ABSTRACT DÉSENCHANTEMENT ET DEUXIÈME CHANCE LA FRANCE CONTEMPORAINE DANS SOUMISSION DE MICHEL HOUELLEBECQ by Pierre Borlée
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ABSTRACT DÉSENCHANTEMENT ET DEUXIÈME CHANCE LA FRANCE CONTEMPORAINE DANS SOUMISSION DE MICHEL HOUELLEBECQ by Pierre Borlée Ce travail se propose de démontrer, par l’analyse détaillée du roman Soumission de Michel Houellebecq, que l’effritement de la notion de transcendance, incarnée à la fois dans la nation française et dans la religion chrétienne, mène à une perturbation des deux éléments vitaux de ce qui constitue une assise identitaire nationale : un passé et un futur envisagé collectivement, et mènent dès lors à une fuite hors du temps. L’auteur français dresse ce constat à l’instant présent, par son univers romanesque désormais coutumier de pessimisme ambiant, d’individu isolé et de désenchantement du monde néolibéral. Il ne laisse cependant pas le héros de son roman en l’état, mais lui fait vivre une découverte d’une nouvelle possibilité d’élévation spirituelle par l’Islam. Ce réenchantement sera également l’occasion pour le protagoniste de retrouver une place dans la ligne du temps. DÉSENCHANTEMENT ET DEUXIÈME CHANCE LA FRANCE CONTEMPORAINE DANS SOUMISSION DE MICHEL HOUELLEBECQ A Thesis Submitted to the Faculty of Miami University in partial fulfillment of the requirements for the degree of Master of Arts by Pierre Borlée Miami University Oxford, Ohio 2020 Advisor: Audrey Wasser Reader: Mark McKinney Reader: Jonathan Strauss ©2020 Pierre Borlée This Thesis titled DÉSENCHANTEMENT ET DEUXIÈME CHANCE LA FRANCE CONTEMPORAINE DANS SOUMISSION DE MICHEL HOUELLEBECQ by Pierre Borlée has been approved for publication by The College of Arts and Sciences and Department of French and Italian ____________________________________________________ Audrey Wasser ______________________________________________________ Mark McKinney _______________________________________________________ Jonathan Strauss Table of Contents Introduction ......................................................................................................................... 1 1. Un désenchantement déjà acté .................................................................................... 4 1.1. Fin de la transcendance de la nation ................................................................................. 4 1.1.1. Nation universaliste : le monde d’avant ....................................................................................... 4 1.1.2. le Volksgeist ................................................................................................................................. 6 1.2. Multiculturalisme & communautarisme .................................................................... 7 1.3. Mort du christianisme ................................................................................................ 13 1.4. Désenchantement moral et structurel ....................................................................... 17 2. Conséquences : vide et réenchantement ....................................................................... 23 2.1. Un Vide ............................................................................................................................... 23 2.2. Nihilisme ............................................................................................................................. 24 2.3. Besoin de transcendance procuré par l’islam. ................................................................ 26 3. Question de la temporalité ............................................................................................. 32 3.1. Premier coup : la nation française n’est plus éternelle .................................................. 32 3.2. Deuxième coup : multiplicité des temporalités ............................................................... 35 3.3. Basculement vers un nouveau « monopole temporel » : ................................................ 36 3.4. Michel Houellebecq en position atemporelle ? ............................................................... 38 Conclusion ......................................................................................................................... 41 Bibliographie ..................................................................................................................... 44 iv Acknowledgements Par ces quelques mots, je tiens à rendre hommage à l’intégralité des membres du département de français de la Miami University pour la qualité de leurs enseignements, leur soutien et leurs conseils avisés durant ces deux dernières années. Je remercie particulièrement Dr. Audrey Wasser pour avoir encadré ce mémoire, et dont la brillance académique n’a d’égal que ses qualités humaines. v Introduction « Rien n’est sacré en soi, mais on ne connaît pas de société, fût-elle officiellement athée, qui n’ait en son sein un point de sacralité » (Debray 92). Par ces mots, Régis Debray fonde un élément capital de toute communauté organisée : une recherche de transcendance communément partagée. Tant qu’il y aura des groupes humains, il y aura du sacré. Le terme prête aujourd’hui à sourire ; il est devenu poussiéreux. Qui s’en réclame encore ? Houellebecq ranime quant à lui dans son roman Soumission la recherche de ce sacré au sein de la société française. En un mot, il dépeint l’histoire d’un désenchantement déjà acté de la société française, suivi d’un réenchantement par l’islam. De fait, en 2015, tollé dans le monde de la littérature : l’enfant terrible des lettres françaises a encore fait des siennes. En effet, le roman Soumission de Michel Houellebecq imagine dans une projection politique une victoire d’un candidat musulman à l’élection présidentielle française de 2022. Dès le début de l’ouvrage, on a déjà l’impression de se situer dans un « bateau qui coule » comme le dirait si bien le philosophe Michel Onfray (Bourton), dans une ambiance d’une France décadente en fin-de-siècle. Dans les premières pages de son roman, l’auteur livre par l’intermédiaire de François, son protagoniste occupant un poste de professeur à l’université, une réflexion sur la nature de la littérature : « Seule la littérature peut vous donner cette sensation de contact de contact avec un autre esprit […], ses faiblesses et ses grandeurs, ses limitations, ses petitesses, ses idées fixes, ses croyances ; […] Seule la littérature peut vous permettre d'entrer en contact avec l'esprit d'un mort ». Avec cet incipit, l’auteur annonce déjà la couleur de son propre projet d’écriture : dépeindre un corps déjà mort, appartenant déjà au passé : dans ce cas, la France ou même un monde occidental révolu. La France a connu son heure de gloire, mais cette dernière se situe désormais derrière elle. Ainsi le narrateur, caractérisé comme la plupart des personnages houellebecquiens d’une bonne dose d’apathie nihiliste, peut déjà observer autour de lui les ruines d’une civilisation à bout de souffle, impression qui se renforce au fur et à mesure que le parti musulman s’approche des portes du pouvoir. Durant le temps de la diégèse, on notera des changement subtils dans le paysage et la société française, déjà entre les deux tours puis bien évidemment après la victoire du candidat musulman : transformation de l’habillement féminin pour rendre les corps moins suggestifs, disparition de cette tension de séduction propre à une culture occidentale et particulièrement française ; islamisation de la 1 société, instauration de normes patriarcales rétrogrades, recul net de la place des femmes dans la société ou sur le marché du travail – et en particulier à l’université de la Sorbonne où exerce le personnage principal en tant que spécialiste de Huysmans –, au profit d’une position revalorisée de femme/mère au foyer ; polygamie ; enseignement religieux dont seuls les établissements musulmans sont subventionnés ; etc. Petit à petit, ces changements s’avèrent moins subtils : pour rester en poste, les universitaires de la Sorbonne doivent se convertir à l’islam. En apparence exagérés et parfois même comiques, ces modifications de la sphère publique ne sont pas uniquement un fantasme isolé d’un écrivain douteux, mais un constat maintes fois exprimé par divers observateurs, écrivains, journalistes, sociologues… On lira par exemple dans la préface de Destin Français, cette histoire de France narrée par l’écrivain et intellectuel Éric Zemmour, préambule dans lequel l’auteur livre son impression personnelle d’un changement de paysage contemporain perceptible à l’échelle d’une génération : « Je ne reconnais pas, moi non plus, les quartiers où j’ai passé mon enfance et ma jeunesse. Pourtant, les immeubles sont restés les mêmes. […] Ce sont les acteurs qui ont changé. En une génération, et à quelques encablures du centre de Paris, […] on passe dans un autre continent, une autre civilisation » (27). Ce travail progressera selon trois grands volets. Tout d’abord, nous dépeindrons un contexte symbolique décadent qui permet de mieux comprendre le désenchantement que vit et décrit le héros de Soumission, à travers la désagrégation de la nation française et du Christianisme principalement, mais aussi tout un réseau moral et structurel en déliquescence. Cette désintégration porte le sceau de la désacralisation, certes, mais elle avance également sous un étendard nouveau : le multiculturalisme. Ensuite, nous aborderons le vide conséquent que cette société désacralisée crée chez le personnage houellebecquien, et la manière dont ce dernier parvient à s’échapper d’un nihilisme total par un acte de soumission envers un nouveau vecteur de transcendance : l’islam. Enfin, nous revisiterons ce même parcours sous une perspective