Création d’une voie à mobilité active en vallée d’Ax

Communes de , Sinsat, Verdun, Aulos, Les Cabannes, Albiès, Urs, Vèbre, , , , Unac, , Perles-et- Castelet, Savignac-les-Ormeaux, Ax-les-Thermes, , Orlu (09)

Avis de l'Autorité environnementale sur le dossier présentant le projet et comprenant l'étude d'impact (articles L122-1 et suivants du Code de l’environnement) N° saisine : 2019-7357 Avis émis le : 28 mai 2019

Avis adopté le 28 mai 2019 par la mission régionale d’autorité environnementale de la région Occitanie Préambule relatif à l’élaboration de l’avis

Pour tous les projets soumis à évaluation environnementale, une « autorité environnementale » désignée par la réglementation doit donner son avis et le mettre à disposition du maître d’ouvrage, de l’autorité décisionnelle et du public. Cet avis ne porte pas sur l’opportunité du projet, mais sur la qualité de l’étude d’impact et la prise en compte de l’environnement dans le projet. Il n’est donc ni favorable, ni défavorable. Il vise à améliorer la conception du projet et à permettre la participation du public à l’élaboration des décisions qui le concernent.

En date du 2 avril 2019, l’autorité environnementale a été saisie par le préfet du département de l’Ariège pour rendre un avis sur le projet de voie à mobilité active en vallée d’Ax, sur les communes de Bouan, Sinsat, Verdun, Aulos, Les Cabannes, Albiès, Urs, Vèbre, Lassur, Garanou, Luzenac, Unac, Tignac, Perles-et- Castelet, Savignac-les-Ormeaux, Ax-les-Thermes, Orgeix, Orlu (09). Le dossier comprenait une étude d’impact du mois de décembre 2018 ainsi que l’ensemble des pièces du dossier d’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique. L’avis est rendu dans un délai de 2 mois à compter de la date de réception de la saisine et du dossier complet, soit au plus tard le 2 juin 2019. Par suite de la décision du Conseil d’État n°400 559 du 6 décembre 2017, venue annuler les dispositions du décret n° 2016-519 du 28 avril 2016, le présent avis est adopté par la mission régionale d’autorité environnementale de la région Occitanie (MRAe). L’avis a été préparé par les agents de la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement de la région (DREAL) Occitanie apportant leur appui technique à la MRAe et placés sous l’autorité fonctionnelle de son président. Conformément à l’article R.122-7 du Code de l’environnement, ont été consultés le préfet de département, au titre de ses attributions en matière d’environnement, et l’agence régionale de santé Occitanie (ARS). Le présent avis contient les observations que la MRAe Occitanie formule sur le dossier en sa qualité d’autorité environnementale. Cet avis est émis le 28 mai 2019 dans le cadre d’une délibération collégiale telle que prévue par le règlement intérieur du CGEDD, par les membres de la MRAe suivants : Philippe Guillard, président, Georges Desclaux, Marc Challéat, Maya Leroy. En application de l’article 9 du règlement intérieur du CGEDD, chacun des membres délibérants atteste qu’aucun intérêt particulier ou élément dans ses activités passées ou présentes n’est de nature à mettre en cause son impartialité dans l’avis à donner. Conformément à l’article R.122-9 du Code de l’environnement, l’avis devra être joint au dossier d’enquête publique ou de la procédure équivalente de consultation du public. Il est également publié sur le site Internet de la DREAL Occitanie (système d’information du développement durable et de l’environnement SIDE)1 et sur le site internet de la préfecture du Lot, autorité compétente pour autoriser le projet.

1 http://www.side.developpement-durable.gouv.fr/EXPLOITATION/DRMIDP/autorite-environnementale.aspx

2 Synthèse Le projet consiste en la création d’une voie à mobilité active en vallée d’Ax (09) sur environ 35 km. L’étude d’impact est de bonne facture, notamment concernant la prise en compte des aspects naturalistes et la démarche d’évaluation environnementale depuis les débuts du projet. Toutefois, la MRAe recommande de détailler la surface à défricher, le linéaire des murets en pierre potentiellement impactés, et de donner une estimation des surfaces en milieu naturel qui seront artificialisées. De plus, les différentes étapes d’analyse de la biodiversité sur l’ensemble du parcours mériteraient de faire l’objet de synthèses plus claires pour une meilleure compréhension des enjeux et des impacts potentiels du projet. Dans ce même objectif, la MRAe recommande de compléter l’étude d’impact avec les estimations de fréquentation de cette voie à mobilité active, pour une meilleure information du public. L’ensemble des recommandations est détaillé dans les pages suivantes.

3 Avis détaillé

1. Présentation du projet

1.1. Contexte et présentation du projet Le projet prévoit la création d’une voie à mobilité active (VMA) d’environ 35 km sur les communes de Bouan, Sinsat, Verdun, Aulos, Les Cabannes, Albiès, Urs, Vèbre, Lassur, Garanou, Luzenac, Unac, Tignac, Perles-et-Castelet, Savignac-les-Ormeaux, Ax-les-Thermes, Orgeix et Orlu du département de l’Ariège. Les objectifs de ce projet sont de proposer une activité de loisirs aux résidents touristiques mais également de diversifier l’offre de transport de la vallée autour des lieux de vie du quotidien. Il comprend des sections en « voie verte », « chemin empierré », « VTC/VTT sur chemin naturel » et « route à faible trafic ». Cinq sections (1, 3, 5, 6 et 7) peuvent proposer une valorisation loisirs et les sections 2 et 4 sont valorisées comme des itinéraires de liaisons randonnées (contraintes de dénivelés). Le projet ne répondant pas aux critères d’une voie verte, il s’inscrit dans une démarche de voie à mobilité active. Cette voie emprunte majoritairement des itinéraires déjà existants. Seules deux zones de créations seront réalisées : en section 7 pour éviter une zone humide en bordure de sentier et en section 1.5v (cf.illustration 2) pour raccorder le projet de liaison avec le projet de réaménagement de la route nationale 20 porté par la direction interdépartementale des routes du Sud-Ouest (DIRSO). L’itinéraire de la voie à mobilité active sera donc constitué de : • sections aménagées en voie verte (revêtement dur qui permet une accessibilité tout public, toutes pratiques, facile d’entretien, sécuritaire) ; • sections en zone 30 ou zones de rencontre dans les villes ; • sections aménagées en voie partagée sur voiries départementales/communales à faible circulation avec traitement des accotements lorsque cela est possible ; • sections traitées par l’aménagement de bandes cyclables ; • sections traitées en itinéraires de liaison avec amélioration de leur qualité pour faciliter la pratique de la randonnée pédestre, équestre et VTT. Le projet comporte aussi : • le défrichement d'un boisement d’épicéas (section 7) ; • des débroussaillages (sections 2, 3, 6 et 7) ; • des opérations de terrassements en déblais ou remblais (sections 3, 4, 5, 6 et 7) ; • la réfection de murets en pierres (sections 2, 3 et 6) ; • la réfection de fossés ou caniveaux (sections 3, 4, 6 et 7) ; • la mise à neuf d’un ponton au-dessus d’un cours d’eau (section 7) ; • la mise en place de panneaux d’informations concernant l’accessibilité à la VMA ainsi que la présence de sites patrimoniaux alentours.

Les opérations de terrassements sont estimées à 4 500 m3 de déblais et 3 000 m3 de remblais. Une gestion optimisée de l’équilibre déblais/remblais sera mise en œuvre. Le délai des travaux est évalué à 6 mois.

4 Illustration 1: Carte de situation du projet de voie à mobilité active (extraite de l’étude d’impact) Illustration 2: Typologie d'aménagements retenue pour les différentes sections du projet (extraite de l’étude d’impact) 1.2. Cadre juridique Le projet de création d’une piste cyclable ou voie verte de plus de 10 km est soumis à examen au cas par cas au titre de la rubrique 6°c) du tableau annexé à l’article R.122-2 du code de l’environnement (CE). La communauté de communes de la Haute-Ariège a toutefois fait le choix de réaliser volontairement une étude d’impact compte tenu du linéaire. 1.3. Principaux enjeux environnementaux Compte tenu de la nature du projet, des terrains concernés, et des incidences potentielles de son exploitation, les principaux enjeux environnementaux identifiés par la MRAe sont : • la préservation de la biodiversité et des fonctionnalités écologiques ; • l’intégration paysagère du projet.

2. Qualité de l’étude d’impact

2.1. Complétude Conformément aux dispositions de l’article R.122-5. II du CE, l’étude d’impact est jugée formellement complète. Le résumé non technique aborde les principaux éléments de l’étude d’impact et permet l’appréhension du dossier par un public non averti, bien qu'il soit un peu long.

2.2. Justification des choix retenus L’historique de la démarche environnementale et l’analyse des variantes du projet de voie à mobilité active pour chaque section sont bien détaillés. Les options du tracé sont issues d’une analyse du territoire, des usagers actuels potentiels, des itinéraires existants et du résultat des inventaires naturalistes. Les différents tronçons sont raccordés aux gares SNCF et plusieurs parkings sont fléchés sur le parcours pour faciliter sa desserte et favoriser l’intermodalité. Cette partie permet de bien appréhender l’évitement de zones à forts enjeux environnementaux.

3. Analyse de l’étude d’impact et de la prise en compte de l’environnement dans le projet

3.1. Habitat, faune, flore L’aire d’étude rapprochée du projet se situe à proximité de deux parcs régionaux, d’une réserve nationale et d’un arrêté de protection de biotope. Elle recoupe deux sites Natura 2000 et treize ZNIEFF. C’est le secteur 7 qui comporte le plus d’enjeux relatifs à la biodiversité. De nombreux passages sur le terrain entre mai 2016 et octobre 2016 ont été réalisés. L’effort de prospection est jugé proportionné à l’ampleur du projet. Les inventaires ont mis en évidence 20 espèces floristiques d’intérêt régional dont une espèce protégée au niveau national, l’Orchis à odeur de vanille, et une espèce inscrite comme quasi menacée sur la liste rouge Midi-Pyrénées, le Barbon velu. L’étude d’impact ajoute également la présence potentielle de neuf espèces d’intérêt régional dont une protégée au niveau national et cinq autres protégées au niveau régional. Les enjeux sont situés sur les sections 1, 3 et 7. Seules ces sections font l’objet de descriptions et de cartographies d’habitats naturels. De nombreux habitats naturels sont qualifiés à enjeu “fort” au niveau de la zone d'étude, dont des pelouses sèches, des zones humides et certains habitats forestiers patrimoniaux. Au niveau de la faune, neuf espèces de reptiles et d’amphibiens ont été observées. 3 espèces potentielles patrimoniales sont ajoutées au diagnostic : la Vipère aspic, le Calotriton des Pyrénées et l’Alyte. Les enjeux portent sur les murets en pierres sèches, habitats d’espèces protégées, proches de la voie.

7 77 espèces de papillons ont été identifiées dont 10 patrimoniales. La section 1, versant sec, présente de nombreuses espèces patrimoniales. Quatre espèces de mammifères semi-aquatiques sont identifiées, liées au cours d’eau et zones humides : le Crossope, le Campagnol amphibie, le Desman des Pyrénées et la Loutre, tous protégés. L’étude d’impact indique que les autres groupes de mammifères ne relevaient pas d’espèces patrimoniales. 48 espèces d’oiseaux ont été identifiées, dont la majorité sont protégées. Les secteurs 1 (falaises en rive droite) et 7 (zone de montagne) recoupent également le plus d’enjeux pour l’avifaune. La MRAe recommande de cartographier les habitats naturels sur l’ensemble des sections, en précisant leurs enjeux.

La notion de qualification des sensibilités relatives à la biodiversité et des impacts du projet semble confuse dans l’étude d’impact. Par exemple, l’enjeu entomofaune est qualifié de faible « tant que les zones ne sont pas altérées ». Malgré les sensibilités fortes, les impacts principaux sont limités compte tenu de l'emprise relativement modeste du projet. Ces impacts résident dans le dérangement des espèces faunistiques, une artificialisation d’habitats naturels à la marge de chemins déjà existants, une fragmentation des habitats (se limitant à la largeur de la voirie), le déboisement d’une plantation d’épicéas et la potentielle destruction de certains murets en pierre. Les différentes options de tracés envisagées ont permis de retenir un tracé de moindre impact sur la biodiversité : évitement de la rive droite de la section 1 très riche en termes de biodiversité, évitement des zones humides sur la section 7, évitement de destruction de murets en pierre en section 4… Mais la surface d’épicéas à défricher, le linéaire de murets en pierre potentiellement impactés ou encore l’estimation de la surface des milieux naturels qui seront artificialisés ne sont pas indiqués dans l’étude d’impact. Les principales mesures de réduction des impacts environnementaux sont : • l’adaptation du calendrier des travaux, notamment la réalisation des travaux lourds (défrichement, débroussaillage, terrassement) entre septembre et décembre, période de moindre sensibilité pour la faune ; • le balisage des stations et la mise en défens d’Orchis à odeur de vanille à proximité de la voie ; • des mesures environnementales classiques en phase chantier : suivi environnemental du chantier, plan de circulation des engins, optimisation du nombre de déplacements et de camions, approche économe dans le choix des matériaux, gestion des déchets et recyclage, géomembrane pour la protection des sols… • la reconstruction des murets en pierres sèches si certains sont détruits (potentiellement sur la section 6.3 où l’accès reste assez difficile). Les impacts résiduels sur la biodiversité étant jugés non significatifs, aucune mesure compensatoire n’est nécessaire. La MRAe considère que les enjeux et les impacts sur la biodiversité sont bien pris en compte dans le dossier et les mesures environnementales d’évitement et de réduction apparaissent satisfaisantes.

La MRAe recommande toutefois de rendre plus claires les étapes d’analyse de la biodiversité sur l’ensemble du parcours : état initial, qualification des enjeux, qualification des impacts puis mesures environnementales associées, par l'intermédiaire par exemple de tableaux de synthèses et de cartes.

Elle recommande de détailler la surface à défricher, le linéaire des murets en pierre potentiellement impactés, et de donner une estimation des surfaces en milieu naturel qui seront artificialisées.

8 3.2. Mobilité et gestion des déplacements La voie à mobilité active est proche de la route nationale 20 (RN20) dont le trafic journalier moyen est de 10 000 véhicules par jour. Un important réseau de navettes relie les stations de ski situées dans les vallées perpendiculaires à celle de la vallée d’Ax. Trois gares sont situées dans l’aire d’étude rapprochée. Il existe déjà un tronçon de voie verte sur la section 6 et la voie à mobilité active reprend également une portion du parcours VTT de la « Grande Traversée » en vallée d’Ax. La fréquentation des différentes sections de la voie à mobilité active n’est pas estimée dans l’étude d’impact, cependant des informations complémentaires ont été apportées dans le courrier de saisine de la communauté de communes de Haute-Ariège. Les sections les plus faciles et les plus attractives de la VMA (1 et 5) pourraient atteindre au maximum 2 000 à 2 500 personnes par an. Les sections 3, 6 et 7 pourraient attendre 800 à 1 000 personnes par an et les plus sportives (2 et 4) seront moins fréquentées avec un maximum de 500 à 700 personnes par an. La MRAe recommande de compléter l’étude d’impact avec les estimations de fréquentation disponibles, afin de mieux appréhender les incidences du projet sur les déplacements au sein de la vallée d’Ax.

3.3. Paysage et patrimoine L’itinéraire de voie à mobilité active est marqué par une grande diversité des milieux traversés : bourgs des communes, longs tronçons en zones rurales, tantôt en zones boisées sur les versants de l’Ariège, tantôt en fond de vallée, longeant parfois des parcelles agricoles. L’itinéraire cohabite avec la proximité de la RN20 sur certains tronçons, la voie ferrée, des zones d’activités et bâtiments industriels. L’aménagement de la voie à mobilité active s’appuie également sur les itinéraires de randonnées existants. Tout au long de l’itinéraire, la proximité des cours d'eau de l’Ariège puis de l’Oriège est une composante forte du parcours. L’aire d’étude rapprochée intercepte 8 périmètres de protection de monuments historiques, dont quatre sont classés et quatre sont inscrits. Les impacts identifiés sur le paysage sont plutôt en phase travaux, comme le stockage sur site des matériaux de construction et des déchets de chantier ainsi que la présence d’engins de chantier. L’étude d’impact relève que malgré la mesure de réduction comprenant la mise en œuvre d’un plan d’installation de chantier pour une bonne gestion de l’emprise du chantier, l’impact résiduel est évalué à “moyen”. Il restera cependant temporaire pour l'essentiel. La MRAe recommande de veiller particulièrement à la remise en état naturelle des emprises du chantier à l'issue des travaux.

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