- Jésus, le Ché, Allende et Rosa . Un Ce chef d’œuvre de l’école nente puis présidente du mouvement dans ouvrage paru… 1975. brabançonne du début du les années 1980 et 1990, elle rappelle que XVIe siècle est une sculpture en les débats autour du changement de nom BESOIN DE RECONNAISSANCE bois polychrome composée étaient alors déjà d’actualité. « La JOC évolue, de 150 figurines. et c’est bien. Déjà à l’époque, nous travaillions « Le fait d’avoir un C dans son nom n’est pas le DIMINUTION. L’Ins- la question de la recherche de sens, plutôt que plus important », précise Julien Bunckens. Pour titut des Œuvres de les questions d’Église. De jeunes musulmans, le chef du CJC, la référence chrétienne doit faire Religion (IOR), surnommé la d’autres non-chrétiens avaient rejoint nos rangs, sens pour les jeunes qui doivent s’y retrouver. « Banque du Vatican » a connu et la question du C était « Ce qui compte, c’est une moins bonne année finan- posée… Le choix de « La JOC évolue, et c’est bien. l’ouverture, la méthode, cière, causée par la réforme conserver le terme chré- les moyens concrets de de l’institut afin de le rendre tien était alors cohérent Déjà dans les années 1980 et faire vivre les valeurs plus transparent. Quelques parce qu’on était dans 1990, nous travaillions la ques- partagées. » Il voit plu- 400 comptes appartenant à des clients extérieurs au Vati- la période post-scission tôt l’abandon du terme tion de la recherche de sens, plu- can ont été fermés causant un entre la CIJOC, restée chrétien comme une départ de fonds d’un montant fidèle au Vatican, et la tôt que les questions d’Église. » opportunité pour la de 44 millions d’euros. JOCI (JOC Internatio- JOC. « Cela va leur per- nale) dont nous faisions partie. » Les tensions mettre de trouver un espace médiatique plus PROFESSIONNA- avec l’Église ne sont pas neuves. « Non ! Il y a large. Ne nous voilons pas la face : il y a une cer- LISME. Une for- mation en gestion vingt à trente ans se créait déjà une distance taine forme de discrimination envers l’associatif et conservation du patrimoine par rapport à l’Église, et des frictions avec les chrétien, des a priori. L’un des objectifs de la JOC mobilier religieux va être orga- adultes, y compris avec le MOC, la CSC. Quand est de sensibiliser le plus grand nombre de jeunes nisée dès septembre à Namur. par exemple on a abandonné la notion d’aumô- à des thèmes comme la précarité de l’emploi, les Elle a été mise sur pied par nier et opté pour celle d’animateurs d’adultes, brutalités policières… Dans cette vision-là, cette l’université de Namur et l’évê- ça a été le tollé ! » Pour Marina, ni à l’époque, décision est cohérente. » Elle n’est donc pas une ché. La formation est destinée ni maintenant, il n’y a de rupture avec Cardijn. négation de Cardijn. « Non, l’esprit est toujours aux responsables qui gèrent « C’est une adaptation. Parce que c’est justement là, ce sont les jeunes qui ont la parole. » le fonctionnement des églises une dimension importante et une force de la JOC Et de rappeler aussi que de nombreux mou- et désirent les initier à tous les d’évoluer avec la société, de trouver une façon vements, dont le patro, débattent de leur aspects de la gestion du patri- de donner une place aux jeunes, avec leurs inté- appartenance à la sphère chrétienne. Concer- moine de celles-ci. rêts, leurs préoccupations. » Avec son regard nant l’accusation de collusion avec les partis VICTIMES. Après les d’ancienne, elle observe aujourd’hui deux ten- d’extrême-­gauche, le chef du CJC la balaie, lui avoir longuement re­- dances dans la JOC : un axe gauche plus radical, aussi. « Les jeunes réagissent face à un monde çues, le pape a célébré la messe clairement ouvriériste, et un axe tourné vers la politique où la gauche est de plus en plus au au Vatican, le 7 juillet, en pré- transition écologique. « Dans une société de plus centre. On peut parler d’une forme de virage, un sence de six adultes victimes en plus violente, il est normal que les actions des peu plus à gauche, un peu plus forte qui peut se d’abus sexuels commis par des jeunes soient plus tranchées. L’important est de rapprocher de la gauche-extrême. Mais le PTB n’a prêtres. Lors de son homélie, il poursuivre le débat, de veiller à rester autonome pas pris le pouvoir ! Pour discuter très régulière- a demandé pardon pour les di- et de garder la distance critique pour trouver ment avec des permanents jocistes, je peux en rigeants de l’Église qui avaient des réponses. » Elle rappelle également que le attester. » Le cardinal Cardijn peut, semble-t-il, « omis de réagir aux abus dont rapprochement avec la gauche n’est pas neuf, reposer en paix. Et arrêter de se retourner ! ils avaient connaissance ». qu’il va vers un changement de société soli- OUVERTURES. « Il y a vraiment daire qui donne le pouvoir aux gens. « Déjà à Annelise DETOURNAY un problème, mais il n’est pas majeur. Cela prendra du LA JOC, 90 ANS DÉJÀ temps, mais il y a des solutions et je vais les trouver. » Telle est la La JOC a été fondée en 1924, par l’abbé Joseph Cardijn, en partant d’un constat : la détresse déclaration qu’a faite le pape matérielle, religieuse et morale des jeunes travailleurs, trop souvent laissés à l’abandon. François à propos du célibat L’ambition de la JOC était de sortir ces jeunes de leur isolement et de les grouper dans un des prêtres, le 13 juillet, dans mouvement. Avec la Jeunesse Ouvrière Chrétienne, le fondateur voulait développer une vie une interview accordée au associative autonome, fondée sur la prise de responsabilités. Celle-ci repose sur la pratique quotidien italien de gauche La d’une méthode, « Voir, Juger, Agir », toujours utilisée à ce jour. Repubblica. 10 À la Une AGRICULTEURS PORTEURS DE HANDICAP

369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel La ferme de la différence

Cinq hectares de production durable et bio fournissent un emploi à des personnes handicapées au nord de Bruxelles. La ferme « Nos Pilifs » relève le défi de la culture rentable sans pesticide, de la solidarité entre travailleurs et de l’excellence professionnelle. – Godelieve UGEUX – Godelieve © Magazine L’appel

DES PROJETS FLORISSANTS. L’Entreprise de Travail Adapté (ETA) emploie 140 travailleurs handicapés.

a ferme est située à Neder-Over- auraient un job. Elle a commencé modes- LE GRAND SAUT ÉCOLOGIQUE Heembeek, nom bien difficile à tement avec un élevage de poulets, pour prononcer pour le non-natif néer- évoluer vers différentes activités agri- Vouloir tout raconter de « Nos Pilifs » landophone, en pleine terre fla- coles et répondre de plus en plus systé- serait téméraire car le projet résulte Lmande bruxelloise. Détente bucolique matiquement à des objectifs de création d’une histoire de volonté et de généro- et activités laborieuses, champs, fleurs, d’emplois. Depuis 1984, le projet s’est sité, de défis, de recherche de subsides, arbres, sentiers… Ce n’est pourtant pas considérablement enrichi sur la certitude de réflexions et d’audace. Avec peut- une exploitation comme les autres. Elle que le travail est un outil d’intégration être autant d’échecs que de réussites. est issue de l’idée de Nelly Filipson, fon- sociale et qu’il doit être utile, valorisant Les uns comme les autres ont forgé la datrice en 1971 d’un Centre de réadap- et rémunérateur pour toute personne mise en place progressive de différents tation ambulatoire (CRA) qui prend en porteuse d’un handicap. Aujourd’hui, secteurs d’activité là où il n’y avait, voici charge à long terme des enfants « diffé- 140 personnes handicapées entourées de trente ans, qu’un champ de chicons ! rents ». Et puis les bambins ont grandi et 30 responsables travaillent à « Nos Pilifs » Premier petit tour par la boulangerie- ont été confrontés aux contraintes de la dans différents secteurs professionnels. épicerie. Du pain est cuit quotidienne- vie adulte et notamment du travail. De Et la diversité des jobs ne manque pas ment, les travailleurs commencent à sept là, l’objectif de lancer une ferme où ils dans cette importante entreprise. heures du matin. Non, pas plus tôt… Car à À la Une 11 L’appel 369 - Septembre 2014 quoi cela servirait-il de fixer un horaire que ces à Benoît Ceysens qui tient à ce que chaque tra- INDICES jeunes ne pourraient respecter ? Tout est une vailleur puisse donner sens à son boulot. L’idée question d’organisation et de matériel appro- est venue alors de lancer « Nos Pilifs-Web » CONDAMNÉS. Deux prié. Cet esprit vigilant sur l’écoute et l’accom- en rassemblant des commandes par internet. haut gradés de l’ar- pagnement de ces travailleurs pas tout à fait Groupées, elles diminuent les frais de trans- mée argentine ont été comme les autres préside à toutes les tâches. port et proposent toute la palette de produc- condamnés à la per- C’est le cas à l’épicerie-bio où les clients doivent tion de la ferme : des paniers bio (huit sortes pétuité pour l’assassi- bien accepter de faire la file. distribuées dans vingt points-relais à Bruxelles) nat de Mgr Enrique Angelelli, Bio, c’est le maître-mot à la ferme. Un choix qu’a à l’épicerie ou à la jardinerie, sans oublier les évêque de La Rioja, en 1976, fait le directeur de cette Entreprise de travail fleurs ! pendant la période de dicta- adapté (ETA), Benoît Cysens, en connaissance ture. Son meurtre avait eu lieu de cause. « On savait que le bio pouvait poser des au lendemain d’un hommage problèmes de coût et de durabilité des produits. » UN GODET À L’ESTAMINET rendu par l’évêque à deux Mais il fallait se lancer dans ce mouvement prêtres, tués alors qu’ils tra- exponentiel des consommateurs d’aujourd’hui. Le responsable, trois animateurs et neuf tra- vaillaient dans des quartiers « On a perdu peu de clients, poursuit Benoît. Et vailleurs accueillent aussi les écoles, organisent pauvres. La junte avait affirmé on en a gagné beaucoup. Nous avons accueilli des anniversaires et des stages durant toute que Mgr Angelelli était mort les gens du quartier, les personnes de passage qui l’année. Les animations tournent autour de dans un accident de la route. viennent se promener et visiter nos animaux. » l’alimentation et la biodiversité, la ferme « à FRANC-MAÇON. Le domaine s’organise en effet en deux par- l’ancienne » et au fil des saisons. Cette solide Dans les Alpes fran- ties. D’un côté, un espace accessible au public, équipe gère également les potagers ainsi que çaises, la mise à comme le parc anima- l’élevage de poulets l’écart, fin 2013, du curé de lier avec ses ânes, ses dont les œufs sont ven- Megève pour cause d’appar- cochons, ses moutons, Détente bucolique et activités dus à l’épicerie. Enfin, tenance à la franc-maçonnerie ses poules, ses lapins. dernière activité lucra- laborieuses, champs, fleurs, continue à faire réagir. L’inté- On peut venir y jeter un tive qui ouvre à l’em- ressé, Pascal Vesin, a reçu le œil par le chemin prin- arbres, sentiers… Ce n’est ploi, l’estaminet. Tout soutien d’un autre franc-ma- cipal de la ferme qui pourtant pas une exploita- le monde peut s’y ins- çon, lui aussi catholique (mais borde la grande « Pro- taller et boire un verre tion comme les autres. pas prêtre), qui vient de pu- menade verte de Neder- ou même dîner sur la blier un livre pour le défendre, Over-Heembeek » bien terrasse. Beaucoup de sous le titre Je suis chrétien connue des Bruxellois amateurs de nature. Bruxellois s’y rafraîchissent en fin de prome- et franc-maçon, où est le pro- De l’autre côté, l’exploitation agricole est réser- nade et après avoir « fait leur épicerie ». Car si le blème ? Il s’est engagé à distri- vée aux activités professionnelles, liant les pro- sens d’une telle ferme est de garder en priorité buer l’ouvrage dans toutes les grès économiques et environnementaux. Ce l’emploi accessible aux personnes handicapées loges de la région et à l’offrir à qui fait de la ferme une entreprise durable où et de fournir des services rentables, sa réussite l’évêque de Haute-Savoie, qui s’exercent pas moins de six métiers différents. dépend des clients. Des citoyens qui ont com- avait destitué l’abbé Vesin. Leur choix ne s’est pas fait au hasard mais par pris l’intérêt, pour leur propre santé et pour la complémentarité et visant chaque fois l’utilité société, d’opter pour des circuits-courts, des MÉDIAS « CHRÉTIENS » ? Le sociale dans le quartier et le contact avec le emplois locaux. Des citoyens sensibles aussi torchon brûle entre l’épiscopat client et les visiteurs. au partage du travail avec ceux qui ont plus de espagnol et les médias audio- mal à se faire accepter dans un circuit profes- visuels généralistes qu’il dé- sionnel classique. tient. Certains évêques repro- JARDINS AU SOL OU SUR LE TOIT ? chent à la radio et Godelieve UGEUX à la chaîne « 13tv » de ne pas L’activité la plus porteuse de « Nos Pilifs » est répondre aux idéaux de l’Évan- l’entreprise des jardins. Fort appréciée, elle gile. Ces médias sont accusés n’utilise ni pesticide, ni engrais chimique, ni d’être devenus des chaînes de substrat à base de tourbe mais des matériaux propagande du Parti popu- locaux et labellisés ainsi que des techniques laire au pouvoir, ainsi que de respectueuses de l’environnement. Les mares l’extrême-droite espagnole. naturelles, l’épuration des eaux par lagunage, PEINE CAPITALE. Des les piscines écologiques, le compostage et les groupes de pression toitures vertes n’ont plus de secret pour les militent, aux Philippines, équipes. Et puis il y a la jardinerie avec une pour la réintroduction grande variété de fleurs, d’arbres fruitiers, de de la peine de mort dans le plantes sauvages, et quelque 25 variétés de code pénal. La Conférence des plants de tomates ! évêques catholiques du pays Mais qu’en est-il de la manutention, cette acti- « Nos Pilifs » est ouvert tous les jours de 10h30 à 18h et s’y oppose, rappelant qu’ils vité souvent associée au travail des personnes le samedi de 9h à 18h. 347 Trassersweg, 1120 Bruxelles. prêchent l’Évangile de la vie. handicapées ? Son côté routinier pose question ( 02.262.11.06 : www.fermenospilifs.be 12 Signe ENTRE VIOLENCE ET ESPÉRANCE

369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel Martial, chirurgien nomade

solitude. Des enfants pris en tenaille par Le docteur Martial Ledecq un conflit qui les dépasse. Des blessés de guerre. Il opérera et amputera sous les a voulu « ouvrir son regard » bombes des hommes des deux camps. sur le monde en rejoignant Pour le médecin, il est important de conti- nuer à regarder tous ces êtres comme des Médecins sans frontières humains, à prendre conscience qu’ils sont tous porteurs de dignité, souvent cachée. dans des missions à haut « Face à la guerre, il y a certainement des risque. À Haïti, en Syrie, au crimes de guerre, mais la guerre elle-même, Burundi, au Pakistan, en n’est-elle pas un crime ? » Afghanistan et dans bien d’autres pays déchirés par la ÉLARGIR SON REGARD guerre et la misère. Ne regarde-t-on pas trop souvent le monde à travers sa petite fenêtre avec De quoi ébranler ce chrétien l’envie de venir avec son savoir ? Ne et le plonger dans une quête serait-il pas plus intéressant de deman- der à cet homme qu’on rencontre ce que de sens. lui voit, vit, comprend ? Comment réa- gir face à la question de l’injustice, de la violence, de l’inutile, de la gratuité ? Face à des pouvoirs totalitaires, en Syrie, en Irak ou ailleurs, n’est-il pas un peu naïf de encore en l’Homme ? Toutes ces questions, Martial Ledecq se les est

© Magazine L’appel – Paul FRANCK posées. Mais il continue à penser que la foi en l’humain est possible s’il y a regard, DIALOGUE. contact, empathie. De petites choses Pour le chirurgien, c’est la seule manière de créer des passerelles. peuvent bouleverser le regard. « Je me souviens de cette infirmière syrienne qui me demande si je soignerai Bachar el-Assad et qui, devant ma réponse, me dit : “moi pas”. e n’est qu’à la fin de ma chirurgien Martial Ledecq décrit sa déci- Pourtant, quelques instants après, elle a vie professionnelle que j’ai sion de quitter le Centre hospitalier de partagé le peu de nourriture qu’elle avait pris la décision de larguer Libramont où il a exercé durant 25 ans avec un soldat des forces syriennes blessé les amarres, de brûler les pour partir avec Médecins Sans Frontières, qui lui demandait à manger. » «Céchelles derrière moi et de concrétiser enfin en gardant un pied-à-terre à Libin, en une aspiration de près d’un demi-siècle : province du Luxembourg. Il va vivre des étendre le temps et l’espace, quitter son expériences où se croisent des violences HAÏTI, LE BOULET DE L’ESCLAVAGE univers mental, nourrir son imagination, extrêmes et des gestes de tendresse inat- observer d’un angle différent, rêver d’un tendus. Le Sida qui exclut des familles Son périple l’emmène également en autre possible. » C’est par ces mots que le et laisse les malades dans la plus grande Haïti. Là-bas, la question qui le taraude Signe 13 L’appel 369 - Septembre 2014 est celle de l’esclavage et de ses conséquences. Lorsqu’il s’incarne, ce n’est pas en Roi de la terre, INDICES En effet, après que la population d’origine a été c’est dans une humble famille qu’il commence complètement décimée en moins de 80 ans sa vie, et c’est sur une croix qu’il la termine entre RECONVERSION. L’église Sainte- de présence espagnole, il a fallu la remplacer deux brigands. » Catherine, dans le centre de par des esclaves venus d’Afrique, pour assurer Au final, dans ces situations extrêmes, Martial Bruxelles, connaîtra l’exploitation du pays. Cet esclavage a été long- aura trouvé une réponse essentielle : l’impor- bientôt sa nouvelle temps justifié par les pouvoirs politiques et reli- tance du dialogue. En face de cultures radicale- affectation. La Ville gieux. Même après l’indépendance conquise ment différentes, c’est là une manière de créer étudie divers projets de réa- par les esclaves, la France, ancienne puissance des passerelles. Les émotions essentielles sont ménagement qui transforme- coloniale, a poussé l’iniquité et l’aveuglement universelles, le prochain est partout le même. raient l’édifice en lieu sportif, en jusqu’à réclamer à la première république noire Alors pourquoi se replier frileusement sur soi- théâtre, en passage couvert, en de l’histoire américaine 150 millions de franc- même ? Il a en effet été souvent confronté musée ou en brasserie. L’option or d’indemnités. Haïti a payé la quasi-totalité­ dans ces pays déchirés à la question des into- de lieu de recueillement n’est de cette somme. Au- lérances réciproques pas non plus exclue, si l’église jourd’hui, dans ce qui pourraient, selon redevenait en partie affectée au qui s’appelle la « Cité « À travers le nomadisme de lui, venir de la préten- culte. Pour « tester » cette situa- Soleil », le quartier le quelques années, j’ai acquis la tion de détenir l’ultime tion, l’archevêque de Malines- plus violent de Port- conviction que nous avons un vérité. Ce qui vaut évi- Bruxelles a décidé d’y faire re- au-Prince et un des demment pour tous les dire la messe dès cet automne. plus grands bidonvilles fond commun d’humanité, de systèmes de pensée y PANEL THÉOLOGI- du monde, c’est en sagesse et une énorme réserve compris les systèmes QUE. Les théologiens même temps l’enfer et religieux. « Si aucune de tendresse les uns pour les Philippe Bacq, Ignace le paradis. Comment civilisation, aucune reli- Berten, Florence Hos- continuer dans cette autres. » gion ne revendiquait le teau et Paul Tihon ont dialo- violence totale une monopole de Dieu, nous gué sur Dieu, la mort et l’Église mission qui apparaît pourrions sans doute après lecture du livre Croire comme impossible ?, s’est interrogé plusieurs vivre dans la nécessaire harmonie qui s’impose à en un Dieu qui n’existe pas ? du fois Martial. « Et pourtant, poursuit-il, est-il pos- notre survie. » Pour faire sens, le docteur Ledecq pasteur hollandais Klause Hen- sible de penser que donner quelques caresses reprend une citation d’Emmanuel Levinhas : drikse, à l’invitation de Sonalux positives aux victimes et aux bourreaux n’est « Le lieu originel du sensé, l’acte fondateur de (Solidarité de chrétiens de Na- pas un geste romantique ? Faut-il connaître les l’Éthique est la rencontre bouleversante du visage mur et Luxembourg). ténèbres pour savoir que la lumière existe, l’hor- d’autrui, l’épiphanie du visage dans sa nudité et FEMME ÉVÊQUE. Le sy- reur pour apprécier la quiétude et la sérénité. Car sa fragilité qui me commande infiniment. Je suis node général de l’Église dans cet océan d’absurdité, il y a encore et tou- responsable de toi gratuitement et sans culpabi- anglicane d’Angleterre jours des moments de grâce absolue. » lité. » a voté récemment en faveur Le chirurgien des tranchées a en tout cas de l’ordination épiscopale des réussi à dénicher le bien, l’humanité, l’espoir femmes. « Une grande aventure LE SENS DE LA JUSTICE dans chacune de ses rencontres. « À travers le commence, faite de renaissance nomadisme de quelques années, j’ai acquis la et, en même temps, de désac- Que ce soit en Haïti, en Syrie, au Burundi, au conviction que nous avons un fond commun cord. Notre défi sera de faire les Pakistan, en Afghanistan ou dans d’autres pays d’humanité, de sagesse et une énorme réserve de comptes avec les divisions et déchirés, le chirurgien a été confronté aux tendresse les uns pour les autres. » Être nomade de continuer à aimer ceux qui enjeux de l’aide humanitaire. Une aide certes ne serait-ce pas profondément évangélique ? s’opposent à cette décision. Peu nécessaire, mais qui risque d’être dérisoire si d’institutions y réussissent », a on ne s’applique pas à retrouver le sens de la Paul FRANCK déclaré, Justin Welby, l’arche- justice. Pour le docteur Ledecq, son travail ne vêque de Cantorbéry. peut pas se défaire de la question métaphy- Martial LEDECQ, Itinéraires d’un chirurgien RÉFORME MÉDIATI- sique. Son origine chrétienne n’y est pas pour nomade, Neufchâteau, Weyrich Éditions, QUE. Le Vatican en- rien. « Si Dieu est Grand, il est peut être aussi Petit. 2014. Prix : 15,90 € - 10% = 14,31 € tend revoir la coordination entre ses divers médias (Radio Vatican, News.va, vatican. CHOCS DE CIVLISATION va, Centre Télévisé du Vati- can…), notamment dans le Le médecin ardennais est lucide : le regard occidental est marqué par un rationalisme fon- but de faire des économies. damental qui se heurte à d’autres regards. Ce sont des chocs de convictions. L’Afrique, par Une commission, présidée par exemple, peut-elle se payer le luxe d’être athée ou agnostique ? Lorsque les choses tournent un ancien patron de la BBC, mal, que la guérison n’est pas au rendez-vous, que penser ? « Le quémandeur était-il indigne, a douze mois pour réformer la supplique mal formulée, le Tout Puissant sourd à l’appel. Autant de questions éternelles que l’ensemble. Et mettre l’accent des générations d’hommes et de femmes se sont posées au bord de l’abîme des pensées infinies. sur les médias qui pourront Chacun y répondra à l’aune de ses propres expériences. » davantage toucher les jeunes. 14 Signe THÉOLOGIE CRITIQUE D’UN ÉVÊQUE CONTESTATAIRE

369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel Un certain Jésus « déshabillé »

L’interprétation des Évangiles, de la figure de Jésus, de son message doit être radicalement revue en fonction des connaissances scientifiques d’aujourd’hui et des recherches sur les croyances juives du premier siècle. C’est la conviction de John Shelby Spong, ancien évêque de l’Église épiscopale américaine de tradition anglicane. © Scott Griessel

DÉCAPANT. L’évêque remet en cause certains passages et notions de l’Évangile, comme le pêché originel et la Passion.

es travaux des théologiens et des choquera sans doute de nombreux chré- puie sur la Bible, rédigée il y a deux à trois exégètes ne manquent pas pour tiens mais peut être entendue et débat- mille ans. Il transmet des credo datant tenter de déceler dans les Évan- tue. du IVe siècle et utilise des pratiques giles ce qui relève de la vérité his- liturgiques élaborées pour la plupart Ltorique, de la conviction ou du mythe. – Tout dans l’Évangile ne doit pas être pris au XIIIe siècle. Je veux mettre ma foi à Ces recherches aboutissent souvent à au pied de la lettre selon vous? l’épreuve du dialogue avec les connais- des interprétations loin des credo offi- – La Bible n’est pas un ouvrage bio- sances du monde où je vis. Cela signifie ciels. Souvent la contestation par les graphique ou historique. Sa rédaction que nous, chrétiens, allons devoir gran- gens d’Église se fait très prudente dans est plus une tentative pour saisir, au dir et changer. Nous pouvons y arriver et l’expression pour ne pas effaroucher les moyen d’interprétations et de narrations nous verrons alors, j’en suis convaincu, la fidèles traditionnels ou les gardiens du l’« expérience » du Christ. Je considère naissance d’un « Nouveau Christianisme dogme. Cette fois, sans langue de bois, et par exemple comme des portraits pure- pour un Nouveau monde ». avec une franchise déconcertante, c’est ment mythologiques les récits de la nais- un ancien évêque de l’Église épiscopale sance, absents à l’origine du christianisme – Parmi les dogmes, vous remettez en américaine qui exprime un point de vue primitif. question la notion de péché originel… carrément critique dans un ouvrage inti- – Je pense que le péché originel, qui tulé Jésus for the non-Religious, traduit – Il faut revoir les credo ? part de l’hypothèse d’une perfection en français Jésus pour le XXIe siècle. Cette – Le christianisme est un système de originelle dont nous serions déchus, est remise en cause du catéchisme officiel croyances du XXIe siècle, mais qui s’ap- une idée qui a perdu toute valeur depuis Signe 15 L’appel 369 - Septembre 2014 que les travaux de Charles Darwin l’ont totale- – Dernier récit des Évangiles : La Résurrection… FEMMES ET HOMMES ment invalidée. L’idée de Jésus mort sur la croix – Je ne mets pas en doute la réalité de l’« expé- pour racheter les péchés des hommes est bien rience » de la résurrection par les disciples mais AUNG SAN SUU KYI. La étrange. Elle suppose que Dieu ne peut donner je m’interroge sur l’exactitude de toutes les célèbre opposante bir- son pardon sans un sacrifice humain ou une descriptions rapportées par les évangiles. Un mane a reçu le soutien offrande de sang. Cela fait de Dieu un monstre, rapide regard aux quatre évangiles révèle que, des évêques de son pays afin de de Jésus une victime et de vous et moi des sur la résurrection, ils ne proposent guère plus lui permettre de participer aux « assassins coupables de la mort du Christ ». Rien qu’une série d’affirmations contradictoires. Les élections présidentielles de ne me plait dans la théologie de l’expiation, qui disciples étaient juifs. Ils avaient une vision du 2015. La junte militaire qui dirige a donné naissance à ce concept. D’un point de monde nourrie de la lecture des Écritures et la Birmanie a en effet inséré dans vue intellectuel, la théologie de l’expiation est des traditions liturgiques juives, ce qui influen- la Constitution un amendement morte, mais une grande partie de l’Église chré- çait leur regard sur tout ce qui leur arrivait. Ils pour empêcher le prix Nobel de tienne s’y accroche encore. Elle est constam- ont vu en Jésus une analogie avec l’agneau la Paix 1991 de pouvoir y ment évoquée dans nos hymnes et nos litur- pascal. Pour eux, la crucifixion était le sacrifice prendre part. gies. Les chrétiens doivent apprendre que cette parfait de Yom Kippour, où le sang de l’animal FRANCESCO MILITO. théologie d’hier est morte et que son cadavre sacrifié était placé dans le tabernacle, pour que Évêque en Calabre, il a ne peut plus être ranimé artificiellement pour les fidèles puissent venir à Dieu « par le sang de ordonné la suspen- fonctionner dans le monde l’agneau ». sion de toutes les processions d’aujourd’hui. religieuses dans son diocèse. « D’un point de vue intel- – Qui reste-il de Jésus pour Motif : il y a peu, un cortège – Dans votre livre, le plus lectuel, la théologie de vous après ce « décapage » ? s’était arrêté devant le domi- surprenant, c’est que vous l’expiation est morte, – Jésus pour moi est la cile d’un parrain de la mafia doutez aussi de la réalité du Vie. À travers lui, tout ce assigné à résidence. récit de la Passion ? mais une grande partie que signifie pour moi le MAHMOUD MAN- – Le récit de la Passion de l’Église chrétienne s’y nom de Dieu fut brusque- SOUR ET MOREL apparaît pour la première accroche encore. » ment révélé de manière MALKA. Ils se sont mariés le fois chez Marc. Lorsqu’on tout à fait nouvelle. Il est 17 août dans la banlieue de Tel- lit ce passage, il apparait celui qui a brisé les préju- Aviv. Lui est palestinien et mu- qu’il n’a pas été écrit par des témoins ocu- gés, les stéréotypes, les frontières religieuses, sulman, elle est juive mais s’est laires. Aucune source ne le laisse entendre. celui qui est ouvert à ce qui est Dieu, ouvert à convertie à l’islam il y a cinq Pour moi, la description de la crucifixion vise l’Amour. Jésus est la révélation de Dieu, le por- ans. Hormis quelques tensions à présenter celle-ci comme l’accomplissement teur de ce que Dieu signifie, c’est à dire l’Amour familiales, la fête aurait dû être des Écritures hébraïques. Les deux sources et le fondement de ce qui est. parfaite si un groupe de l’ex- sur lesquelles s’appuie Marc sont essentielle- trême-droite israélienne n’était ment le Psaume 22 et Isaïe 53. Les détails sur – L’image de Dieu change alors… venu tout gâcher au nom du les réactions de la foule, le dernier cri de Jésus, – L’image d’un Dieu, divinité « toute puissante refus de l’assimilation (mariage le partage de ses vêtements entre les soldats, et créatrice de toutes choses » qui « siège pour d’une juive avec un non-juif). l’épreuve de la soif viennent du Psaume 22. juger nos actes » est une définition théiste qui, OSCAR RODRIGUEZ Isaïe, au chapitre 53, décrit un personnage qu’il je le crois, a été anéantie, non par moi mais MARADIAGA. Arche- appelle le Serviteur souffrant, et c’est là que se par Copernic, Galilée, Isaac Newton, Charles vêque de Tegucigalpa trouvent les détails sur les voleurs crucifiés avec Darwin, Sigmund Freud et Albert Einstein, (Honduras) et président de Jésus. Isaïe dit aussi que le Serviteur « intercéda parmi d’autres. Un Dieu qui peut être menacé Caritas International, il a décla- en faveur de ceux qui le tourmentaient », ce qui par de nouvelles connaissances ne peut vrai- ré : « Si saint Paul avait cherché est à rapprocher des paroles de Luc qui montre ment pas être autre chose qu’une idole fabri- à entrer en Europe aujourd’hui, Jésus priant pour ceux qui plantaient les clous quée par les hommes. Dieu dépasse le voca- il aurait été catalogué parmi les et pour le voleur pénitent. bulaire des hommes, il dépasse leur compré- clandestins et renvoyé chez lui ». hension, mais je crois que nous faisons « l’expé- JOSEPH ANDRÉ. Vi- – Il faut, écrivez-vous, lire le récit de la Passion rience » de Dieu. Dieu est pour moi la source de caire de la paroisse St- comme un texte liturgique pour les premiers chré- Vie qui m’appelle à vivre pleinement, la source Jean-Baptiste de Na- tiens de tradition juive. d’Amour qui me libère pour que j’aime sans mur durant la deuxième – Une étude attentive de ce premier récit de compter, la raison d’être qui me donne le cou- Guerre mondiale, il était à la la Passion, sous la plume de Marc, révèle qu’il rage d’être moi-même. tête d’un réseau qui cachait a été délibérément composé de manière à des enfants juifs. Début août, couvrir une journée complète de vingt-quatre Propos recueillis par Gérald HAYOIS Ingrid Landes, fille de l’un de heures, depuis le crépuscule de ce que nous ceux-ci, et deux de ses enfants, sont venus des USA à Namur appelons le Jeudi saint jusqu’au crépuscule du pour rendre hommage à celui Vendredi saint. Il est divisé en trois périodes de qui avait sauvé leur père et huit heures qui sont bien délimitées. Cet agen- grand-père. L’histoire de l’abbé cement me porte à penser qu’il n’a pas été écrit John SHELBY SPONG, Jésus pour André a inspiré à E. E. Schmidt pour être raconté mais pour servir de texte e le XXI siècle, Paris, Karthala, 2014. son livre L’enfant de Noé. liturgique. Prix : 20,50 € -10 % = 18,45 €. 16 Évangile à la Une Septembre Les Évangiles des dimanches ne sont pas des textes anciens et poussiéreux. Tous les jours, ils résonnent dans l’actualité.

369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel Réconciliations en vue

DIMANCHE 7 SEPTEMBRE la banque française ses promoteurs, « ce revenu de ERREUR… Société Générale a base vise à permettre à chacun été arrêté lorsqu’il et chacune de mener une vie est arrivé en France, digne et de participer à la vie en dans la commune société sous toutes ses formes ». En 2009 et 2010, Daniel H., un de Menton, le 19 mai dernier. Il ne dissuaderait pas de tra- elle ne se situe pas au cœur sexagénaire de la région du Condamné à trois ans de prison, vailler, mais permettrait à ceux d’une vallée au climat tem- Centre, subit plusieurs interven- il a été contraint de commencer qui se satisferaient de ce socle péré, mais en Ardenne. À Wi- tions dans un hôpital de Char- sa peine. Mais sa marche « contre minimal d’être « libérés du tra- brin, dans la vallée de l’Ourthe leroi. Lors d’une de ces opéra- la tyrannie des marchés » a été vail contraint ou de la néces- Supérieure, une centaine de tions, on lui pose une sonde uri- reprise par un prêtre français ori- sité d’en rechercher un » et ainsi pieds viennent d’être plantés naire dans le ventre… mais sans ginal, le père Gourrier, psycho- « auraient la possibilité d’utiliser sur une terrasse entourée d’un prévenir personne. Durant les logue de formation entré dans leur temps pour se consacrer mur de pierres sèches. L’opé- mois qui suivent son passage les ordres à quarante ans après à des activités librement choi- ration, initiée par le président à l’hôpital, le malade souffre de avoir dirigé une grande maison sies ». Pour plusieurs écono- du syndicat d’initiative, a été douleurs soudaines et handi- d’édition de Paris. Pour Patrice mistes, même en période de réalisée avec l’aide d’un vigne- capantes. Il faut attendre 2013 Gourrier, comme pour tous ceux crise, le système pourrait être ron de la Moselle qui, jusqu’ici, pour que l’hôpital fasse un qui soutiennent l’ancien trader, finançable. Selon le philo- se contentait de venir dans le nouvel examen et découvre, Kerviel n’a pu agir seul et avoir sophe et économiste Philippe village… vendre ses propres à l’intérieur du corps, un petit fait perdre cinq milliards d’euros Van Parijs, ce revenu univer- vins. Le cépage choisi, le Sola- tuyau enroulé d’une vingtaine à sa banque sans que personne sel permettrait d’éliminer les ris, a pour caractéristique de de centimètres. Depuis lors, ne soit au courant de ses trop trappes à pauvreté, d’encou- résister aux hivers froids et aux Daniel demande qu’on recon- superbes résultats… rager le travail, de lutter contre champignons. L’an prochain, naisse l’erreur, pour qu’il puisse « Dieu a envoyé son Fils dans le la précarité et de libérer les cent cinquante pieds supplé- être remboursé des nombreux monde, non pas pour juger le femmes au foyer de la dépen- mentaires seront plantés sur coûts entraînés par la douleur. monde, mais pour que, par lui, le dance financière à leurs maris. une autre terrasse, la première Mais l’hôpital et le chirurgien monde soit sauvé. » (Jean 3, 17) « Ceux qui n’avaient commencé récolte étant prévue en 2018. semblent faire la sourde oreille qu’à cinq heures s’avancèrent Mais, déjà, l’initiative peut et lui demandent de prouver DIMANCHE 21 SEPTEMBRE et reçurent chacun une pièce compter sur l’aide de plusieurs lui-même la faute. En géné- POUR TOUS d’argent. Quand vint le tour des vendangeurs. ral, lorsqu’il y a plainte, moins premiers, ils pensaient recevoir « Un homme avait deux fils. de 10% des médecins recon- davantage, mais ils reçurent, Il vint trouver le premier et lui naissent spontanément avoir eux aussi, chacun une pièce dit : “Mon enfant, va travailler commis une erreur médicale… d’argent. » (Matthieu 20, 9-10) aujourd’hui à ma vigne.” Celui- « Si ton frère a commis un péché, va ci répondit : “Je ne veux pas.” lui parler seul à seul et montre-lui La création d’un « revenu de DIMANCHE 28 SEPTEMBRE Mais ensuite, s’étant repenti, il y sa faute. S’il t’écoute, tu auras ga- base » inconditionnel a de VIGNERONS VOLONTAIRES alla. Abordant le second, le père gné ton frère. » (Matthieu 18, 15) plus en plus la cote. Il serait lui dit la même chose. Celui-ci accordé à tous, tout au long de Avec le réchauffement clima- répondit : “Oui, Seigneur !” et DIMANCHE 14 SEPTEMBRE la vie et versé périodiquement tique, il ne devient plus sau- il n’y alla pas. Lequel des deux a CONDAMNÉ, MAIS… à titre individuel, sans prendre grenu de rêver à une produc- fait la volonté du père ? » (Mat- en compte l’existence d’autres tion de vins wallons de qualité. thieu 21, 28-30) Remontant à pieds de Rome, revenus ni contrepartie de La dernière expérience en date Jérôme Kerviel, ancien trader de l’exécution d’un travail. Pour est cependant audacieuse, car Frédéric ANTOINE Éclairage 17 L’appel 369 - Septembre 2014 EN TERRE D’ISLAM Chrétiens arabes : un avenir impossible ?

Minorité tolérée mais discriminée, les chrétiens arabes ont pris le chemin de l’exil depuis de nombreuses années. Ils créent ou rejoignent d’autres communautés chrétiennes en Europe ou en Amérique. Aujourd’hui, la montée d’un islamisme intolérant, et souvent violent, les pousse manu militari vers la sortie. Peut-on imaginer qu’un jour il n’y ait plus d’arabes chrétiens dans cette région, berceau du christianisme ? © Caritas Internationalis © Caritas

epuis l’invasion islamique du été victimes de discrimination, assure un pas les bienvenues dans certains quartiers VIIe siècle, les chrétiens arabes habitant de Cisjordanie. Les organisa- musulmans… » ont été les partenaires obligés tions islamiques soutiennent en priorité les Et pourtant, dit ce Palestinien qui habite des musulmans dont ils par- musulmans. Quand il y a des possibilités près de Jérusalem, « nous sommes arabes. Dtagent la culture et la langue. Mais ceux- de travail, elles sont d’abord proposées aux Chrétiens et arabes. Nous parlons la même ci ont toujours eu du mal à accepter musulmans, surtout s’il s’agit de postes langue. Nous ne sommes pas les descen- qu’un arabe ne soit pas aussi un musul- dans les administrations. Les commu- dants des croisés. Ni des colons. Ni des man. « Que ce soit dans les zones chiites nautés au pouvoir travaillent pour elles- objets-souvenirs pour touristes d’un chris- ou sunnites, les chrétiens ont toujours mêmes. Les femmes chrétiennes ne sont tianisme des premiers temps. On ne peut ➞ 18 Éclairage18

nous définir seulement comme des arabes déchanté. Bien organisées, rodées depuis l’État leur paraissait une protection suffi- qui ne se sont pas convertis à l’Islam… De de nombreuses années, les organisations sante. Si des chrétiens se sont retrouvés nombreux chrétiens ont partagé les aléas islamistes, ont repris le dessus. « À l’écoute du côté des rebelles, les hiérarchies ecclé- des nations arabes, de l’Égypte à l’Irak, en des résultats électoraux en Égypte, en Tuni- siastiques sont restées fidèles au régime. passant par la Syrie. Les chrétiens d’Égypte sie, nous avions le sentiment que l’histoire Ce choix ne les a pourtant pas protégés étaient du côté de Nasser lors de la nationa- faisait machine arrière, dit un étudiant qui du groupe islamiste le plus violent, l’« État lisation du canal de Suez. Mais aujourd’hui, était sur la place Tahrir. L’exode des chré- islamique en Irak et au Levant » (EILL) qui il ne suffit plus de nous mettre de côté. On tiens va se poursuivre. On ne peut pas nous avait commencé à opérer en Irak.

369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel nous pousse avec violence vers la sortie. enlever nos rêves. Mais on peut nous empê- En Irak, il y avait plus d’un million de chré- Voyez ce qui se passe en Irak… » cher de les réaliser. Le passé revient. » tiens avant les guerres du Golfe. Ils ne sont Les chrétiens, explique l’abbé Bernard Les Coptes d’Égypte ont toujours souf- aujourd’hui plus que 400 000, soit moins de Saintmard, doyen de Virton et animateur fert de violences plus ou moins systéma- 2% de la population. Et ceux qui restent sont de nombreux pèlerinages en Palestine, tiques, tout au moins dans les régions coincés dans la guerre que se livrent sunnites ont occupé de nombreux postes à res- rurales. Ils ont connu incendies et des- et chiites. Mossoul, dont le nom évoque la ponsabilité, ouverts de nom- douceur de la mousseline, est breuses écoles et organisa- « L’exode des chrétiens va se poursuivre. On ne tombée en juin dernier aux tions sociales dans l’ensemble mains des djihadistes de l’EIIL du monde arabe, excepté peut pas nous enlever nos rêves. Mais on peut après quatre jours de combat. dans les Émirats arabes, sans nous empêcher de les réaliser. Le passé revient. » Un mois plus tard, malgré les faire de prosélytisme. Beau- assurances données par les dji- coup de musulmans ne se reconnaissent tructions d’églises ou d’institutions chré- hadistes, les chrétiens de Mossoul avaient à pas dans ces mouvements violents, mais tiennes. Soit leurs constructions sont trop « choisir » entre la conversion à l’islam, payer ils restent discrets. « En Israël aussi, ajoute- hautes, soit on les accuse d’occuper illéga- un impôt aux islamistes, ou quitter la ville. t-il, les chrétiens arabes n’ont pas facile. Ils lement des terrains dont elles sont pour- Menacés de mort, ils ont fui en masse vers le sont représentés à la Knesset, mais n’ont tant légitimement propriétaires, soit elles Kurdistan irakien, se faisant souvent racket- guère d’influence. Ils sont pris en étau entre chercheraient à convertir des musulmans. ter dans leur fuite les quelques biens qu’ils la droite israélienne, les ultra-orthodoxes Les kidnappings, dans le but d’obtenir avaient réussi à emporter avec eux. dont l’influence grandissante est une catas- des rançons, sont fréquents. Les autorités « Nous avons vécu depuis des siècles à trophe, même pour Israël, et entre l’isla- n’interviennent que mollement. Ou elles Mossoul en harmonie avec les musulmans, misme extrême du Hamas du côté arabe. » organisent des séances de « réconcilia- déclare Mgr Boutros Mouchi, évêque tion » incitant les victimes à retirer leurs syriaque-catholique de Ninive en Irak, DÉSILLUSION plaintes. De telles discriminations exis- au journal libanais L’Orient-Le jour. Ils ont taient sous Moubarak. Elles se sont ampli- brûlé les livres, les documents et tout ce Les violences en Égypte, la guerre en fiées sous la présidence de Morsi qui vou- qui se trouvait à l’intérieur du bâtiment. » Syrie, l’installation de l’« État islamique » lait leur imposer la Charia. C’est ce qui a L’exode des chrétiens ne date pas d’au- en Irak ces mois d’été sont d’autant plus déterminé leur opposition au gouverne- jourd’hui. Mais c’est la première fois que tragiques qu’il y a deux ans à peine les ment Morsi… et provoqué de nouvelles les chrétiens sont obligés d’abandonner « printemps arabes » avaient soulevé attaques contre leurs églises, leurs écoles leur ville sous une telle violence. l’enthousiasme de milliers de jeunes, ou les habitations de particuliers. Faut-il en conclure que l’« on ne pourra d’hommes et de femmes, de chrétiens, plus jamais cohabiter avec des musul- de laïcs et musulmans mêlés qui, avec FIDÈLES ET INFIDÈLES mans » s’interroge un chrétien perdu avec audace, avaient exprimé leurs envies sa famille sur la route de l’exil avec ses de liberté et de démocratie, et réussi à En Syrie, les chrétiens ont longtemps sou- maigres bagages ? déboulonner des dictateurs qui sem- tenu le régime alaouite du clan Hassad, blaient installer pour l’éternité ! Ils ont vite père et fils. La laïcité « proclamée » de Christian VAN ROMPAEY

« UN BON ARABE NE PEUT ÊTRE QUE MUSULMAN » (KADHAFI) Dès que le pouvoir musulman s’est installé sur les terres évangélisées par les chrétiens, celui-ci a instauré un statut spécifique déterminant les devoirs des non-musulmans. Juifs et chrétiens devaient accepter le statut de dhimmi, ce qui signifie « pro- tégé » en arabe. Ce statut de protection organisait aussi leur infériorité juridique. Ils devaient payer un impôt et respecter des règles de vie contraignantes (habillement, habitat, activités…). Il n’en était pas moins un statut légal de citoyenneté. L’appli- cation de ce statut variera d’une région à l’autre selon qu’elles connaissent ou non des périodes de crise. Il s’estompera sous l’empire ottoman et ne sera aboli, en théorie, qu’à la fin du XIXe siècle sous la pression européenne. Crises politiques, dégradation des conditions de vie, manque de travail, avenir incertain, discriminations, violences, exac- tions… se succèdent. Au fil des années, la présence chrétienne au Proche-Orient va diminuer. Non pas en chiffres absolus, mais par rapport au développement démographique des populations locales. L’exode des chrétiens du Proche-Orient n’est donc pas un phénomène récent. La situation, parfois pénible, est devenue dangereuse pour les chrétiens là où l’islamisme strict s’impose, mais aussi pour les musulmans qui ne se reconnaissent pas dans le développement d’un islam violent et conquérant. Éclairage 19 L’appel 369 - Septembre 2014 Il ne faut pas désespérer de l’islam

Au vu du passé et de l’actualité immédiate, peut- on encore espérer que les musulmans vivent un jour dans des États de droit, démocratiques et pluralistes ? S’il existe un islam de la cohabitation, il est temps qu’il s’exprime ! © Wikipédia - MENA © PRINTEMPS ARABES. Vont-ils favoriser la sécularisation en terre d’islam ?

plus de 80 ans, le père Henri Bou- plus durs. « On en voit aujourd’hui les être pas à l’optimisme. Et cette région du lad, directeur du centre culturel conséquences ! », fait remarquer Antoine monde connaîtra sans aucun doute une À d’Alexandrie, jésuite et théologien Sfeir, directeur de la revue Les Cahiers de longue période d’instabilité et d’incerti- égypto-libanais, a vu le Printemps arabe l’Orient. tudes, mais aujourd’hui, « on ne peut plus égyptien éclore sous ses fenêtres avant abrutir les consciences ». d’être récupéré par d’autres idéaux que ceux des révolutionnaires. Il ne cesse de NE PLUS ABRUTIR LES CONSCIENCES fustiger le double langage des islamistes, CONTAGION DÉMOCRATIQUE qui promettent la démocratie mais réta- Il y a une quinzaine d’années, aux blissent la charia. Il ne cesse aussi de membres d’une organisation sociale Les sociétés islamiques progressent décrier l’angélisme teinté de cynisme belge de passage au Caire, le père Henri comme le font ces rivières souterraines de l’Occident et son « pragmatisme poli- Boulad avait exprimé son étonnement qui semblent surgir de nulle part quand tique » : peu importe le pouvoir pourvu et ses craintes de voir l’islam s’installer elles reviennent au jour. En marge des qu’on ait le pétrole et le gaz, sans oublier et construire des mosquées en Europe. événements largement médiatisés, sou- le marché des armes. Aussi, presse-t-il « Vous êtes aveugles, disait-il. C’est la vent violents, il existe aussi de « longues les occidentaux à ne pas s’allier aux fon- porte d’entrée d’un islamisme dont vous accumulations et de lentes adaptations ». damentalistes musulmans. Il ne peut ne connaissez pas encore la capacité de Au-delà d’un religieux omniprésent, trop comprendre comment les États-Unis ont nuisances. » Propos alors considérés instrumentalisé par la conquête du pou- choisi de se mettre du côté de l’Arabie comme excessifs, au moins pour l’Europe. voir, on ne peut nier « la montée, récente, Saoudite plutôt que du côté de Nasser à Aujourd’hui, Henri Boulad poursuit son mais irréversible, de la sécularisation en l’époque de la construction du barrage combat. Mais, dit-il, il faut parler avec terre d’islam ». C’est ce qu’affirment des d’Assouan, dans les années soixante. Évi- les musulmans qui acceptent d’analy- chercheurs musulmans et occidentaux, demment, l’un avait du pétrole, l’autre ser la position de l’Islam dans le monde réunis en 2012 au Collège des Bernardins pas. L’Arabie saoudite est pourtant aux contemporain. Envers et contre tout. Ce à Paris. « La contagion démocratique » a eu antipodes du projet démocratique qui s’est passé pendant les printemps des résultats divers, disent-ils, décevants, tant vanté par les États-Unis à travers arabes ne peut se perdre. Un processus voire terrifiants selon les pays. « C’est l’hi- le monde. De plus, il soutient financiè- important s’est mis en marche. L’actualité ver après le printemps. » Mais cette conta- rement les mouvements islamiques les de ces derniers mois n’encourage peut- gion a gagné l’ensemble du monde arabe 20 Éclairage20

islamique à partir de mots d’ordre iden- féminisme arabe existe, bien que mal vu il existe une « cohabitation paradoxale » tiques : dignité, liberté, démocratie, état et combattu par tous les régimes. de l’islamisme et de la sécularisation qui de droit, droits de l’homme. « Même si ce Quant au droit islamique, celui-ci est clai- provoque de fortes réactions de défense cours est incertain, il a ouvert un espace rement, pour les musulmans, « une loi identitaire. L’islamisme sera-t-il pour public à la modernisation sociale et cultu- venue du ciel ». Mais depuis le XIXe siècle, autant « soluble dans la modernisation et relle. » le droit musulman (la charia), confronté la sécularisation » que certains pensent Deux marqueurs principaux, l’un socio- à la modernité, est contraint d’entendre « irréversibles » ? Oui sans doute, mais culturel, le statut de la femme, l’autre l’appel à la raison et aux principes de jus- dans combien de temps ? Après combien

369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel institutionnel, la conception de victimes ? du droit, mais aussi le dévelop- Malgré les violentes secousses de ces der- On ne peut guère être opti- pement du syndicalisme, des miste dans l’issue des prin- nouvelles formes de contesta- nières années, le monde arabo-islamique temps arabes à court terme. tion et de toutes les pratiques serait en train de se séculariser, sans pour Mais, c’est un fait : « Une révo- qu’on a vu se développer durant lution s’est mise en marche dans les printemps arabes, sont des autant « sortir du religieux ». les consciences. Lente, discrète, signes de ce changement. Para- moins médiatisée… Le prin- doxalement, l’exemple vient de l’Iran tice. L’islam est contraint de s’inspirer du temps arabe a déclenché un processus de et de l’Égypte qui ont été les premiers droit international, en l’adaptant à son remise en question et d’analyse qui, cou- à reconnaître le droit de la femme à contexte particulier certes. Mais il sort de plée avec l’Internet, sera déterminante pour s’émanciper, dès les années 1920. Si ces la tradition fondamentaliste. l’avenir des pays arabes », analyse le Père mouvements sont partis d’une relecture Boulad. Les réseaux sociaux permettent du Coran, ils sont aujourd’hui une reven- DANS LES CONSCIENCES d’accéder « à une autre culture qui échappe dication laïque d’égalité et de réforme du au pouvoir en place et qui, bientôt, jouera droit. Qu’il s’agisse du mariage, de l’habil- Malgré les violentes secousses de ces der- comme un contre-pouvoir. » lement, de la liberté de circuler, de s’expri- nières années, « le monde arabo-islamique mer, du droit à entreprendre des études, [serait] en train de se séculariser, sans pour Christian VAN ROMPAEY en Algérie, en Tunisie, en Palestine, le autant “sortir du religieux”. » Pour l’heure,

LE MESSAGE ORIGINEL DU CORAN

Pour bien comprendre le blocage Tous ceux qui ont tenté de actuel et la guerre que se livrent actuel- questionner le Coran et d’en lement les musulmans, il faut remonter proposer une lecture plus au message originel de Mohammed. philosophique ont toujours « Celui qu’il a délivré à La Mecque et qui, été violemment contrés. De

à l’époque, était un message d’ouverture, plus, en privilégiant les textes © Cyril PAPOT Fotolia de tolérance et de profonde spiritualité…, de Médine sur les premiers explique Henri Boulad. N’ayant pas été textes de La Mecque, « les suffisamment entendu, Mohammedplus beaux versets du pro- s’est déplacé à Médine pour y fonder une phète, ceux affirmant qu’il société où le religieux devenait indisso- n’existe pas de contrainte en CORAN. ciable du politique, du social, du cultu- religion comme ceux préco- Est-il possible qu’il soit interprété d’une manière rel et du militaire. C’est à ce moment-là nisant de fraterniser avec les plus philosophique ? que l’islam, qui n’était que religion, est autres croyants, notamment devenu un système englobant. Ce qu’il les chrétiens et les juifs, ont disparu. » Dès est toujours resté depuis. » Le message lors, le Coran a enfermé l’islam dans une allant jusqu’à menacer de mort tout s’est « figé dans une interprétation défi- intolérance qui a marqué toute son his- qui remet ce texte en question, qu’il nitive des textes religieux qui prévaut toire, du Xe siècle à nos jours. Voilà com- soit musulman, chrétien, journaliste, aujourd’hui encore ». ment l’islam est devenu l’islamisme, athée… ou caricaturiste. (CVR)

Pour aller plus loin… Bichara KHADER, Le Monde arabe expliqué à l’Europe, Paris, L’Harmattan, CERMAC, Academia Bruylant, 2009. Prix : 44 € -10% = 39,60 €. Marie DE VARNEY, Chrétiens d’Orient, François Bourin Éditeur, 2013. Prix : 20 € -10% = 18 €. Jacques HUNTZINGER, Les printemps arabes et le religieux. La sécularisation de l’Islam, Paris, Collège des Bernardins, Parole et Silence, 2014. Prix : 10 € -10% = 9 €. Antoine SFEIR, L’islam contre l’Islam. L’interminable guerre des sunnites et des chiites, Paris, Biblio essais, Grasset, 2013. Prix : 6,85 € -10% = 6,17 €. Bernard HEYBERGER, Les chrétiens au Proche-Orient. De la compassion à la compréhension, Paris, Payot, 2013. Prix : 16 € -10% = 14,40 €. Reportage de 40 pages « Aux sources du monde chrétien », Revue Géo, décembre 2013. Vu 21 L’appel 369 - Septembre 2014 Mémoire « vivante » de la mort Oradour, témoignage du martyr

© Cyril PAPOT Fotolia

Il y a septante ans, le 10 juin 1944, une unité de la Waffen SS allemande raye de la carte une petite localité du Limousin français située à quelques kilomètres de Limoges : Oradour-sur-Glane. 642 hommes, femmes et enfants sont massacrés puis brûlés et la ville totalement incendiée. Contrairement aux villes martyres de la guerre 14-18, Oradour n’a pas pansé ses plaies et n’a pas été reconstruite au même endroit, en espérant oublier au plus vite. Aujourd’hui, le témoignage de cette barbarie est toujours là. Vivant dans la mort. Et se visite avec émotion. 22 Vu 369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel

Mission : raser Oradour Ce samedi-là, les cent vingt SS de la 2e division Das Reich pénètrent dans la petite bourgade. La veille, ils ont pendu 99 otages dans la ville de Tulle, mais à Oradour on n’en sait rien. En guise de représailles à des attaques de maquisards survenues depuis le débarquement, ils ont aujourd’hui ordre de raser Oradour. La population, qui n’a jamais vu d’Allemands depuis le début de la guerre, croit à un simple contrôle d’identités. En début d’après-midi, tous les habitants sont amenés sur le champ de foire, de gré ou de force. Les Allemands exigent que les hommes soient séparés des femmes et des enfants.

Abattus à la mitraillette Avant 16h, les hommes sont dispersés en six groupes dans des granges, les deux garages automobiles de la localité, et un chai. Une fois les lieux déblayés par les otages, les SS installent à l’extérieur des mitraillettes en batterie, et tirent dans le tas. Alors que les victimes s’écroulent, les bourreaux répandent de la paille et de l’essence, boutent le feu aux bâtiments puis se mettent à piller les environs. Tous ceux qui ont réussi à se cacher sont débusqués et assassinés sur place. Chaque maison est incendiée.

Brûlées dans l’église Plus tard dans l’après-midi, 350 femmes et enfants sont enfermés dans l’église. Les SS tentent de faire sauter le bâtiment. Comme la charge explosive est insuffisante pour que l’édifice s’écroule de lui-même, ils pénètrent dans l’église, tirent sur tout qui bouge, puis y mettent le feu. Dans leur poussette dont le métal fond, les nourrissons meurent avant les autres. Une seule femme réussira à s’échapper du massacre de l’église. Vu 23 L’appel 369 - Septembre 2014

Hébétement Dans la soirée, du tramway venant de Limoges débarquent des voyageurs horrifiés. De loin, ils avaient aperçu que le village n’était plus qu’un brasier, mais n’avaient pas imaginé entrer dans une cité remplie de cadavres. Sur les 642 personnes abattues, seuls 52 corps seront identifiés. Le massacre ne fera que trente survivants. Des « miraculés » de la haine.

Mémorial Alors que la guerre se termine, les autorités françaises décident de conserver en l’état les ruines de la ville détruite. Comme un monument historique. Longtemps, on accédera au lieu en toute liberté, comme si on y arrivait en descendant du tram de Limoges… Depuis 1999, un Centre de la mémoire a été édifié en bordure du village. Il permet d’entrer dans les lieux, laissés intacts (mais légèrement plus aménagés que jadis), et de visiter une exposition qui resitue le drame d’Oradour dans son contexte, de la montée du Nazisme aux procès qui ont suivi. Où ont notamment été mis en cause des Alsaciens, enrôlés malgré eux dans la division SS, et qui avaient été forcés de participer à l’anéantissement de la localité.

Textes et photos : Frédéric ANTOINE

Le Centre de la mémoire, qui gère l’accès au village, est ouvert 7 jours sur 7 du 1er février au 15 décembre, de 9 à 17, 18 ou 19h selon les saisons. Accès payant à l’exposition permanente Comprendre Oradour, accès gratuit au village. (http://www.oradour.org) 24 Rencontre SYLVIE GERMAIN

369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel « L’essentiel, ce sont les Évangiles »

Philosophe de formation, romancière, essayiste, la Française Sylvie Germain rencontre un lectorat de plus en plus large, creusant dans ses écrits une interrogation spirituelle d’inspiration chrétienne.

© Tadeusz Kluba Rencontre 25 L’appel 369 - Septembre 2014 ous êtes née à Châteauroux – Catholique, oui mais je pense que me posait problème. Finalement, avant en France en 1954 et évoquez c’était plus par tradition et habitude, de quitter ce que je ne comprenais pas, dans un de vos tout derniers comme dans beaucoup de foyers. Ma j’ai décidé d’approfondir ma propre tradi- livres la mémoire de vos deux famille n’était pas profondément investie tion. J’ai pensé que je passerais peut-être -Vparents. Qu’ont–ils transmis de marquant ? dans des activités liées à l’Église. On pra- ma vie autour d’une sorte de trou où la – C’était une famille traditionnelle, plu- tiquait. On allait à la messe le dimanche croix aurait été désouchée et que je res- tôt unie et aimante qui permettait de se mais c’était plutôt, je pense, une terais là, à cet endroit. Des décennies plus structurer à peu près convenablement, démarche un peu formelle. Le fait d’aller tard, aujourd’hui, je suis toujours là, à rien n’étant jamais parfait. Je suis la der- au catéchisme a induit évidemment des côté de cette croix, avec des questions… nière d’une fratrie de quatre. La place choses, même si celui que j’ai reçu était qu’on occupe dans une fratrie a beau- vraiment très indigent. Il n’empêche qu’il – En faisant des études de philosophie avec coup d’importance dans la manière dont a formé mon imaginaire d’enfant. Cela a notamment Emmanuel Levinas comme on appréhende le monde et dans sa déposé des images, des sortes de mytho- maître et un mémoire sur l’ascétisme chré- relation aux autres. Je n’avais pas à subir logie et cela oriente la sensibilité d’une tien, vous avez approfondi les questions la rivalité d’un frère ou d’une sœur qui personne. Mon père avait une spiritualité liées à la foi, qui doit, écrivez-vous, être pen- arrive après moi. Je n’étais pas non plus profonde. Il restait fidèle à son Église mais sée, interrogée… l’enfant unique à qui tout est dû. intérieurement, il en était distancié. Il se – Effectivement, des affirmations comme D’emblée, j’ai été dans le partage et par- posait beaucoup de questions. l’incarnation ou la résurrection ne sont fois aussi naturellement dans le conflit. Ma mère allait plus à l’église par conven- souvent pas croyables, ni vraisemblables S’il fallait rentrer dans les détails, c’est tion sociale et habitude. Quand des ni prouvables. Mais si on élimine cela au évidemment plus complexe mais en épreuves sont venues dans sa vie, elle l’a nom d’une sorte de crédibilité scienti- bref, je suis issue d’un type de famille complètement désertée. Je suis un peu fique, alors on n’est plus du tout dans l’es- peut-être en voie de disparition actuel- héritière de ces deux figures. pace de la foi. On peut continuer à porter lement… de la considération et de l’inté- rêt aux Évangiles et au Christ – Une famille attachée à « Je suis partagée entre foi et doute. » en disant : « C’est un homme des valeurs dites tradition- admirable, un grand sage comme nelles comme le respect de l’autorité par – Vient la période de la jeunesse où sou- Socrate ou Bouddha. » Beaucoup de per- exemple… ? vent beaucoup prennent distance avec sonnes en sont là. Pourquoi pas. C’est – Oui. J’avais un père très doux, dénué l’Église. C’était aussi votre cas ? déjà beau de garder le Christ comme un de toute brutalité, ouvert, mais qui avait – J’éprouvais de l’ennui par rapport à ce certain modèle de vie mais on s’éloigne une grande autorité naturelle, doté d’une qu’on proposait. Ce n’était pas suffisam- alors pour moi complètement de l’essen- sorte de charisme que lui reconnaissaient ment habité. J’allais aux offices. La liturgie tiel. tous ses amis. n’était pas envoûtante. Plus j’avance en âge, plus je me rends compte de la néces- – Où est-il pour vous ? – Un homme qui avait probablement le sité d’une beauté liturgique dont parle – Pour moi, l’essentiel ce sont les Évan- sens de l’État, du bien commun, de par sa tellement bien Maurice Zundel pour sen- giles. Parfois, il y a des oripeaux, des fonction de sous-préfet de la République… sibiliser l’imaginaire, évangéliser la sensi- divergences d’interprétation selon les – Effectivement. Je crois que les valeurs bilité ou comme il disait « évangéliser l’in- Églises. Je pense que, génération après que l’on acquiert le plus sont celles qui conscient ». Sans être une rebelle, il y a eu génération, on ressent une nécessité viennent non pas par des discours mais une sorte d’éloignement par ennui mais d’adaptation pour que le sens continue par l’exemple. Mon père venait d’un en même temps, les questions demeu- à passer. Parfois, les formulations sont milieu très modeste de paysans. Il a vécu raient intactes et cinquante ans plus tard, tellement datées qu’on les comprend de dans une maison où il n’y avait pas de elles sont toujours là à me tarauder. travers aujourd’hui alors qu’au temps où livres. Il était l’exemple typique de ces elles étaient formulées, les contempo- enfants boursiers de la République. Il – Quelles questions par exemple ? rains les comprenaient, les entendaient, lisait énormément et a fini par faire des – J’ai été dans un grand désarroi à une y trouvaient du sens, portaient du fruit. études de sciences politiques. Il se pas- certaine époque surtout à l’égard de la Aujourd’hui, certains mots n’ont plus sionnait aussi bien pour la science que la personne du Christ. Est-ce qu’on adhère de sens ou ont pris un autre sens. Du philosophie. Parmi ses grandes passions, ou non à l’idée de l’incarnation et de la coup, cela provoque des contre-sens qui il y avait le poète Paul Valéry et Teilhard résurrection qui vont de pair. Si on exclut peuvent éloigner les gens… de Chardin. un des deux, il y a quelque chose qui ne va pas. Ce sont les deux grandes nuits, – Comme par exemple le péché originel, la – Et votre mère ? celle de la Nativité et celle de Pâques, notion de victime expiatoire… ? – Elle était plus dans le côté passionnel, qui ne peuvent pas être dissociées. Les – Oui, il y a beaucoup d’expressions plus irascible, plus méditerranéen. Cela deux sont l’une et l’autre fondamentales. ainsi où l’insistance mise sur la « souf- s’équilibrait. Cette question était vraiment pour moi france » qui a abîmé tant de personnes. un grand tourment. Un moment, dans À ce niveau-là, je pense qu’il faut sans – Votre adolescence s’est ancrée dans les mon désarroi d’adolescente, je me suis arrêt être vigilant. Maintenant, sur le années 1960, dans un milieu catholique, dit que je devrais peut-être me convertir fond du fond, si on retire tout de la subs- avant la révolution culturelle de 1968… au judaïsme puisque c’était le Christ qui tance des paroles de Jésus, si on le réduit 26 Rencontre

au simple Jésus de Nazareth, aussi belle J’étais ahurie et je le suis toujours. Quant ture est-elle une manière pour vous d’être figure cela puisse-t-il donner, pour moi à la science, elle ne peut pas tout prouver au monde ? alors, on retire l’essentiel. Mais en même elle-même. Si un jour, on prouvait l’exis- – Oui, c’est pour moi une manière vitale temps, le mystère reste entier. Je n’ai pas tence de Dieu, on ne serait plus dans le d’être au monde, comme une respiration. de réponses toutes faites. Je fais partie de domaine de la foi et il y aurait des gens Dans toutes les disciplines artistiques, cette foule de personnes qui sont entre qui nieraient les évidences. Je crois que pour les créateurs, leur discipline est leur foi et limite de l’incroyance parce que, le débat sur l’existence de Dieu, sur la manière d’être au monde, de vraiment comme d’autres, je suis constamment meilleures voie d’accès vers lui, sur qui « vivre » et de goûter la saveur de la vie

369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel travaillée par le doute. Il y a cette phrase est le meilleur prophète, ce débat sera là parfois jusqu’à l’amertume. Pour moi, en admirable dans l’Évangile de cet homme jusqu’à la fin de l’humanité. l’occurrence, c’est l’écriture. Ce n’est pas qui vient auprès de Jésus pour qu’il sauve neutre puisque l’on y manie le langage, son enfant et qui dit : « Seigneur, je crois. – Certains pensent que Dieu est main- la pensée. Pour arriver à maintenir vivace Viens en aide à mon peu de foi. » Dans la tenant d’une certaine façon absent du cette interrogation spirituelle fondamen- même phrase, il semble dire une chose monde et que c’est à nous de le porter. Vous tale, oui, j’ai besoin de l’écriture, qu’elle et son contraire mais il dit ainsi la vérité êtes sensible à cette idée ? passe par la fiction ou des essais. humaine. On est là. On a confiance et pas – Oui, Dieu est devenu présent de tant que cela. On espère et on désespère manière inédite, littéralement inouïe par – On peut être « utile » par l’écriture ? à la fois. On sait et on ne sait pas. Cet l’incarnation, si on reste dans l’espace – Je ne me pose pas la question de l’écri- homme vient et il dépose cette contra- chrétien. Il faut que cette incarnation se ture comme une sorte d’instrument. diction, cette supplication aux pieds du reproduise constamment. Les grands Parfois, on écrit, dit ou fait des choses Christ. qui provoquent chez l’autre des réactions démesurées – Au catéchisme, on ensei- « L’écriture, c’est pour moi une manière vitale par rapport à la petite chose gnait aussi que Dieu était créa- d’être au monde, comme une respiration. » qu’on a faite, dite ou écrite, teur, tout puissant et amour. parce que cela a déclenché Des qualités apparemment quelque chose qui était déjà difficilement conciliables pour beaucoup… mystiques le disent très bien. La Nativité en eux. Il y a aussi des malentendus, y Vous préférez parler de Dieu autrement, par n’est rien si elle n’a pas lieu dans le cœur compris chez les lecteurs. Ce que je vois des métaphores notamment. de chaque homme. Si la résurrection n’a et qui m’intéresse, ce sont que les écrits – Déjà le mot « Dieu » pose problème. pas lieu dans le cœur, la pensée, l’esprit circulent. Si cela donne du positif, tant En français, le mot est dérivé de Zeus, d’une personne, alors elle n’existe pas et mieux. Je ne m’imagine pas écrire des le dieu grec. C’est déjà très mal parti. Dieu n’est pas là non plus pour celui qui choses venimeuses ou visant à désespé- Chacun met sous ce vocable plein de ne le fait pas exister. rer mes contemporains. Mais quand je choses. Beaucoup de gens autour de Par ailleurs, Dieu est. Il y a la fameuse défi- prends la plume, je ne pense jamais à être moi rejettent le Dieu monothéiste parce nition dans l’Exode : « Je suis celui qui suis. » utile à un lecteur. Sinon, il y a un manque qu’il serait source de toutes les guerres Si Dieu est, on ne peut pas empêcher que de spontanéité et d’authenticité. J’essaye et toutes les tragédies. Ce n’est pas vrai. ce qui est… soit. Mais en même temps, ce de pratiquer l’écriture comme une tenta- Ce n’est pas si simple. Il suffit de regar- n’est pas ce qui le fait exister pour nous. tive de saisir le mystère de la vie, même der l’histoire. On peut tuer aussi au nom Celui qui dit « Dieu n’existe pas » parce si on sait que c’est en partie insaisissable. de dieux au pluriel, au nom de « Pas de qu’il n’y croit pas a raison. Pour cette per- Voilà ce qui me motive, me donne envie Dieu », de Mammon ou d’idoles. Mais il sonne non croyante, Dieu n’« existe » pas de continuer, même après des échecs. est vrai qu’au sein du monothéisme, cela au sens étymologique du terme. Il ne le peut susciter des comportements inté- fait pas « sortir ». Il n’y a pas « exode ». Il – Écrire des phrases, c’est aussi une tenta- gristes absolument insupportables et ne se passe rien pour cette personne. Le tive de clarté face à l’obscur… qui en arrivent à tout renverser et à nier croyant est celui qui fait exister Dieu en – C’est essayer de déceler un petit peu complètement le message d’origine. On lui et par lui… de sens, de signification et de direction, rappelle suffisamment souvent toutes même si cela louvoie beaucoup. J’écris les dérives de l’Église. Elles furent nom- – Et vous, votre manière de le faire exister, aussi pour continuer à vivre un peu plus. breuses : Les croisades, l’Inquisition. On c’est plutôt par l’écriture… Peut-être un jour, m’en détacherai-je. le sait. Il ne faut pas l’oublier. Mais il ne – J’aimerais que cela soit plus par mes Certains grands sages y arrivent. J’aime faut pas non plus se repaître de cela et actes… Il y a toute une dynamique dans beaucoup cette phrase de Maurice Blan- rejeter au temps présent le legs. Der- notre façon d’agir, de penser, de faire ou chot : « Nous écrivons pour tendre vers le rière ce chaos, ces trahisons, les défail- de ne pas faire qui fait ou non être Dieu silence. » C’est un horizon de silence qui lances de l’Église en tant qu’institution en nous… obsède l’écrivain et comme on n’y arrive humaine, avec son lien au pouvoir, il faut pas, on recommence. garder et extraire de cette gangue le – Vous avez étudié la philosophie, été texte d’origine. enseignante un temps et puis vous avez Jeune, constatant qu’on avait tué au commencé à écrire, connu le succès, l’es- nom du Christ, je me disais déjà : « Mais time auprès de lecteurs de plus en plus où ont-ils pu trouver dans l’Évangile le nombreux avec très souvent dans vos moindre mot qui justifierait leurs actes ? » écrits, cette interrogation spirituelle. L’écri- Propos recueillis par Gérald HAYOIS Ça se vit 27 L’appel 369 - Septembre 2014 MAISON JOSEFA Un autre regard sur les réfugiés

Un lieu d’hébergement pas comme les autres va bientôt naître à Bruxelles. Il sera un lieu d’accueil des réfugiés, un endroit d’échange, un espace où l’on pose un autre regard sur la migration. Plus qu’intégrer les réfugiés, il s’agit de les rendre acteurs de la société.

ospitalité et rencontre, danger. « Et si nous changions de voilà les deux porte-dra- regard », lance Gilbert Grangon. peaux du projet « Mai- son Josefa » en plein ENRACINÉ DANS L’ÉVANGILE Hcœur d’Ixelles. Cette maison accueillera et hébergera dans un Changer le regard, c’est là tout habitat agréable et convivial des le sens du projet. La Fondation, personnes rendues vulnérables d’utilité publique, « ambitionne par la migration. Des personnes de mettre en relation des réfugiés qui ont obtenu leur permis de rendus vulnérables par le déracine- séjour. Des hommes comme des ment de leur pays d’origine et qui femmes, pour favoriser l’occa- cherchent à s’insérer, à trouver une sion de vivre ensemble. « Ce sera, place, à devenir membre actif de explique Gilbert Grangon, co-fon- © Josefa cette société qui les accueille, dans le dateur et administrateur délégué IXELLES. but de changer le regard des uns et de la Fondation Josefa, un lieu où La maison accueillera une cinquantaine de réfugiés des autres », détaille Gilbert Gran- et d’autres résidents. s’expérimentera dans le quotidien gon. C’est donc bien plus qu’une la rencontre, le partage, l’écoute. » Un lieu Mais pas seulement. Ses visées sont plus question d’intégration ou d’assimilation. Il d’échange dans une réciprocité enrichie larges : sensibiliser aux questions de s’agit vraiment d’un projet qui contribue à par la migration des uns et des autres. En migration. faire des différents partenaires des acteurs effet, il ne s’agit pas de mettre ensemble Ses bureaux se trouvent au troisième d’une société qui donne toute sa place à des réfugiés ou de vouloir traiter le pro- étage du 174 rue Joseph II à Bruxelles. celles et ceux qui sont prêts à s’y engager. blème « des » réfugiés mais de se laisser Juste derrière la Commission euro- La vision de la Fondation puise sa source toucher par l’autre, dans sa singularité, péenne. Symbolique. En effet, quelles et son enracinement dans l’Évangile. Elle notamment sur le plan des convictions et sont les politiques de l’Europe en terme invite chacun et l’ensemble de la société à de la spiritualité. de migrants ? La question des flux migra- s’intérroger sur ses certitudes. Qui est du toires n’a jamais été aussi actuelle, la pro- bon côté de la frontière ? MIGRATION ET SPIRITUALITÉ blématique aussi aiguë. Suite aux nom- breux foyers de conflits dans le monde, Paul FRANCK La Maison Josefa pourra héberger une les demandes d’asile augmentent. Les cinquantaine de réfugiés avec d’autres réfugiés sont souvent perçus comme un : www.josefa-foundation.org résidents prêts à partager et à rendre possible ce défi. Il est prévu un espace Question de frontière logement, mais aussi des espaces de ren- contre et un espace interconvictionnel, Selon les derniers chiffres, 67 personnes détiendraient une fortune équivalente à permettant aux résidents de partager celle de 3,5 milliards de personnes. « Cette équation suffit à montrer l’absurdité de la également sur ce qui les fait vivre, sur ce situation, dénonce Gilbert Grangon. De quelle autorité, moi, plutôt du bon côté de la qui donne sens à leur vie. frontière, puis-je me permettre de refuser que certains de ces trois milliards et demi de Derrière ce projet, on retrouve la Fonda- personnes franchissent la frontière de mon pays ? Ne serait-il pas plus légitime de deman- tion Josefa, dont le but est de récolter der à ces 67 citoyens de déplacer la frontière de leur portefeuille, plutôt que de laisser les des fonds qui serviront à la construction. États dépenser des fortunes publiques pour tenter d’endiguer des flux migratoires ? » (P.F.) 28 Eh ben ma foi Conflits d’intérêts

369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel L’art d’engendrer les guerres. Et après ? Il est facile de faire naître une guerre. Encore faudrait-il que ceux qui les engendrent ne s’en lavent pas les mains lorsqu’elles sont devenues hors contrôle.

u moment de rédiger cette un développement envié par les pays voi- véritable objectif de l’intervention ? Quels chronique, l’armée d’Israël sins. Nous l’avons assassiné et depuis lors étaient, alors, les objectifs ? pilonne depuis trois semaines la Lybie, encore plus que l’Irak, est à feu Ils sont nombreux, mais dans chacun la bande de Gaza. Hôpitaux, et à sang. de ces conflits il y a une forte odeur de Aambulances et écoles sont frappés. Le pétrole et de gaz naturel. C’était assez nombre des victimes ne cesse de croître, ILS S’EN LAVENT LES MAINS évident pour la guerre d’Irak. En Afgha- surtout des civils et un nombre effarant nistan, il fallait assurer la construction du d’enfants. Des crimes contre l’humanité Nos pays occidentaux se sont concertés gazoduc TAPI. En Syrie, il s’agissait de per- sont commis, mais l’autorité israélienne pour reconnaître à quelques aventu- mettre la réalisation du projet américano- sait qu’elle jouit d’une pleine impunité, riers syriens exilés le titre de « pouvoir européen de gazoduc Nabucco contre- comme lors des guerres précédentes. Elle légitime » et les aider à renverser Bachar carrant ainsi les projets Nord Stream sait aussi qu’elle peut poursuivre impu- el-Assad. Celui-ci est toujours au pou- et South Stream de Vladimir Poutine. nément son blocus de Gaza. Parmi les voir ; son pays est détruit par des hordes Derrière la destruction de Gaza, il y a la nombreuses raisons de cette impunité, d’extrémistes. La population a tout perdu volonté de permettre à Israël d’exploiter il y a sans doute le fait que presque tous et se trouve dans une situation immensé- impunément les énormes réserves de gaz les chefs d’État occidentaux ont eux aussi ment plus pénible qu’avant notre inter- naturel situées dans les eaux territoriales besoin d’immunité pour leur rôle dans un vention libératrice. palestiniennes. long chapelet de conflits armés. Et que dire de l’Ukraine où la commu- Malheureusement, dans toutes ces inter- nauté européenne a encouragé le ren- ventions, l’empire américain comme les COMMENT ENGENDRER UNE GUERRE ? versement d’un gouvernement légitime anciens empires coloniaux européens quoique corrompu par un groupe d’op- sont en train de perdre leur âme et d’ac- Saddam Hussein était un dictateur. Mais posants, ne représentant qu’une partie célérer leur propre déclin moral aussi la population irakienne avait atteint un du pays ? Le nouveau gouvernement bien que politique. niveau de développement supérieur aux s’est empressé de légiférer contre une autres pays du Golfe, que pouvait envier section importante de sa population plus d’un pays d’Europe. Georges W. Bush suscitant un mouvement sécessionniste et ses complices ont voulu faire à l’Irak le qu’il a tout de suite décidé d’écraser par cadeau de la démocratie. Depuis lors, le la force armée. Au lieu de reconnaître territoire est à feu et à sang et aucun des leur responsabilité dans ce gâchis, les pays de la « coalition » ne s’en occupe. Européens et les USA en font la Russie Les Talibans n’étaient certes pas une bé- l’unique responsable. nédiction pour l’Afghanistan. À ce pays aussi on a voulu faire manu militari le don PÉTROLE ET GAZ de la démocratie occidentale. La situation actuelle est dix fois pire qu’elle n’était sous Comment se fait-il qu’une fois le chaos les Talibans et les armées d’occupation se installé, dans presque chacun des cas sus- sont retirées sur la pointe des pieds. mentionnés, aucun des pays occidentaux Mouammar Kadhafi était un tirant, mais ne semble se soucier des populations vic- il avait maintenu dans une certaine co- times de ces conflits. L’explication ne se- Armand VEILLEUX, hésion l’ensemble composite des tribus rait-elle pas que, dans chaque cas, le bien Père abbé de l’abbaye de Scourmont formant la Lybie et avait offert à celle-ci de la population concernée n’était pas le (Chimay) Eh ben ma foi 29 L’appel 369 - Septembre 2014 Voir plus loin Le « ministère » du redressement

Être débordé et toujours en mouvement nous évite parfois de nous interroger sur le sens de notre vie. Mais à trop ployer sous les charges, comment partager celles des autres ou leur ôter un peu des leurs ?

près la pause estivale, nous FÊTER LA LIBERTÉ religieuses, politiques ou sociales ou bien replongeons dans nos activités par les forces intérieures de l’orgueil ou quotidiennes et leur rythme Le chef de la synagogue considère Jésus de la convoitise. Si un jour de repos nous parfois effréné. Le récit de la comme une sorte de médecin qui tra- libère des liens du travail, prenons garde Afemme courbée (Luc 13, 10-17), nous rap- vaille un jour de repos en guérissant cette à ne pas nous aliéner à nouveau, même à pelle que l’Évangile de Jésus-Christ est un femme. Cela ne pouvait-il pas attendre un la société des loisirs ! évangile de libération. Car ce récit parle rendez-vous du lendemain matin ? Non, Nous voici donc libérés de la crainte de ne de l’usage du temps et plus particulière- le Royaume n’attend pas, il surgit ! C’est pas être suffisamment aimés ou de devoir ment de la conception du sabbat. Jésus lui que nous pouvons percevoir chaque être parfaits pour plaire à Dieu. Libérés de entre en dialogue avec cette femme, il fois qu’un être humain est relevé ! la loi chaque fois qu’elle n’est plus au ser- lui permet de retrouver son identité pre- Alors qu’on l’accuse de ne pas respecter vice de la vie des humains, mais libérés mière, celle que Dieu lui a donnée. la règle du repos par son geste vis-à-vis aussi des puissances de ce monde et du de cette femme, Jésus, au contraire, sou- regard des autres. CE QUI RELÈVE DE DIEU SEUL ligne combien son action s’inscrit dans Libérés « de » donc libérés « pour »… pro- la tradition portée par l’Exode du sabbat tester encore contre tout ce qui aliène, Nos critères de réussite et nos critères comme libération. Le sabbat est une fête : enferme, asservit l’être humain. À travers d’échecs ne sont que des critères hu- on ne se souvient pas du sabbat comme cette femme redressée, Jésus annonce un mains. Ils ne sont pas le dernier mot sur d’une sorte de repos forcé indifférent au temps indéfini de libération pour nous- la vérité de notre être. Ceci appartient à monde et ses souffrances ; mais on actua- mêmes et au service d’autrui. Dieu. La vérité de chacune de nos vies ne lise le sabbat. Le Dieu de Jésus est le Dieu peut se résumer à la somme de nos réus- d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, le Dieu sites ou de nos échecs, à ce que nous pos- des vivants, le Dieu vivifiant ! Comme sédons ou ne possédons pas. Dieu nous Dieu a libéré son peuple d’Égypte, il libère de cette illusion qui peut nous libère cette femme et chacun, chacune faire tant souffrir, tant courir… pour nous d’entre nous. ouvrir à une identité non pas comptable, mais offerte. LIBRE « DE » DONC LIBRE « POUR » Nous sommes des êtres nés d’un Amour qui nous précède et nous accueille à la Nous voici donc face à une femme libé- fin de notre vie. Cet Amour a posé une rée. Libérée de la courbure physique due parole à l’origine de notre existence, une à la maladie et de la courbure morale parole de bonté qui dit notre dignité et due à l’enfermement sur elle-même. Mais que nul ne peut ôter. Une parole de dou- libérée aussi du temps des hommes et ses ceur et de confiance dans un monde qui contraintes. les oublie trop souvent. Une parole que Et si Dieu nous libère, ce n’est pas pour Jésus-Christ a fait résonner tout au long que nous retombions sous la coupe du de son ministère et qu’il nous appartient premier tyran venu ; ce n’est pas pour Laurence FLACHON, de transmettre. Une parole qui, littérale- que nous nous laissions corseter par des Pasteure de l’Église protestante ment ou non, relève. contraintes extérieures qu’elles soient de Bruxelles-Musée (Chapelle royale) 30 Parole « Et comme Moïse a élevé le serpent dans le désert, il faut que le Fils de l’homme soit élevé » (Jean 3, 14)

369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel Lever-Dieu

rois jours avant sa mort, fices, le droit de transgresser. Petit le vieil abbé veut encore garçon pourtant obéissant aux dire la messe depuis son consignes de sa mère, il a osé, ce lit d’hôpital. La dire toute matin-là, écarter les doigts plus entière,T comme à l’autel, la cha- longuement. Et rien ne brûlait suble déposée sur le lit… Pour dans les mains du prêtre… Luther, les mots, ça va. Le récit l’habite déjà, craignait ici le retour du faux depuis si longtemps. Mais le bras sacré, le danger d’adorer un Dieu n’y est plus, la main tremble. trop exposé. Et pourtant, après Alors, au moment de l’Élévation, il avoir envisagé de la supprimer, fait signe à Marie-Thérèse : qu’elle il maintint quand même l’Éléva- prenne le calice et qu’elle le sou- tion, en mémoire, peut-être, de la lève… Parole qu’on soulevait déjà dans Il a 88 ans. Elle 82. Et ils savent la synagogue. Et parce que Jean qu’ils vont se quitter. C’est très lui-même parle d’élever le Fils de dur. Pour elle surtout. Ce n’est l’Homme. « Notre Dieu est un Dieu pas qu’elle soit seule, l’arrière qui élève » confiait à ses moines grand-maman. Elle sait bien l’at- Dom André Barbeau, abbé à Val tention de toute sa tribu. Mais Notre-Dame, au Québec, et il à qui confier cette affection spi- ajoutait que l’Ascension élève sur- rituelle qui la fait vivre depuis tout quelque chose en nous. si longtemps ? Car voilà 45 ans qu’elle l’accompagne. J’entends la pudeur d’une si grande tendresse ÉLEVER UNE TENDRESSE quand elle évoque sa présence d’ange-gardienne sur un chemin Ce soulèvement millénaire, que « parsemé d’embûches ». la liturgie chrétienne n’introduira e Je n’étais pas dans la chambre… DU PAIN, DU VIN. qu’au XII siècle, Balzac va l’ap- mais je la célèbre avec eux, cette La messe ultime. peler Lever-Dieu. Deux mots au messe ultime, et je le vois, le calice lieu d’un, mais tellement reliés. porté à quatre mains, même si deux seu- l’acolyte agitait la sonnette. En une Du coup, le geste, soudain, paraît plus lement le soulève. Quatre mains qui, pour seconde, comme à la mosquée quand proche et plus familier. Le lever-Dieu la première fois, parce que c’est la der- la vague des dos s’incline vers le sol, les comme le lever du jour, comme le levain nière, vont jouer ensemble le concerto de fronts se baissaient et les mains cachaient dans la pâte, comme on élève un enfant, l’Élévation. À ce moment-là, ce moment les yeux pour que le buisson ardent comme on relève un paralytique. rare, peut-être inédit, où une femme aperçu le temps d’un éclair au-dessus de En élevant le calice de son vieil ami, porte le calice d’un homme, n’est-ce pas la tonsure ne se voit plus qu’à l’intérieur Marie-Thérèse fait bien plus qu’accom- aussi leur histoire qu’elle soulève, pour de soi. Seul, le prêtre pouvait regarder pagner fraternellement un dernier geste elle, pour lui, et pour la multitude ? sans se brûler. liturgique. Elle élève une tendresse et Un ami engagé sur le terrain de la laïcité fait de son élévation un soulèvement. À philosophique m’a confié que sa rupture leur insu, dans le secret d’une chambre, ÉCARTER LES DOIGTS d’avec le catholicisme remontait à l’Élé- et d’une vie, ces deux-là ont écrit une vation. Lui aussi voulait voir comme ce nouvelle parabole : la parabole du lever- Je n’ai pas oublié le temps où l’Élévation n’est pas permis ! Alors, pendant les jours Dieu ? mélangeait encore la ferveur et le trem- qui précédaient la messe, il a marchandé blement. Le célébrant se tenait dos au avec Dieu en lui achetant d’avance, à Gabriel RINGLET peuple. Au moment du soulèvement, force de prières et autres petits sacri- À voir 31 L’appel 369 - Septembre 2014 guerre intime CALENDRIER

À BRUXELLES (Koe- kelberg), Conférence : « Érasme et More, héré- tiques ? Mise en évidence d’un endoctrinement », avec Alfred Sous la plume Denoyelle, KUL, le 20/9 à 14h30 au sous-sol de la Basilique natio- nale du Sacré-Cœur à Koekelberg (porte 1, salle « Mimosa »). - [email protected] d’un poilu À BRUXELLES, Concert : « Commémorations 14- Avec ses Lettres à Élise, Jean-François 18 » avec le chœur « Terpsichore » dirigé par Xavier Haag, le 23/10 Viot signe une pièce bouleversante et à 20h en l’église Notre-Dame du Chant d’Oiseau, avenue du Chant profondément humaniste. Les lettres que d’Oiseau, 2, 1150 Bruxelles. ( 02.761.42.75 et 0477.77.79.27 Jean et son épouse Élise s’échangent entre - [email protected] 1914 et 1918 racontent le quotidien de À BRUXELLES, Confé- ces héros anonymes de la Grande Guerre. rence : « Le visage de la chimère : leçons d’un mythe de- venu réalité » avec Benoît Lenge- ean était instituteur dans un petit village mand, comme un trophée, Jean lui écrit : « Que lé, chirurgien, auteur de la pre- d’Auvergne, lorsqu’il est mobilisé en août penserais-tu si un petit garçon allemand deman- mière greffe de visage humain, le 1914. Il part à la guerre, le sourire aux dait à son papa de lui envoyer un casque français, 20/10 à 20h30 au Square Brussels. Entrée piétonnière : rue Mont- lèvres, convaincu qu’elle ne durera pas. et que ce casque soit justement le mien ? » Même des-Arts à Bruxelles. Entrée par- JD’ailleurs dans le train qui l’emmène au front, dans les tranchées, Jean reste un instituteur et king (Albertine) : rue des Sols à l’ambiance est celle d’un départ de colonie il envoie à son fils quelques problèmes pour Bruxelles. de vacances. Personne ne sait encore ce qui qu’il révise ses mathématiques : « Une com- ( 02.543.70.99 - gcc@grandescon- va advenir. Élise, son épouse, gère le ménage pagnie comporte deux cents hommes. Au bout ferences.be et élève seule ses deux jeunes enfants. Très de cent jours, cent cinquante hommes sont hors À BRUXELLES, Concert vite, elle découvre qu’elle est enceinte. Sa fille de combat. Combien de temps faudra-t-il pour de la Saint Michel : le s’appellera Jeanne, en hommage à ce papa qui qu’une compagnie disparaisse ? » 25/9 à 20h en la cathédrale se bat là-bas, dans le Nord, dans des tranchées Saints-Michel-et-­Gudule. cinq étoiles, avec vue sur les Boches. Le sort des femmes ( 02.217.83.45 : www.cathedrale Mais la guerre s’enlise et les soldats aussi, dans la stmichel.be boue et au milieu des rats. Dans aucun des deux Mais les hommes ne sont pas les seuls à souf- À ERMETON-SUR-BIERT, camps, personne ne sait vraiment pourquoi on frir de la guerre. Élise, jouée avec une justesse Colloque liturgique : se tire dessus. Cette guerre est obstinément stupéfiante par Sophie Lajoie, est une femme « Présence du Christ dans absurde. À la Noël 1915, les ennemis font la déterminée qui prend des initiatives, remplace sa Parole » avec le Père Yves-Ma- rie Blanchard, Institut Catholique trêve. Chacun visite la tranchée de l’autre camp, son mari à l’école, gère la ferme familiale et de Paris (ICP), le Père Louis-Marie on s’échange des cigares et du chocolat. Mais le affronte seule le machisme de l’administration Chauvet, ICP et Institut Supérieur lendemain, les tirs reprennent de part et d’autre. ou l’égoïsme inouï de la comtesse du village. de Liturgie (ISL) et Sœur Loyse Le miracle de Noël n’aura duré qu’une nuit. Cette pièce qui est aussi destinée à tourner dans Morard, du 15/9 de 10h au 18/9 les écoles est une belle leçon d’histoire, ryth- au Monastère Notre-Dame Béné- Chair à canon mée, intense et dramatique. Portées par des dictines, rue du Monastère, 1. comédiens sincères et une équipe enthousiaste, ( 071.72.00.48 - [email protected] Jean-Marie Pétiniot, qui s’est beaucoup investi les Lettres à Élise bouleverseront les spectateurs, À LIBRAMONT, Conférences : dans le projet de ce spectacle, incarne le jeune quel que soit leur âge, parce qu’elles racontent « Témoins et pro- soldat avec intensité. Et s’il n’a pas l’âge du rôle, la guerre au jour le jour, sur le terrain, par ceux vocateurs d’hier et peu importe. Ce sont toutes les victimes de qui la subissent et non par ceux qui la décident. d’aujourd’hui », les la guerre qu’il symbolise, celles d’hier et d’au- jeudi 25/9 (St Benoit) avec Sœur jourd’hui. Les soldats qui servent de chair à canon Jean BAUWIN Marie-­Raphaël (Bénédictine du sont de toutes les époques. Des deux côtés de la monastère d’Hurtebise) et 2/10 ligne de front, ils vivent le même enfer. Lettres à Élise, de Jean-François Viot du 18 au 21/9 sous (St Jean) avec Sœur Thérése-­ Jean-François Viot a le don d’évoquer les hor- le chapiteau des Baladins du Miroir, chemin du bois des Marie (Supérieure d’Hurtebise), dames, 8 à Thorembais-les-Béguines. ( 010.88.83.29 de 20h à 22h à l’Institut St-Joseph, reurs de la guerre, sans insistance, dans une : www.lesbaladinsdumiroir.be En tournée ensuite dans Grand’rue 16. émotion toute maîtrisée. Ainsi, lorsque le fils de les écoles. Demandes à adresser Aline Lourtie aline.lourtie@ ( 061.53.38.67 et 061.22.25.90 Jean lui demande de lui envoyer un casque alle- lesbaladins.be 32 À lire, à voir, à écouter, à visiter…

Vive la diversité Pour cinq semaines, le Théâtre de la Place des Martyrs offre un focus Hamadi, cet auteur, comé- LIÈGE 1944 EN CLICHÉS dien et conteur qui offre sur la diversité et le vivre Après les rappels en août du début de la Première Guerre mondiale, ensemble un regard affûté et bousculant. Il jouera voici ceux de la Libération en septembre 1944. Ainsi, à son roman en alternance deux spectacles. Papa est en voyage doublement primé Les étoiles de l’aube, Bernard Gheur ajoute un traite des sujets les plus divers : l’immigration, les beau prolongement illustré avec de nombreuses photos en noir exils, les petits et les humbles, les autres, les relations hommes- et blanc auxquelles s’ajoutent de multiples témoignages, dont pas

369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel femmes et les cultures du Sud. Avec Sans ailes et sans racines qu’il mal d’inédits, plein de regards d’enfants, de jeunes et d’adultes sur a écrit et qu’il joue avec son fils Soufian El Boubsi, il confronte un la libération des villes en province de Liège, arrivée du Bip-Bop à père laïque et tolérant à son fils converti à un islamisme radical. Un Spa comprise. L’auteur y évoque aussi les souvenirs des armées, la spectacle coup-de-poing. (J.Ba) résistance, l’accueil d’aviateurs alliés au cloître Ste-Croix à Liège et Papa est en voyage et Sans ailes et sans racines d’Hamadi, en alternance, du au café Lacroix à Embourg, le soutien de Mgr Kerkhofs aux familles 19/9 au 25/10 au Théâtre de la Place des Martyrs, Place des Martyrs, 22 à juives, la joie des condamnés à mort, les cellules des femmes inci- 1000 Bruxelles. : www.theatredesmartyrs.be ( 02.223.32.08 viques au collège Saint-Barthélemy, les bombardements et les raids de V1 et V2 ayant fait plus de 2 500 morts à Liège au moment de la Bataille des Ardennes. Parmi les témoignages, ceux de Léon Hal- kin (1906-1998), professeur d’histoire à l’ULg, résistant et prisonnier politique de 1943 à 1945. Le tout pour rassembler des histoires lié- geoises et… sacrées. (J.Bd) Bernard GHEUR, Liège 1944. Le 1er Américain, Neufchâteau, Wey- Les enfants du père Pedro rich, 2014. Prix : 25 € -10 % = 22,50 €. Il y a vingt-cinq ans, le père Pedro Opeka, Argentin d’origine slovène, est interpellé par le sort des gens vivant sur une décharge à Tananarive, capitale de Madagas- Rire infernal car. Alors qu’il y avait été nommé pour y diriger un séminaire lazariste, ce prêtre décide de consacrer sa vie à ces rejetés de la société, convainc septante Après le rire purificateur de son familles de quitter la décharge et fonde, avec elles, un nouveau village à 75 km de Purgatoire, Dominique Bréda la mégapole. C’est la naissance de Akamasoa. Dans ce village, les familles disposent explore à présent les flammes de l’enfer. Un enfer pavé d’intentions d’un logement correct, les enfants sont scolarisés et le travail000 est personnes rémunéré. vivent Depuis lors, dix-huit villages Akamasoa ont vu le jour dans l’île, 25 drôles. Il reprend le principe de 000 enfants vont à l’école. Un bel album dans une cité qu’ils ont bâtie, et 11 son succès précédent : une suc- photographique retrace cette magnifique histoire et la vie à Akama- cession de courtes scènes encore soa. (F.A.) plus explosives, plus cruelles, plus Pierre LUNEL, Akamasoa, rêves d’enfants, Monaco, édi- abrasives… Bref, il emmène ses tions du Rocher, 2014. Prix : 19,90 € -10% = damnés spectateurs vers le pire 17,91 €. et les fait s’esclaffer de tout ce qui devrait les faire pleurer. La seule façon de survivre en enfer est Secret enfoui peut-être d’en rire. « L’enfer veut se Face au suicide de sa maîtresse, un patron arrogant se remet en question et moquer de nous ? Nous survivrons consulte un psychiatre, dont il espère une déclaration de non-culpabilité en nous moquant de l’enfer. Habil- qui le rassurerait. Malgré ses résistances, il entame un douloureux chemin lez-vous léger, il fera très chaud vers un passé qu’il a voulu occulter et qui a dirigé toute son existence. dans la salle. » (J.Ba) Le roman explore le poids des traumatismes de l’enfance et les chemins L’enfer de Dominique Bréda, du 11/9 au 18/10 au Théâtre de la Toison de guérison et de pardon, Un temps possibles. égaré, Paris, (J.G.) Albin Michel, 2014. Prix : 21,30 € -10% = 19,17 €. d’or, Galerie de la Toison d’Or, 396- de Cazotte Marie-Laure 398 à 1050 Ixelles. ( 02.510.05.10 : www.ttotheatre.be

GUSTAVE STOOP, PRÉCURSEUR Entrepreneur et précurseur de l’ingénierie sociale, c’est ainsi que Charles Picqué, ministre d’État, et Michel Kesteman, directeur d’Espace social, décrivent le personnage de Gustave Stoop. Michel Kesteman en a écrit une courte, mais détail- lée, biographie. Il y décrit sa participation active à de multiples initiatives. Ce cadet d’une famille bruxelloise conserva- trice, devenu jeune animateur de plaine de jeux à Quaregnon, a été ordonné prêtre en 1959 avant de devenir professeur en techniques et professionnelles de 1960 à 1996. Pour ouvrir des issues aux jeunes fragilisés par la vie et pour ne pas être prêtre pour les chrétiens, Gustave Stoop a collaboré à des mouvements et maisons de jeunes, à la création d’Infor- Jeunes au temps du très contesté Petit livre rouge des écoliers et lycéens, mais aussi à l’auberge de jeunesse Sleep Well et à la communauté du Finistère. Resté un adepte de la cravate, il a aussi été membre du Rotary et du mouvement L’aiguillon au sein du PS, tout en restant défenseur du secteur associatif. Avec la référence à l’Évangile et la liberté de pensée d’un croyant, il a collaboré aussi au groupe Abrame, cet atelier bruxellois de recherche pour d’autres ministères dans l’Église et, non sans conflits, au sein de Caritas Catholica. Pour Michel Kesteman, « Gustave est un résilient qui a tissé sa toile pour s’associer un réseau allié, facilitateur capable de multiplier son énergie propre ». Une Fondation Gustave Stoop a d’ailleurs permis de garder les traces de cet étonnant parcours. (J.Bd) Michel KESTEMAN, Gustave Stoop, debout et frontalier, Bruxelles-Mons, Couleur Livres, 2014. Prix : 10 € -10% = 9 €. À lire, à voir, à écouter, à visiter… 33 L’appel 369 - Septembre 2014

LÉGUER SA MÉMOIRE ? Le fantasme CALENDRIER du plombier Transmettre son héritage culturel, ses valeurs, ses us et coutumes, À LIÈGE, Brocante de la est-ce encore possible aujourd’hui ? Beaucoup de personnes s’in- Lorsque le plombier a terminé son travail, sa cliente lui pro- Bonne Femme : le 5/10 terrogent sur la transmission et mettent le doigt sur le fait que de 8h à 19h aux alen- les instances traditionnelles tels les prêtres, les enseignants et les pose de le payer en nature… Mais avant d’accepter, le tours de l’église Saint-­ parents bien sûr, ne parviennent plus à transmettre le savoir-vivre, Lambert, rue du Beau-Mur, 45. le respect, la ponctualité, le vivre ensemble. Ce dossier montre plombier lui pose une simple question : « Pourquoi ? » Ils se ( 0491.08.69.57 - info@peuple-et- combien et comment les chemins et la voie de la transmission ont culture-wb.be évolué. (B.H.) mettent alors à parler de Dieu, de divorce, de la vie et de ses À LIÈGE, Grandes con­ Transmission en crise ? Dossier n° 108, Malonne, Édi- tions Feuilles familiales, 2014. Prix : 10 € -10% = 9 €. échecs. Bref, ce qui se présen- férences : « Pourquoi tait au départ comme la scène les riches ont gagné » avec Jean- inaugurale d’un Louis Servan-­Schreiber, patron de film d’un certain presse et essayiste, le 2/10 à 20h15 à genre (le plom- la salle de l’Europe du Palais des bier n’est-il pas Congrès (Esplanade de l’Europe). en effet le fan- ( 04.221.93.74 - nadia.delhaye@ tasme universel gclg.be : www.grandesconferences- liegeoises.be de la ména- gère ?) dérape très vite dans À MALONNE, Conféren- une comédie sensuelle et phi- ces organisées par le losophique. (J.Ba) Ratelier : « Diriger à la lumière de Curieuse médecine Tuyauterie de Philippe Blasband, l’Evangile » avec Michel Damar du 4/9 au 18/10 au Théâtre (ex-dirigeant d’entreprise) et Jo- L’Hôpital Notre-Dame à la Rose Le Public, rue Braemt, 64-70 à seph Pirson, sociologue) le 8/10 ; accueille une exposition de plus 1210 Bruxelles. ( 0800.944.44 « Quelles paroles pour les questions de deux cents objets qui illustrent : www.theatrelepublic.be ethiques » avec Joseph Duchêne, remarquablement l’évolution de la philosophe, le 15/10 et « Au-delà médecine et de la pharmacie du XVIe des mots, quelles options so- au XIXe siècle. Ces objets présentés DÉCRYPTER LA SOCIÉTÉ ciales ? » avec Philippe Defeyt, pré- dans le cloître et tout au long du Comment la société va-t-elle évoluer ? De quoi l’avenir sera-t-il fait ? Quelles tendances sident du CPAS de Namur, le 22/10 ; parcours habituel de la visite, sont traversent le monde et en quoi cela va-t-il bouleverser toujours à 20h à la Haute Ecole curieux, interpellants, originaux le quotidien de chacun ? Cet ouvrage tente de répondre à Henalux, département de Malonne, et témoignent surtout d’une pé- ces questions et à bien d’autres en partant de l’observation de rue du Fond 123, auditoire CR2. riode où les artisans et les méde- gens ordinaires, de leurs vécus, habitudes et suivis des modes. ( cins conjuguaient leurs savoirs 081.45.02.99 (en journée) et L’auteur décrypte les tendances sociétales et y ajoute une intui- 081.44.41.61 (en soirée) pour faire évoluer les techniques tion personnelle. Il ouvre ainsi une nouvelle manière de per À MARCHE-EN-FAMENNE, Spec- médicales et scientifiques. La cevoir et comprendre les principaux modes de vie de ces beauté de ces instruments les rend tacle (lecture musicale) : « Le dernières années. (B.H.) - d’autant plus fascinants et inquié- Loup dans la Bergerie » Martine CLERCKX, Petit traité des tendances sociétales. tants. (J.Ba) avec Pietro Pizzutti, ac- Pour comprendre l’évolution de la société à l’aube du compagné à la viole de Gambe D’Ambroise Paré à Louis Pasteur. Expo- XXIe siècle, Bruxelles, Éditions Mols, 2014. sition jusqu’au 30/11 2016 à l’Hôpital par Johan Vlaeyen. Dans le cadre Prix : 23,50 € -10% = 21,15 €. Notre-Dame à la Rose, Place Alix de Rosoit du Festival de musique baroque ( à Lessines. 068.33.24.03 en Famenne-Ardenne, le 5/10 de : www.notredamealarose.com 11h à 12h30 au Studio théâtre, rue des Carmes, 3. ( 0479.02.21.68 - [email protected]

e Revivre À MAREDSOUS, 7 Jour- Mission au canada née Interreligieuse : « L’in- Comment aider des Situé dans les espaces sau- terreligieux au Féminin » victimes d’abus sexuels à vages du Canada au avec Gaëlle Shifra (Bruxelles), Zah- survivre et à revivre, en particu- XVIIe siècle, ce roman re- ra Khatri (Bruxelles), Anne Soupa lier lorsque l’abuseur était auréolé late au quotidien la vie (Paris), le 13/9 de 9h30 à 16h30 à d’une fonction protectrice ? Une l’abbaye de Maredsous. tâche pour les psys sans doute. Mais au pays des Hurons et des Iroquois. Parti- ( 082.69.82.60 et 0495.93.04.07 comme l’image de Dieu se construit cularité : il confronte les points de vue de trois protagonistes très différents impli- - [email protected] souvent au départ des figures parentales rassurantes, c’est qués dans les mêmes événements. Un À NAMUR, la confiance en Dieu elle-même qui est affectée par l’abus missionnaire jésuite, un chef de guerre Conférence : d’un parent ou d’un prêtre. La guérison doit donc com- huron et une jeune captive iroquoise. « La pleine conscience pour les porter un volet spirituel, (très) loin de l’idée d’une souf- Ce voyage dans les croyances et les cou- enfants et les ados expliquée aux france que l’on peut « offrir à Dieu ».Se relever (J.G.) après l’abus tumes parfois cruelles décrit aussi les moti- parents » avec Alexandre Castan- Karlijn DEMASURE (sous la dir.), vations pas toujours désintéressées de ceux heira, le 8/10 à l’Université de sexuel. Accompagnement psycho-spirituel des survi- vants, Bruxelles, Lumen Vitae, 2014. Prix : 15 € qui soutiennent les missions… (J.G.) Paix, Boulevard du Nord, 4. -10% = 13,50 €. Joseph Boyden, Dans le grand cercle du monde, Paris, ( 081.55.41.40 - info@universite- Albin Michel, 2014. Prix : 26,80 € -10% = 24,12 €. depaix.be 34 À lire INTENSITÉ Une vie à soi 369 - Septembre 2014 369 - Septembre L’appel

Une femme écrivain est au bord de l’effondrement, incapable d’écrire une ligne. Par la présence imaginaire d’une photographe dont elle découvre l’œuvre, elle reprend possession de sa propre vie. Un roman de Laurence Tardieu qui saisit l’être dans sa nuit profonde.

n dimanche d’octobre comme des éclairs, d’étranges UN ÉCLAT 2011. Laurence, écrivain de ressemblances entre leurs deux Adulte, Diane choisit la rupture Uquarante ans, entre dans existences. Enfances parallèles en- avec ce milieu très bourgeois. Il un célèbre musée parisien. À quoi fermées dans un climat d’irréalité, s’agit de le fuir, le plus loin pos- a tenu sa décision de visiter cette comme si leur propre vie ne leur sible, quitte à payer le prix fort. En- exposition consacrée à la photo- appartenait pas. Comme si elles core un choix commun, une des- graphe américaine Diane Arbus ? zonaient toutes les deux en de- cente sociale voulue, de part et À une vague envie de se prome- hors d’elles-mêmes. Plus Laurence d’autre, parce que, pour chacune, ner dans un lieu chargé de sou- découvre qui avait été Diane, plus avec plusieurs dizaines d’années venirs d’enfance. À presque rien. des pans entiers de sa vie à elle d’écart, le bonheur n’était pas en Laurence ne connaît rien à la pho- lui reviennent avec une acuité haut de l’échelle. La façon dont la tographie et encore moins celle de impitoyable qu’accompagne une photographe se reconstruit après l’artiste américaine. Et pourtant, grande douleur. Enfance pour- avoir quitté son milieu d’origine cette rencontre entre elle et cette tant gâtée, ouatée. Adolescence va aider l’écrivain qu’est Laurence, femme morte cinq mois avant que rangée, avec quelques tentatives dans son chemin vers elle-même. la première ne vienne au monde, d’être soi vite réprimées par les « Je n’en pouvais plus, écrit-elle à la va la saisir et la soulever du sol. parents. Laurence ressent la honte photographe morte depuis bien Elle décide de tout connaître de de venir de ce monde-là, pétri longtemps. Et alors, tu es entrée Diane. Photos, biographies, notes, de convenances et de faux-sem- dans ma vie, et moi qui ne pouvais souvenirs, fragments de lettres, blants « où l’on parlait avec ces into- plus rien ressentir si ce n’est l’effroi Laurence s’imprègne de tout nations faussement chantantes ». tu m’as soulevée de terre. Tu m’as jusqu’à l’obsession. Apparaissent Une vie sans vie. montré le chemin, me murmurant que je n’étais pas seule, et dans ma nuit profonde un éclat est apparu, de plus en plus intense. » Des livres moins chers à « Une vie à soi », c’est l’aventure Commandez les livres que nous présentons avec 10 % de réduction. de l’appropriation de sa personne Remplissez ce bon et renvoyez-le à L’appel Livres, rue du Beau-Mur 45, 4030 Liège, ou faxez-le au 04.341.10.04. profonde, unique, quelque part Les livres vous seront adressés dans les quinze jours accompagnés d’un bulletin de versement. dans ce lieu essentiel où respire Nouveau : Vous pouvez également commander un livre via notre site internet : le vivant. Certains y voient l’Esprit www.magazine-appel.be onglet : Commandez un livre à L’appel dont on dit qu’il souffle où il veut, Attention : nous ne pourrons fournir que les ouvrages mentionnés « Prix -10 % ». quand il veut. Il a ses entrées se- Je commande les livres suivants : crètes. Il saisit l’être dans sa nuit profonde, le pousse à chercher ce e q ...... qui au cœur de sa personne s’était

q ...... e dissous, le fait passer de la nuit à la lumière. Ce roman qui éclaire la e q ...... rentrée littéraire ressemble fort à

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À NAMUR, : « Dépas- À RHODE-ST-GE- À WAVREUMONT ser nos peurs, Oser le dialogue » NÈSE, Marcher et (STAVELOT), Jour­ Magazine mensuel indépendant Éditeur responsable ept du 24/10 au 26/10 à l’Université prier en Forêt de nee des personnes Paul FRANCK embr de Namur, à l’Institut des Ursu- Soignes : le 22/9, organisé par separees, divorcees, divorcees Rédacteur en chef lines, à l’église Saint-Loup et à la le Centre spirituel, Avenue Pré au remariees : conference et partages, Frédéric ANTOINE Rédacteur en chef-adjoint e 2014 cathédrale Saint-Aubain. Bois, 9. le 11/11 de 9h a 17h30 au Monastere Stephan GRAWEZ ( 081.72.50.37 - info@rivespe- ( 02.358.24.60 - [email protected] St-Remacle, Wavreumont, 9. Secrétaire de rédaction Sabine LOURTIE rance.be : www.rivesperance.be ( 080.31.91.63 et 0473.77.02.05 Équipe de rédaction À SPA, Retraite : « Avec Simon- - À ORVAL, Journées de ressour- [email protected] Jean BAUWIN, Chantal BERHIN, Jacques BRIARD, Pierre, ses appels, ses doutes, ses Paul de THEUX, Annelise DETOURNAY, cement : « Le pain, le vin sont À WÉPION, Week-end Ados : José GERARD, Gérald HAYOIS, élans » avec le Père Pierre Mour- Guillaume LOHEST, Gabriel RINGLET, notre résumé. Approche poétique « Let’s go » avec P. Daniel de Crom- Godelieve RULMONT-UGEUX, Thierry TILQUIN, lon Beernaert, du de l’eucharistie », du brugghe, Sr Françoise Schuer- Christian VAN ROMPAEY 29/9 au 5/10 au Foyer Comité d’accompagnement 10/10 au 12/10 à l’ab- mans, Antoine Beaudoint et Flo- Bernadette WIAME, Véronique HERMAN, de Charité, avenue de baye d’Orval. rence Fastres du 26/9 au 28/9 au Jean-Yves QUELLEC, Gabriel RINGLET Clermont, 7, Nivezé. Ont collaboré à ce numéro ( 061.31.10.60 : www.orval.be Centre spirituel La Pairelle, rue Laurence FLACHON et Armand VEILLEUX ( 087.79.30.90 - [email protected] Marcel Lecomte 25. Photocomposition et impression À ROCHEFORT, Journée diocé- Imprimerie MASSOZ, Alleur (Liège) ( 0474.45.24.46 - centre.spirituel@ saine : « Youth for God », Administration À TILFF, Matinée : « Entrepreu- lapairelle le 27/9 de 14h à 19h45. neuriat social, économie so- Président du Conseil : Paul FRANCK Promotion - Rédaction - Secrétariat - [email protected] ciale? » avec Jacques Defourny, Abonnement – Comptabilité Bernard HOEDT, rue du Beau-Mur 45, 4030 Liège À SAINT-HUBERT, Retraite : « Un professeur et directeur du Centre (+Ê 04.341.10.04 À WÉPION, Week-end du Compte n° 001-2037217-02 - Dieu si proche du silence : Quand d’Économie Sociale (ULg), le 3/10 IBAN : BE32-0012-0372-1702 - Bic : GEBABEBB la spiritualité se fait poème », avec de 9h à 14h à l’abbaye de Brial- CEFOC : « Sois jeune et bouge- - [email protected] toi ! Quel sens à s’engager au- : http://www.magazine-appel.be/ Gabriel Ringlet, prêtre et écrivain, mont, organisé par le Vicariat Publicité Évangile & Vie. jourd’hui ? », les 11 et 12/10 au MEDIAL, rue du Prieuré 32, 1360 Malèves-Sainte- ancien vice-recteur de l’UCL, du Marie, ( 010.88.94.48 - Ê 010.88.93.18 3/10 au 5/10 au Monastère d’Hur- ( 04.230.31.66 - d.servais@eveche- Centre La Marlagne, chemin des deliege.be tebise. Maronniers, 26. Avec l’aide de la Fédération Wallonie- ( 081.23.15.22 - [email protected] Bruxelles ( 061.61.11.27 : www.hurtebise.net Abonnement individuel : 23,50 e. Autres types d’abonnements : voir site internet ou sur demande.

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2014 2015

2 octobre Pourquoi les riches ont gagné Jean-Louis SERVAN-SCHREIBER Patron de presse - Essayiste 6 novembre Pierre KROLL La plus belle Dessinateur - Caricaturiste conférence du monde

11 décembre Isabelle AUTISSIER Océan : risques et opportunités Navigatrice - Présidente WWF France

8 janvier Rudy RICCIOTTI Sans titre Architecte - Ingénieur Co-auteur du futur Musée du Parc de la Boverie (CIAC)

5 février Herman VAN ROMPUY L’Europe : une Ancien Premier ministre expérience personnelle ! Ancien président du Conseil européen

5 mars Frédéric SALDMANN Le meilleur Médecin cardiologue - Nutritionniste médicament, c’est vous !

2 avril Paul JORION Comprendre les temps Titulaire de la chaire que sont les nôtres «Stewardship of Finance» (VUB)

Les conférences ont lieu au Palais des Congrès de Liège à 20 h 15 Abonnements et préventes : www.gclg.be - Office du Tourisme - Stand-Info Belle-Île Informations : 04 221 93 69 – 04 221 92 21 www.gclg.be