ACTIVITES TOURISTIQUES ET DEVELOPPEMENT DURABLE DANS UN ESPACE MONTAGNARD MAROCAIN : CAS DU MOYEN ATLAS ORIENTAL AU SUD DE (MAROC)

Abdellatif TRIBAK *, Enrique LOPEZ LARA **, M. José MIRANDA BONILLA, ** Mohamed LAAOUANE * * Laboratoire d’analyse géo-environnementales et d’aménagement (LAGEA), Faculté des Lettres et Sciences Humaines, Route d’Imouzzer, B.P. 59, Fès, Maroc, : e-mail :[email protected] ** Département de Géographie, Université de Séville, Espagne : e-mail :[email protected]

Résumé

Le moyen Atlas oriental, montagne accidentée, souffre d’un enclavement qui explique, pour une bonne part, la pauvreté des populations et la précarité de leurs conditions de vie. Néanmoins, cette partie du moyen Atlas recèle des potentialités naturelles et culturelles importantes et diversifiées. Ces atouts pourraient faire de cette zone de montagne, actuellement défavorisée, un territoire d’intérêt stratégique très convoité par différents acteurs. Ils constituent ainsi, une richesse spécifique dont la mise en valeur pourrait constituer un créneau déterminant pour un développement durable de la région. Le présent article se propose de discuter la durabilité du tourisme de montagne dans cette région dans le cadre d’une approche participative et décentralisée permettant d’associer les différents acteurs (les populations, les autorités locales, les ONG etc…) aux processus décisionnels concernant la mise en valeur et la préservation des potentialités touristiques et de toutes les valeurs territoriales de cette zone du Moyen Atlas.

Mots clés : Moyen Atlas oriental, Maroc, tourisme de montagne, développement durable, patrimoine naturel et culturel.

Abstract

The middle Eastern Atlas, broken mountain, suffers from an isolation which explains, to a great extent, the poverty of the populations and the precariousness of their living conditions. Nevertheless, this part of the middle Atlas conceals important and diversified natural and cultural potentialities. These assets could make this zone of mountain, currently underprivileged, a strategic territory of interest very coveted by various actors. They constitute thus, a specific richness whose development could constitute a crenel determining for a durable development of the area. The present paper proposes to discuss the durability of tourism of mountain in this area within the framework of a participative and decentralized approach making it possible to associate the various actors (the populations, the local authorities, ONG etc…) with the decision-making processes concerning the development and safeguarding of the tourist potentialities and all the territorial values of this zone of the middle Atlas.

Key words: Middle Eastern Atlas, , tourism of mountain, sustainable development, natural and cultural inheritance.

Figure1: localisation

Introduction Le moyen Atlas oriental, au sud de Taza, occupe une place importante en termes environnemental et culturel au sein de la montagne marocaine. Il recèle de potentialités importantes et variées qui font de lui un territoire d’intérêt stratégique très convoité par différents acteurs. Dans cette région le tourisme revêt de multiples enjeux et intérêts concernant à la fois la population locale et les différents acteurs de développement. Il peut être considéré comme un nouvel élément de développement économique et social dans la région. Néanmoins, plusieurs questions se posent quant aux conditions nécessaires à la mise en place d’un développement touristique durable susceptible de dynamiser ces espaces enclavés et déshérités.

I - Une zone enclavée et une population déshéritée Le moyen Atlas oriental, au sud de Taza, constitue une entité géographique bien distincte à l’Echelle de la chaîne atlasique. Ce pays de Hautes montagnes, boisé pour une bonne part et imposant par ses dimensions, conserve une originalité remarquable. Structuralement, il correspond essentiellement à une chaîne plissée caractérisée par la succession de larges cuvettes synclinales (Meghraoau , Tamatroucht, ) et de rides anticlinales (Bou Iblane, Ramuz Rkibat, Châara, Ouasser). Le dôme primaire de Tazekka (1986 m) sépare ces chaînes plissées des causses peu étendus vers le NNO. Cette structure tourmentée offre un relief énergique et accidenté taillé essentiellement dans des calcaires et des dolomies jurassiques et du matériel schisto-gréseux primaire. Les massifs montagneux culminent entre 1600 m à Châara et 3172m à Bou Iblane. De longs versants fortement disséqués et inclinés séparent les sommets des fonds de vallées. Cependant, au niveau des causses les altitudes se situent entre 700 et 1200 m. La disposition du relief influence largement la répartition des précipitations. Les totaux pluviométriques offrent de très grands contrastes ; ils dépassent 1200 mm à Bab Bou Idir et se situent autour de 350 mm à Meghraoua. La neige stationne de façon régulière plusieurs semaines sur les altitudes qui dépassent 1200 m ; elle persiste parfois jusqu’au mois de juin sur les sommets de Bou Iblane. Le couvert forestier est assez abondant ; des écosystèmes de chênes et de cèdres couvrent de larges espaces. Les populations en majorité berbérophone (Béni Ouaraïn – Aït Seghrouchène) ou arabisées de souches berbères (Rhiata), vivent dans des conditions précaires ; leurs activités sont basées essentiellement sur l’élevage et les cultures vivrières. Marginale à l’échelon national, cette région souffre d’un enclavement géographique qui fut encore accentué par les événements historiques. Les populations, en majorité berbères, réfugiées dans ces montagnes, se sont toujours, montrées méfiantes vis-à-vis du pouvoir central. Au 19ème siècle les expéditions punitives (mhella) du Mahkzen sur les tribus insoumises (Bled Siba) de la région (du bassin d’Inaouène) ont constitué un fait marquant qui a largement influencé la mobilité de la population et renforcé l’enclavement de la région. Pendant la période coloniale, cette région du Moyen Atlas était considérée comme un réservoir de richesses forestières et d’hommes nécessaires pour l’armée française (Idil 1982). Après l’indépendance, et malgré les efforts déployés par l’Etat, la région continuait de jouer le même rôle. Elle reste défavorisée et sous équipée par rapport aux zones privilégiées du Maroc). Les interventions étatiques en matière des infrastructures routières restent très limitées et ne répondent pas aux attentes des populations. Le réseau routier reste déplorable malgré la réhabilitation du faible réseau hérité de la période coloniale (route Taza – Meghraoua) et la création de certaines routes (Guercif-Berkine). Un grand nombre de douars et de centres ruraux ne sont desservis que par des pistes difficiles des fois à emprunter ; des douars situés sur les sommets restent totalement isolés. Cet isolement de la région entrave les communications et les flux socio-économiques avec les espaces limitrophes et nationaux. L’économie de la région reste dominée par les activités agro-sylvo-pastorales à faible flux monétaire. Les équipements en matière de l’enseignement et de la santé sont également très insuffisants. Néanmoins, cette partie du moyen Atlas recèle de potentialités naturelles et culturelles importantes et diversifiées pouvant constituer une base d’un développement touristique et un démarrage économique importants. . II- un patrimoine naturel et culturel important et peu valorisé Contrairement aux contraintes susmentionnées, le Moyen Atlas oriental au sud de Taza dispose aussi d’atouts spécifiques qui font de lui un territoire d’intérêts stratégiques. Il est doté de ressources naturelles, humaines et culturelles qui constituent un support d’enjeux très intéressant. La fraîcheur du climat, l’abondance de la neige, l’encaissement des vallées et la virginité de sites difficilement accessibles, la beauté des paysages karstiques et floristiques, ainsi que les pratiques et les traditions ancestrales, peuvent constituer des potentiels touristiques très convoités par les visiteurs. En effet cette région du Moyen Atlas recèle d’importantes ressources naturelles, culturelles et paysagères. Les paysages forestiers y sont imminents et diversifiés. Les peuplements de chêne vert (Quercus rotundifolia), souvent en taillis denses, couvrent de larges surfaces entre le jebel Messaoud à l’entrée du parc de Tazekka et les massifs qui surplombent les dépressions de Tamatrocht et Meghraoua. Les peuplements de chêne liège (Quercus suber) et de chêne zeen (Quercus faginea) se localisent à proximité de Bab Azhar où ils constituent des paysages originaux. De belles cédraies (cedrus atlantica) sont encore bien conservées au niveau de Tazekka, de bab Bou Idir, du lac Tamda et de Bou Iblane. Le patrimoine paysager lié à l’eau et à la dynamique karstique est un atout touristique important qui doit être valorisé. En effet, les paysages karstiques qui se localisent un peu partout au sein des formations calcaires constituent une richesse indéniable de la région et lui confèrent une identité remarquable. Avens, grottes, gouffres, dolines, poljés, ponors, rivières souterraines et résurgences se multiplient un peu partout. Les inventaires spéléologiques montrent que La province de Taza compte, environ 125 cavités souterraines connues dont les plus importantes sont la grotte Chiguer (146 m de profondeur et 3765 m de longueur), le gouffre Friouato ( 271 m de profondeur et 2178 m de longueur) et la grotte de Chaâra ( 7650 m de progression sous terre ). La Dayat Chiker constitue un poljé spectaculaire de 10 Km de long et de 1,5 km de large qui abrite des ponors et des avens permettant d’absorber des quantités importantes d’eau permettant d’alimenter les écoulements souterrains. Au point nommé Ras El Ma à proximité de Taza apparaît une puissante exsurgence vauclusienne qui assure le fonctionnement des cascades situées en contrebas du douar. Le Karst inférieur de Bab Azhar laisse apparaître d’importantes vallées sèches, des falaises rocheuses et des petites exurgences. Le Karst de jebel Châara est réputé par l’extension spectaculaire des lapiès géants, et d’importantes résurgences (Kaouane et Châara). Il se caractérise également par des grottes bien développées (grotte Châara dont la progression sous terre est estimée à environ 8Km). Dans la région d’Admame une résurgence importante se présente sous forme de grotte siphonnante qui peut écouler plus de 15 m3 /S (Marc Tennevin 1978). Au niveau de j. Bou Iblane, s’étendent des vallées sèches, des cônes rocheux, d’importants canyons ainsi que des dolines géantes. Certaines dépressions sont occupées par des lacs naturels temporaires tels Dayt Ait Ismail à proximité de Bou Iblane et Guelta tamda. Ce dernier est un SIBE; il constitue un lac de barrage naturel qui occupe le fond de la vallée encaissée de Souf Igrane au sein de la commune de Meghraoua. Ce type de lac temporaire est original par sa genèse et par la beauté qu’il offre au milieu de la cédraie qui le surplmobe. Il peut constituer un point important à visiter dans le cadre d’un circuit touristique liant le parc de Tazekka au Bou Iblane ; d’où l’importance d’installer un gîte d’étape à proximité de ce lac. Les sites de Bou IBlane et Ouad El Bared (Tametrochte ; Tighza) sont également des SIBE remarquables dans la région. Le premier qui constitue une haute montagne culminant à 3172 m, regroupe à la fois des richesses floristiques, faunistiques et paysagères importantes. L’écosystème à cèdre, assez bien conservé, offre de grandes potentialités écotouristiques. Pour le second, il s’agit des sources de l’Oued El Bared (Aïn Ighz) situées à environ 15 km au nord de Tankrarmt. Elles forment un complexe d’exurgences puissantes et permanentes qui jaillissent d’une grotte très profonde. Ces sources alimentent l’Oued El bared (affluent de l’Oued Moulouya) qui forme dans ce secteur des gorges spectaculaires Le patrimoine bâti est assez diversifié ; il constitue un aspect fortement identitaire de la région. Les douars arabo-berbères typiques sont éparpillés un peu partout au fond des vallées et des dépressions (Tamtrocht) ou accrochés sur certains versants (Béni Snan). L’habitat traditionnel traduit une certaine intégration des populations locales dans leur environnement et reflète ainsi leurs conditions de vie et leurs coutumes. La plupart des matériaux utilisés sont vernaculaires provenant essentiellement du sous-sol et de la forêt. Les structures des maisons et leurs modes de construction traduisent une forte identité culturelle de la région. Les ouvrages hydrauliques ancestraux (séguias, puits, collecteurs, moulins à eau) sont encore fonctionnels dans certains douars. Le patrimoine culturel y est également important. Le douar sidi majbeur situé à l’entrée du parc de Tazekka est un site classé depuis 1949. Les terrasses agricoles sculptées sur des versants assez raides (Meghraoua, sidi majbeur, Bou Iblane) offrent des points de vue remarquables. Les techniques traditionnelles d’irrigation, de gestion de la ressource en eau et d’exploitation du milieu offrent des valeurs touristiques considérables. La production de l’huile d’olive passe essentiellement, dans de nombreux douars, par des moulins traditionnels. De même, l’utilisation de l’araire et de la faucille est encore assez répandue. Le folklore des tribus locales (Ait Oauaraïn et Rhiata) est assez riche.

Figure 2 : Potentialités touristiques

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Cette région du Moyen Atlas abrite également Le Parc National du Tazekka, qui s’étend actuellement sur une superficie de 13737 ha, et qui offre une grande diversité floristique et faunistique. Les sentiers paysagers sont ainsi, nombreux et attrayants ; en plus des 9 sentiers proposés au sein du parc de Tazekka (Bouslama, Bouhadli, les rochers …); la diversité des paysages dans la région permet d’envisager d’autres sentiers permettant de découvrir un patrimoine naturel et culturel très riche. Les communes de Meghraoua, Zrarda, Tazarine et Bou Iblane en offrent plusieurs possibilités. D’après cette énumération des potentialités existantes on constate que la région recèle un potentiel important en matière de tourisme rural et de nature proposant aux visiteurs un accueil chaleureux chez les habitants, avec une cuisine du terroir et des activités de sport et de loisirs tels que la chasse, la pêche et la petite randonnée. Par ailleurs, les secteurs les moins habités de la région (Bou Iblane, Tazarine, Berkine) sont plutôt favorables à un tourisme itinérant, de découverte et de longues randonnées.

photo 1 : Douar typique de Sidi majbeur avec ses terrasses culturales à l’entrée du Parc national de Tazekka

Les sites remarquables identifiés dans les différentes communes de la région peuvent constituer des centres d’intérêt qui pourraient alimenter un mouvement écotouristique important et bénéfique pour la population locale en matière de création d’emplois non agricoles. Malheureusement, ces sites, à l’exception du parc national de Tazekka, ne sont ni mis en valeur ni même protégés contre les multiples formes de dégradation. Par ailleurs, il faut bien avouer que ce potentiel, si important, est faiblement connu, voire totalement ignoré dans certains cas. Un grand effort de publicité, de promotion et de mise en valeur des différentes potentialités s’impose, dans l’objectif de dynamiser le secteur touristique qui pourrait être un catalyseur des autres secteurs économiques et sociaux dans la région.

III – conditions et retombées d’un développement touristique durable Les magnifiques sites précités constituent une richesse réelle de cette région du Moyen Atlas. Malheureusement, ils cohabitent avec l’isolement, l’insuffisance des infrastructures, le sous emploi et par conséquent, avec la pauvreté de la population. Pour cette raison, beaucoup d’espoir peut être placé dans le développement des activités touristiques pour relancer l’économie de cette montagne et l’intégrer dans la gamme de croissance des zones favorisées du pays. Ainsi, vu la situation d’enclavement et de pauvreté qui caractérise cette zone et paradoxalement l’importance des ressources dont elle bénéficie, le tourisme de nature peut être une chose bénéfique et appréciable en matière de développement économique de ces zones déshéritées. Ce type de tourisme n’exige pas de grands investissements de départ et s’intègre facilement aux autres activités rurales des régions de montagne tout en permettant d’utiliser des forces de travail disponibles temporairement (Urbaplan 2005). Sa promotion pourrait être une alternative importante pouvant sortir la région de la marginalisation actuelle, diversifier les revenus des populations et réduire leur pression sur les milieux. Le tourisme de montage, comme activité génératrice de revenus, peut avoir des retombées économiques non négligeables pour une population pauvre et déshéritée. La mise en place de différents équipements aura un impact direct sur la perception de l’économie et les populations locales ainsi que sur l’organisation socio-spatiale. Ainsi, Des activités touristiques bien ciblées peuvent procurer (créer) des emplois de guides, d’accompagnateurs d’itinéraires, de gardiens et de propriétaires de gîtes. Il peuvent également créer des passerelles avec les autres secteurs économiques en favorisant la commercialisation des produits locaux et leur promotion (produits de terroir : fromage de chèvre, miel, cuisine locale, artisanat…etc). Ceci entraînerait une monétarisation des économies locales permettant aux populations locales d’accéder à des nouveaux biens de consommation. Le relancement de l’emploi et L’accroissement de l’activité professionnelles des acteurs locaux impliqués directement (accompagnateurs, muletiers, porteurs, gîteurs, transporteurs…) et indirectement (artisans, éleveurs, agriculteurs, apiculteurs….) pourrait créer des conditions favorables au maintien de la population sur place. Sur le plan patrimonial le développement d’activités touristique permettrait de valoriser les richesses architecturales traditionnelles et les techniques locales de construction qui s’intègrent parfaitement avec les conditions de ces milieux Ainsi, Autour des grands massifs montagneux de Bouiblane , Bou Nasser, Messaoud , Tazekka, la région peut offrir d’importantes opportunités pour des randonnées sportives étalées sur de nombreux jours. Néanmoins, pour la mise en place de cette activité il est nécessaire de créer un petit nombre d’équipements (gîtes détapes, entretien des pistes, ….) de former des guides et surtout de faire un effort de publicité et de promotion auprès de la clientèle intéressée à l’échelle nationale et internationale et de sensibilisation auprès de la population locale pour encadrer et gérer ce type d’activité. Par ailleurs la région peut constituer un lieu de prédilection pour les clients du tourisme rural désirant se déplacer en famille pour s’aérer, se reposer et se distraire dans la nature. Ce type d’activité n’exige pas de grands équipements ; des formules d’hébergement simples et moins chères peuvent être envisagées, soit chez l’habitant ou dans des maisons qui peuvent être réhabilitées et équipées. Les points d’eau, les forêts et les paysages karstiques peuvent faire constituer des lieux privilégiés pour les promenades, les pique-niques et la détente Par ailleurs, le tourisme de montage peut constituer un facteur d’intégration de ces milieux enclavés. L’ouverture de ces derniers aux activités touristiques est susceptible de créer des contacts de nature variée entre les populations locales et le reste du territoire national ainsi qu’avec le monde extérieur. Les activités touristiques liées au parc national de Tazekka, bien qu’ils soient embryonnaires, ont effectivement permis de nouer des relations entre les populations autochtones et le monde extérieur. Les propriétaires du gîte d’étape de Ain Bechar ainsi que les habitants de ce douar ont pu faire connaissance de nombreux touristes ayant fréquenté le gîte. Le célèbre gouffre de friouato, est intégré dans des circuits organisés par un certain nombre d’agence de voyage. La semaine culturelle de Bab Bouidir, organisée chaque été et assisté par une clientèle provenant essentiellement de Taza, génère une activité inhabituelle pour les habitants et leur assure des revenus supplémentaires pendant cette saison. Les circuits pédestres du parc sont assez fréquentés par des touristes nationaux et internationaux. La mise en place d’un développement touristique durable doit s’effectuer dans un cadre décentralisé pouvant favoriser une entente et une synergie entre différents partenaires. Il s’agit donc d’asseoir une planification fondée sur la concertation et la conciliation entre les opérateurs concernés par les projets de développement touristique dans la zone. L’Etat et ses partenaires, Les associations, la population locale, et les investisseurs sont donc appelés à collaborer ensemble pour garantir le succès d’une planification d’un tourisme durable issue d’une volonté commune de débloquer le développement touristique et économique de la région et de procurer à la population locales des conditions d’emplois et des sources supplémentaires de revenus. Le désengagement de l’état et la médiocrité des infrastructures de base expliquent pour une bonne part l’absence quasi-totale de projets touristiques si l’on excepte les faibles activités liées au Parc naturel da Tazekka. Le désenclavement et l’équipement de la région peuvent participer à l’émergence d’une série d’acteurs et de notables qui peuvent se mobiliser pour la mise en œuvre de projets touristiques importants Ainsi, L’Etat doit faire davantage en matière de réduction des déséquilibres territoriaux en accordant plus d’importance à ces espaces périphériques et en y encourageant les investissements touristiques. Elle doit assurer la mise à disposition des infrastructures (routes, eau potable, électricité, assainissement, téléphone) (urbaplan 2005). Le rôle de l’Etat est aussi indispensable, en matière d’appui à la communication. Les célèbres sites précédemment cités sont faiblement connus, voire totalement ignorés au niveau national et international. Bien que les pratiques touristiques des marocains soient orientées plutôt vers les villes et les plages, le tourisme rural, pour lequel la montagne est particulièrement bien placée, peut avoir un certain succès par l’amélioration de l’offre avec un grand effort de publicité et de promotion. Enfin, l’Etat pourrait soutenir les investisseurs locaux en leur fournissant un appui technique adapté et bien ciblé (information, formation, aide à l’investissement touristique) sous forme d’aides très réduites pour l’aménagement des pistes, de gîtes ruraux ou de camping à la ferme (Urbaplan 2005). Les habitants semblent prédisposés à collaborer dans des projets touristiques qui leur apporteraient des revenus complémentaires ; néanmoins leurs faibles moyens sont très insuffisants pour mettre en place et gérer des projets. Au sein de la commune de Meghraoua, des habitants qui proposent la création d’un gîte d’étape à proximité du lac Tamda, dans le cadre d’un circuit touristique, montrent en même temps leur incapacité financière de construire et gérer ce gîte. Par ailleurs, il faut rappeler que ces espaces ne peuvent être gérés sans une participation efficace de leurs habitants et sous la responsabilité des certains opérateurs locaux. Pour assurer une meilleurs insertion des populations dans les différents projets, le développement touristique dans la région ne doit en aucun cas être l’affaire des seuls investisseurs exogènes ou des fonctionnaires de services administratifs. La population locale doit réellement participer dans l’élaboration et la gestion des projets par l’intermédiaire des élus, des investisseurs locaux ou des associations. L’Etat doit vieller à aider les différentes associations agissant dans la région et soutenir leur cohésion pour éviter tout émiettement. Trente neuf associations ont été créées au sein du parc de Tazekka, quatre seulement d’entre elles survivent actuellement, travaillant dans des conditions très précaires (Lowenguth 2005). L’association Al Manbout (Pain de sucre) créée en 1999 à Douar Ras El ma dans le cadre d’un projet de l’FAO et considérée parmi les plus actives ; elle fait face actuellement à de multiples difficultés. Un regroupement des différentes associations est souhaitable afin d’élaborer et de gérer en synergie des projets touristiques dans la région. Ces associations auxquelles adhèrent actuellement un certain nombre de jeunes diplômés chômeurs sont assez bien encadrées et peuvent jouer un rôle important en matière de gestion et de promotion du produit touristique.

Conclusion : Les activités touristiques peuvent avoir un rôle intrinsèque dans le développement territorial de cette région marginalisée du Moyen Atlas. Elles peuvent constituer des enjeux économiques importants permettant l’intégration de la région et favorisant un lien culturel et territorial entre les sociétés montagnardes et le monde extérieur. Néanmoins la réussite d’un développement touristique durable nécessite la mise en place d’une réelle concertation entre tous les partenaires concernés, permettant d’associer les différents acteurs aux processus décisionnels concernant la mise en valeur et la préservation des potentialités touristiques et de toutes les valeurs territoriales de cette zone du Moyen Atlas.

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