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Ciné-Bulles

Mannish boys Mud de , États-Unis, 2012, 130 min Loïc Darses

Cinéma et femmes Volume 31, Number 3, Summer 2013

URI: https://id.erudit.org/iderudit/69642ac

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Publisher(s) Association des cinémas parallèles du Québec

ISSN 0820-8921 (print) 1923-3221 (digital)

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Cite this review Darses, L. (2013). Review of [Mannish boys / Mud de Jeff Nichols, États-Unis, 2012, 130 min]. Ciné-Bulles, 31(3), 61–61.

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Mud Ainsi, sous ses multiples couches de bourbe, de Jeff Nichols Mud est avant tout un film sur l’amour. Cet amour qui change et devient soudainement impossible, cet amour qui, tels les méandres Mannish boys L’auteur y fait le récit des jeunes Ellis et quelquefois tortueux du Mississippi, fluctue LOÏC DARSES Neckbone, mais surtout de leur rencontre et blesse, mais en vaut néanmoins la peine, avec un homme mystérieux au charisme puisque fécond. Muddy Waters, légende envoûtant, exilé malgré lui sur une île du mississippienne du blues, évoquait sa Au cœur des États-Unis coule le fleuve Mississippi. Avec ses airs de mythomane, propre éducation sentimentale dans la Mississippi; sillonnant tant les berges du Mud, personnage titre du film, raconte aux chanson Mannish Boy. Si la facture de cet Min nesota que celles de la Louisiane, il se enfants une histoire aux allures de chimère : hymne proverbial est certes plus grivoise déverse, telle une effusion sanguine, dans le il vivrait en ermite pour échapper aux re- que l’œuvre de Nichols, c’est entre amour, golfe du Mexique. Ses flots irriguent les présailles d’une bande de chasseurs de mensonge, famille et désillusion que le ci- terres et abreuvent les hommes : ruisselant primes texans en espérant pouvoir un jour néaste signe ici la petite odyssée touchante, de la littérature au cinéma en s’épanchant vivre d’amour avec la flamme de sa vie, malgré ses quelques excès de genre, de deux par le blues, le fleuve inspire son rythme et Juniper. D’abord méfiants, les deux jeunots blancs-becs entre l’arbre et l’écorce, mi- sa verve au peuple américain. Jadis, c’est ce accepteront cependant de lui venir en aide. hommes mi-garçons, rappelant du coup que cours d’eau mythique qui fit s’écouler l’encre le cinéma, comme les syncopes du blues, de l’écrivain Mark Twain dans les pages de Ode sincère au sud des États-Unis, ce conte doit toujours prendre forme sur une bonne Adventures of Huckleberry Finn, œuvre fon- filmique, en bon récit d’apprentissage qu’il histoire pour espérer toucher au cœur. datrice de la littérature états-unienne. est, témoigne avant tout du passage de l’en- Aujourd’hui, c’est sur pellicule que le ci- fance à l’âge adulte. Mais le parallèle avec néaste Jeff Nichols fige, avec Mud, les cou- l’illustre Mark Twain ne s’arrête pas là, rants impétueux de cette muse fluviale. puisque Jeff Nichols offre ici sa propre lec- ture cinématographique de la « Great Am e- Après avoir narré les violences fratricides ri can Novel ». Ainsi, le cinéaste s’efforce, à qu’attise la mort du patriarche dans le wes- la manière d’un Terrence Malick au seuil tern moderne qu’est Shotgun Stories de sa carrière (Badlands, 1973; Days of (2007), puis troqué les plaines de l’Arkansas Heaven, 1978), d’esquisser les portraits contre celles de l’Ohio dans d’une Amé rique aux maints visages. (2011) — un drame psychologique aux re- États-Unis / 2012 / 130 min lents surnaturels où le père d’une famille ru- Incarnés par les vedettes hollywoodiennes RÉAL. ET SCÉN. Je Nichols IMAGE Adam Stone SON rale vacille au gré de ses visions apoca- Matthew McConaughey et Reese Wither- Ethan Andrus MUS. David Wingo MONT. Julie lyptiques récurrentes —, Nichols plonge à spoon, les personnages de Mud et de Juniper Monroe PROD. Sarah Green, Aaron Ryder et Lisa Maria Falcone INT. Matthey McConaughey, Tye nouveau dans le folklore d’une Amérique imprègnent le récit de leur présence emblé- Sheridan, Jacob Loand, Reese Witherspoon, Sarah profonde en campant son dernier opus sur matique et apparaissent ainsi au spectateur Paulson, Ray McKinnon, Sam Shepard, DIST. Les Films Séville les rives du Mississippi. tels que perçus et ressentis par le duo de

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