Le Château D'alone-Toulongeon À La Chapelle-Sous-Uchon
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Le château d’Alone-Toulongeon à La Chapelle-sous-Uchon (Saône-et-Loire) Bernard Gueugnon** Résumé Du château d’Alone-Toulongeon, à 15 km au sud d’Autun, il ne restait guère que les douves en eau et quelques moignons de murs émergeant des buissons, quand son propriétaire, M. Gueugnon, entreprit de l’amé- nager. Le curage des fossés et l’aménagement d’un chemin de contournement ft apparaître le plan d’un château sans cesse réaménagé du XIIIe au XVIIIe siècle, au centre d’un jardin à la française qui passait, à la fn de l’Ancien régime, pour l’un des plus beaux de la région. Le long de la route reliant Mesvres à Rivière, Alone-Toulongeon3, des ruines restaurées au lieu-dit Toulongeon (fg. 1), commune de La Chapelle-sous-Uchon, se situent les vestiges En guise d’introduction, citons Anatole de du château éponyme. Ces ruines ne sont pas Charmasse : signalées sur la carte IGN, seule une tache bleue indique l’emplacement des anciennes douves. « Mais il semble qu’il y ait une mort pour les lieux comme pour les hommes, et qu’après une période de bruit et d’éclat, la vie se soit retirée de certains d’entre eux et les ait abandonnés au silence et à l’oubli. C’est la pensée qu’ins- pire le spectacle des murs écroulés, des débris épars, des fossés envasés qui rappellent seuls aujourd’hui l’antique Alone. Ce qui subsiste, ce ne sont pas des ruines, avec tout ce que le mot comporte souvent de tragique et d’évocateur, et qui laissent au moins soupçonner la noblesse de l’édifce disparu, mais des décombres, inertes et muets, qui ne disent rien à l’esprit ni aux Fig. 1 : localisation des ruines yeux […] Le nom même d’Alone a péri, (carte IGN 1/25 000). efacé, depuis près de trois siècles, par celui des nouveaux possesseurs4. » À1côté de celles-ci, on peut voir l’ancienne chapelle castrale transformée en habitation et, 3. L’orthographe « Toulongeon » est celle retenue, en un peu plus loin, les dépendances2 dont le bâti- 1631 pour désigner le nouveau comté de Toulongeon en Saône-et-Loire. Dans les textes anciens, nous trouvons ment « des communs » ressemble à un château. d’autres orthographes : Toulonjon, Toulongeon, Thou- longeon. Ce comté correspond à l’ancien fef d’Alone. Pour le nommer, nous retenons l’orthographe « Alone » qui fgure sur la carte IGN pour désigner le bois d’Alone. Dans les textes anciens, nous trouvons d’autres écritures : * Retraité de l’éducation nationale. Alonne, Allone, Alonne... 2. Ces dépendances, appartenant à la famille Dunoyer, 4. Charmasse (Anatole de), « Alone, aujourd’hui Toulon- abritent un gîte qui est parfois désigné sous l’appella- geon », Mémoires de la société éduenne, t. 43 à 46, 1919, 1923, tion de « château de Toulongeon ». 1927 et 1931, ici t. 43, 1919, p. 213. Chastels et maisons fortes IV. Chagny : Centre de Castellologie de Bourgogne, 2014 192 Bernard Gueugnon Remettre en lumière ce château oublié Dans la littérature consacrée à Toulongeon, nous trouvons un certain nombre d’assertions qui ne sont pas toujours exactes. - Une publication récente mentionne « l’an- cienne motte du château primitif de Toulon- geon5 » (fg. 2). Comme nous le verrons plus loin, il ne s’agit pas d’une motte mais d’une butte constituée par l’éboulement des restes du château du xviiie siècle lors de sa démo- lition après la Révolution française. Le terme de « motte » n’est pas approprié à ce site, de Fig. 2 : la butte castrale qualifée à tort « d’ancienne même que le qualifcatif de « château primitif » motte du château primitif de Toulongeon ». (Images qui laisse supposer la construction d’un second de Saône-et-Loire, n° 147 septembre 2006). château. - En efet, certaines cartes postales mention- nent « Château du parc de l’ancien château deToulon - geon » (fg. 3). En réalité, cette carte postale représente le bâtiment dit « des communs » construit au xviiie siècle et contemporain de la dernière restauration du château par l’archi- tecte Nicolas Lenoir. - Nous trouvons également cette phrase : « Le château féodal n’est plus marqué que par un pan de muraille ». En efet, pendant long- temps, la plupart des vestiges ont été masqués Fig. 3 : photographie d’une carte postale ancienne par la végétation, seul un pan de muraille était montrant le bâtiment « des communs » qui y est visible de la route (fg. 2). Ces vestiges n’étaient qualifé de « château du parc de l’ancien château de d’ailleurs plus ceux du château féodal, mais Toulongeon ». bien ceux du château du xviiie siècle. - En 2001, Gilles Auloy classe le château de registrement des lettres patentes par François Toulongeon dans la catégorie : « seulement de Toulonjon en 16878. Quant au comté de un relief apparent6 ». Aujourd’hui, grâce au Toulongeon, il ne dura qu’un siècle mais le nettoyage des ruines, il serait classé dans la caté- nom de Toulongeon, avec sa nouvelle ortho- gorie : « relief avec ruines ». graphe, s’est maintenu jusqu’à nos jours. Réduire l’appellation à Toulongeon tendrait à Alone ou Alone-Toulongeon ? occulter l’essentiel de la vie de ce château. La dénomination d’Alone a perduré D’autre part, les vestiges d’un autre château pendant cinq siècles, de la première référence de Toulongeon existent dans l’Ain, à Germa- connue d’une famille d’Alone en 11517 à l’en- gnat. Il a appartenu à la même famille de Toulonjon mais deux siècles plus tôt. Un 5. Images de Saône-et-Loire n° 147, septembre 2006. Antoine de Toulonjon est inhumé dans l’église 6. Auloy (Gilles), « L’habitat médiéval fortifé en de Germagnat. Il convient de le qualifer d’An- Chalonnais : essai de synthèse », in : Chastels et maisons toine Ier de Toulonjon puisqu’il vécut de 1385 fortes en Bourgogne, t. 1, Montceau-les-Mines : CeCaB, 2001, p. 7-48. 7. Bulliot (Jacques-Gabriel), Essai historique sur l’ab- baye Saint-Martin d’Autun, Autun : Dejussieu, 1849, t. II : 8. Terrier de Toulongeon. Archives de la société éduenne, Cartulaire, acte 16. H Toulongeon 1687. Chastels et maisons fortes IV : actes des journées de castellologie de Bourgogne, 2010-2012 Le château d’Alone-Toulongeon à La Chapelle-sous-Uchon 193 à 14329. Nous verrons plus loin qu’Antoine de d’Alone estoit place fort tenable et qu’en tems de Toulonjon, acquéreur d’Alone, a vécu de 1572 guerre ils pouvoient surement retraire et garder contre à 1633. Nous pouvons donc le qualifer d’An- les invasions des ennemis leurs biens et personnes, toine II. auquel efet toutes les armes avoient esté représen- L’association des deux noms, Alone- tées ; auxquels retrayants commandement avoit esté Toulongeon, évite des confusions avec Germa- fait à peine de 100 livres de faire guet et garde au gnat-Toulongeon et fait perdurer un nom qui temps d’eminent peril, de nuit et de jour, au château a marqué l’essentiel de l’histoire de ce château. d’Alone, de contribuer aux menus emparemens et reparations d’icelui chasteau et de curer et nettoyer les Le château : quelques étapes de son histoire10 fossés, de faire les barrières, ponts-levis et dormant, et autres choses nécessaires à la conservation d’icelui14. » Bernard d’Alone Ainsi, au xve siècle cette maison forte Le premier seigneur d’Alone connu est comporte plusieurs bâtiments protégés par Bernard d’Alone qui apparaît comme dona- des fortifcations entourées de fossés avec un teur en 1151 dans le cartulaire de Saint-Martin pont-levis. On peut penser que son architec- d’Autun11. Encore cette mention n’est-elle pas ture militaire, les douves, les tours rondes et les tout à fait certaine, puisqu’elle émane d’un courtines datent de cette époque, tout en ayant cartulaire, et que le nom a pu être extrapolé au pu être remaniées et complétées par la suite. moment de la rédaction du cartulaire. Le château dans le premier terrier d’Alone La place et maison forte d’Alone Louis d’Alone, marié à Catherine d’Armes, En 1415, nous trouvons la première n’a pas de descendance. La seigneurie d’Alone mention de « maison forte » dans un acte de échoit à Anne de Loges, flle d’Hugues de Marie d’Alone par lequel elle fait fondation Loges et de Charlotte de Mesnil. d’une messe qui sera célébrée chaque jour Anne de Loges, par contrat du 22 avril 1551, dans la chapelle située devant la maison-forte épouse Louis de Chastellux, vicomte d’Avallon. d’Alone12. À dater du 5 septembre 1580, les actes sont Le 11 février 1439, à la requête de Philiberte passés au nom de dame Anne de Loges, veuve de de Busseul, dame d’Alone, « il a été demandé Louis de Chastellux. Elle continue à accroître de faire commandement à tous les habitants l’importance de la seigneurie. Elle obtint, en retrayants en la maison forte dudit Allonne 1583, du pouvoir royal, l’établissement d’une d’y faire guet et garde de nuit et de jour et de foire à Alone, au jour de la Conversion de Saint contribuer aux fortifcations, emparemens et Paul (25 janvier). Il existe alors à Alone, une réparations dudit château13 ». seconde foire le 2 octobre, jour de la fête de Saint Léger. Pour la commodité desdites foires, Sous Louis d’Alone, les retrayants de sa elle a fait construire une halle couverte15. seigneurie, par actes des 1er et 29 septembre Anne de Loges obtient aussi l’établissement 1484, reconnaissent que « la place et maison forte d’un terrier contenant la description et l’état du domaine seigneurial. Les lettres patentes sont 9.