DIRECTION DES MUSÉES DE INVENTAIRE DES COLLECTIONS PUBLIQUES FRANÇAISES

SCULPTURES ANTIQUES RÉGIONALES VOLUMES PARUS i. BESANÇON. Musée des Beaux-arts. La collection Pierre-Adrien Paris, par M. L. Cornillot, conservatrice des Musées de Besançon. Préface de J. Bouchot-Saupique, conservateur du Cabinet des dessins du Louvre. 2. TOULOUSE. Musée Paul-Dupuy. Les dessins antérieurs à 1830, par Robert Mesuret, conservateur des Musées Paul-Dupuy et Saint-Raymond. Préface de J. Vergnet-Ruiz, inspecteur général des Musées de province. 3. MONTAUBAN. Musée Ingres. Les dessins d'Ingres : Les portraits par Daniel Ternois, conservateur du Musée Ingres. Préface de J. Bouchot- Saupique, conservateur du cabinet des dessins du Louvre. 4. BAYONNE. Musée Bonnat. Les dessins italiens de la collection Léon Bonnat, par J. Bean, chargé de mission au cabinet des dessins du Louvre. Préface de J. Bouchot-Saupique, conservateur du Cabinet des dessins du Louvre. 5. TOULOUSE. Musée des Augustins. Les sculptures romanes, par Paul Mesplé, conservateur du Musée des Augustins. Avant-propos de M. Henri Seyrig, Membre de l'Institut, Directeur des musées de France. 6. MONTPELLIER. Musée Fabre. Dessins de la collection Alfred Bruyas et autres dessins des XIXe et XXe siècles, par Jean Claparède, conservateur du Musée Fabre. Préface de J. Vergnet-Ruitz, inspecteur général des Musées de province. 7. TOURS. Musée des Beaux-arts. Peintures du XVIIIe siècle, par Boris Lossky, conservateur des Musées de Tours, Amboise et Richelieu. Préface de A. P. de Mirimonde, Président de Chambre à la Cour des Comptes. 8. GRENOBLE. Musée de Peinture et de Sculptures. Les dessins modernes, par Gabrielle Kueny, conservateur du Musée de Peinture et de Sculpture, et Germain Viatte, attaché à l'Inspection générale des Musées de province. Préface de Bernard Dorival, conservateur au Musée National d'Art Moderne.

VOLUMES EN PRÉPARATION NANTES. Musée Thomas Dobrée. Collections mérovingiennes, par Dominique Costa, conservateur du Musée Dobrée. Préface de Jean Hubert, Membre de l'Institut. ROUEN. Musée des Beaux-Arts. Peintures françaises et italiennes du XVIIe siècle, peintures italiennes du XVIIIe siècle, par Pierre Rosenberg, assistant des Musées Nationaux. Introduction de Olga Popovitch, conservateur du Musée des Beaux-Arts de Rouen. Préface de Jacques Thuillier, maître de conférences à la Faculté des lettres de Diion CHANTILLY. Musée Condé. Les dessins italiens, par Roseline Bacou, conservateur des Musées Nationaux. VERSAILLES Les statues du Parc de Versailles, par Jean Coural, conservateur des Musées Nationaux. MONTAUBAN. Musée Ingres. Ingres et son temps, peintures, par Daniel Ternois, maître de conférences à la Faculté des lettres de Lyon.

Les photographies illustrant ce volume ont été exécutées par le Service de documentation photographique des musées nationaux (photographe Ina Bandy) et par At. J.- J. Hatt. INVENTAIRE DES COLLECTIONS PUBLIQUES FRANÇAISES

9

STRASBOURG MUSÉE ARCHÉOLOGIQUE SCULPTURES ANTIQUES REGIONALES

PAR JEAN-JACQUES HATT CONSERVATEUR DU MUSÉE ARCHÉOLOGIQUE DE STRASBOURG

PARIS ÉDITIONS DES MUSÉES NATIONAUX PALAIS DU LOUVRE 1964 Ce volume, le neuvième de PInventaire des Collections Publiques françaises est publié par les .Editions des Musées Nationaux. Le secrétariat de la collection est assuré, sous l'autorité du Directeur des Musées de France, par Michel Laclotte, Inspecteur Principal des Musées de Province, Ro se line Bacou et Jean Coural, Conservateurs des Musées Nationaux. Nous tenons à remercier pour leur aide Mme A. S. Henraux, Chef des services de la Réunion des Musées Nationaux et l'équipe du service de documentation photo- graphique des Musées Nationaux.

Sur la couverture : Fragment de stèle funéraire (nO 13 du catalogue). Photo Mme Bandy. PRÉFACE

Assurément, comme l'indique dans son avant-propos l'au- teur de cet ouvrage, le temps n'est plus. où l'on jugeait d'un point de vue exclusivement classique les arts des provinces de l'Empire romain. Cette année même, à Paris, le ville Congrès international d'archéologie classique vient d'en offrir la meilleure preuve : consacrés, selon le libellé du thème adopté, au « rayon- nement des civilisations grecque et romaine sur les cultures périphériques », ses travaux, en fait, n'auront pas été limités aux seuls emprunts de celles-ci à celles-là; ils auront aussi donné lieu à de savants rapports, à de fructueuses interventions sur les traditions indigènes et, l'éclairant ainsi d'une lumière plus directe, souligné, à maintes reprises, l'originalité de ces arts provinciaux. Celle de la sculpture gallo-romaine, en tout cas, ne saurait être aujourd'hui contestée. Ses techniques, ses styles, ses écoles se révèlent peu à peu, à mesure que progresse, dans ce domaine, notre connaissance des apports celtiques, — et, par ceux-ci, de l'art celtique lui-même, — autant et plus, peut-être, que celle des influences classiques. A cette captivante et, on le conçoit, émouvante découverte d'une des sources les plus vives de nos arts plastiques d'Occident de nombreux archéologues, au cours des trente dernières années, ont attaché leur nom : parmi les plus heureux, M. Jean-Jacques Hatt. Sans doute, et il voudra bien en être persuadé, n'est-ce en rien diminuer son mérite que de signaler d'abord, pour montrer l'importance de ses recherches et la portée de leurs résultats, l'exceptionnel intérêt du « matériel » sur lequel il a travaillé : celui, tout particulièrement, des 205 pièces du Musée archéo- logique de Strasbourg, dont il nous donne ici le catalogue raisonné. Cette collection, en effet, offre, du point de vue scien- tifique, le double avantage de rassembler, principalement, la quasi-totalité des sculptures gallo-romaines de Basse-Alsace, — grâce, pour une bonne part, je tiens à le rappeler, aux efforts de M. Hatt lui-même, qui l'a enrichie du produit de plusieurs fouilles et par de judicieux regroupements, — et d'être aussi représentative de l'« art populaire » de cette région que de son « art savant ». Encore fallait-il bien distinguer le second, d'inspiration gréco-romaine, du premier, de tradition celtique, fixer les carac- téristiques de style et de technique propres à chacun d'eux, relever les influences qu'ils purent exercer l'un sur l'autre, leurs transformations respectives et, le cas échéant, leur com- mune évolution. Quiconque a tant soit peu pratiqué ce genre de recherches mesurera l'ampleur de la tâche et ses difficultés. Elles n'ont pas arrêté M. Hatt, qui s'est engagé dans cette voie avec résolution, patience et méthode : analysant, classant, comparant; ne négligeant aucune indication sur l'origine de chaque pièce et sur les circonstances de sa découverte; repérant de précieux critères dans la nature des pierres employées, dif- férente suivant les époques et les factures; examinant celles-ci jusque dans les moindres détails des visages, des attitudes, des drapés, tenant le meilleur compte des textes épigraphiques, lorsque des œuvres en portaient; tirant habilement parti, pour certaines sculptures récemment découvertes, telle la stèle à quatre divinités de la place Kléber, à Strasbourg, des données chronologiques fournies par la stratigraphie; enfin, avant de mettre en chantier cet ouvrage, éprouvant ses conclusions dans une série d'articles publiés dans la Revue archéologique de l'Est et du Centre-Est, en 1955, 1956, 1957 et 1958, et dans la Revue des Etudes Anciennes, en 1957. Au vrai, l'entreprise était d'autant plus délicate que M. Hatt entendait bien ne pas se contenter de dresser un simple réper- toire, analytique, des sculptures gallo-romaines de son musée. La connaissance approfondie que, par ailleurs, dans l'exercice de ses fonctions, très utilement complémentaires, de directeur régional des antiquités historiques, à l'occasion des fouilles qu'il dirigea personnellement à Strasbourg, à , à Mack- willer, à , non moins qu'à la faveur de son enseignement des antiquités nationales à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l'Université de Strasbourg, il avait acquise du contexte archéologique et historique de ce riche ensemble, l'invitait à donner un tour plus synthétique à son travail. Il s'y décida en faisant d'abord, dans un substantiel avant-propos, le point de ses recherches sur l'art de la sculpture en Alsace romaine, puis, pour illustrer en quelque sorte ses thèses, en présentant le catalogue proprement dit, notices et figures, selon un clas- sement chronologique. Parti audacieux, trouveront d'aucuns. Peut-être; mais, à coup sûr, le seul qui permettait de suivre, sur quatre siècles, l'évolution des styles et la transformation des techniques, qu'il s'agisse de l'art savant ou de l'art populaire, de noter l'appa- rition et la disparition d'ateliers, d'apprécier leur rayonnement, voire d'étudier la production et la manière de quelques artistes, et, en même temps, de replacer toutes les pièces de la collection dans la perspective des événements, religieux ou politiques, militaires ou économiques, dont elles jalonnent et, à leur façon, reflètent le cours. De cette audace, tout autant que de la science et du soin dont témoigne son ouvrage, il faut, certainement, féliciter M. Jean-Jacques Hatt, et le remercier. Pierre QUONIAM Inspecteur général des musées de province

AVANT-PROPOS

Pendant longtemps, les historiens de l'art antique n'ont eu d'yeux que pour la sculpture classique. L'art des provinces de l'empire romain, médiocre et barbare, paraissait sans valeur et tout à fait indigne d'atten- tion. Ce n'est que récemment, par suite du développement des recherches archéologiques dans les anciennes provinces impériales romaines, de l'intérêt suscité par ces œuvres auprès de certains spécialistes, en raison, enfin, des transformations intervenues dans le goût du public, que l'a- tention s'est portée sur ces œuvres d'art. On s'est efforcé d'abord d'y découvrir le témoignage des anciennes traditions indigènes, luttant contre l'académisme officiel gréco-romain. On a même été jusqu'à recon- naître, dans ces arts primitifs et spontanés, quelques signes annonciateurs des recherches de l'art moderne. Bref, au préjugé défavorable, qui régnait encore en France au début de ce siècle, a succédé un préjugé favorable. Toutefois, il . ne faudrait pas abuser des interprétations esthétiques, et déformer les perspectives de l'histoire, dans laquelle ces œuvres, souvent naïves et attachantes, doivent retrouver leur véritable place. Il s'agit là, en réalité, d'un travail difficile, qui doit être préparé par des recherches approfondies sur le plan régional. Le catalogue que nous présentons ici voudrait être une de ces mono- graphies, souhaitées par les historiens de l'art, désireux de passer à la synthèse, sur le plan des arts provinciaux eux-mêmes. Il a été mûri par de longs travaux, non seulement dans les Musées, au contact des pièces originales, mais aussi sur le terrain. En effet, les fouilles stratigraphiques de Strasbourg, celles de Seltz, de Saverne, de Mackwiller, nous ont apporté de nombreuses données objectives nouvelles, susceptibles d'être, en général, intégrées dans l'histoire de l'Alsace romaine ou même appor- tant des précisions particulières sur la date de certaines œuvres d'art. Elles ont autorisé l'établissement d'une chronologie détaillée, permet- tant de rattacher l'évolution de l'Alsace romaine aux périodes de l'histoire mouvementée qui fut celle des régions frontières de l'Empire d'Occident pendant quatre siècles. Les époques ainsi délimitées sont en rapport direct avec les étapes parcourues par les styles artistiques dans leurs transformations et leur évolution. D'autre part, un long travail d'analyse, de classement et de compa- raison a été nécessaire pour ranger par périodes les importantes séries de sculptures antiques régionales déjà déposées au Musée de Strasbourg, et dont les circonstances de trouvailles sont, pour la plupart du temps, imprécises. Les résultats de ces recherches ont été déjà partiellement publiés, soit dans la Revue des Études Anciennes, soit dans la Revue Archéologique de l'Est. Le présent catalogue s'efforce d'en tirer les conclusions, en les enrichissant notablement par de nouvelles confron- tations d'œuvres d'art, auxquelles nous n'avions d'abord pas songé. La collection lapidaire gallo-romaine du Musée Archéologique de Strasbourg. Ses origines, sa constitution, son histoire. Le noyau primitif du Musée Archéologique de Strasbourg a été constitué par les collections de l'humaniste et archéologue Jean-Daniel Schœpflin (1694, 1771), auteur d'un monumental ouvrage illustré sur les Antiquités de l'Alsace (Alsatia Illustrata). Ces collections furent, après sa mort, acquises par la ville de Strasbourg et réunies dans l'ancienne église des Dominicains, désaffectée depuis le XVIe siècle, et aménagée en bibliothèque municipale. Après la fondation de la Société pour la Conservation des Monu- ments Historiques d'Alsace, en 1855, ce fut cette dernière qui se chargea de la gestion du Musée. Les recherches étant alors très actives, sous son impulsion, de nombreuses sculptures romaines provenant principalement du Nord du département du Bas-Rhin y furent déposées. Le bombardement de Strasbourg, en 1870, détruisit la bibliothèque et anéantit ou endommagea gravement la plupart des sculptures exposées. L'incurie et la négligence qui sévirent alors dans les opérations de déblaie- ment, confiées à des entrepreneurs, sans aucune surveillance, ajoutèrent aux destructions les pertes et les détournements. Dans la suite, néanmoins, quelques œuvres importantes, et notam- ment le bas-relief figurant le dieu local Medru, devaient être retrouvées à l'emplacement où avaient été déposés les déblais. Mais comme il n'exis- tait pas, avant 1870, d'inventaire de la collection, l'état même de ces disparitions devait être difficile à établir. Le chanoine Straub, alors prési- dent de la Société des Monuments Historiques, essaya pourtant de le constituer, sur la base des publications partielles déjà parues (B. S.C.M.H.A., 1888, p. 363). Ce bilan devait se révéler comme désastreux : sur quatre-vingt-dix monuments de l'époque gallo-romaine déposés au Musée avant 1870, une douzaine avaient pu être retirés en assez bon état de conservation, cinquante avaient disparu sans laisser de traces, le reste n'était que débris. Mais de nouvelles découvertes vinrent, sans compenser ces pertes, pratiquement irréparables, enrichir la collection. En 1878, fut mise au jour la célèbre stèle de Largennius, légionnaire de la IIe légion du temps de Tibère. C'est alors aussi que fut déposée au Musée une belle tête de femme en marbre blanc, du IIe siècle, découverte en 1867, à Koenig- shoffen, non loin du lieu où devait être trouvée plus tard la stèle de Largennius. A partir de 1898, les travaux du tout-à-l'égoût, et en général les travaux urbains, surveillés par les services municipaux et le Musée, enrichirent la collection, notamment grâce à la découverte de stèles funéraires trouvées emmurées dans l'ancien rempart romain. En automne 1911, à la faveur des travaux de terrassement nécessités par la construc- tion du Temple protestant de Koenigshoffen, furent découverts les vestiges d'un sanctuaire de Mithra. Les restes des sculptures en haut- relief mises au jour à cette occasion furent déposés au Musée. Plus tard, son conservateur, R. Forrer, devait faire établir une reconstitution en plâtre poly chromé du grand relief. Celle-ci fut remplacée, il y a quelques années, par un montage des pièces originales, sur un fond de la couleur de la pierre, où la reconstitution du haut-relief a été esquissée à la gouache. Pendant la guerre de 1914-1918, un officier allemand, Poelmann, fit don au Musée d'une série de sculptures découvertes au Donon pendant les hostilités, à la suite de travaux exécutés par les soldats du Génie allemand. Ultérieurement, les enrichissements continuèrent d'affluer, soit sous la forme de dons, soit par acquisition à la suite de découvertes fortuites. Nous signalerons, parmi les plus importantes de ces dernières, la grande stèle d', trouvée par hasard en 1937, ainsi que les restes de monuments sépulcraux mis au jour, à Dachstein, lors de fouilles exécutées en 1938-39 dans une tour de défense du Bas-Empire par R. Forrer et J. Griess. Depuis 1945, quelques lots importants sont venus s'ajouter à une collection déjà considérable : la très belle stèle à quatre dieux, découverte sous la place Kléber en 1954, la série particulièrement intéressante des sculptures mithriaques du sanctuaire de Mackwiller, déposées au Musée, entre 1955 et 1958. En 195 8, furent transférées au Musée les sculptures restées sur place au Donon, s'ajoutant à celles qui avaient été trouvées au cours des fouilles de F. Lacour (1935-1938) et généreusement offertes par ses héritiers. Ces dernières acquisitions ont permis de consacrer une salle entière aux antiquités du Donon. Rappelons qu'une partie d'entre elles avait été, avant 1870, déposée au Musée d'Épinal. Le Donon et la haute vallée de la Bruche faisaient alors partie du département des Vosges. Enfin, en 1958, M. Schlumberger a bien voulu déposer au Musée une inscription et quelques fragments de sculptures découvertes par lui dans la Sarre, à Bischtroff, près du moulin de dont il est propriétaire. En ce qui concerne la provenance, les sculptures gallo-romaines du Musée peuvent être réparties en plusieurs groupes : Le groupe strasbourgeois, le plus important, comprend trois caté- gories d'objets : les monuments funéraires, provenant de la grande nécro- pole de Koenigshoffen, et découverts, parfois sur place, mais le plus souvent dans les fondations de l'enceinte du bas Empire, les monuments votifs, trouvés dans le sous-sol de la ville, et particulièrement nombreux autour de la Cathédrale '(rue des Frères), enfin, le groupe des sculptures du Mithraeum de Koenigshoffen. Le groupe des sculptures votives provenant des sanctuaires et des agglomérations du Nord de l'Alsace : régions de Seltz, , , , Niederbronn. Le groupe de l'Alsace tordue, comprenant les sculptures votives de Mackwiller, Bischtroff, Spachbach, etc. Le groupe du Donon. Le groupe des nécropoles et des agglomérations romaines situés à l'ouest de Strasbourg : , Dachstein, Oberhaslach. Le groupe de (Brocomagus). Le groupe de Saverne (Tres Tabernæ). Le groupe d'Ehl-, relativement important avant 1870, mais presqu'entièrement détruit par l'incendie. Les groupes méridionaux : région de Sélestat, Vicenz et Châtenois (Bas-Rhin), groupe d'Ostheim-Zellenberg (Haut-Rhin). Le Musée Archéologique de Strasbourg contient une collection très représentative pour la sculpture provinciale romaine principalement en Basse-Alsace. Rappelons ici que le Musée de Mulhouse expose éga- lement un lot important de sculptures votives provenant des sanctuaires du Nord de l'Alsace (), que ceux de Haguenau et de Wissembourg contiennent également quelques pièces importantes, pro- venant de la même région. Bien que ces divers objets n'entrent pas dans le cadre de notre travail, nous serons souvent dans l'obligation de les comparer avec ceux du Musée Archéologique de Strasbourg, afin de résoudre certains problèmes de classement stylistique et chronologique. Nous mentionnerons également ici deux séries notables de bas-reliefs votifs, conservés sur place, et encore partiellement inédits, ou mal publiés. Ce sont les sculptures de l'église de , et celles de Langen- soultzbach, qui ont été emmurées non loin de leur lieu de trouvaille. Un bas-relief antique est encore conservé dans l'église Seltz. Ces derniers monuments nous intéressent également à titre de matériaux de comparaison.

Aperçu bibliographique.

Le fonds le plus ancien du Musée Archéologique, celui de Schoepflin, est publié dans les deux ouvrages suivants :

Schoepflin, Alsatia Illustrata, Colmar 1771 (cité, en abrégé : Als. 111.) et Oberlin, Museum Schoepflinianum, Strasbourg 1773 (Mus.). A partir de 1855, les découvertes et les entrées au Musée sont signalées dans les Bulletins de la Société pour la conservation des Monuments Historiques d'Alsace (cités en abrégé B.S.C.M.H.A.). Nous avons donné un résumé de ces données et de l'activité de la Société dans le domaine de l'archéologie proto-historique romaine et mérovingienne dans le Bulletin paru à l'occasion du centenaire de la Société (B.S.C.M. H.A., IIe série, XXVIIe volume, 1956).

Un catalogue scientifique des collections du Musée a été publié, en 1912, par Henning, sous le titre de : Denkmâler der elsâssischen Alter- tumssammlung zu strassburg im Elsass, von der neolithischen bis zur karo- lingischen Zeit (cité en abrégé : Hen.). Il comprend les sculptures impor- tantes existant au Musée à cette date (quarante-deux numéros). Les enri- chissements ultérieurs de la collection sont signalés dans les Cahiers d'Archéologie et d'Histoire d'Alsace (tables parues en 1951, cité en abrégé C.A.H.A.) puis par les Cahiers alsaciens d'archéologie, d'art et d'histoire (cités en abrégés C.A.A.A.H.), à partir de 1957. L'inventaire des sculptures recueillies lors de la construction de l'église protestante de Koenigshoffen, et provenant du sanctuaire de Mithra, a paru dans l'ouvrage de Forrer : das Mithra-Heiligtum von Koenigshoffen bei Strassburg (B.S.C.M.H.A. XXIV, 1915, Mithr). La plupart des sculptures strasbourgeoises ont été étudiées et publiées par R. Forrer dans son monumental ouvrage Strasbourg-Argentorate préhistorique, gallo-romain et mérovingien, paru à Strasbourg en 1927 (cité en abrégé Arg.). Dans son petit ouvrage l'Alsace romaine, paru en 1935, R. Forrer publie et commente une sélection des sculptures gallo- romaines d'Alsace. Après 1945, les acquisitions du Musée sont signalées parallèlement dans la Gallia, et dans les Cahiers d'archéologie et d'histoire d'Alsace. E. Linckenheld a réuni, dans un article paru en 1947, (CAHA, no 128, 28e année, p. 68 à 114) les sculptures du Donon mises au jour par les fouilles de Mme Lacour, et entrées au Musée après la guerre de 1940 à 1945. Les découvertes de Mackwiller ont été signalées dans les Cahiers Alsaciens d'archéologie d'art et d'histoire en 1957 (C.A.A.A.H., 1957, p. 51 et suiv.), et dans la Gallia (Tome XIV, 1956, fascicule 2, p. 306, 308, et Tome XVI, 1958, p. 333 à 339 ). Nous avons publié la découverte de la stèle à quatre dieux de la place Kléber dans les Cahiers d'Archéo- logie en 1954 (p. 57 et suiv.), et dans la Gallia, la même année (Gallia XII, 1954, fascicule 2, p. 488 à 492). Les premiers résultats du classement chronologique des sculptures du Musée Archéologique de Strasbourg ont été publiés dans une série d'articles de la Revue Archéologique de l'Est (Observations sur quelques sculptures gallo-romaines du Musée de Strasbourg, dans R.A.E. 1955, p. 124 à 134; 1956, p. 114 à 129; 1957, p. 75 à 87; 1958, p. 303 à 322), et de la Revue des Etudes Anciennes (Esquisse d'une histoire de la sculpture régionale de Gaule romaine, R.E.A. 1957, p. 76 à 107). Nous avons également repris l'étude et la publication d'une sélection des meilleures sculptures strasbourgeoises dans notre petit ouvrage sur Strasbourg au temps des Romains, paru en 1953 (cité en abrégé Strasb.). Enfin, l'étude des statuettes de bronze nous a permis d'apporter certains compléments à l'évolution des styles régionaux (Observations sur quelques statuettes gallo-romaines en bronze du Musée de Strasbourg, dans R.A.E., 1960, p. 315-326; 1961, p. 116-146, 216-233, 3°3-319). Les sculptures antiques régionales du Musée de Strasbourg, ancien- nement ou récemment acquises, sont également publiées dans le Recueil général des bas-reliefs, statues et bustes de la Gaule romaine, aux Tomes VII (Germanie Supérieure); X (suppléments), XI (suppléments). Méthode de classement. La méthode suivie dans l'étude des sculptures antiques d'art pro- vincial déposées au Musée de Strasbourg comporte un triple aspect : a) Datation d'œuvres importantes, considérées comme têtes de série; b) Analyse, sur ces œuvres, des traits de style et de technique carac- térisant l'époque, et détermination des différences individuelles, permet- tant de séparer l'artiste, ou son école, des œuvres contemporaines. c) Groupement autour de ces œuvres maîtresses, de séries d'œuvres attribuables, soit à la même époque, soit à la même école, ou au même atelier, voire à la même main. Pour la datation des œuvres les plus importantes, nous avons utilisé les critères les plus objectifs : détails de l'inscription, du costume et de l'équipement masculin, coiffure masculine ou féminine. Il est arrivé parfois que les conditions d'une trouvaille, et la stratigraphie qu'il a été possible de relever, nous mettent en situation de déterminer objecti- vement une date précise pour certaines œuvres exhumées récemment. Tel fut le cas, notamment, pour la stèle à quatre divinités de la place Kléber, à Strasbourg (nO 77). Dans d'autres cas, les fouilles actuelles ont permis d'interpréter les conditions de trouvailles anciennement consignées dans les inventaires, et d'en tirer une indication chronolo- gique. Ce fut le cas pour la stèle à quatre dieux de la rue des Francs- Bourgeois (nO 109). L'analyse des œuvres datées doit porter à la fois sur les procédés techniques de répérage et de découpage des contours, sur le « canon » (proportion de la tête par rapport au corps), sur la stucture des détails expressifs du visage et des modelés anatomique, sur la façon de traiter les parties drapées, la chevelure et la barbe. Certains traits individuels, certaines habitudes d'artistes ou d'écoles ont pu être ainsi décelés, notam- ment en ce qui concerne le maître, probablement étranger à l'Alsace, mais ayant travaillé à Argentoratum au début du Ille siècle, qui a sculpté le Caracalla découvert à la place Gutenberg (nO 76), ainsi que la stèle à quatre dieux de la place Kléber (nO 77). Ces traits d'époque, ces caractéristiques d'artistes ou d'ateliers sont surtout bien distincts dans les œuvres savantes ou à demi-savantes. Quant aux œuvres d'art populaire, elles doivent être datées par confrontation avec celles-ci. En effet, le style et la technique des unes ont été, la plupart du temps, maladroitement adaptés ou imités par les autres. C'est ainsi que les progrès accomplis par les écoles savantes d'art régional dans le trai- tement du corps et des éléments expressifs de la figure humaine, des draperies et des chevelures, ont eu leur retentissement dans les œuvres populaires, bien que celles-ci conservent leurs caractères propres. Un critère matériel est important pour la chronologie, c'est celui de la matière. La pierre la plus couramment employée est, jusqu'au début du IIe siècle, le calcaire dur importé. L'époque des Flaviens voit cepen- dant apparaître, concurremment avec celui-ci, les grés locaux de la région de Saverne ou de l'Alsace tordue, d'abord blancs ou orangés, puis roses. Cette apparition de la pierre locale comme matériau de sculpture semble liée à l'ouverture de carrières, par la ville légion, dans la région savernoise. Vers le milieu du IIe siècle apparaît à Strasbourg le grès gris ou blanc à grain fin de la région de Mackwiller. Ce fait doit être mis en relation avec l'ouverture de la grande carrière privée de Mackwiller, dont était propriétaire le chevalier romain, qui a dédié le sanctuaire de Mithra découvert en 1956. Ce grès à ciment argileux, facile à travailler humide, durcit rapidement et résiste bien au gel et aux intempéries. C'est un très bon matériau, qui a été préféré par les sculpteurs savants de Strasbourg jusque vers le milieu du IIIe siècle. Notons cependant que les sculpteurs locaux de la même époque, auxquels nous devons la plupart des sculptures de l'Alsace du Nord, emploient au même moment, soit des grès jaunes, ou orangés du Pala- tinat, soit des grès roses à gros grains de provenance locale. La plupart des sculptures du Donon sont taillées dans un grès grossier, contenant des grains de quartz, et récolté sur place. A la fin du IIIe siècle sont souvent employés les grès de la vallée de la Bruche (carrière de Haslach). La pierre locale, de mauvaise qualité est généralement employée au IVe siècle. En résumé, donc, les calcaires d'importation semblent préférés au Ier siècle. A la fin de ce siècle, et jusqu'au milieu du IIe siècle, sont employés les grès de Saverne et de l'Alsace du Nord. Depuis 150 jusque vers 240, le matériau le plus employé est le grès gris à grain fin de Mack- willer. Puis, au cours de la deuxième moitié du Ille siècle, se généralise le grès de Haslach. Les grès locaux vulgaires sont généralement utilisés au IVe siècle. Ils n'ont jamais cessé de l'être d'ailleurs, sur place, par certains artistes locaux. Il existe même à Saverne une représentation de déesse mère tutélaire du Ier siècle (époque de Claude-Néron), qui est en grès rose local. Cette analyse même des conditions de l'emploi des divers matériaux nous amène à préciser la distinction, véritablement fondamentale pour la connaissance des arts provinciaux, entre sculpture savante et sculpture populaire. A vrai dire, la réalité est passablement complexe et il existe une série d'intermédiaires entre l'art savant, de caractère officiel, et l'art populaire naïf et spontané. Dans la pratique, et si nous tirons des conclu- sions des découvertes faites à Strasbourg, et dans le reste de l'Alsace, voici comment les choses semblent se passer : 1° Il existe dans les grands centres, notamment à Argentoratum, des ateliers officiels d'art savant, dirigés par des artistes confirmés, comme, par exemple, le maître du grand relief de Mithra de Koenigshoffen, qui semble avoir travaillé entre 150 et 180, et celui du Caracalla et de la Junon, qui paraît avoir exécuté ses œuvres strasbourgeoises au début du Ille siècle. Ces maîtres dirigeaient un atelier, qui pourrait d'ailleurs leur avoir été commun, le maître de Caracalla ayant succédé au maître du Mithraeum à la fin du Ils siècle. 20 L'atelier exécute, sous la direction du maître, mais sans sa parti- cipation personnelle, des ensembles de bas-reliefs en dehors du centre de travail habituel (Mithraeum de Mackwiller). Ce sont alors les compa- gnons de l'atelier qui travaillent sous la direction du maître, et dans son style, suivant sa technique. L'atelier procède également à l'élaboration, à Argentoratum, d'oeuvres secondaires : monuments funéraires, sarcophages. 30 Certains compagnons, après avoir travaillé quelque temps dans l'atelier, en sortent, et se mettent à leur compte. 4° Des artisans de villages travaillent, à leur tour, à l'école de ces maîtres secondaires. 5° De simples tailleurs de pierre produisent également des sculp- tures, notamment dans les carrières vosgiennes, dans les sanctuaires de montagne (le Donon). Ces œuvres, qui ne sont pas dépourvues de mérites, dépendent toujours, quelle que soit leur apparente spontanéité, directe- ment ou indirectement, des œuvres savantes pour le style et la technique. 6° Lorsque les ateliers d'art savant ne sont plus là pour le soutenir, l'art populaire tombe progressivement dans la barbarie, comme cela s'est produit à la fin des Ille et IVe siècles. Il s'en faut donc de beaucoup que l'art savant et l'art populaire constituent deux domaines clos, hermé- tiquement séparés. Il existe dans chaque province des ateliers officiels d'art savant, et des ateliers d'art local. Mais des courants artistiques, dûs à des raisons humaines et individuelles, aussi bien qu'à des causes générales, ne sont nullement exclues entre ces deux catégories d'ateliers. C'est une des constatations qui ressortent de nos recherches. Elle est de première importance pour l'étude des sculptures romaines provinciales. Les grandes périodes de l'évolution artistique en Alsace romaine. Les collections de sculptures antiques du Musée de Strasbourg sont d'une très inégale richesse suivant les époques. Aussi est-il nécessaire, pour reconstituer dans son ensemble l'évolution artistique régionale, d'avoir recours à d'autres sources : notamment les statuettes de bronze, et, d'autre part, en général, les sculptures en pierre ou en bronze déposées dans les autres musées d'Alsace, ou restées sur place. Nos recherches, entreprises dès 1945, nous ont permis de préciser les caractéristiques des différents styles aux diverses époques, et dans certains cas, de reconstituer le mécanisme de formation des ateliers, bref de donner un sens plus concret à ce que l'histoire de l'art appelle les grands courants artistiques ou les influences. Existait-il, en Alsace, une sculpture indigène antérieure à l'époque romaine ? Dans l'état actuel de notre documentation, aucun fragment de sculpture antérieur à l'Empire Romain n'est connu en Alsace. Deux observations sont cependant nécessaires : l'Alsace est située dans la vallée du Rhin, c'est-à-dire précisément dans une région qui a fourni des sculptures celtiques de très haute époque (pilier de St-Goar, tête de Heidelberg). D'autre part, les ceintures hallstattiennes du Musée de Haguenau, celles mêmes du Musée de Strasbourg sont là pour prouver que les habitants de la région pratiquaient, dès le vile siècle, avant notre ère, une forme d'art schématique qui n'était ni sans originalité, ni sans mérites. En ce qui concerne l'art de la Tène, nous ne possédons, jusqu'à ce jour, que des objets mobiliers et des bijoux, décorés suivant le système de stylisation flamboyante, cher aux Celtes. Une découverte de sculpture gauloise n'est toutefois nullement exclue en Alsace. Il y a, dans les sculp- tures régionales du Ier au IVe siècle assez de traits originaux de style et de technique, pour rendre manifeste une tradition artistique ancienne, déjà solidement implantée dans la population indigène avant l'arrivée des Romains. Mais la seule sculpture actuellement connue qui paraisse ressortir à un art indigène, est le torse du Mars celtique de Brumath (n° 2 de ce catalogue) qui appartient au début du Ier siècle de notre ère. A partir de la conquête romaine, il nous est permis d'établir une relation entre l'évolution artistique, et l'histoire de l'Alsace romaine, telle qu'elle nous est connue par les textes, les inscriptions, et les données de l'archéologie. Les grandes phases du développement artistique régional peuvent être ainsi énumérées : I. — Début du Ier siècle, règnes d'Auguste, Tibère, Caligula, jusqu'à Claude (27 av. J.-C. à 41 apr. J.-C.). II. — Époque de Claude - Néron (41-68 apr. J.-C.). III. — Période flavienne (70 à 97 apr. J.-C.). IV. — Première moitié du Ils siècle (Trajan - Hadrien, partie du règne d'Antonin, 98 à 15° apr. J.-C.). V. — Deuxième moitié du IIe siècle (Antonin, Marc Aurèle, Com- mode, 15° à 192 apr. J.-C.). VI. — La période des Sévères (193 à 235 apr. J.-C.). VII. — Du règne de Maximin à l'anarchie du Ille siècle (235 à 25° apr. J.-C.). VIII. — La période d'anarchie du Ille siècle et la réaction indigène. IX. — De Constantin à l'invasion de 352. X. — La fin du IVe siècle. I. — Début du Ier siècle. Le courant artistique cisalpin, amené en Rhénanie par les armées romaines, est représenté à Strasbourg par la stèle de Largennius (nO i), soldat de la IIe légion, qui a séjourné dans la ville depuis la fin du règne d'Auguste, jusque sous le règne de Claude. Cette stèle a été rattachée par Gerster (Mittelrheinische Bildhauerwerkstatten im ersten Jahrhun- dert, p. 130) à l'atelier mayençais, qui a sculpté la stèle de Musius, vers 20 apr. J.-C. Nous avons eu l'occasion déjà de noter les traits d'originalité celtique, qui caractérisent les production de l'école de Mayence sous Tibère (J.-J. Hatt, la Tombe gallo-romaine, p. 142-143). Le style gaulois, sur la stèle de Largennius, est très perceptible dans la stylisation parti- culière de la chevelure, dérivant de la technique indigène du métal. La facture particulière des draperies, en plis parallèles serrés, est originaire du Nord de l'Italie. Ce sont d'ailleurs des Gaulois cisalpins, qui consti- tuaient en grande partie le personnel d'occupation, qu'il s'agisse des soldats de l'armée, des ouvriers ou des commerçants venus s'installer dans leur entourage. Le musée archéologique de Strasbourg possède une grande inscription funéraire se rapportant à une famille de Milan, intro- duite au début du Ier siècle à Argentorate, parce que le fils était légionnaire de la IIe légion. A la même époque fonctionnaient dans l'agglomération artisanale voisine du camp romain des officines de fondeurs de bronze. Grâce à une découverte faite anciennement à Strasbourg, rue de la Nuée-Bleue, il est prouvé que l'on fondait à Argentorate des statuettes de style régional. II. — Règnes de Claude et de Néron. Il n'existe pas, au Musée de Strasbourg, de statues de pierre de cette époque. Mais le style claudien et néronien est représenté par des statues et une applique en bronze, qui accusent une nette influence de la Narbon- naise (voir J.-J. Hatt, Observations sur quelques statuettes gallo-romaines en bronze du Musée de Strasbourg, dans Revue Archéologique de l'Est, Tome XI, i960, p. 32 à 326). Il est possible que certains objets de ce genre, notamment une applique en bronze représentant Dionysos, et trouvée sous l'ancien Hôpital, aient été fabriqués sur place (voir ibidem, p. 325, fig. 130). Le style baroque un peu lourd de cet objet lui donne une place intermédiaire entre le style narbonnais de la période de Claude- Néron, et celui de la colonne de Mayence. III. — Période flavienne. Cette époque a été particulièrement marquante dans l'histoire du camp militaire et de l'agglomération civile voisine d'Argentorate. Détruits en 70 apr. J.-C., par suite des dévastations systématiques ordonnées en Germanie romaine par le chef batave insurgé Civilis, la ville et le camp furent entièrement reconstruits sous Vespasien. D'abord base d'opéra- tions militaires pour la conquête des champs décumates, puis, devenue grande plaque tournante du trafic entre les régions danubiennes et rhé- nanes, Argentorate prit à partir de ce moment une importance nouvelle. Les contacts directs entretenus dès lors avec l'Orient par la voie des Balkans y introduisirent de nouveaux éléments militaires et civils. La ville légion, qui, venue de Mésie, s'installa dans la ville vers 80 ap. J.-C., amena avec elle des soldats grecs et orientaux, et sans doute aussi, dès cette époque, le culte de Mithra. Les découvertes faites il y a quelques années sous la rue de l'Ail, nous ont appris que les ouvriers de l'officine céramique militaire attachée à la VIlle légion écrivaient le grec. L'abondance relative des bronzes alexandrins sortis du sous-sol strasbourgeois peut être mise en relation avec l'existence sur place d'une petite colonie alexandrine, peut-être constituée de membres du personnel qualifié, employé pour la navigation rhénane, qui se développe beaucoup à cette époque. En conséquence de ces faits, les influences hellénistiques et orien- tales devaient se faire sentir, plus rapidement d'ailleurs dans le domaine de la peinture murale (fresques flaviennes trouvées sous l'Hôtel de la Maison Rouge, place Kléber) et dans celui des statuettes de bronze, que dans la sculpture sur pierre, encore inféodée aux traditions de l'art pro- vincial gaulois du Ier siècle. Deux intéressants bas-reliefs funéraires proviennent de tombeaux de soldats : Il s'agit d'un portrait de cavalier, suivi de son valet d'armes (nO 9), et d'une figuration de soldat du train des équipages, conduisant une voiture à quatre roues. Ces œuvres per- mettent de constater les progrès accomplis par les sculpteurs militaires régionaux, dans le sens du réalisme, de la vie et du mouvement. C'est alors que la pierre régionale, le grès, fait son apparition dans la sculpture militaire, sans doute en raison de l'ouverture des grandes carrières légion- naires de la région de Saverne. Mais, à la même époque, les sculpteurs civils restent fidèles à la pierre calcaire, et à un style provincial dérivé de la sculpture de Gaule méridionale : tête de prêtre ou d'eunuque, bas-relief de Mercure et des deux Eponas (nos 6 et 7). Achevé d'imprimer le ij Juin ig 64 par LES PRESSES ARTISTIQUES 4, square Roland-Garros PARIS

PRINTED IN FRANCE DÉPÔ T LÉGAL N" 4 Participant d’une démarche de transmission de fictions ou de savoirs rendus difficiles d’accès par le temps, cette édition numérique redonne vie à une œuvre existant jusqu’alors uniquement sur un support imprimé, conformément à la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012 relative à l’exploitation des Livres Indisponibles du XXe siècle.

Cette édition numérique a été réalisée à partir d’un support physique parfois ancien conservé au sein des collections de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal. Elle peut donc reproduire, au-delà du texte lui-même, des éléments propres à l’exemplaire qui a servi à la numérisation.

Cette édition numérique a été fabriquée par la société FeniXX au format PDF.

La couverture reproduit celle du livre original conservé au sein des collections de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal.

*

La société FeniXX diffuse cette édition numérique en accord avec l’éditeur du livre original, qui dispose d’une licence exclusive confiée par la Sofia ‒ Société Française des Intérêts des Auteurs de l’Écrit ‒ dans le cadre de la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012.