LE NATURALISTE VENDÉEN N° 9 : 61 – 69 61

Vingt-six ans de suivi des cavités de Saint-Michel-le-Cloucq et de (Vendée)

Christian GOYAUD, Julien SUDRAUD & Jean-Paul PAILLAT

Abstract: An annual winter count of Chiroptera has been carried out in the disused quarries of Saint-Michel-le-Cloucq since 1984 and in the tunnel at Pissotte since 1990. The total number of bats wintering in these cavities varies from 1,500 to 3,700 per year, which gives an international importance to the complex of cavities in South Vendée. In January 2009, 13 species of Chiroptera from among the 21 species known in Vendée were recorded; 7 of them are listed on Annexe II of the Habitats Directive, (a list which contains 12 species of Chiroptera). The South Vendée cavities have been classified as a "Natura 2000" site, and as a consequence of the statement of aims and objectives, statutory protective measures have been put in place and systems of protection (grids) have been installed with the aim of ensuring that the bats are not disturbed.

Mots clés : chauves-souris, Chiroptères, comptage, protection, Saint-Michel-le-Cloucq, Pissotte, Vendée (). Key words: bats, Chiroptera, counts, protection, Saint-Michel-le-Cloucq, Pissotte, Vendée (France).

PRÉSENTATION DES CAVITÉS Le site de Pissotte est un ancien tunnel ferro- DE SAINT-MICHEL-LE-CLOUCQ viaire construit en 1888 et désaffecté depuis ET DE PISSOTTE 1963. Sa hauteur est de 6 m, sa largeur de 4,70 m et sa longueur de 600 m. À l'intérieur du tunnel, Les trois cavités de Saint-Michel-le-Cloucq 25 refuges en forme de niche sont creusés dans la sont d'anciennes carrières d'où l'on extrayait des paroi alternativement des deux côtés tous les blocs de calcaire destinés à la construction. La 23 m. Bien que situé sur la commune de Pissotte, superficie totale des cavités est d'environ le tunnel appartient à Fontenay-le-Comte, une 5 170 m² et la hauteur actuelle sous la voûte va- commune voisine (fig. 1). rie de 1,5 m à 4,5 m. Les entrées des trois cavités Cet ensemble de cavités est situé à proximité sont situées à quelques centaines de mètres les du plus grand massif forestier de Vendée, la forêt unes des autres sur deux propriétés privées. de -.

Cavités à chiroptères du Sud Vendée Tunnel de Pissotte et cavités de Saint-Michel-le-Cloucq

Fig. 1 – Localisation du tunnel de Pissotte et des cavités de Saint-Michel-le-Cloucq (Vendée)

© Les Naturalistes Vendéens 62 Christian GOYAUD, Julien SUDRAUD LE NATURALISTE VENDÉEN N° 9 & Jean-Paul PAILLAT

SUIVI DES POPULATIONS Saint-Michel-le-Cloucq et dans le tunnel de Pis- DE CHIROPTÈRES sotte le même jour, fin janvier ou début février. Au cours de ces inventaires, chaque individu Au début de l'année 1984, Gildas Toublanc et ou chaque groupe de chauves-souris est localisé Christian Goyaud visitent trois anciennes carriè- sur un plan de la cavité. La répartition des espè- res souterraines à Saint-Michel-le-Cloucq et dé- ces sur leur lieu d'hivernage est ainsi cartogra- couvrent l'importance des populations de chau- phiée, chaque année, le jour du comptage. Un ves-souris qu'elles abritent. Lors de cette premiè- plan de l'ancien tunnel ferroviaire de Pissotte est re visite, 374 grands rhinolophes sont dénombrés réalisé pour appliquer la même méthode d'inven- dans l'ensemble des cavités. Bien que n'ayant pas taire qu'à Saint-Michel-le-Cloucq. de référence précise en la matière, l'effectif nous La fluctuation du nombre de barbastelles ob- paraît important. servées dans ce tunnel nous conduit à établir une Les plans sommaires des carrières souterrai- corrélation entre leur effectif et les températures nes sont réalisés à la fin du printemps suivant extérieures minimales les jours précédant le alors que les chauve-souris ont déserté les sites. comptage. Par exemple, nous n'observons que 10 Ces plans sont dressés pour localiser les barbastelles dans le tunnel en 2001 alors qu'il y chauves-souris au cours des futurs comptages en a 349 en 2002 pendant une période de froid. hivernaux (fig. 2). Afin de pouvoir comparer les résultats d'une an- née à l'autre, il est certain que ce n'est pas la date 10 m de comptage qui est importante mais plutôt le fait d'avoir les mêmes conditions météorologi- ques avant et au moment du comptage. C'est pourquoi, chaque année nous nous efforçons de réaliser l'inventaire annuel en janvier, si possible pendant, ou juste après, une période de froid. La présence de guano à des endroits où aucu- ne chauve-souris n'est habituellement observée au cours des comptages hivernaux, nous a incités à faire un suivi mensuel des chiroptères dans le tunnel de Pissotte. Cet inventaire a été réalisé de novembre 2001 à février 2003 en localisant les individus sur le plan du tunnel afin de mettre en évidence les zones fréquentées selon les mois de Fig. 2 – Plan d'une cavité de Saint-Michel-le-Cloucq l'année. annoté au cours d'un comptage hivernal Enfin, depuis septembre 2007, le phénomène du swarming est étudié aux abords du tunnel de L'inventaire des chiroptères en hivernage Pissotte : observation des comportements, captu- dans les cavités de Saint-Michel-le-Cloucq est re et marquage des individus (fig. 3). dès lors effectué chaque année en janvier. En comparant les résultats des sept premières an- nées, de 1984 à 1990, nous constatons une fluc- tuation du nombre de grands rhinolophes. Celui- ci passe de 487 en 1988 à 266 en 1990, ce qui nous amène à soupçonner l'existence d'un autre site d'hivernage à proximité de Saint-Michel-le- Cloucq. L'examen de la carte IGN à 1/25 000e (Fontenay-le-Comte 1427-est) nous fait décou- vrir l'existence d'un ancien tunnel ferroviaire si- tué environ à 4 km au nord-ouest des cavités connues. Le 7 janvier 1990, une première visite dans ce tunnel désaffecté nous permet d'observer un essaim d'environ 300 grands rhinolophes. Fig. 3 – Capture de chiroptères pour étudier À partir de l'année 1990, l'inventaire des chi- le swarming à l'entrée du tunnel de Pissotte roptères sera donc effectué dans les cavités de (photo : J. Sudraud) Vingt-six ans de suivi des cavités de Saint-Michel-le-Cloucq et de Pissotte (Vendée) 63

RÉSULTATS cathoe (Myotis alcathoe), en 2006, avec 2 indivi- dus et le Minioptère de Schreibers (Miniopterus Nombre d'espèces observées schreibersii), en 2007, avec deux individus cap- turés à la sortie sud du tunnel lors d'une séance Au 17 janvier 2009, parmi les 21 espèces de d'étude du swarming. Le Minioptère de Schrei- Chiroptères recensées en Vendée, 13 espèces ont bers n'a pas été observé ailleurs en Vendée. été observées dans les cavités de Saint-Michel-le Le tableau 1 ci-dessous liste les différentes -Cloucq ou dans le tunnel de Pissotte. Huit d'en- espèces observées au moins une fois sur les sites. tre elles sont inscrites à l'annexe II de la Directi- Il présente aussi les effectifs minimum et maxi- ve habitats (liste comportant 12 espèces). mum pour chaque espèce ainsi que leur statut de Les récentes découvertes sont le Murin d'Al- conservation régional, français et mondial.

Nombre Nom français Annexe Statut de conservation de l'espèce d'hivernants et de la dans les Pays de la nom scientifique Directive France Monde sites Loire Grand Rhinolophe II & IV 196-1 177 LC NT LC Rhinolophus ferrumequinum Petit Rhinolophe II & IV 5-37 NT LC LC Rhinolophus hipposideros Rhinolophe euryale II & IV occasionnel CR NT NT Rhinolophus euryale

Grand Murin Myotis myotis II & IV 5-22 VU LC LC

Minioptère de Schreibers non II & IV NA VU NT Miniopterus schreibersii hivernant Murin de Daubenton IV 4-71 LC LC LC Myotis daubentonii Murin d'Alcathoe IV 0-2 NA NA DD Myotis alcathoe Murin à moustaches IV 50-150 LC LC LC Myotis mystacinus Murin à oreilles échancrées II & IV 400-1 008 LC LC LC Myotis emarginatus Murin de Natterer IV 1-29 LC LC LC Myotis nattereri Murin de Bechstein II & IV 0-12 DD NT NT Myotis bechsteinii Noctule commune IV 0-1 LC NT LC Nyctalus noctula

Pipistrelle sp. Pipistrellus sp. IV 0-10 - - -

Oreillard gris Plecotus austriacus IV 0-1 LC LC LC

Oreillard sp. Plecotus sp. IV 0-1 - - -

Barbastelle Barbastella barbastellus II & IV 4-1 179 DD LC NT

Tabl. 1 – Espèces observées dans les cavités de Saint-Michel-le-Cloucq ou dans le tunnel de Pissotte (Vendée) CR : en danger critique d’extinction ; VU : vulnérable ; NT : quasi-menacé ; DD : données insuffisantes ; LC : préoccupation mineure ; NA : non applicable, [IUCN, 2008 ; MARCHADOUR, 2009 ; MONCORPS et al., 2009] 64 Christian GOYAUD, Julien SUDRAUD LE NATURALISTE VENDÉEN N° 9 & Jean-Paul PAILLAT

deux sites es d al l-le- ot t-Miche Clou T e Sain cq s d vité T Ca unne l de Pissotte

Fig. 4 – Évolution de l'effectif de chiroptères dans les cavités de Saint-Michel-le-Cloucq et dans le tunnel de Pissotte (Vendée) de 1984 à 2009 Ce complexe de sites est surtout important depuis 2006. Cette progression intervient après pour l'hivernage de quatre espèces : le Grand un léger fléchissement à la fin des années 1990. Rhinolophe, le Murin à oreilles échancrées, la Nous observons que les cavités de Saint-Michel- Barbastelle d'Europe et dans une moindre mesu- le-Cloucq et le tunnel de Pissotte sont complé- re le Murin à moustaches. mentaires. En effet depuis 2001, les courbes des effectifs des deux sites se croisent mais l'effectif Analyse globale des résultats total continue d'augmenter. Cette complémenta- rité entre sites concerne surtout une espèce : le Les cavités de Saint-Michel-le-Cloucq et le Grand Rhinolophe. La progression enregistrée tunnel de Pissotte présentent un intérêt européen depuis quelques années est due à l'augmentation pour l'hivernage des chiroptères. Depuis que les des effectifs du Murin à oreilles échancrées et du chauves-souris sont comptés le même jour dans Grand Rhinolophe. En ce qui concerne l'effectif le tunnel et dans les cavités, l'effectif global de de la Barbastelle, il est lié aux conditions météo- chiroptères hivernants varie de 579 à 3 764 indi- rologiques. Des températures négatives plusieurs vidus par an. jours consécutifs sont nécessaires pour provo- En moyenne, depuis les années 1990, 1 760 quer un afflux de barbastelles dans le tunnel de individus hivernent dans les sites. Le maximum Pissotte. Lorsque les conditions sont réunies, cet étant obtenu en 2009 et le minimum en 1991. effectif peut atteindre des niveaux records, par Une augmentation régulière de l'effectif de exemple : 926 barbastelles en 2003 et 1 179 indi- chiroptères hivernant dans les sites est observée vidus en 2009.

Fig. 5 – Évolution de l'effectif de la Barbastelle d'Europe dans le tunnel de Pissotte (Vendée) de 1990 à 2009 Vingt-six ans de suivi des cavités de Saint-Michel-le-Cloucq et de Pissotte (Vendée) 65

Évolution Évolution de l'effectif de la Barbastelle d'Europe de l'effectif du Grand Rhinolophe

Sur les deux sites d'hivernage que nous sui- Avant 1990, dans les trois cavités de Saint- vons, la Barbastelle d'Europe n'en fréquente Michel-le-Cloucq, l'effectif du Grand Rhinolo- qu'un : le tunnel de Pissotte. phe ne dépasse pas 600 individus. La découverte L'effectif, pour cette espèce, varie énormé- du tunnel de Pissotte comme site d'hivernage ment d'une année à l'autre et peut passer de 5 à pour les Chiroptères et sa prise en compte lors 1 179 individus (fig. 5). Le pic visible sur le gra- des dénombrements annuels à partir de 1990 ac- phique correspond à 926 barbastelles lors du dé- croît le nombre de grands rhinolophes recensés. nombrement de 2003. Il est probablement dû à la L'effectif global augmente à partir de 1992 pour période de froid qui a précédé le jour du compta- atteindre 1064 individus en janvier 1996 (fig. 6). ge et qui a poussé les barbastelles à se réfugier Au cours des années suivantes il diminue et se dans le tunnel. En effet, la température est restée stabilise autour de 800 individus en 2000-2003. négative durant les cinq jours précédant ce dé- Pendant cette période, on assiste au transfert nombrement. C'est également après une période d'une partie de la population de grands rhinolo- de froid, le 17 janvier 2009, que nous avons re- phes hivernant à Saint-Michel-le-Cloucq vers le censé 1 179 barbastelles dans le tunnel. tunnel de Pissotte. En effet, l'effectif dans les ca- Au cours d'un même hiver, les fluctuations de vités diminue entre 1997 et 2003 puis se stabili- l'effectif sont très importantes. Par exemple, au se pendant 4 ans aux alentours de 200 individus. début du mois de janvier 2008, nous avons À l'inverse, l'effectif dans le tunnel de Pissotte compté plus de 800 barbastelles pendant une pé- ne cesse de croître entre 2000 et 2006. D'ailleurs, riode de gel prolongé mais après un redoux, le 3 l'année 2006 correspond au deuxième meilleur février, l'effectif est dix fois moins grand. résultat pour le Grand Rhinolophe avec près de Cette fluctuation du nombre de barbastelles 1 200 individus recensés. Les années suivantes, au cours d'un même hiver rend impossible toute l'effectif reste élevé et atteint un maximum de tentative de définir une évolution globale de l'ef- 1 292 individus en 2009. fectif pour cette espèce. Quant à l'effectif moyen Les variations d'effectifs entre les deux sites de 230 barbastelles en hivernage dans le tunnel sont difficilement explicables. Cependant, une sur 20 ans, nous ne pouvons pas lui accorder hypothèse expliquant ce transfert vers le tunnel d'intérêt particulier car cette moyenne est calcu- pourrait être le dérangement consécutif aux mul- lée à partir d'effectifs annuels liés au hasard de la tiples dégradations subies par les grilles de fer- météorologie et qui pourraient être tout autres. meture des cavités de Saint-Michel-le-Cloucq.

Total des deux sites

te C ot av ss it Pi és e d l d e e Sa nn in Tu t-M ich el -le -C lo uc q

Fig. 6 – Évolution de l'effectif du Grand Rhinolophe dans les cavités de Saint-Michel-le-Cloucq 66 Christian GOYAUD, Julien SUDRAUD LE NATURALISTE VENDÉEN N° 9 & Jean-Paul PAILLAT

Fig. 7 – Évolution de l'effectif du Murin à oreilles échancrées dans les cavités de Saint-Michel-le-Cloucq (Vendée) de 1985 à 2009 Évolution Suivi mensuel de l'effectif du Murin à oreilles échancrées du tunnel de Pissotte

Sur les deux sites d'hivernage dont il est Entre novembre 2001 et février 2003, un question ici, le Murin à oreilles échancrées oc- comptage mensuel des chauves-souris est réalisé cupe presque uniquement les cavités de Saint- dans le tunnel de Pissotte afin de mieux appré- Michel-le-Cloucq. En 20 ans, l'espèce n'est ob- hender les variations de l'effectif de chaque espè- servée qu'une seule fois dans le tunnel de Pissot- ce. te. Depuis le début des comptages, l'augmenta- Nous constatons tout d'abord que le tunnel tion de l'effectif du Murin à oreilles échancrées n'est pas utilisé comme gîte diurne par les chau- est constante (fig. 7). Trois phases sont tout de ves-souris entre le mois d'avril et le mois de juil- même identifiables. Une première entre 1985 et let (fig. 8). En été, les premiers chiroptères sont 1996 où nous observons une augmentation de observés en petit nombre au mois d'août, cela se l'effectif qui passe de quelques individus à plus réduit à quelques individus. de 600. La deuxième phase entre 1997 et 2006 En ce qui concerne la Barbastelle d'Europe, montre une stagnation de l'effectif entre 400 et son effectif varie fortement au cours de l'hiver, 600 individus. Puis en 2007, une forte augmenta- passant de zéro à plusieurs centaines d'individus tion est notée avec 944 individus. La limite des dans un laps de temps très court. Pendant la pé- 1 000 individus est franchie en 2008 et presque riode d'hivernage 2002-2003, en un mois le atteinte en 2009. Cette augmentation soudaine de nombre de barbastelles passe de moins de 100 à l'effectif du Murin à oreilles échancrées n'est pas plus de 900 individus. L'effectif atteint son forcément une bonne nouvelle pour l'espèce car maximum en décembre et en janvier. elle pourrait résulter de la destruction d'un gîte Le Grand Rhinolophe est observé dans le tun- hivernal qui a contraint quelques centaines de nel de septembre à mars. Sa présence est plus murins à se réfugier dans les cavités de Saint- étalée dans le temps que celle de la Barbastelle Michel-le-Cloucq pour passer l'hiver à défaut de d'Europe. Au cours de l'hivernage 2001-2002, leur gîte habituel. une hausse de l'effectif est constatée en janvier

1000 Barbastelle d'Europe 900 Grand Rhinolophe 800 Murin à moustaches 700 600 500 400 300 Nov. Déc. Janv. Févr. Mars Avr. Mai Juin Juil. Août Sept. Nov. Déc. Janv. Févr. Fig. 8 – Évolution mensuelle de l'effectif de chiroptères dans le tunnel de Pissotte (Vendée) de novembre 2001 à février 2003 Vingt-six ans de suivi des cavités de Saint-Michel-le-Cloucq et de Pissotte (Vendée) 67 tandis que pour la période d'hivernage 2002- Pissotte. À ce jour le dossier est en cours d'ins- 2003 les maximums sont atteints en décembre et truction. en février, avec une baisse en janvier (fig. 8). Les variations de l'effectif sont certainement PROTECTION PHYSIQUE dues aux déplacements d'une partie de la popula- DES CAVITÉS tion de grands rhinolophes entre les cavités de Saint-Michel-le-Cloucq et le tunnel de Pissotte En raison de la fréquentation des sites, la po- pendant la période d'hivernage. se de grilles aux entrées des cavités s'est imposée Le Murin à moustaches apparaît dans le tun- comme une nécessité pour garantir la tranquillité nel de Pissotte entre le mois de décembre et le des chauves-souris. Par la force des circonstan- mois de février. Il hiverne en plus faible nombre ces, elle s'est déroulée en plusieurs phases. que la Barbastelle ou le Grand Rhinolophe, par contre les variations mensuelles de son effectif Aménagement des accès aux cavités sont moins importantes que pour les deux autres de Saint-Michel-le-Cloucq espèces. Dans la continuité du classement en réserve STATUT FONCIER ET JURIDIQUE naturelle volontaire de l'une des cavités de Saint- DES CAVITÉS Michel-le-Cloucq, son propriétaire et Les Natu- ralistes Vendéens ont convenu de réparer les Les cavités de Saint-Michel-le-Cloucq sont grilles existantes. Cette opération s'est déroulée trois carrières souterraines d'extraction de calcai- en avril 2001 avec un financement de la DIREN re, depuis longtemps abandonnées, qui appar- des . L'année suivante le proprié- tiennent à deux propriétaires privés. Quant au taire de la seconde cavité a fabriqué et installé tunnel de Pissotte, c'est un tunnel ferroviaire dé- une grille aux mêmes conditions. Malheureuse- saffecté qui est la propriété de la commune de ment ces grilles ont été rapidement vandalisées. Fontenay-le-Comte depuis le 16 mai 1967. L'ac- Leur remplacement par des grilles dites blindées cès nord du tunnel a été cédé à un riverain et a fait l'objet d'une action inscrite dans le Docu- l'accès sud à la commune de Pissotte. ment d'objectifs Natura 2000 en 2004 (action Conscient de l'importance exceptionnelle du B2.1). La pose des grilles est intervenue entre la site pour l'hivernage des chauves-souris, le pro- fin août et le début septembre 2005, leurs carac- priétaire de l'une des carrières de Saint-Michel-le téristiques sont les suivantes : -Cloucq s'est engagé en faveur de sa protection, − barreaux en acier de 14 cm de diamètre remplis en concertation avec l'association Les Naturalis- de béton ferraillé ; tes Vendéens. Cette démarche s'est concrétisée le − positionnement horizontal ; 21 décembre 2000 par la signature d'un arrêté − espacement de 11 cm entre les barreaux ; préfectoral portant agrément de réserve naturelle − coût de fabrication et de pose : environ 6 000 volontaire. À la même date, en raison de la me- euros ; nace du remblaiement de son accès, la seconde − financement par la DIREN des Pays de la Loi- carrière a fait l'objet d'un Arrêté Préfectoral de re. Protection des Biotopes (APPB), avec l'accord L'efficience de ce dispositif est mise à mal en de son propriétaire. 2007, puisque des détériorations sont constatées En février 2004, les deux entités, cavités de sur une grille en janvier et sur la seconde en sep- Saint-Michel-le-Cloucq et tunnel de Pissotte, tembre. Ceci prouve qu'il est illusoire de vouloir sont intégrées au réseau Natura 2000 dans un si- installer un système complètement inviolable fa- te unique (FR5202002) dénommé "Cavités à chi- ce à la détermination de ces "visiteurs de cavités roptères de Saint-Michel-le-Cloucq et Pissot- par effraction". Au moins parvient-on à réduire te" [SÉCHET, 2004]. L'animation du Document significativement l'accessibilité des sites et les d'objectifs Natura 2000 est confiée à la LPO nuisances qui en découlent pour les chiroptères. Vendée et les suivis scientifiques sont réalisés en collaboration avec Les Naturalistes Vendéens. Aménagement des accès En 2006, la LPO Vendée a déposé auprès de la au tunnel de Pissotte DIREN un dossier de demande d'arrêté préfecto- ral de protection de biotopes en vue de formali- En 1997, à l'initiative du propriétaire et pour ser et de pérenniser la protection du tunnel de des raisons de sécurité, les extrémités du tunnel 68 Christian GOYAUD, Julien SUDRAUD LE NATURALISTE VENDÉEN N° 9 & Jean-Paul PAILLAT ont été obturées partiellement par la pose de gril- vorisé la fréquentation des sites par les chiroptè- lage et de barbelés. Ce dispositif rudimentaire res en améliorant leur tranquillité même si les étant fréquemment dégradé, son remplacement dispositifs ont été fracturés à plusieurs reprises. par des grilles à barreaux d'acier a été inscrit Dans les années à venir, la pose d'enregis- dans le Document d'objectifs Natura 2000 treurs de température et d'hygrométrie à l'inté- (action B2.2). La pose des deux grilles est inter- rieur du tunnel permettra d'améliorer nos venue en septembre 2007, leurs caractéristiques connaissances sur les conditions d'hivernage des sont les suivantes : chiroptères. Le phénomène du swarming sera − hauteur de 3 m ; également étudié à l'entrée des cavités. Enfin, − barreaux verticaux pour éviter qu'ils ne soient nous prévoyons de rechercher les colonies de utilisés comme échelle ; parturition dans les environs des cavités, notam- − tirant d'air de 3 m entre les grilles et la voûte ment pour la Barbastelle d'Europe et le Grand du tunnel ; Rhinolophe. − coût de fabrication et de pose : environ 15 000 euros ; − financement par un contrat Natura 2000. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES Le cahier des charges élaboré pour la conception des grilles a tenté de concilier trois objectifs : IUCN, 2008. – IUCN Red List of Threatened − dissuader au maximum l'intrusion du pu- Species. blic tout en tenant compte de l'expérience des MARCHADOUR B. (coord.), 2009. – Mammifères, cavités de Saint-Michel-le-Cloucq ; Amphibiens et Reptiles prioritaires en Pays − maintenir l'utilisation du tunnel par les chirop- de la Loire. Coordination régionale LPO tères au cours de leurs différentes phases d'acti- Pays de la Loire, Conseil régional des Pays vités, notamment l'hivernage et le swarming. de la Loire, 125 p. C'est pour cela que nous avons privilégié l'am- MONCORPS S., KIRCHNER F., GIGOT J. & MER- plitude du tirant d'air disponible pour leur évo- CERON E., 2009. – La liste rouge des espè- lution ; ces menacées en France. Chapitre : les − limiter le coût de fabrication. Mammifères de France métropolitaine. Le suivi de l'évolution des effectifs de chiroptè- Dossier de presse du comité français de res présents dans les sites démontrera ou non la l'IUCN, Muséum national d'histoire naturel- pertinence de ces dispositifs. le, 12 p. ROUÉ S. Y., (coord.) 2004. – Plan de restaura- tion des Chiroptères. Inventaire des sites à CONCLUSION protéger en France métropolitaine. Rapport final. SFEPM, 91 p. Dans un département comme la Vendée, dé- SÉCHET E., 2004. – Cavités à chiroptères de pourvu de cavités naturelles, les cavités de Saint- Saint-Michel-le-Cloucq et Pissotte. LPO Michel-le-Cloucq et le tunnel de Pissotte ont une Vendée, Docob Natura 2000, 86 p. fonction vitale pour d'importantes populations de chiroptères. Depuis les premiers comptages dans ces cavités, respectivement en 1984 et en 1990, Christian GOYAUD l'effectif de chauves-souris hivernantes, toutes La Haute Chevillonnière espèces confondues, y est en nette augmentation. 85310 LA CHAIZE-LE-VICOMTE Cette tendance concerne notamment plusieurs [email protected] espèces comme le Grand Rhinolophe, le Murin à oreilles échancrées et la Barbastelle d'Europe. La Julien SUDRAUD grande taille des populations hivernantes du Mu- 31 rue du 8 mai 1945 rin à oreilles échancrées, du Grand Rhinolophe 85450 CHAMPAGNÉ-LES-MARAIS et de la Barbastelle d'Europe ainsi que le statut [email protected] officiel de vulnérabilité de ces trois espèces confèrent au site vendéen une importance natio- Jean-Paul PAILLAT nale [ROUÉ, 2004]. 176 cité la Garenne Bât. D La réparation ou l'installation de grilles fer- 85000 LA ROCHE-SUR-YON mant les entrées des cavités a probablement fa- [email protected] Planche I

a b

c d

e

f g a – Dispositif de fermeture d'une cavité de Saint-Michel-le-Cloucq ; b – Murins à oreilles échancrées ; c et d – Grands Rhinolophes ; e et f – Barbastelles d'Europe ; g – Grille à l'entrée nord du tunnel de Pissotte (photos b, d, e : C. Goyaud ; photos a, c, f, g : J. Sudraud) LE NATURALISTE VENDÉEN 9 : 69