Histoire Des Communes De L'yonne
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Maurice PIGNARD-PÉGUET HISTOIRE DES COMMUNES DE L’ YONNE LIVRE I ARRONDISSEMENT D’AUXERRE 1913 AUXERRE (AUTESSIDURUM, AUTISSIODORUM, ALTISSIODORUM) La ville d’Auxerre est située entre deux cours d’eau la rivière de l’Yonne à l’est et le ruisseau de Vallan au sud. La première coule au pied du plateau de la Préfecture et de la cathédrale, à vingt-quatre mètres environ en contrebas. Là, près de l’écluse, il y avait de, grands moulins. Il y a encore les trois sources des fontaines dites de saint Pèlerin, de saint Germain et d’Amour. Autour de ce point se seraient groupés les premiers habitants (Galls ou Gaulois) de la cité qui prit le nom d’ « Autric ». Pour y arriver, il fallait traverser l’Yonne dont le lit s’était élargi en formant des îles. On dut donc jeter un pont en cet endroit, près du Moulin dit Demi-Eau. Les premières maisons du bourg furent bâties sur la pente qui s’élève de là (ancienne fontaine Saint-Pèlerin) au plateau de la rue du Temple et de la Mairie. Plus tard, les Romains ou d’autres étrangers s’installèrent au midi sur les bords du ruisseau de Vallan dont nous reparlerons à propos des eaux de la ville. Ils créèrent un village qui prit le nom d’ « Autessidurum ». Chaque groupement se développa en adorant ses idoles. Quand l’empereur Julien passera vers l’an 250, il se heurtera à des Germains et à des Francs qui avaient obtenu des concessions de terre (Voir Histoire Générale, livre V) aux alentours. A cette époque, la cité était devenue un lieu de passage. La route de Sens la longeait à l’ouest pour se diriger vers Bourges par Ouanne, Entrains et Nevers; la voie de Lyon était tracée jusqu’à Boulogne-sur-Mer par Autun, Saulieu, Avallon, Auxerre, Troyes; elle traversait l’Yonne vraisemblablement au pont Paul-Bert, qui a été construit sur l’emplacement d’un ancien pont que le comte Guillaume IV fit fortifier en 1165 et que refit en partie Pierre de Courtenay en 1192. Saint Pèlerin. — C’est par cette voie romaine qu’arriva saint Pèlerin au temps de Julien l’Apostat. Autricum ou Autessidurum, était l’unique grand marché de la peuplade des « Cambiovicenses » que Peutinger place dans sa carte, entre Autessio (Auxerre) et Ebirno (Nevers). Saint Pèlerin se mit à l’unisson des conquérants et désigna Autric « Autissiodurum ». Les premiers Gallo-Romains, convertis au christianisme par l’apôtre Pèlerin, se séparèrent des idolâtres qu’ils laissèrent sur les rives du Vallan et de 1’Yonne pour s’échelonner sur la pente montant vers le plateau. Ils bâtirent, en l’an 258, presque à l’angle de la rue de la Poterne et de la rue Saint-Pèlerin un petit oratoire auquel ils donnèrent le nom du saint qui d’ailleurs y baptisa les premiers néophytes à la manière de saint Jean dans le désert, les pieds dans l’eau. Les eaux de la fontaine qui servirent à saint Pèlerin à cet effet furent captées dans un puits. Ce puits a disparu sous la crypte de l’église qui a remplacé l’oratoire. Un cimetière fut créé sur le mont Autricus, le long du chemin du « Nivernois », où furent inhumés les compagnons de saint Pèlerin : Moïse, prêtre; Corcodome, diacre; Alexandre et Savinien, sous-diacres. Saint Marcellin, saint Valérien, saint Elode, les y suivirent. Saint Amâtre, évêque d’Auxerre, qui avait été marié, y avait fait enterrer sa femme, Marthe. A sa mort, en 418, il fut inhumé à côté d’elle. L’oratoire qu’il y avait construit et qui était appelé à devenir le siège d’une belle abbaye, devint le lieu de sépulture des premiers évêques. On y bâtit une basilique en l’honneur de saint Amâtre. Saint Corcodome y eut sa chapelle et saint Urse, évêque d’Auxerre, sa première cellule. L’abbaye ne devint florissante qu’au XIIe siècle. Elle était installée au-dessous de l’église, près des murs d’enceinte. L’église fut détruite en 1789; derrière il y avait une chapelle Saint-Didier (VIIe siècle); elle a été convertie en pressoir en 1790. Le corps de saint Amâtre fut transféré au XIe siècle dans la crypte de Saint-Germain. En 1166, quand on voulut élever les murs de la nouvelle enceinte on dut traverser le cimetière de Montartre. Une partie demeura hors ville et plus tard on y construisit la porte dite du Cimetière. Les inhumations se firent, à partir de cet instant, toutes dans la partie intra muros. Au fur et à mesure que de nouvelles églises s’élevèrent, on créa d’autres cimetières. Il y en eut à Saint-Père-en-Vallée, à Saint-Pierre-en- Château, à Saint-Loup, à Notre-Dame-là-D’hors, à Saint-Eusèbe, à l’Hôtel-Dieu et à Saint-Etienne. Cela en fit huit avec celui de Saint-Pèlerin. Du IIIe au XIe siècle, on n’entendit guère parler de saint Pèlerin qui a donné son nom à tout un quartier. Au XIIe siècle, en 1145, l’évêque Hugues de Mâcon donna l’église de Saint-Pèlerin à l’abbé de Saint-Père-en- Vallée (Saint-Pierre). Après divers remaniements, elle fut entièrement restaurée en 1632. Au XIXe siècle, sa partie antérieure a été transformée en logements, et le chœur, inachevé, a été affecté au culte évangélique. C’était une église à trois nefs d’après les ruines. On y voyait des fresques remontant à 1653. Sous le chœur était la crypte à trois nefs. C’est là qu’est le puits qui, selon dom Viole, servait de baptistère. Saint Pèlerin fut arrêté à Entrains par les soldats de Dioclétien en 308 et martyrisé. Il fut inhumé dans un caveau qui donna naissance à l’église de Bouy (Nièvre). Le roi Dagobert fit transférer son corps sans la tête dans l’abbaye de Saint-Denis où l’abbé Suger lui lit dresser un autel. Au XVIIIe siècle, au cours de fouilles, faites à Bouy, on découvrit dans le caveau une tête que l’évêque d’Auxerre Caylus fit authentifier pour celle de saint Pèlerin et il la fit enchâsser. La vie de la cité du temps de saint Pèlerin. — D’après les nombreuses inscriptions qu’on a trouvées et dont quelques-unes remontent au-delà de saint Pèlerin, la vie de la cité gallo-romaine, dans la plaine des bords du Vallan (quartier Saint-Julien et faubourg Saint-Martin, vers la gare Saint-Amâtre) était fort active. Voici une des inscriptions en langue latine qui était alors la langue gallo-romaine implantée par le vainqueur en Gaule : Aete Menioriae Aureli Demetri itdiutori Proge civitatis Senonum (Sens) Tricassinorum (Troy es) Meldorum (Meaux) Parisiorum (Paris), et civitatis Aeduorum, inge Nuinia Aurelia Coniugi carissimo et Aurelia de Metriane et Aurelius Demetrius fili patri carissimo faciundum curavernut. M. l’abbé Lebeuf qui la cite dans ses Mémoires dit l’avoir empruntée à la collection de Gruter qui l’avait tirée de Manuce et que ce dernier tenait de Muret. Elle est très importante par sa signification historique. On pourrait croire que ce proconsul qui fut inhumé à Auxerre, administrait à la fois les Sénonais, les Troyens, les Meldois, les Parisiens et les Eduens. Elle était gravée sur une base de colonne en douze lignes et serait antérieure au passage à Autricum de Julien l’Apostat qui devait être proclamé l’hiver suivant Empereur à Paris par ses légions. L’Enceinte d’Auticidorum. Un siècle s’écoula entre le martyre de saint Pèlerin et la grande invasion des Barbares qui saccagèrent Alesia, traversèrent le pays avec Attila. et les Huns pour se rendre à Orléans. Les Gallo-Romains s’étaient fortifiés sur le plateau de la Mairie et de la Cathédrale La cité s’appelait alors « Auticidorum » et formait un quadrilatère irrégulier que jalonnaient dix tours dont il reste encore les ruines de trois. Dès le Ve siècle, toute la vie de la cité s’y concentrait. Il y avait là l’Hôtel de Ville ou le municipe de ce temps, le château dit des Comtes qu’habitaient les gouverneurs romains de passage ou leurs représentants : les vicomtes ou comtes. Il y avait Saint-Pierre-en-Château, la maison épiscopale, les églises Notre-Dame, de Saint- Jean, de Saint-Etienne ou la cathédrale, dite de Saint-Amâtre. On entrait dans la cité par deux portes l’une vers la rue de la Fécauderie et l’autre vers l’arcade de l’horloge. On comptait en outre deux poternes sans débouchés ; celle de Saint-Pancrace et celle de Saint-Germain. La cité comptait quatre rues longitudinales : Notre-Dame, Saint-Regnobert, les Lombards et la Fécauderie, coupées du nord au sud par une rue unique qu’on appelle aujourd’hui rue Joubert. Ce déplacement du faubourg de Saint-Martin-lès-Saint-Julien, de la plaine de Vallan vers la colline, au nord, s’effectua en ligne droite, car en creusant à quatre pieds de profondeur aux abords de la promenade de l’Eperon, on a mis à jour des substructions gallo-romaines. L’évêque saint Germain. — Saint Amâtre, évêque d’Auxerre (380-418), né à Auticidorum, contemporain du passage des premiers Barbares, eut pour successeur, vers ce temps-là, un ancien haut fonctionnaire romain qui habitait sur la colline et s’appelait Germain. Il l’avait sacré par surprise dans l’église nouvelle de Saint- .Etienne enclose dans la cité dont les murs, épais de plus de trois mètres, étaient faits de blocs, cimentés, coupés par des cordons horizontaux de briques. C’étaient surtout des blocs provenant des ruines des temples païens abattus ou abandonnés.