Rameinteuveries Ed Min Tayon
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Rameinteuveries ed min tayon Souvenirs de mon grand-père DU MÊME AUTEUR : Aux éditions Poiré-Choquet - Amiens : Feux de Cendres (Prix Capdeville de l'Académie française), 1950. Les Harmonies de l'Ame, 1952. Fantaisies en Gris majeur, 1954. La Tour d'Ivoire, 1956. Aux éditions du C.A.N.F. - Toulouse : Rêves et Roses, 1972. Aux éditions Barré-Dayez - Paris : Aux Rythmes du Rêve, 1975. Aubades et Nocturnes, 1976. Au Cercle Européen d'Edition - Monaco : Le Grand Livre des Instituteurs, 1972. (Essais biographiques : d'Aristote à Alain) Editions de la Pensée Universelle - Paris : Histoires véridiques et autres, 1977. Imprimerie Bené - Nîmes : Le Passé perpétuel, 1977. Poèmes entre deux printemps, 1978. Poèmes aux clairs de lune, 1979. Editions Eklitra - Amiens : L'empoisonneuse de Courcelles-sous-Thoix, 1979. A PARAÎTRE : Des lycéens de l'An XL. Nouvelles poésies. Récits et anecdotes. La légende du vieux loup de mer, (adaptation de Coleridge). RENÉ/POUVREAU Rameinteuveries ed min tayon Souvenirs de mon grand-père EKLITRA -Tradition picarde — LIII — Tirage limité à 300 exemplaires AVERTISSEMENT Tout Picard, amateur ou amoureux de son patois qu'il comprend ou qu'il parle, ne peut manquer d'être embar- rassé dès lors qu'il tente de l'écrire. Il peut user d'une orthographe phonétique, dont il existe d'ailleurs plusieurs systèmes. Edouard Paris a ainsi traduit en Picard amiénois le Saint Evangile selon Saint Matthieu, en 1863, après avoir affirmé, dès 1851 que "Le Picard s'écrit comme il est prononcé", et utilisant, à cet ef- fet, un alphabet de trente-six signes phonétiques. Mais, cette même année 1851, Corblet réfutait la théo- rie de Paris, affirmant que "l'usage, la prononciation, et l'étymologie sont les trois bases qui doivent servir de fon- dement à une bonne orthographe". Il s'en tenait à ces principes pour la rédaction de son "Glossaire étymologi- que et comparatif du patois picard". Il prévient le lecteur qu'il a employé une orthographe étymologique en ayant soin de figurer, autant que possible, la prononciation réel- le quand elle est en désaccord avec l'orthographe, et à l'exception des citations qui sont reproduites telles qu'elles ont été recueillies dans les documents. Il fait observer que, pas plus que le Français, le Picard ne se prononçait point précisément comme il s'écrivait. De nos jours, M. René Debrie, qui fait autorité en ma- tière de dialectologie picarde, professe une clarification de l'orthographe picarde, avec, pour critère, "le respect abso- lu du son". Il suit donc, en l'élargissant, la voie ouverte par Rousselot, Gilliéron et Paris dont, dans son "Essai d'orthographe picarde" (1966), il se déclare "résolument partisan... pour les ouvrages de quelque importance... lus, en priorité, par les savants romanistes de France et de l'étranger". Mais il reconnaît la nécessité de recourir à une orthographe moins savante pour les œuvres purement lit- téraires. Pour ma part, préoccupé avant tout de transcrire, fidè- lement et humblement, le parler de mon grand-père, je n'ai pu me résoudre à écrire un picard qu'il n'aurait pas compris. C'est dans les œuvres d'Edouard David — que mon grand-père avait bien connu — et dans celles de René Normand, qui comptent parmi les plus représentatives de la littérature contemporaine de parler amiénois, que j'ai trouvé, le cas échéant, les exemples justifiant ou corrobo- rant l'orthographe que j'ai adoptée, avec le souci constant et scrupuleux d'éviter le plus possible les incohérences, et en me serrant au plus près du bon sens et de l'authenticité. Il me manquera toujours de savoir si ma grand-mère et mon grand-père auraient été contents de moi. A ma grand-mère, à mon grand-père, dont j'ai copié les souvenirs dans ma mémoire ; en témoignage de profonde et vivace affection. "Je voudrais tout sauver de l'oubli." Edouard David Ch'l'histoire ed min tayon, cho foit d'z'années èq j'ai einvie d'èl raconter. D'abord, por em foire plaisi, por mi tout seu, peindant qu'j'em rameinteuve coire tout ch'qu'i m'o dit quand j'étois tchot, pis qu'i m'o répété quand j'étois pus grand. Pis, pasqu'ej crois qu'cho y auroit foit plaisi à li aussi, ed povoir lire es n'histoire comme si ch'étoit chelle d'ein eute. Ed vrai, j'en'n saurois point dire si, ein ch'teimps-lò, ch'étois mi qu'j'étois ch'pus conteint de l'l'écouter ou bien li d'erbatte ses hotons qui restoitent por li, margré chés misères, ch'qu'il appeloit ch'boin temps, por el boenne raison qu'ch'étoit sin jonne temps. Des dizangnes ed fois l'même cose qu'i m'o dit min tayon, à einne flèpe près, quand em tayonne, ou bien m'mère, aile li disoit qu'i s'berluroit à propos d'ech' l'an- née, d'chés geins, ou bien de ch'l'endroit où que ch'l'his- toire alle s'étoit passée. J'aurois pu dire tout cho ein français, vu qu'min tayon i m'parloit d'habitude ein français ; mais avec s'fanme, des momeints, comme cho, por rire ein molet, i li parloit sin picard d'Amiens, pis alle li répondoit dins sin picard ed Bieuquesne. Mi, j'ai appris ech picard aveuc li, ein m'muchant d'em mère, vu qu'alle avoit failli ête institutrice, dins ch'temps- lo où qu'dins chés écoles, il étoit défeindu d'ratcher à terre pis d'parler patois. L'histoire de mon grand-père, cela fait des années que j'ai envie de la raconter. D'abord pour me faire plaisir, pour moi tout seul, pen- dant que je me rappelle encore tout ce qu'il m'a dit quand j'étais petit et qu'il m'a répété quand j'étais plus grand. Et puis je crois que ça lui aurait fait plaisir à lui aussi de pouvoir lire son histoire comme si c'était celle d'un autre. En vérité, je ne saurais pas dire si, en ce temps-là, c'était moi qui étais le plus content de l'écouter, ou bien lui de rabâcher ses souvenirs qui restaient pour lui, malgré les malheurs, ce qu'il appelait le bon temps, pour la bonne raison que c'était son jeune temps. Des dizaines de fois la même chose, qu'il m'a dites mon grand-père, à un détail près, quand ma grand-mère, ou ma mère lui disait qu'il se trompait à propos de l'année, des gens, ou de l'endroit où l'histoire s'était passée. J'aurais pu dire tout cela en français ; mais avec sa fem- me, par moments, comme cela pour rire un peu il lui parlait son picard d'Amiens, et elle lui répondait dans son picard de Beauquesne. Moi, j'ai appris le picard avec lui, en cachette de ma mère qui avait failli être institutrice à une époque où dans les écoles il était interdit de cracher par terre et de parler patois. Photocomposé et imprimé par Polygraphique 16, rue Le Corbusier - 80000 AMIENS Dépôt légal : 3 trimestre 1984 Participant d’une démarche de transmission de fictions ou de savoirs rendus difficiles d’accès par le temps, cette édition numérique redonne vie à une œuvre existant jusqu’alors uniquement sur un support imprimé, conformément à la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012 relative à l’exploitation des Livres Indisponibles du XXe siècle. Cette édition numérique a été réalisée à partir d’un support physique parfois ancien conservé au sein des collections de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal. Elle peut donc reproduire, au-delà du texte lui-même, des éléments propres à l’exemplaire qui a servi à la numérisation. Cette édition numérique a été fabriquée par la société FeniXX au format PDF. 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