Aude

Lorsqu’ on observe l’ édifice en amont, depuis le cimetière, on distingue très clai- rement que la partie est représente un ajout Canton , arrondissement , 99 habitants qui a prolongé la construction antérieure, peut-être au détriment d’ une abside hémicirculaire. À ce nouveau chevet est accolé un petit édifice qui constitue la après Antoine Sabarthès, sacristie, protégé comme l’ église de murs Vignevieille (Vinhavielha en de soutènement élevés. C’ est là, semble- occitan languedocien) n’ ap- t-il, le développement final de cette église D’paraît dans les sources, d’ ailleurs de façon cinq ou six siècles après avoir été érigée. ténue, que dans le courant du xiiie siècle, Il semble bien, en effet et toujours sur la 2 en 1214, en 1240, par de simples mentions. seule foi d’ une observation rapide , que sa Quant à l’ église, il faut attendre 1351, pour partie ouest, au moins les deux premières en voir citer le curé, d’ ailleurs dans un travées, sont médiévales et peuvent e document romain1. L’ église, qui appar- remonter au xii siècle : sur le mur sud tenait à l’ archevêque, est dédiée à sainte apparaît effectivement une baie murée Eulalie : voilà cependant une titulature étroite et haute, couverte d’ un linteau qui nous renvoie à un passé beaucoup échancré, qui pourrait même être plus plus ancien, les martyres de Mérida en ancienne, mais une étude d’ archéologie 303, Eulalie et Julie, patronnes du voisin plus soigneuse serait nécessaire. C’ est diocèse d’ Elne, étant plutôt des références dans cette partie de l’ église que s’ ouvre du christianisme du haut Moyen Âge. Il le portail qu’ on a cité au début, et que se n’ est pas surprenant que dans l’ ancien trouvent aussi les fonts baptismaux, cuve diocèse de Narbonne, fondé au iiie siècle – en marbre renfermée dans la maçon- et dont la cathédrale est d’ ailleurs dédiée nerie et s’ ouvrant dans un placard. Un aux saints Just et Pasteur, autres martyrs clocher-mur est juché sur le mur ouest, d’ Espagne –, de telles dévotions président percé de deux baies accueillant des cloches : aux premières fondations de paroisses, au-dessus se trouve une troisième petite antérieurement, même, aux regroupe- baie, qui semble incomplète, vide. ments villageois tels que nous les connais- sons actuellement. En l’ absence d’ autres 1. Vue nord-ouest Les travaux récents (2018) ont permis à la sources, seul l’ examen de l’ édifice nous commune, avec l’ aide de la Sauvegarde de permettra d’ en savoir un peu plus. Il ne À quelques mètres de l’ entrée du cime- divisées par des arcs doubleaux en plein l’ Art français, de reprendre en entier la fait pas de doute qu’ il comporte au moins tière, une source captée alimente une cintre, enduits et peints, et l’ on ne peut couverture en tuile canal. une partie antérieure au xiiie siècle. fontaine. Malheureusement, le flanc nord, distinguer si les voûtes en berceau, elles par où l’ on accède à l’ édifice, est presque aussi enduites et peintes, sont en maçon- Olivier Poisson Le village de Vignevieille se situe au entièrement dissimulé par une construc- nerie pleine ou sont des ouvrages minces 2. Porte nord bord de l’ , affluent de l’ Aude tion moderne en brique qui lui est accolée, en brique, modernes. La première travée, au parcours contrasté, qui traverse les un ancien atelier qui dépare vraiment qui accueille la tribune, possède, elle, un Corbières avant de rejoindre le fleuve l’ aspect des lieux. Sous un auvent s’ ouvre la plafond plat, ce qui orienterait plutôt vers en amont de Narbonne. Il occupe une porte en plein cintre de l’ église, aux larges la seconde hypothèse. petite croupe au-dessus de la rivière, et claveaux de pierre de taille, munie d’ une l’ on remarque que l’ église est un peu à menuiserie et d’ une serrurerie anciennes, Le sanctuaire est décoré de pilastres en l’ écart au sud du village, même dans son peut-être du xviie siècle. Placée devant la gypserie supportant une corniche dont étendue actuelle qui résulte de son exten- tête du contrefort qui soutient l’ auvent, l’ arrondi rachète les angles droits de la sion maximum du xixe siècle. L’ édifice est à droite, on remarque une croix ancienne, construction. Ce n’ est là cependant qu’ un orienté est-ouest, perpendiculairement à moulurée et sculptée, juchée sur un vestige d’ une décoration qui doit dater la pente de la sorte de combe qui l’ abrite, haut socle. de la fin du xviiie siècle. Le maître-autel ce qui fait qu’ il est assez encaissé sur son est en marbre blanc, production courante flanc, protégé par un caniveau profond et À l’ intérieur, l’ édifice, net et bien entre- de la fin du xixe siècle. Peu de mobilier et un mur de soutènement. Au sud, juste- tenu, est une simple nef unique divisée d’ œuvres d’ art dignes d’ intérêt à l’ inté- ment, s’ étend le cimetière qui surplombe en quatre travées, qui possède une abside rieur, mais, dans la sacristie, le coffre des Notes presque l’ église, aujourd’ hui sans usage à chevet plat. Au sud, une petite chapelle marguilliers est toujours là, avec les fentes mais où se rencontrent des sépultures, étroite, dédiée à la Vierge, a été ajoutée au où glisser les offrandes et revenus, dont 1. A. Sabarthès, Dictionnaire topographique du département de l’ Aude, Paris, 1912, p. 457. petits monuments du xixe et du début xixe siècle en hors œuvre, d’ ailleurs fondée on faisait l’ inventaire, au jour dit, une e 2. Malgré nos recherches, nous n’ avons du xx siècle, que la municipalité a prévu à cheval sur le caniveau qui isole l’ édifice fois par an. trouvé aucune mention de cet édifice de préserver, en laissant le site en l’ état. des terres du cimetière. Les travées sont 3. Vue intérieure vers le chœur dans la bibliographie disponible.

40 Cahier 27 La Sauvegarde de l’Art Français 41