RAPPORT D’EVALUATION RAPIDE

Région de , cercle de Tenenkou Du 28 octobre au 6 novembre 2016

CONTEXTE La crue précoce et majeure de cette année a occasionné des inondations dans la moitié du cercle de Tenenkou, affectant principalement les communes situées le long de la vallée. Le niveau de la crue a été exceptionnellement haut et la montée des eaux a surpris par son arrivée soudaine. Des informations provenant de missions terrains faisaient état de besoins majeurs dans la zone et après coordination au niveau régional, les cercles de Tenenkou, et Djenne ont été priorisés pour réaliser des évaluations et la commune de Djaloubé dans le cercle de Mopti.

C’est ainsi que NRC avec l’appui de IRC et World Vision ont réalisé une mission d’évaluation conjointe afin d’analyser la situation et les conséquences de la crue dans le cercle de Tenenkou. Ces organisations interviennent dans le cercle de manière permanente (World vision en assistance alimentaire et nutrition ; IRC en santé, NRC en éducation) et ce cercle a été jugé prioritaire vu son enclavement.

SYNTHESE DES RESULTATS Parmi les 23 villages affectés par cette crue, près de 3 000 ménages sont sinistrés (information reçue via les focus groups, à noter qu’en général, entre les estimations des focus groups et les enquêtes porte à porte lors du ciblage, on note un écart moyen de 20%).

Parmi les ménages déplacés, pour la moitié d’entre eux (56%), c’est la première fois que la crue les a obligés à se déplacer, leur habitat étant détruits (à 63%) ou fortement endommagés et le niveau d’eau trop important. Pour les autres ménages affectés, le niveau mais également le fait que cette crue fut précoce a eu des conséquences particulièrement négatives sur leurs biens et cultures, en affectant le bétail (manque de fourrage déjà à hauteur de 50%) ; les cultures (champs inondés avant la germination des semences et non-respect du calendrier saisonnier pour le labour, estimation de perte de cultures entre 50 à 70%). Avec l’endommagement des berges, 65% des abris ont subi des dégâts lourds dans la zone inondée du cercle et 6% sont totalement détruits. Les zones les plus touchées sont les communes de Toguere Coumbe, , Togoro- Kotia, Ouro- Guiré, Ouro- Ardo et Diafarabe.

METHODE DE L’EVALUATION : Pour cette mission d’évaluation la méthodologie utilisée a été axée sur : - La création d’un outil d’évaluation adapté au contexte et harmonisé ; - La cartographie du cercle et la collecte d’informations initiales ; - La visite des villages les plus affectés avec des focus groupes communautaires avec les représentants et les habitants de manière distincte ; - 143 enquêtes ménages auprès des personnes sinistrées ; - Focus group avec les autorités, représentants et population. Le service local du développement social et de l’économie solidaire de Tenenkou a été impliqué tout au long de cette évaluation, notamment dans l’analyse générale et la cartographie.

Compte tenu de la situation géographique, l’accessibilité et des caractéristiques similaires des villages, il a été décidé de procéder aux focus group et enquêtes ménages dans 10 villages estimés représentatifs des 23 affectés au total. Les informations collectées ont été triangulées avec le service local du développement social et de l’économie solidaire et de la préfecture par World Vision en septembre 2016. Pendant l’évaluation et au retour, les 13 villages restant ont fait l’objet de focus group téléphoniques. SITUATION DES POPULATIONS Les données ci-dessous ont été recueillis durant les focus group des 10 villages visités :

Villages Population Totale Ménages affectés Ménages déplacés (ménage) (population locale) accueillis Tagane 500 20 10 Somogiri daga 1000 20 0 Boukari 700 10 4 Saré Machalou 300 10 0 Djougui 2000 40 75 Thiengue 560 207 0 Kamaké Sébé 1300 125 1 M’Boureye 2365 450 48 Niasso 4000 40 20 Sabare 5500 206 5 TOTAL 12 725 922 158

Les 13 autres villages affectés recensent les informations ci-dessous collectées via des focus groupes téléphoniques :

Villages Population Totale Ménages affectés Ménages déplacés accueillis (ménage) (population locale) Saré Tina 1417 150 300 Saré Maré 815 30 20 Kadial 180 40 0 Serindou 412 40 0 Kinta 380 152 86 Kaya 376 62 80 Assih 363 50 36 Mbouta 1130 142 312 Mopti Keba 880 85 12 Kolle Samba 486 45 0 Keba 600 68 0 Nene 615 85 0 Sende Kabo 448 57 0 TOTAL 8 102 1006 846 Soit au total près de 2 000 ménages affectés parmi les 21 000 ménages habitant ces 23 villages et 1 000 ménages déplacés accueillis en famille d’accueil.

ANALYSE DES BESOINS

EAU, HYGIENE ET ASSAINISSEMENT 54% des populations des villages visités ont accès à l’eau du forage PMH (pompe à motricité humaine), château d’eau solaire qui sont des sources d’eau potable contre 6% utilisant l’eau du fleuve pour boire et autres besoins. Cependant, la défécation à l’air libre est une pratique courante observés dans tous les villages enquêtés. 32% des latrines sont inondées et 34% sont complétement détruites. Cette situation risque d’engendrer la prolifération de maladies hydriques typhoïdes ou choléra mais également indirectement augmenter les cas de paludisme. Au moment de l’évaluation, 33% des enfants de moins de 5 ans souffrent de diarrhées et 46% d’entre eux sont pris en charge.

Source principale d’eau que consomment les ménages Forage 54,5% Puit protégé 19,6% Puit non protégé 19,6% Rivière/fleuve/marigot/ruisseau 6,3%

NFI (ARTICLES MENAGERS ESSENTIELS)

En ce qui concerne les articles ménagers essentiels, le score de vulnérabilité moyen observé est de 4,4 sur une échelle maximale de 5, comme le montre le graphique ci-dessous. Selon les informations récoltées, cette situation s’explique par la situation socio-économique des populations de ces localités en majorité nomades et pauvres se déplaçant à la recherche de pâturage pour les animaux ainsi que le poisson pour son commerce et à ajouter à cela les inondations qui ont endommagés le peu d’articles disponibles.

Par ailleurs, les familles sont nombreuses, avec une taille moyenne sur l’échantillon évalué de 11.6 personnes par ménage.

Graph 1. Score NFI de la population

Couverture et Drap 4,5 Moustiquaire 3,6 Couchage (natte, matelat) 4,2 Seau 4,7 Casserole 4,8 Bidon 4,7 Score Total 4,4

0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0 3,5 4,0 4,5 5,0 Score (5=maximal)

ABRIS 87% des ménages enquêtés autochtones vivent dans leur propre maison, avec près de 65% des abris qui ont besoin de réhabilitation car ils ont subi des dégâts lourds mais réparables et 6% des maisons ont été totalement détruites.

Concernant les ménages déplacés, la totalité d’entre eux ont vu leurs abris lourdement endommagés et pour 63% d’entre eux, ils sont totalement détruits.

L’architecture des maisons dans la zone est en adobe (banco), avec le niveau plus haut que d’habitude de la crue et le fait qu’elle ait duré plus longtemps que les années précédentes, les murs des maisons ont subi un affaissement qui a provoqué l’effondrement des toitures.

Les toitures sont principalement construites en bois et en argile, mais il n’existe pas de ressources locales suffisantes et les marchés ne sont pas non plus approvisionnés en bois de qualité.

Les ménages enquêtés ont exprimé leurs priorités en termes d’abris : - 1. L’argent pour reconstruire ou réparer ; - 2. Le manque de bois et d’outils de construction et - 3. Les moustiquaires et support de couchage.

Etat de l'abri actuel pour les autochtones

6% 29%

65%

Non endommagé Dégâts lourds mais réparables Destruction totale

SECURITE ALIMENTAIRE L’enquête a révélé que 94% des ménages interrogés pensent que leurs récoltes vont être affectées par les inondations selon la répartition mentionnée dans le graphique ci-dessous, les estimations sont pessimistes. En effet, les trois quarts des ménages estiment que leurs pertes seront supérieures à 50% et un tiers supérieures à 70%.

Estimation de la perte de récolte

6% Entre 0 et 30% 36% 19% Entre 30 et 50% Entre 50 et 70%

40% Entre 70 et 100%

A noter que la moitié des ménages interrogés disent être affectés de manière exceptionnelle cette année, et qu’il s’agit d’une crue particulièrement élevée, avec des conséquences dramatiques, ce n’était pas le cas les années précédentes. 60% des ménages disposent actuellement d’un stock alimentaire d’une durée moyenne de 6 semaines.

Le prix des denrées alimentaires est à la hausse sur le marché local, et en cette période les populations vivent des revenus générés par la pêche. La diversité alimentaire est de quantité et de qualité inadéquate d’où les ménages enquêtés qui pour 90% d’entre eux ont un SCA pauvre inférieur à 28. Cette situation n’est pas reliée aux inondations, mais néanmoins, elle va empirer lors de la période de soudure si les récoltes sont aussi mauvaises que prévu. PATURAGE Dans le cercle de Tenenkou l’élevage est basé sur la transhumance, les pasteurs remontent avec les animaux dans le sahel et y séjournent de juin à novembre. Ce mouvement concerne les bergers, les propriétaires d’animaux et les marchands de bétail. C’est un élevage de type extensif et de prestige. Pendant la période de transhumance le delta se vide de sa population au profit de la zone exondée.

Le pâturage existe mais le nombre de cheptel est élevé avec le retour de la grande transhumance par rapport à l’espace existant.

D’après la communauté à compter du mois d’avril prochain un risque de rupture du pâturage est pressenti auquel il faut ajouter la perte de bétail (actuellement déjà évaluée à 13% auprès des ménages enquêtés dans les communes sinistrées) et l’apparition des maladies comme la distomatose, la péri pneumonie bovine, la pasteurellose due à leur forte concentration dans la zone et la rareté de l’eau dans les influents du fleuve Niger vers le mois de mars.

Cette situation annonce une menace sur le bétail ce qui favorisera une inflation des prix de l’aliment bétail. Ainsi par mesure de précaution, quelques communautés se préparent en conséquence en fauchant les herbes, les sèchent et les gardent à domicile pour faire face à la période de soudure. Mais seulement 50% des ménages ont un stock pour nourrir leurs animaux pour encore 3 mois.

Cette situation n’est pas seulement reliée aux inondations, mais la traversée annuelle des troupeaux va engendrer les tensions communautaires connues mais le manque de pâturage attendu risque de les exacerber.

CONCLUSION L’inondation dans le cercle de Tenenkou a été marquée par une importante perte d’abris, d’animaux, de production agricole et a considérablement affecté l’économie locale et le système d’hygiène et d’assainissement. Cette situation risque de générer la multiplication des maladies liées à l’eau comme la diarrhée et indirectement le paludisme.

Sur le total des ménages affectés enquêtés, 72% d’entre eux priorisent leurs besoins en abris et dans l’ordre de leurs priorités : 1 les abris, 2 les NFI et 3 la sécurité alimentaire. La moyenne de leurs 3 besoins sectoriels prioritaires est résumée ci-dessous :

Abris 25% NFI 24% Sécurité Alimentaire 19% Assainissement 12% Santé 14% Accès à l'eau 5% Nutrition 1% Protection 0%

PAT

ANNEXES

Liste des 23 villages affectés : Cercle Commune Village M'bouta Zougui Sare Machamalou Assih Sabare Diondiori Boukary Kaya Niasso Thianguel Kinta Foulbe M'bouryoye Tenenkou Nene Sende Korbo Kolle Samba Moti Keba Somogiri Daga Keba Ouro Giri Taganene Sare Thina Sare Mare Kadial Serindou Toguere Koumbe Kamaka Sebe Synthèse focus group :

Villages Taganènè Somogiri Boukari Saré Djougui Thienguel Kamaké M’Boureye Niasso Sabare daga Machalou Sébé Maisons détruites 10 20 25 0 et 15 10 7 56 28 40 25

Latrines détruites 10 0 8 5 61 7 12 91 18 10

Villages Taganènè Somogiri daga Boukari Saré Djougui Thienguel Kamaké M’Boureye Niasso Sabare Machalou Sébé Superficies 20/30 30/50 20/40 40/50 40/50 90/100 56/77 78/78 50/60 89/95 inondées/ superficie emblavées en hectare

Vivres 2 1 2 0 0 0 7 10 5 6 perdus en tonne

Villages Taganènè Somogiri Boukari Saré Machalou Djougui Thienguel Kamaké M’Bour Niasso Sabare daga Sébé yoye Têtes de 23/400 13/125 41/800 10/35 10/750 24/260 150/1175 78/525 225/1018 158/715 bétails perdues /existan tes