2011 Année internationale des forêts

Histoire de la forêt communale de (3/4)

par Lucien BOLE

www.frasne.fr Après l’histoire de la forêt du Forbonnet, nous vous invitons dans ce troisième fascicule à mieux connaître l’histoire des autres forêts de la commune, à savoir : le bois des Auges, le bois de Billin, le canton de la Joux, le bois de Cessay, le bois du Laveron.

Le bois des Auges

Le canton du Bois des Auges appartenant à la commune de Frasne est composé de trois parcelles pour un total de 27ha 35 a. L’autre partie du bois appartient à la commune de Dompierre pour environ la même surface.

Pour retrouver l’origine de cette propriété, il faut remonter à la charte de 1375 par laquelle HUGUES II de Chalon d’Arlay octroya la concession de la forêt du Forbonnet ainsi que la côte de Bonnevaux et la Haute Joux et même de la forêt de .

Le bois des Auges ne faisait pas partie de cette charte. Par contre dans sa lettre aux habitants de Frasne, Victor Loiseau en 1815 nous précise : « …. avant de commencer une instance pour faire reconnaître les droits que la commune avait dans la forestrie de Boujailles, elle transigea avec le Seigneur et obtint le bois des Auges actuel pour ses droits dans cette foresterie. … »

Si les habitants ont bien défendu leurs intérêts pour la propriété du bois du Forbonnet, il semble qu’ils n’ont rien gagné dans cette transaction car le bois des Auges était peuplé que de buissons, coudriers et bois rabougris (voir le texte ci-après sur le four à chaux).

La gestion de cette forêt dès 1865 va complètement la transformer pour donner une forêt de résineux avec une production assez importante à la place du taillis. Le premier plan d’aménagement de la forêt communale a été approuvé par décret de Napoléon, Empereur des Français le 30 août 1865. Le bois des Auges constitue à lui seul la 3ème série. Voici comment était décrite cette forêt :

« Contenance : 27 ha 09 a Le sol généralement peu profond et rocheux et cependant divisé. La végétation est assez bonne. Les essences sont les suivantes : Hêtre 4/10, bois blancs 4/10, résineux 2/10. Etat du peuplement : le peuplement consiste en un taillis sous futaie, en général assez complet, âgé de 1 à 30 ans et mélangé de jeunes résineux épars de 10 à 30 ans. ….. La série du Bois des Auges sera divisée en 15 parties égales constituant 15 coupes biennales du taillis. Les résineux existants seront ménagés. »

Ces éléments de l’aménagement nous prouvent qu’il y avait à l’époque que très peu de résineux (20%), ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Pendant de longues années ce canton a été exploité pour son taillis de bois blanc tout en favorisant le développement des résineux.

Un four à chaux au bois des Auges en 1804

Voici une délibération du conseil municipal qui précise que le bois des Auges a permis l’installation d’un four à chaux :

« A la séance du vingt deux pluviose douzième année Républicaine le conseil municipal de la commune de Frasne assemblé aux lieux ordinaires de ses séances a fait rapport que l’année

2 dernière, la commune avait un besoin pressant de chaux pour reconstruire le presbytère et réparer l’église incendiés en l’An dix, que pour s’en procurer ont fit marché avec des chaufournier1 pour construire un four à chaux dans le canton du Bois des Auges appartenant à la dite commune. Que la commune n’ayant pas d’autres emplacements plus avantageux le moins préjudiciable que le canton du Bois des Auges pour construire un four à chaux, le bois n’étant emplanté que d’épines, coudriers, saules et autres bois rabougris de peu de valeur. Les ouvriers travaillant le garde général en fut informé et se transportant sur les lieux, après visite faite il en interdit provisoirement la coupe. La commune par cette interdite fut obligée de suspendre la confection du four à chaux et par faute de chaux les réparations du presbytère et de l’église furent arrêté, ce qui préjudicie beaucoup à la commune par la raison qu’elle est obliger de louer une maison pour le ministre du culte, qu’il est instant de demander et d’obtenir la main levée afin de continuer la construction du four à chaux, et qu’il est d’autant plus urgent de l’obtenir que les broussailles coupées se dilapident et ne seront bientôt plus d’aucune valeur pour la cuisson du dit four à chaux ; Pourquoi le conseil municipal prenant ces motifs en considération invite et autorise le maire de la commune de Frasne à faire toutes les démarches nécessaires afin d’obtenir la main levée de l’interdiction et la permission de continuer la construction dudit four à chaux pour la chaux employée à réparer les édifices sus mentionnés et ce dans le plus bref délai. »

Une délibération du 10 février 1806 donne la description suivante du bois des Auges : « les coupes de chaque année suffisent à peine pour payer les charges ; la forêt des Auges est un bois taillis dont la coupe en a été faite depuis peu d’années et on ne pourrait en rien tirer avant au moins vingt ans ». Elle confirme que ce canton est encore peu riche en bois.

En 1865, le projet d’aménagement de la forêt décrit chaque canton et pour le bois des Auges, il est noté : « le bois des Auges est peuplé de feuillus mêlés de quelques résineux ».

Aujourd’hui le bois des Auges a une contenance de 27ha 35 répartis en 3 parcelles. Le peuplement est constitué essentiellement de gros bois de résineux.

Le bois de Billin

A l’origine le bois de Billin était du pré comme le rappelle Loiseau dans sa lettre citée plus haut :

« Mais le Seigneur, ou plutôt ses agents voyant que l’ancien communal de Billin appartenant à la commune se changeait en forêt, prétendirent qu’elle n’était pas comprise dans la Charte de 1375 et voulaient la revendiquer. Ils en demandèrent et obtinrent l’interdiction. Elle fut levée mais le procès continua jusqu’à la Révolution de 1789 qui y mis fin. »

La nature du terrain est confirmé dans une transaction du 7 avril 1524 entre les habitants de Frasne et ceux de Courvières : « en un lieu appelé le pré de Billins ». Mais là aussi les limites furent souvent contestées aussi bien par Frasne que par Courvières.

C’est en 1397 que les habitants de Courvières, qui n’avaient pas encore de concession de bois, reçurent du Seigneur un canton de bois entre le bois de Billin et le bois de la Godine mais avec beaucoup de restrictions. Du même coup ils vont continuer à couper des bois

1 Chaufournier : ouvrier qui dirige un four à chaux pour fabriquer et vendre de la chaux

3 dans les bois banaux et dans leur forêt sans respecter les clauses fixées par le Seigneur, ce qui fit l’objet d’un nouveau procès entre la Princesse Philiberte et Courvières en 1524.

A la même époque Frasne et Courvières étaient en procès pour la délimitation des pâturages et des bois d’usage. Les officiers de Nozeroy se rendirent sur les lieux où Frasne était représenté par Pierre Courdier, Jean Courvoisier et Jacques Poncet et de nouvelles bornes furent posées avec l’accord de tous.

Malgré tout Frasne va chercher à anticiper sur les terrains et en 1614 l’affaire est jugée à la Cour de Dole et à nouveau des bornes sont posées pour confirmer ce qui avait été fait en 1524. Il faudra attendre la transaction du 17 juin 1631 entre les habitants de Frasne et de Courvières pour mettre fin aux difficultés et fixer définitivement les limites. Ce sont encore aujourd’hui les limites entre Frasne et Courvières.

Les titres ont disparu dans les incendies pendant les guerres de 1636 à 1642 qui mirent toute la Franche-Comté à feu et à sang. En 1825, Victor Loiseau, notaire royal à a collationné les titres de 1524 et de 1631 qui étaient encore en possession de Courvières pour en dresser une copie pour Frasne et il précise en fin du document :

« Les dits maires des communes de Frasne et Courvières ont aussi observé que la transaction du dix sept juin mil six cent trente et un a reçu son exécution par la plantation d’une borne encore existante dans la localité dite « aux accrues », qu’elle retrace les limites suivies entre les forêts contigües, appartenant aux deux communes, qu’elle a mis fin aux procès résultants de l’interprétation de leurs titres de concession respectifs. Enfin que les limites indiquées par la transaction sont les limites territoriales actuelles entre les deux communes qui ont été suivies dans les opérations cadastrales exécutées dans les deux communes. »

Dans « le projet d’aménagement de la forêt communale de Frasne » de 1865, le bois de Billin est présenté en deux divisions. La division F, d’environ 50 ha dont la nature des peuplements est indiquée comme suit : « perchis complet et régulier de 60 à 90 ans dominé par places et vers la ligne séparative par quelques vieux arbres épars ; vide au nord ». Une seconde division K d’environ 22 ha est décrite de la façon suivante : « jeunes bois assez complets de 20 à 60 ans dans lesquels restent quelques vieux arbres épars de 150 ans ».

La forêt a une contenance de 71ha 48 exactement en 1865 alors qu’aujourd’hui elle contient 72ha 47 répartis en 7 parcelles. Cette forêt communale se trouve noyée au cœur d’un important massif forestier qui s’est développé au fur et à mesure que les propriétaires transformaient les prés et pâtures en plantations.

Contrairement à la forêt du Forbonnet dont une grande partie du sol est tourbeux, le bois de Billin pousse sur un sol peu profond car la roche calcaire est apparente en de nombreux endroits. Il faut retenir que ce relief karstique offre des particularités comme le gouffre de Billin ou encore la grande lésine qui sont le résultat d’une forte érosion par les eaux à travers les temps. Le gouffre de Billin (43 m de profondeur) a fait l’objet de visites par les spéléos ainsi qu’un nettoyage. Il est vrai que ce gouffre était devenu un lieu de dépôts de déchets de toute sorte : bêtes crevées, vieux matériel et de boîtes de fromage Rouy. Il a été nettoyé en 1984 par le groupe spéléologique du CAF de Pontarlier. Les déchets étaient les suivants : 20% de charnier ancien, 30% de charnier récent (cadavres d’animaux), 20% de fromages, 20% d’ordures ménagères, 10% de déchets de végétaux.

4 Cette forêt a connu aussi des arbres remarquables avec en particulier le premier Sapin président de la commune qui dominait dans la parcelle 12 avec près de 50 m de haut et un volume de 21.700 M3 sous écorce lorsqu’il a été abattu en 1979 par Jean Pierre Courdier, bucheron, pour le compte de la scierie Louvrier de Frasne. Ce président avait autour de lui toute une cour de gros arbres. La commune a choisi un nouveau sapin président, toujours dans le bois de Billin, et qui sera baptisé cet automne.

Le canton de la Joux Commune de Bonnevaux

Chacun peut se demander pourquoi la commune de Frasne possède depuis très longtemps une forêt sur le territoire de la commune de Bonnevaux. Pour en connaître les raisons, il faut dans un premier temps reprendre la charte de 1375 qui est rédigée comme suit :

« item avons donné comme dessus esdits habitants et à leurs hoyrs leurs usaige de panre tout bois gros et menu en la coste de Bonneval et lhaute Joult et aussi en tout nostre bois dart appartenant à notre chatel de chalamon… »

Ce canton étant éloigné de Frasne son exploitation par les habitants a certainement été difficile et peu attrayant surtout lorsque l’on sait qu’il était surtout peuplé de broussailles comme nous le précisaient les Echevins en 1754 dans le livre d’arpentement cité plus haut :

« Plus par un cantonnement de bois qui vient d’être fait par le Seigneur de La Rivière, de la Joux de Bonnevaux. Notre communauté a eu pour sa part cent soixante cinq arpens de terrier dans cette montagne ou Joux de Bonnevaux, peuplés de partie de bois, coudriers, foyards, espines et quelques sapinaux. Elle n’en a rien tiré jusqu’à présent. Les bois y sont rabougris en partie. Il faut encore quelques années avant qu’elle puisse en tirer. »

La nature du peuplement de ce canton d’une contenance d’environ 85 ha est aussi rappelée dans une délibération du conseil municipal du 19 nivôse an dix de la République (1802) :

« L’an dix de la République, le dix neuf du mois de nivôse, le citoyen Claude Louis Alix maire de la commune de Frasne ayant fait convoquer de la manière accoutumée ensuite d’autorisation du Préfet du département du du vingt six frimaire dernier le conseil municipal de la commune, même les principaux habitants à l’effet de délibérer quelle part la commune prend au procès qui existe entre les communes de Bonnevaux, Vaux et Chantegrue et le citoyen Droz de Bonnevaux relativement à la propriété respective des cantonnements de la haute Joux ou côte de Bonnevaux appartenant à chacune des parties la partageante, un membre à observé à l’assemblée que la commune de Frasne était dans une pénurie d’argent, même dans une détresse de fonds à la suite des incendies arrivés en la commune aux édifices publics (à l’église et à la maison commune) et des événements de la Révolution, fournir aux réquisitions en tout genre dont elle a été requise pour la République ; que les centimes additionnels ne suffisent pas pour les dépenses locales ; qu’il a fallu soutenir des procès contre les communes de Bonnevaux et du ; que celui contre cette première est encore pardevant les tribunaux du département du Doubs ensuite de vue de lieux ordonnée par eux ; que le plan de la forêt de Forbonnet n’étant pas encore fini on ne peut pas en même suivre l’instance. Qu’il est urgent de se procurer les fonds nécessaires pour faire face aux frais

5 d’un procès que Bonnevaux nous a intenté si injustement. Il y existe plusieurs vides dans la forêt de Forbonnet appartenant à différents particuliers qu’il conviendrait d’échanger ou de faire pour éviter de nouveaux procès si ruineux pour les communes et pour le bien de la forêt.

Que la commune de Frasne possède un canton communal emplanté de bois essence fües et sapins à la haute Joux de la contenance de cent soixante arpens environ. Que pour faire face aux frais de gardes et des contributions il faut faire chaque année des dépenses considérables. Il conviendrait d’aliéner ledit canton de bois pour le remplacer par échange sur d’autres propriétés enclavées dans le territoire de la commune pour les réduire en biens communaux à l’usage de tous les habitants de Frasne notamment ceux enclavés dans la forêt du Forbonnet. Que l’éloignement de la forêt de la haute Joux et la difficulté des chemins pour y arriver et pour en faire l’extraction la rendent inutile à l’usage des habitants.

• Que les citoyens Perrard et Vendel, maîtres de forges de Laferrière ayant fait la demande à la commune pour l’acheter à de justes conditions, il conviendrait de nommer des commissaires à l’effet de se rendre à Bonnevaux demain vingt courant lieu désigné par eux pour cet objet, que les commissaires nommés seront autorisés par l’assemblée de passer compromis s’ils conviennent su prix principal en attendant l’autorisation des autorités compétentes.

Surquoy l’assemblée a nommé et nomme les citoyens Claude Louis Alix maire, Bazile François Loiseau membre du conseil et Antoine Jospeh Jacquin habitant de cette commune, lesquels se rendront demain vingt du courant à Bonnevaux pour passer un compromis s’ils conviennent du prix du canton de bois et feront tout le nécessaire pour le bien de la commune, et ne sont les commissaires autorisés qu’à passer compromis de ce qu’il sera convenu en attendant l’autorisation des autorités compétentes si on peut parvenir à l’obtenir. En cas contraire la convention qu’ils pourraient faire deviendra nulle. »

Cette importante délibération mérite quelques remarques : • A cette époque la commune est fortement endettée et elle propose de vendre le canton de la Joux ou de s’en servir pour des échanges pour plusieurs raisons : o Obtenir rapidement de la trésorerie pour payer les frais suite aux incendies et pour les procès en cours en vendant le canton aux maîtres de forges de La Ferrière. o Pour réaliser des échanges concernant en particulier les propriétés privées enclavées dans la forêt du Forbonnet.

• Heureusement pour la commune, les autorités compétentes de l’époque se sont opposées à la vente.

Le canton de la Joux va devenir une véritable forêt qui engendra des revenus importants à la commune. C’est dans ce canton que le conseil municipal a obtenu en 1973 de réaliser une coupe extraordinaire pour financer la construction de la salle des fêtes. La coupe de 1811m3 a rapporté 480 000F soit environ la moitié du coût de la construction de la salle des fêtes, alors que le conseil de l’époque espérait au mieux 200 000F. Il faut se rappeler que c’est en 1973 que le prix de vente du M3 de bois sur pied a doublé, ce qui a été très bénéfique pour les finances des communes forestières.

6 Le bois de Cessay

Après l’histoire des plus anciennes forêts de la commune, voici celle d’un canton plus récent, à savoir le bois de Cessay d’une superficie de 18 ha 71a. C’est dans sa séance du 25 janvier 1955 que le conseil municipal décide d’acquérir la ferme de Cessay :

« Acquisition de la ferme de Cessay. Le président rappelle à l’assemblée la proposition de vente du domaine de Cessay faite à la commune de Frasne moyennant le prix de 6 854 057 francs ; Il fait connaître : 1- Que dans sa séance du 8 décembre 1954 la commission départementale de contrôle des opérations immobilières a donné un avis favorable à cette acquisition. 2- Que par arrêté du 5 janvier 1955 Monsieur le Préfet du Doubs a déclaré la dite acquisition d’utilité publique. En conséquence le conseil municipal de Frasne à l’unanimité des membres présents décide d’acquérir ledit domaine de Cessay au moyen de fonds provenant d’un emprunt émis auprès des particuliers. Et vote le crédit de la somme de 8 000 000 francs qui servira à payer le prix principal d’acquisition, les frais de cette acquisition et diverses réparations à faire à la maison de ferme située sur le domaine acquis. »

La même année lors de sa séance du 13 août, le conseil décide de solliciter un prêt de 1 300 000 francs (198 183 €) auprès du Fonds forestier national pour la plantation d’épicéas sur une surface de 15 hectares dans la pâture et la pose d’une clôture autour de cette plantation. Au total 65 000 plants seront nécessaires. Bien entendu ces 15 hectares seront soumis au régime forestier.

Le conseil municipal a tenu à mettre en valeur cet espace de Cessay en transformant la ferme en lieu d’accueil et de convivialité. De plus un sentier partant de la ferme rappelle l’histoire de ces lieux avec un sentier de découverte qui emprunte une partie de la forêt communale. L’histoire de la grange de Cessay remonte à plus de huit siècles, à l’époque où les moines de l’Abbaye du Mont Sainte Marie sont venus s’installer, là, où aujourd’hui nous trouvons les restes du cimetière des moines.

Pour la petite histoire il est intéressant de rappeler qu’une autre petite parcelle de bois existe vers l’espace Cessay, au niveau du parking actuel et qui est appelée aussi « le bois des conseillers ». En effet le 8 avril 1983 le conseil décide de nettoyer la parcelle en question qui fait environ 40 ares avant une plantation de sapins et d’épicéas. Ce travail a été réalisé par l’ensemble des conseillers municipaux d’où le nom de cette petite parcelle qui aujourd’hui est rattachée à la parcelle 4 de Cessay.

Le canton de Cessay s’est agrandi aussi par la plantation de la pâture au niveau de la source des moines, ce qui porte la surface totale de ce canton à 18 ha 71.

7 Le canton Au Laveron (commune de )

La préparation du plan de gestion pour la période 1986-2005 pose le problème d’une forêt communale qui a un excédent de peuplements mûrs (120 ans et plus), un déficit important de peuplements d’âge moyen (de 40 à 80 ans) ainsi qu’un excédent de peuplements jeunes (20 à 40 ans). Le conseil envisage alors l’achat d’une ou plusieurs parcelles de bois pour rééquilibrer l’histogramme des classes d’âge et pour maintenir les possibilités d’exploitation futures.

Parmi plusieurs possibilités le conseil a retenu en 1994 l’acquisition d’une parcelle de 5ha23a41ca au lieudit « Au Laveron » sur la commune de Bouverans. Après expertise et évaluation par l’ONF le conseil a décidé son achat pour un montant de 560 000 francs soit 85 371€.

L’exploitation de nos forêts

Bien entendu le bois de nos forêts a servi au chauffage des habitants dans cette contrée où les hivers sont très longs et souvent très froids. N’oublions pas que la moyenne des températures à l’année se situe entre 5 et 6°. Dans le passé, c’est à travers l’affouage que s’organisait l’accès à la forêt pour récupérer le bois de chauffage.

L’affouage

Depuis des siècles les affouages ont réuni les générations de paysans et d’ouvriers en forêt pour fabriquer en particulier le bois de chauffage. Le mot « affouage » date du XIIIe siècle et vient du verbe de l’ancien français « affouer » qui veut dire « chauffer ». Sous l’Ancien Régime les communautés qui détenaient des forêts accordaient à leurs habitants la possibilité de se procurer le bois nécessaire au chauffage. Suivant les communautés, après avoir établi la liste des « affouagistes », le partage pouvait se faire de différentes façons : par feu, par tête ou mixte. Le bois pouvait être sur pied ou déjà façonné. Généralement il fallait acquitter une taxe fixée par le conseil municipal qui souvent était minime. Certaines communes renonçaient à la percevoir.

A Frasne les archives nous indiquent qu’il y avait des taxes. N’oublions pas qu’en plus du bois de chauffage, il y avait la vente des tourbes, là aussi accessible à toutes les familles du village.

Je vous propose de mieux connaître les pratiques dans notre commune à travers les délibérations ou les rôles de ventes de bois et pour commencer une vente en 1809 en vue de remplacer la vente de tourbes :

Vente de chablis pour remplacer la vente de tourbes : 23, 24 et 25 octobre 1809.

8

« L’an mil huit cent neuf, le 23 octobre, le sieur Etienne Joseph Marmier propriétaire à Frasne a fait savoir aux habitants de la commune de Frasne que le présent jour, il endrait au plus offrant et dernier enchérisseur les arbres fues et sapins chablis et secs de la forêt, à lui adjugés par l’administration forestière le cinq du courant sous le bon vouloir du conseil municipal de la commune qui a invité le dit Marmier de ne vendre les bois qu’aux habitants de Frasne, et de n’en adjuger à chaque chef de famille que pour une somme de cinquante livres afin que chaque famille puisse en acquérir suffisamment pour tenir place de tourbe l’an prochain en laquelle année le conseil municipal se propose de n’en point distribuer. Le dit Marmier adhérent aux invitations du conseil municipal a établi ses conditions pour base des enchères qu’il ne veut que pour comptant et a prié le Sieur Loiseau percepteur de la commune de faire sa recette et de lui en rendre compte. Les adjudicataires devront enlever les bois à eux vendus pour le premier octobre 1810 et seront tenus de se conformer à tout ce qui est prescrit par les règlements forestiers. »

Ensuite suivent les adjudications avec le nombre de bois, leur état : « séchon », « déraciné » « rompu », « étouble », le nom des personnes à qui le lot a été adjugé, et le prix. Le premier jour de la vente, soit le 23 octobre, 162 lots ont été vendus, le second jour, le 24 octobre, 166 lots ont été adjugés et le dernier jour, le 25 octobre, 120 lots ont été vendus. Au total la vente a rapporté 3 237 livres 7 sols.

Répartition de l’affouage en 1829

Quand le conseil municipal veut garder les usages dans la commune et ne pas respecter le code forestier en vigueur sur la répartition de l’affouage entre les habitants.

« L’an mil huit cent vingt huit le vingt cinquième jour du mois de septembre le conseil municipal de la commune de FRASNE, réuni à la chambre commune, lieu ordinaire de ses séances, présents les Sieurs Jean Etienne Pelletier, Claude Maurice Lepeule, Jean Louis Marmier, Etienne Louis Nicolet, Guillaume François Girod, François Joseph Lonchampt, Jean Baptiste Sebile, Victor Augustin Sebile, tous membres du conseil municipal et Etienne Joseph Marmier, maire, conformément à la circulaire de Monsieur le Comte de Million, préfet du département du Doubs, qui ordonne audit conseil de se réunir pour délibérer sur le partage de l’affouage de tous les habitants de la commune pour l’année 1829. Le maire a remis sur le bureau le tableau de la répartition de la coupe affouagée pour l’année 1829, l’extrait du code forestier et des instructions relatives à la répartition et distribution des coupes, qui lui avaient été envoyés par Monsieur le Préfet ; le code forestier, l’ouvrage et les discutions faites par Monsieur l’avocat C. sur le dit code, relatif au titre et usage des communes.

Un membre a pris la parole et a dit que l’article 105 du code forestier dit, s’il n’y a titre ou usage contraire, le partage des bois d’affouage, se fera par feu, c'est-à-dire par chef de famille ou de maison, ayant domicile réel et fixe dans la commune. S’il n’y a également titre ou usage contraire, la valeur des arbres délivrés pour la construction, ou réparation sera estimée à dire d’expert et payé à la commune.

Pour se conformer à l’article 105 ci-dessus relaté, la commune n’a point de titre mais elle a un usage contraire très ancien, et qui a toujours été suivi de tout temps et d’un temps immémorial, que jamais elle n’a réparti les bois par feu, ou ménage, jusqu’en

9 l’année 1823, la commune vendait tous les bois aux habitants de la dite commune, au plus offrant et dernier enrichisseur, avec défense à tous les étrangers de paraître, et même aux personnes qui résidaient dans la commune qui n’étaient pas reconnues par la commune avoir payé le droit ? Les administrateurs de la commune quand ils vendaient les bois à leurs administrés, formaient déjà six classes différentes, la première classe était composée des plus forts contribuables, qui avait le droit d’en acheter d’une somme de soixante francs, la seconde était ceux qui payaient moins de contribution que le premier, qui avait le droit d’en acheter de cinquante francs, la troisième de quarante francs, la quatrième de trente francs, la cinquième de vingt francs et la sixième de dix francs. Etaient comprises dans cette classe les personnes qui payaient le moins de contributions.

Tous les bois propres aux réparations et construction étaient prélevés des ventes et distribués aux habitants et propriétaires des maisons, qui étaient reconnues par les autorités de la commune être dans l’urgente nécessité de rétablir leur maison, et payaient les bois qui leur étaient distribués au prix de l’estimation qui existait dans la commune. En 1823 il s’élève des contestations entre les habitants de la commune et même dans les membres du conseil municipal, une partie voulait continuer de vendre les bois comme il était d’usage dans la commune, l’autre partie demandait la répartition par toisé de maison, par individu et par feu. Après de grandes discussions il fut décidé à l’unanimité que la répartition de tous les bois serait faîte après avoir prélevé les bois propres aux réparations des maisons comme il avait toujours été d’usage, tous les bois restants furent répartis : les trois cinquième par toisé des maisons et les deux autres cinquièmes, une partie par individu et l’autre partie par feu. Que conformément aux usages qui se sont toujours pratiqués dans le commune, que le code forestier article 105 maintient, et ne déroge en rien, qu’il est de toute équité, sagesse et justice de suivre les usages de la commune, pratiqué de tous les temps et d’un temps immémorial. Le conseil prenant ces dires en considération, après avoir discuté et pesé avec sagesse les usages de la commune, le code forestier, les arrêtés et instruction de Monsieur le Préfet avons délibéré ce qui suit :

Article 1 : tous les bois merrains qui sont connus sous cette dénomination par les habitants, seront prélevé de l’affouage et estimés à leur valeur par expert et délivrés aux propriétaires des maisons qui seront reconnues par nous dans l’urgente nécessité, pour réparation seulement comme il est d’usage et le prix en provenant sera payé comptant au receveur municipal et sera employé à payer les contributions des dits bois.

Article 2 : la moitié des bois restant seront répartis par toisé de maison, conformément au tableau et mesurage qui est déposé dans les archives de la commune.

Article 3 : la moitié de la moitié qui reste sera répartie par tête d’individu qui paye des contributions quelconque.

Article 4 : l’autre moitié qui comprend le quart de tous les bois d’affouage de la dite année sera répartie par feu ou ménage qui paye une contribution quelconque.

Article 5 : la conscience, la justice et l’équité nous dictent et prouvent à toute personne qu’une famille composée de dix, douze et de quinze personnes compte plus de chauffer et pour cuire leur nourriture qu’une famille composée d’une, de deux ou de trois personnes et que même ces familles en grande partie sont des personnes journalières, très souvent se chauffent et se nourrissent chez autrui et gagnent de bonnes journées.

Article 6 : les familles qui ne paient aucune contribution, que la loi exclue de l’affouage, l’humanité, la religion qui fait à l’homme un devoir de faire à son prochain comme il voudrait qu’il lui soit fait, nous fait à nous même un devoir de les comprendre dans la dite répartition, à moitié des autres familles et individu. Ils y seront compris à demi feu et demi individu.

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Article 7 : la présente délibération, l’extrait du rôle de répartition, le code forestier, les instructions de Monsieur le Préfet concernant la répartition et distribution des coupes, seront publiés et affichés le présent jour à sept heures du matin afin que personne n’en puisse prétendre cause d’ignorance, et que les personnes qui voudraient faire des réclamations, les fassent et les remettent au maire de la commune pour le dix octobre prochain. »

Distribution de l’affouage en 1838

La répartition de l’affouage entre les habitants a toujours été une source de contestations et en particulier par l’autorité de tutelle, à savoir le Préfet ou le Sous-préfet. Nous pouvons en juger par la lecture de la délibération du 20 novembre 1837, dans laquelle le conseil municipal répond au Préfet qui conteste le mode de répartition pour le rôle de 1838. Cette délibération nous apporte plus de détails sur les critères retenus pour répartir l’affouage :

« Le conseil après avoir pris connaissance des pièces, a considéré :

1°) que pendant des siècles la généralité des bois résineux de la commune était vendue aux enchères entre les habitants ayant droit de Bourgeoisie dans la commune, que les bois taillis de la forêt du Bois des Auges étaient répartis par feu et suivant le franc de contribution foncière.

2°) que la vente des bois résineux était modifier en ce que l’on avait établi des classes de manière à ce que chaque habitants pouvait acquérir jusqu’à concurrence de ses besoins eu égard à l’étendue de sa maison, au nombre d’individus dont se composait la famille et à l’étendue de son exploitation rurale. Les classes étaient divisées par dizaine. • Celui qui n’avait ni maison ni bétail, ni contribution ne pouvait en acquérir que jusqu’à concurrence de dix francs. • La seconde classe qui pouvait en acquérir pour vingt francs était composée des individus ayant feu et ménage, une ou deux ou trois pièces de bétail et payaient une contribution foncière ou mobilière ou personnelle. • La troisième pouvait acheter jusqu’à concurrence de trente francs, était composée de ménages ayant une demie charrue, c'est-à-dire ayant maison, feu et ménage, bétail et exploitation rurale de deux bœufs ou deux chevaux et porté au rôle des contributions. • La quatrième pouvait acquérir jusqu’à concurrence de quarante francs, était composée des laboureurs ayant feu, ménage et tenant charrue entière et complète. • Une cinquième classe était composée de ceux ayant des maisons de plus vaste étendue ou tenant une plus forte exploitation.

Quand des individus avaient de fortes réparations à faire à leurs maisons, on les autorisait verbalement sur la fin des ventes à acquérir encore un ou deux arbres, moyennant qu’il n’y eu pas de réclamation. Enfin les bois merrains étaient distribués aux particuliers selon le besoin des maisons reconnu par l’échevin de la commune. Que ce mode a été modifié au fur et à mesure que le prix des bois augmentait, que pour démontrer que tel était l’usage immémorial l’on pourrait produire des restes de ventes et les comptes des échevins qui remontraient à plus d’un siècle ;

11 3°) Que depuis la Révolution, époque où les droits de la Bourgeoisie sont tombés, des difficultés se sont élevées de temps à autre dans la commune. Elles ont été facilement aplanies dans la commune sans recourir à l’autorité supérieure et à la satisfaction de tous les habitants. Ces changements et modifications furent constatés par une délibération du douze mai 1820. Elle porte article 1er qu’il sera fait estimation des bois portée à un taux suffisant pour acquitter les charges communales. Puis à l’article 2 il est dit qu’après l’estimation faite tous les bois sont répartis à tous les habitants à la manière accoutumée : • 1- suivant le besoin de chaque particulier • 2- l’étendue de la maison • 3- le nombre d’individus qu’il y a dans chaque famille • 4- par feu

4°) Que le mode était celui en usage lors de la promulgation du code forestier, que c’est celui-ci que ce code a maintenu pour Frasne en conservant les usages anciens et que le conseil a de loin suivi et entendu suivre comme le constate le rôle de distribution pour 1837 dûment approuvé.

En conséquence le conseil persiste unanimement dans la délibération du 12 mai 1820 et toutes celles subséquentes qui fixaient et reconnaissent le mode de distribution d’affouage des bois de la commune à la satisfaction de tous les habitants et leurs réclamations de leur part invitent le maire à joindre à la présente délibération des copies de celle de 182O et subséquentes espérant que l’autorité voudra bien les maintenir et les homologuer.

La reconstruction des maisons après les incendies

Le village de Frasne, au cours des siècles a connu une multitude d’incendies, dont certains très importants. : en 1636 le village est complètement détruit par les troupes du Duc de Saxe Weimar, 1664 incendie de la cure, en 1728 neuf grosses maison brûlèrent par le feu du ciel (foudre), 1779 l’église, la cure et plusieurs maisons sont réduites en cendres, 1832 plusieurs maisons incendiées et surtout 1853 où 76 maisons sont détruites par le feu.

Lorsque les archives le permettent, je retrouve l’engagement de la commune pour aider les sinistrés à reconstruire. Parmi toutes les délibérations, je retiens celle qui concerne le feu de 1853 compte tenu de son importance et de l’énorme besoin en bois pour reconstruire.

« L’an mil huit cent cinquante trois, le sept août, le conseil municipal réuni en session ordinaire dans la chambre des délibérations étaient présents les membres soussignés. Le maire expose au conseil municipal l’urgence d’adresser une demande à l’autorité compétente pour lui exprimer le désir qu’il soit fait le plus tôt possible dans les forêts communales, et où l’administration forestière le jugera convenable, le martelage des bois nécessaires à la reconstruction des 76 maisons incendiées par le feu du ciel dans la nuit du 3 au 4 de ce mois. Le conseil comprenant toute l’opportunité de cette demande mais désirant connaître d’une manière précise la quantité en stères qu’il avait fallu lors de la construction des maisons actuellement en ruines, et celle qu’il faut demander pour les rétablir, est d’avis de consulter des personnes de l’art qui puissent l’éclairer sur l’objet de la demande.

MM Bastier architecte à Pontarlier, Perrier et Daguin les deux entrepreneurs en travaux publics, de résidence le premier à Frasne et le second à Byans les Usiers, sont appelés à cet effet. Ces messieurs après avoir reconnu que la superficie au sol des maisons incendiées est de 27120 mètre carrés, qui étaient divisés par 76 donnent en moyenne celle de 356 mètres carrés, ont déclaré que comparativement aux maisons qui ont échappé au

12 sinistre il y avait en moyenne 187 stères dans chaque bâtiment détruit par la foudre, ce qui donne au total 14 212 stères.

En outre d’après un devis établi pour la reconstruction d’une de ces habitations, ils ont déclaré, toujours en terme moyen, que 132 stères seulement pouvaient suffire à son rétablissement, attendu qu’actuellement on fait toujours élever les murs jusqu’à la toiture, et que pour couvrir on substitue la tuile aux bardeaux. Il résulte donc de ce qui précède que 10 032 stères sont nécessaires pour relever les 76 maisons consumées par l’incendie, quantité bien grande il est vrai mais néanmoins bien inférieure à celle qu’avait absorbée les anciennes constructions.

Le conseil municipal connaissant la grande vérité des documents qui lui sont communiqués, émet le vœu à l’unanimité qu’il soit accordé par l’autorité supérieure et avec l’intervention de l’administration forestière le nombre de 10 032 stères de bois destinés à être distribués aux malheureux incendiés de la commune de Frasne. Le prix à payer à la commune par les particuliers pour le bois a été fixé par le conseil municipal à la somme de quatre francs cinquante centimes le stère. La quantité à attribuer à chaque particulier incendié sera fixée par le devis des experts désignés à cet effet, sur la superficie du sol qu’occupait chaque maison.

Nul particulier qui ne reconstruit pas sa maison n’a droit au bois de reconstruction, à moins qu’il ne vende ses droits à un second qui reconstruirait. Le bois destiné à reconstruire sera mesuré en forêt par des hommes de l’art avant la répartition. »

Une délibération du 15 février 1874 qui traite de nouveaux incendies sur la commune, apporte des précisions sur la distribution de bois après le feu de 1853. Il est rappelé que la répartition moyenne avait été de 60 stères par maison et qu’en réalité il fallait penser qu’il s’agissait de mètres cubes et non pas de stères. C’est sur cette base que le conseil attribue les quantités de bois pour les feux de 1873 et de 1874, soit une prévision de 1080 mètres cubes pour 18 maisons concernées.

Auparavant une autre délibération du 21 janvier 1874 rappelait qu’il a été réparti « environ 4500 stères ou mètres cubes aux incendiés de 1853 », ce qui donne bien une moyenne de 60 mètres cubes par maison.

A préciser que les prix demandés aux sinistrés pour ces bois de reconstruction étaient calculés « à prix réduits » comme le rappelle la délibération du 26 juillet 1874. Je n’ai pas trouvé pour la même période les prix au mètre cube pour établir des comparaisons.

Ces différentes délibérations nous renseignent sur l’importance du bois dans la construction à l’époque, ce qui explique aussi le caractère dévastateur des incendies. Mais heureusement que la commune possédait plusieurs cantons de forêt pour faire face à ses demandes extraordinaires.

Après avoir évoqué cette forme d’utilisation de la forêt avec la reconstruction après incendie, je pense qu’il faut ouvrir le dossier « des bois merrains » c'est-à-dire des bois de construction.

Les bois merrains

Pendant des siècles le bois est resté la base des constructions des maisons comme le prouve les rôles de vente des bois merrains :

Vente de bois entre habitants en 1803

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« L’an douze de la République française, le cinq brumaire, le conseil municipal de la commune de Frâne, assemblé au lieu ordinaire de ses séances : considérant que depuis longtemps le besoin urgent de bois de reconstruction, d’entretien et de chauffage se fait sentir dans ladite commune de Frâne, ce qui se répète journellement par les citoyens dudit lieu, et que ce serait un oubli de devoir, et même une coupable négligence, aux fonctionnaires qui représentent la commune de ne pas pourvoir à ce besoin… »

Ensuite la délibération rappelle le nouveau règlement des Eaux et Forêts pour obtenir l’assiette où sont délivrés les arbres à vendre en limite de Bonnevaux du côté de la Grange de Forbonnet. Voici les conditions de cette vente :

« le conseil municipal de cette commune a délibéré à l’unanimité que le jour de demain six brumaire courant, on se transporterait dans la forêt de Forbonnet, notamment dans la dite assiette, à l’effet de vendre et distribuer tous les bois martelés par le Sous- Inspecteur, aux habitants de cette commune, et du produit en acquitter les dettes et charges dont il s’agit ; et le surplus, s’il y en a, être employé à faire reconstruire le Presbytère et à payer les dettes les plus urgentes de la commune. Et pour règlement le conseil municipal fait défense à tous les habitants de monter ou de se faire adjuger plus de deux pieds d’arbres dans ladite distribution. Il est expressément défendu de commercer les dits bois adjugés, sans qu’au préalable ils soient transportés hors de la forêt… »

Puis suit la liste de tous les adjudicataires de bois avec les sommes payées :

1- un sapin délivré à Louis Lépeule 18 livres 2- un pied d’arbre fuve adjugé à Jacques Jacquin 25 livres 3- un pied d’arbre sapin adjugé à Victor Loiseau 30 livres 4- un pied d’arbre sapin adjugé à Ambroise Marmier 12 livres 5 sols 5- un sapin adjugé à Guillaume Antoine Besancenet 15 livres 6- un sapin adjugé à Jean Louis Masson 8 livres 5 sols 7- un sapin adjugé à Jean Etienne Grappe 24 livres 8- une fuve adjugée à Louis François Sebile 8 livres 9- une étouble adjugée à Denis Jacquin 4 livres 5 sols …etc…

La vente comprendra 100 lots pour une somme totale de 1 440 livres 6 sols qui a été encaissée par Victor Loiseau, notaire à Frasne.

Mais compte tenu de l’heure tardive, le conseil municipal a décidé de poursuivre la vente un autre jour, ce qui fut fait le 23 nivôse an douze. Pour cette deuxième journée, il sera vendu 59 arbres pour la somme de 880 livres.

Le restant des bois martelés fut vendu lors d’une troisième journée, soit 36 arbres pour la somme de 332 livres 4 sols.

Les 195 arbres vendus se répartissent comme suit : 114 sapins, 74 fuves (épicéas) et 7 étoubles pour une somme totale de 2 652 livres 10 sols.

Les délibérations sont nombreuses qui traitent de la distribution de bois merrains :

« Rôle des bois merrains distribués aux particuliers de la commune de Frasne pour reconstruction, réparation et entretien des maisons de la commune pendant le cours des années 1806 et 1807, lesquels doivent payés par les dits particuliers d’après le taux

14 fixé dans la délibération du conseil municipal du onze brumaire an 13, ladite distribution faite dans les bois de Billin et Forbonnet. »

Suivent 47 noms de familles de Frasne qui ont participé à cette distribution de bois pour une somme totale de 571 livres un sol. Il est bon de se référer à la délibération citée pour retrouver les tarifs pratiqués pour les différents bois de construction.

« L’an treize de la République le onze brumaire le conseil municipal de la commune de Frasne ayant pris lecture de la délibération du dix sept pluviose an dix relative à la taxe des bois de construction soit pour établissement, réparation et reconstruction des édifices de la commune de Frasne, ayant jugé dans sa sagesse que les bois taxés à un prix trop modique, ce qui donnait bien trop souvent d’abuser des dits bois, autre raison non moins relevante c’est que par des prix si modiques on ne pouvait atteindre le montant des contributions et des vacations des agents forestiers pour le martelage des bois. Le conseil municipal vu tous ces motifs s’est déterminé à porter les prix des bois dénommés pièce à pièce dont la teneur s’en suit : 1. Poutre de cheminée : dix livres 2. Gitte de grange : deux livres 3. Colonne : une livre 4. Chevron : quinze sols 5. Poutre d’écurie : seize sols 6. Poutre de chambre : vingt sols 7. Pour un cheneau de couvert : une livre 8. Pièce d’assemblage : quinze sols 9. Une paine : une livre 10. Soulette de grange et d’écurie : douze sols 11. Une apponse : six sols 12. Soulette de chambre : six sols »

Il est précisé dans plusieurs délibérations que les bois merrains étaient souvent prélevés dans les coupes d’affouage.

(à suivre)

15 –––

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